djinneo a écrit 10 commentaires

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 2.

    Sur la planète Terre, les femmes constituent la seule majorité à être traitée comme une minorité. L'endroit sur la Terre où elles sont le mieux traitées est probablement le "monde occidental". Et dans le "monde occidental", l'un des endroits les plus favorables pour exister en tant que femme à égalité avec les hommes est probablement -ou entre autre- la France, le pays des Droits de l'Homme et du Citoyen. En France, le secteur professionnel indiscutablement le plus favorable à l'égalité homme-femme reste la Fonction Publique où des mesures en faveur de la parité existent.

    Quand bien même nous nous plaçons dans l'un des pays comptant parmi les plus progressistes, et quand bien même nous nous plaçons dans l'environnement de travail le plus favorable possible qu'est la Fonction Publique (seulement 20% des emplois en France), 'alenvers', fonctionnaire de son Etat, hostile au stage Girls Can Code, nous apprend que moins de 10% des informaticiens de la Fonction Publique sont des informaticiennes (je n'ai pas vérifié, mais je veux bien le croire). Au pays des Droits de l'Homme, de la démocratie, et du ballotage à 50%-50%, dans le sanctuaire de "Liberté-Egalité-Fraternité", 10% des informaticiens de la Fonction Publique sont des femmes. Et 90% sont des hommes. Je te laisse imaginer l'état de la parité dans le secteur privé.

    10% contre 90%. Avec une telle disparité tu oses parler de privilèges ? Tu oses réclamer des efforts dans l'autre sens ? Sérieusement: de quel ordre ?
    De grâce, ne nous joue pas le couplet larmoyant du mec aigri face à la fille subventionnée. Epargne-nous le couplet pathétique sur la féministe qui se réclamerait supérieure aux hommes. La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes s'exempte de toute considération de supériorité ou de privilège. Supprimer toute supériorité d'un sexe par rapport à un autre est précisément l'objectif de ce genre de texte.

    Personnellement, au lycée, dans ma classe de Latin, j'étais le seul garçon. Et personnellement, dès le lycée, j'ai bénéficié d'une bourse: pas tant pour mon mérite estudiantin que pour les revenus de mon père. Soit dit en passant, cette rentrée d'argent ne m'était pas directement attribuée sur mon compte personnel, mais reversée au bon vouloir de mon père, une fois déduit le loyer de ma chambre sur le palier de l'appartement dont la seule frontière avec l'escalier de l'immeuble résidait en un rideau opaque. Et également une fois déduit ma participation à la logistique quotidienne. Sans vouloir la jouer Cosette, j'aimerais néanmoins te signifier que j'ai pris des douches froides durant toute ma fac (même en février et mars) et que j'ai fait mes lessives au savon de Marseille (draps et jeans compris).

    M'est avis que tu confonds joyeusement confort et privilège. Quelque fut ton niveau de vie, j'imagine aisément que tu te serais aisément accommodé d'une rentrée d'argent supplémentaire. Ca ne marche pas comme ça. 10% contre 90%, dans les meilleures conditions possibles selon 'alenvers'. Est-ce que tu arrives à t'imaginer cela ? Malgré mon parcours façon Cosette, je reste statistiquement dans les 90% d''alenvers'. Même avec mes chiottes sur le palier, même avec mon rideau qui me sépare de l'escalier, même sans eau chaude, même sans machine à laver. Statistiquement, et uniquement parce-que je suis un garçon, je suis le candidat privilégié sur toute ma classe de Latin pour un emploi dans l'Informatique.

    Et je peux te dire que mes cours de Latin jusqu'au bac, c'était du billard aussi doux qu'un coussin tricoté par les bisounours. Comme le reste de tous mes cours. J'en dirais pas autant pour Lara, collégienne rousse au physique de lycéenne partie dans ce qu'on appelait à l'époque les "voies de garage". J'en dirais pas autant non plus pour une autre amie bien plus jeune, devenue obèse en achevant son école de jeu vidéo. M'est avis que tu ne sais pas de quoi tu parles quand tu réclames ta part du gâteau. M'est avis qu'en lorgnant sur la pelouse plus verte de ta voisine, tout en criant au scandale, tu ne mesures pas un seul instant ta chance.

