Journal Des brevets cancérigènes

Posté par  (site web personnel) .
22
21
juil.
2012

Je me contente de recopier l’info claire et concise publiée dans le numéro de juillet de la revue de Médecins Sans Frontières. Petites précisions : le procès Novartis a été reporté au 22 août, et il se tiendra devant la Cour Suprême Indienne.

1. Les brevets et l’“evergreening”.

Une compagnie développe un nouveau médicament protégé par un brevet. Le brevet empêche les autres producteurs de produire ce médicament pendant 20 ans. La compagnie peut ainsi elle-même fixer des prix élevés sans craindre de concurrence pendant 20 ans. Quand le brevet s’arrête, d’autres producteurs entrent sur le marché et se font concurrence. C’est à ce moment-là que les prix baissent, et les médicaments deviennent abordables pour tous. Mais les compagnies pharmaceutiques veulent toujours plus de profits. Alors elles changent légèrement leur médicament et déposent un nouveau brevet pour 20 ans. C’est l’“evergreening”

2. La loi indienne.

En 2005, l’Inde introduit les brevets sur les médicaments dans le cadre de ses obligations en tant que membre de l’Organisation Mondiale du Commerce. Mais elle conserve dans sa loi des dispositions indiquant que les nouvelles formes ou nouvelles utilisations de substances déjà connues ne peuvent pas être brevetées, sauf si elles démontrent une réelle amélioration de l’efficacité thérapeutique. Voilà pourquoi Novartis tente de faire abroger cette loi qui l’empêche de faire de l’evergreening.

3. Les procès Novartis

En 2006, le laboratoire pharmaceutique s’était vu refuser une demande de brevet pour un médicament anticancéreux déjà disponible en version générique en Inde pour 200 $ par patient et par mois, contre 2 600 $ à la même période aux USA. Novartis a perdu son procès en appel en juin 2009. Mais deux mois plus tard, le laboratoire récidive. Il s’agit cette fois de préciser l’interprétation des termes “efficacité thérapeutique”. Cette nouvelle action en justice débutera en juillet 2012. Si Novartis parvient à affaiblir l’interprétation de la loi indienne, le pays sera forcé d’accorder beaucoup plus de brevets qu’il ne le fait actuellement. Cela pourrait mettre un terme définitif à la concurrence des génériques sur plusieurs médicaments essentiels, et avoir un effet immédiat et dévastateur pour les millions de personnes qui vivent grâce aux médicaments génériques indiens dans les pays en développement.

Plus de précisions :
http://www.msf.fr/actualite/publications/regime-brevets-en-inde-et-affaire-novartis-questionsreponses

Licence du texte recopié sans vergogne : elle n’est précisée nulle part, mais MSF l’a publié pour que l’information circule.

  • # /licence

    Posté par  . Évalué à 5.

    • [^] # Re: /licence

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 1.

      OK, merci. Sur la revue imprimée rien n'est mentionné, et l'article n'est pas signé. Je viens d'envoyer un mail à MSF, on verra bien.

    • [^] # Re: /licence

      Posté par  . Évalué à 3.

      Les communiqués de presse sont généralement «sous CC-BY». Quel intérêt de faire un communiqué si personne ne peut le reprendre ?

      • [^] # Re: /licence

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2.

        Je ne pense pas que MSF s’offusquera : l’esprit vivifie, la lettre tue. Une licence générique est destinée à prévenir les abus et détournements. En l’occurrence elle n’est pas mentionnée sur la revue imprimée, et s’il faut la chercher ailleurs, alors elle était dissimulée et ne peut être invoquée. Quant à la loi supplétive : droit de citation, même si celle-ci est un peu longue.
        À part cette longueur qui peut être discutée, la reprise est dans les clous.
        Et je pense que MSF ne s’offusquera pas pour cette autre raison que la préoccupation, ce n’est pas la licence, c’est le droit de se soigner.