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 3.

    J'ai pris l'exemple du prix Goncourt avant tout pour montrer que les garçons intéressés par la littérature ont de nombreux exemples d'écrivains hommes connus et reconnus pour leur travail d'écrivains. Et ce dans les manuels scolaires et dans les médias. Le faible taux de garçons en littéraire est effectivement symptomatique des stéréotypes en vigueur en matière d'éducation, néanmoins les obstacles à franchir pour qu'un garçon fasse des études de Littérature sont moindres que pour une fille qui souhaite faire des études d'Informatique. Ne serait-ce que grâce aux Goncourt et aux exemples qu'il promeut, il ne fait aucun doute dans l'inconscient collectif que des hommes peuvent faire d'excellents littéraires.

    A contrario, il n'y a pas pléthores d'exemples de femmes scientifiques célèbres, connues et reconnues, et encore moins dans l'Informatique. C'est précisément ce manque d'exemples qui nourrit les stéréotypes sexistes: "si les femmes étaient douées en sciences, on ne se souviendrait pas seulement de Marie Curie", "il n'y a pas de femmes scientifiques célèbres parce-que cela ne les intéresse pas".

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à -1.

    Je parle des emplois, donc de la fonction publique, tandis que JP.Delsol compte les chômeurs (donc sans emploi par définition) et de tous les emplois financés par l'Etat (donc les agriculteurs avec la PAC, mais aussi les journalistes du Figaro et de Valeurs Actuelles - un comble pour les chantres du libéralisme). Tant qu'il y était, il aurait pu tout aussi bien compter tous les contribuables bénéficiant de crédits d'impôts, et de ceux relevant de l'ISF bénéficiant de niches fiscales. Merci pour ce moment de franche rigolade, mais un peu de sérieux ne serait pas de refus. Donc 20% des emplois seulement.

    Comme tu le dis "encore faut-il qu'il y ait des candidates". C'est précisément tout le sens des recherches de Carol Dweck, des stages comme celui dont il est ici question, de la parité, et des associations comme PyLadies (qui entre parenthèses, motive son existence par la nécessité d'avoir un lieu pour faire avant tout du développement Python, mais sans devoir subir harcèlements et intimidations). Avant de déployer tant d'effort pour imaginer d'éventuels effets de bord, une bonne idée serait probablement de se demander quelles sont les raisons qui poussent les filles à se regrouper.

    Lors d'un cours, il y a déjà quelques années, pour illustrer les permissions de fichiers, notre prof a trouvé judicieux et rigolo de prendre à partie la seule fille de la promo et de lui parler de ses photos en bikini, avec clins d'oeil, et dessins sur le tableau. J'ai pas le souvenir qu'en fac de sciences, un prof ait illustré la thermodynamique en évoquant le slip d'une étudiante. Tout à fait intuitivement, je mets ce débordement sur le compte de la "dudecore culture" qui me semble être assez spécifique au milieu informatique. Et tout aussi subjectivement, il me semble que l'esprit libertaire, anticonformiste et hacker s'est fait infiltré et dépassé par cette "dudecore culture" au fur et à mesure qu'internet s'est démocratisé, en particulier depuis une dizaine d'années. Notamment, par le biais du jeu vidéo dont on s'acharne à le présenter comme l'un des étendards de la contre-culture et de l'anticonformisme alors qu'il constitue au contraire le bien culturel le plus partagé, le plus mainstream.

    En définitive, les filles qui voudraient coder se retrouvent à devoir faire face à deux obstacles majeurs spécifiques au milieu informatique: les processus de sélection à la formation et à l'embauche qui leur sont particulièrement défavorables, et un sexisme hostile banalisé.

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 2.