        • [^] # Re: /licence

          Posté par  . Évalué à 3. Dernière modification le 21 juillet 2012 à 15:06.

          Oui, mais d'un autre coté, si on considère qu'on vit dans un état de droit il faut faire les choses carré, et les licences Creative Commons ayant prévu le coup (avec le share alike) c'est en effet un peu dommage de ne pas le voir (le droit) utilisé pour ce document.

          • [^] # Re: /licence

            Posté par  . Évalué à 3.

            Comment pourrait on encourager Médecin sans frontières à utiliser des licences style Creative Commons ?

            Pourquoi pas leur envoyer un message, en les encourageant à utiliser des licences plus souple comme par exemple Creative Commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike, pour permettre une plus grande diffusion de leur publications.

            Sur leur site web vous trouverez leur formulaire de contact public, ou leur formulaire de contact pour donateurs, si comme moi vous êtes donateur régulier.

            • [^] # Re: /licence

              Posté par  . Évalué à 4.

              Je pense qu'une licence CC-By-ND-SA est bien plus intéressante pour faire passer un message qu'une CC-By-SA-NC.

              « Rappelez-vous toujours que si la Gestapo avait les moyens de vous faire parler, les politiciens ont, eux, les moyens de vous faire taire. » Coluche

        • [^] # Re: /licence

          Posté par  . Évalué à 6.

          En l’occurrence elle n’est pas mentionnée sur la revue imprimée

          Le droit d'auteur stipule qu'il est interdit de copier ou diffuser sans autorisation préalable, or, s'il n'y a rien écrit, aucune autorisation n'est donnée et il n'est pas légal de le copier.

          « Rappelez-vous toujours que si la Gestapo avait les moyens de vous faire parler, les politiciens ont, eux, les moyens de vous faire taire. » Coluche

          • [^] # Re: /licence

            Posté par  (site web personnel) . Évalué à 1.

            Exact, c’est la loi supplétive à laquelle je faisais allusion.
            Un droit commun se substituant à la volonté de l’auteur quand il a omis de l’exprimer.
            La même loi se complète d’un droit de courte citation, et s’il y avait procès, le juge estimerait la longueur de la citation pour déterminer s’il y a eu infraction ou pas.
            Pour qu’il y ait procès il faut quand même qu’il y ait dépôt de plainte.
            Vu le contexte… Le droit d’auteur a beau être implicite quand il n’est pas mentionné, les auteurs et publicateurs ne manquent jamais de rappeler l’importance qu'ils lui accordent quand c’est le cas.
            MSF n’a rien précisé et à mon avis a d’autres chats à fouetter.
            Il n’y a pas eu plagiat, il y a eu citation pour relais de l’information, et de par les statuts ça doit les intéresser au premier chef.
            Le site, c’est différent, les éléments peuvent en être détournés pour une utilisation malveillante.
            Ceci dit, c’est quand même mieux de respecter la loi.
            Mieux aussi de ne pas préjuger de la volonté d’autrui.
            Et pour ce qui est d’avoir relayé l’information… Elle n’a pas l’air d’intéresser grand monde.
            Ou alors, c’est qu’elle est trop consensuelle pour prêter à débats.

            • [^] # Re: /licence

              Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

              Le droit d’auteur a beau être implicite quand il n’est pas mentionné, les auteurs et publicateurs ne manquent jamais de rappeler l’importance qu'ils lui accordent quand c’est le cas.

              Tu crois vraiment à ce que tu viens d'écrire ?

              • [^] # Re: /licence

                Posté par  (site web personnel) . Évalué à 0.

                Oui, j’ai l’habitude de rédiger/publier/faire circuler de la littérature, de la documentation, des tracts, de la communication interne, les logiques — collectives, pas mes logiques personnelles — sont totalement différentes. Pas plus que les autres je ne signe mes tracts, même très personnels, et je ne m’offusque pas qu’ils soient remaniés. A contrario, les publicateurs attachés à leurs droits ne font jamais confiance au public pour deviner la loi. Sauf cas particuliers de plus en plus nombreux — autoédition, internet — où eux-mêmes ne connaissent pas la loi.
                Que penser de cette argumentation : funambulesque ? Oui, un peu. Mais pour la bonne cause.
                Disons que j’en serais mieux convaincu si je n’étais en position délicate.