    Il est toujours bénéfique de tirer des enseignements de ses propres expériences. Ca n'en constitue pas pour autant une étude statistique. Statistiquement, même si bien sûr notre réseau social n'est pas verrouillé, nos relations restent le plus souvent dans la même catégorie socio-professionnelle. Statistiquement également, les personnes de la fonction publique sont plutôt à gauche, et plutôt concernées par l'égalité homme-femme. En ce sens, ton environnement compte parmi les plus favorables à l'égalité homme-femme. Ton expérience et ta situation sont enviables, mais elles ne sont pas représentatives.

    Des études montrent qu'à résultat égal pour les filles et les garçons, les conseils d'orientations au lycée, et les encouragements à suivre des études scientifiques ou à tenter de grandes écoles ne sont pas les mêmes. Il ne s'agit pas de détourner consciemment les filles des grandes écoles et des filières scientifiques, mais c'est ainsi que les préjugés oeuvrent: involontairement et pernicieusement. Concernant la politique, des journalistes politiques femmes, et des femmes politiques dénoncent régulièrement le sexisme des hommes politiques. Enfin, heureusement que les choses s'améliorent pour les femmes dans le milieu du travail: nous ne pouvons que nous en féliciter même si ce n'est pas encore satisfaisant. Particulièrement en informatique où le nombre de diplômées et les taux d'embauche des femmes sont spécifiquement bas, et où la discrimination sexiste le harcèlement sont spécifiquement agressifs.

  • [^] # Re: Discrimination

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 2.

    D'autres font la différence entre équité et égalité.

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 3.

    Tu penses que sans les quotas, les travailleurs handicapés seraient "égaux" sur le marché du travail face aux valides ?

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à -2.

    Un taux inférieur à 4%, ce n'est pas ce que j'appelle faire partie du groupe majoritaire favorisé. La parité en promotion est une bonne chose, ce serait mieux qu'elle soit également appliquée à l'embauche. Par ailleurs, la fonction publique ne représente que 20% des emplois en France. Je te laisse imaginer à quoi ressemble la parité dans le privé.

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 3.

    C'est bien parce-que cette croyance du don inné est si profondément ancrée dans l'inconscient collectif qu'il fait tant de ravages. Trop souvent, les bons élèves sont félicités pour leurs capacités, leurs aptitudes, leur potentiel, leurs dons. Mais c'est contre productif comme l'a montré Carol Dweck dans ses recherches. Car les élèves qui auront été le plus félicités pour leurs capacités, sont également ceux qui se découragent le plus vite quand surviennent les difficultés: "finalement, je ne suis pas aussi doué que je le pensais". Ce mécanisme est aussi valable pour les filles que pour les garçons. Par contre, il est extrêmement amplifié pour les filles à cause -entre autre- des préjugés sexistes selon lesquels les filles seraient moins douées que les garçons pour les maths. Ce que préconise Carol Dweck est de féliciter un élève pour son travail, ses efforts, ses progressions, ses réalisations, sa persévérance et non pour ses aptitudes et ses facilités.

    Nous sommes globalement d'accord sur ce point. Nous divergeons cependant concernant la malheureuse existence du préjugé selon lequel "une fille serait naturellement moins douée qu'un garçon en maths". Par exemple, d'autres études statistiques ont montré qu'à résultat égal, les filles ne se voyaient pas proposer les mêmes conseils d'orientation que les garçons dans les filières scientifiques. Autre point de divergence, lorsque tu dis que "les filles et les garçons n'ont pas les mêmes intérêts". Pour moi, cela constitue très précisément un stéréotype. Je ne développerai pas plus ces deux points qui nous écarteraient du stage de codage pour les filles.

    Pour finir, sur le fond, il existe en France des quotas pour l'embauche de personnes handicapées. Il me semble que tout le monde s'en félicite, et que personne ne se plaint de se voir fermer des portes au prétexte qu'il serait valide. Tout le monde regrette qu'une telle mesure soit nécessaire, et tout le monde préférerait que handicapés et valides soit égaux sur le marché du travail. Mais dans la pratique, ce n'est pas le cas, et des mesures (quotas) sont nécessaires pour assurer un minimum d'emplois aux travailleurs handicapés. C'est toute la différence entre égalité et équité.
    Aux US et depuis la fin des années 60, le nombres de femmes diplômées n'a cessé de croître dans tous les disciplines (psychologie, physique, chimie, agriculture, ingénierie, sciences sociales, etc.). Vraiment toutes ? Toutes à l'exception de l'Informatique où le taux de filles dans cette filière n'a cessé de diminuer depuis les années 1980; et en Mathématique où les chiffres ont stagné. Par ailleurs, si une femme devient médecin, astrophysicienne, ou chimiste, cela ne pose de problème à personne. Par contre, en Informatique, et même dans les logiciels libres, des témoignages de harcèlements et de menaces de mort se font entendre. Ce qui est à la fois intolérable, incompréhensible et absent dans la plupart des autres disciplines.
    Dans ces conditions, des efforts pour rééquilibrer les choses spécifiquement dans ce domaine sont parfaitement justifiés: associations et stages pour programmeuses sont bienvenus. Encore une fois, c'est la différence entre égalité et équité.

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 7.

    L'analogie n'est pas pertinente: la plupart des émissions littéraires et culturelles sont animées par des hommes (apostrophe, un livre un jour, d'art dare). Les prix goncourt sont majoritairement des hommes (10 femmes lauréates en plus de cent ans de Goncourt). Les auteurs étudiés du lycée sont des hommes. Les garçons qui voudraient se lancer en littérature ne manquent ni de modèles, ni d'encouragements.

    La différence c'est que les activités genrées féminines dans l'inconscient des stéréotypes, restent à la portée des garçons: comme la cuisine, le travail social, ou le ménage. "C'est juste qu'ils ont mieux à faire". A l'inverse, les activités genrées masculines ne sont pas à la portée des filles: le bricolage, les sciences, la politique, diriger: "c'est trop compliquées ou trop dur pour elles", ou "elles ne sont pas naturellement douées pour ça".

    Si Marcel ne fait pas le ménage, ni la vaisselle, ni la lessive, ce n'est certainement pas parce-qu'il pense qu'il n'est pas assez doué pour ça. C'est par contre ce qui est à l'oeuvre pour nombre de filles avec les carrières "masculines".

  • [^] # Re: La mixité est un échec !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Stage collégiennes/lycéennes « Girls Can Code! » en août. Évalué à 8.

    Une chercheuse comme Carol Dweck (prof et chercheur en psychologie sociale à Stanford) a voué une partie de sa vie et de ses recherches à répondre à ces questions. Le but n'était pas de savoir si les filles sont plus vulnérables aux doutes, aux stéréotypes, à l'auto-censure et aux préjugés. Elles le sont et c'est un fait. Le but est de savoir pourquoi et comment y remédier.
    Par exemple, à une classe de primaire, elle donne des exercices difficiles que les élèves n'ont pas du tout l'habitude de faire. Les garçons réussissent mieux que les filles, alors que l'intelligence n'est pas en jeu puisqu'elles ont un QI équivalent aux garçons… Alors pourquoi ? Ses recherches ont porté sur des élèves de primaire jusqu'à l'université. Ses conclusions sont qu'il y a une croyance / un savoir déterminant: les groupes d'élèves qui croient qu'il faut être "naturellement" doué pour faire des maths et des sciences, présentent des disparités importantes entre les filles et les garçons; alors que les groupes qui savent que ce sont des compétences qui évoluent grâce au travail, qui ont été sensibilisés à la plasticité du cerveau, à qui les célébrités des sciences et de l'informatique ont été présenté plus comme des "travailleurs acharnés" que comme des "génies", ces groupes là ne présentent plus de disparité dans la réussite des filles par rapport aux garçons.

    La mixité a permis de faire avancer les choses. Mais pour les changer en profondeur, il est avant tout nécessaire de se débarrasser du préjugé selon lequel "la bosse des maths" serait un don inné. Car cette croyance aggrave dramatiquement les préjugés sexistes ("l'informatique est un truc de garçon"), les doutes ("je ne suis pas douée"), l'auto-censure ("je ne suis pas faite pour ça"), le découragement ("je réussissais bien jusqu'au lycée, mais je rencontre des difficultés dans le supérieur, c'est que je ne dois pas être aussi douée que je le croyais").