                • [^] # Re: /licence

                  Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

                  Bon, il s’avère que j'avais raison, puisque MSF a répondu à mon mail :
                  « Pas de problème, comme vous le dites cette information doit être relayée, alors merci ! »

  • # Money : 1 - Economy : 0

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10.

    les nouvelles formes ou nouvelles utilisations de substances déjà connues ne peuvent pas être brevetées, sauf si elles démontrent une réelle amélioration de l’efficacité thérapeutique.

    En gros : vous avez le droit d'empêcher l'humanité d'accéder librement à un nouveau médicament si et seulement s'il est prouvé que l'utilisation de votre médicament pourrait améliorer le sort de l'humanité.

    • [^] # Re: Money : 1 - Economy : 0

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 5.

      C’est même pire que ça. MSF l’explique très bien sur son site : les compagnies pharmaceutiques préfèrent vivre des rentes de situation générées par les brevets et reconductions de brevets, que rechercher de nouvelles substances ou améliorer l’existant. La loi indienne accorde au moins un droit d’accès à l’existant en soumettant la reconduction de brevets sur son sol à une condition préalable. Elle ne pouvait aller plus loin sans risquer des représailles.
      Pour Novartis, c’est encore trop. Sans cette épine qui le place en situation de concurrence, il pourrait vendre en petites quantités mais très cher, et sans trop dépenser en recherches.

  • # La loi du marché

    Posté par  . Évalué à 5.

    A la base, les brevets étaient instaurés pour protéger la recherche de médicaments. Car le développement d'un nouveau médicament coûte cher, vraiment cher. A tel point que si l'entreprise n'avait pas une assurance de revenu, elle n'enclenchait pas les recherches. Évidemment puisque l'esprit maintenant c'est de faire quelque chose à but uniquement lucratif, le brevet est utilisé à tord et à travers. L'explication du journal sur l'evergreening est très bonne car elle montre bien qu'il n'est plus question de rendre service à l'humanité, mais de se faire le plus de pognon possible.

    Pour ce genre de chose aussi importante que la recherche médicale, je pense qu'il faut que l'état reprenne les manettes, on voit bien les problèmes que l'on se tape si on le laisse a une horde de commerciaux.

    • [^] # Re: La loi du marché

      Posté par  . Évalué à 2.

      Les brevets n'ont pas été instaurés pour protéger exclusivement les médicaments. Ils existent pour encourager la diffusion des inventions et du savoir en protégeant, temporairement, l'auteur d'une invention en contrepartie de la divulgation de comment réaliser l'invention. Il faut constater que si la protection existe toujours, la contrepartie l'est moins par l'offuscation en utilisant un jargon pseudo-juridico-technique qui permet de moins en moins la réalisation de l'invention à la lecture du brevet par l'homme de l'art.

  • # Comprends pas comment ça marche l'evergreening.

    Posté par  . Évalué à 7.

    Une compagnie développe un médicament A1 et a un brevet dessus pour 20 ans lui assurant l'exclusivité, ensuite elle crée une variante A2 et pose un nouveau brevet.

    Mais qu'est-ce qu'on en a a faire de A2?
    Ils brevettent A2, mais il me semble qu'on ne peut breveter que des nouveautés, non?
    Donc à priori on ne peut pas breveter une partie de A2 qui était déjà dans A1, donc maintenant A1 peut être cloné et les "génériques A1" répondent aux besoins des malades.

    Certes la compagnie qui produit A2 va faire du marketing pour pousser A2 par rapport aux clones d'A1, mais bon ça c'est la pub "normale".

    Quelqu'un peut m'expliquer où est le problème?

    • [^] # Re: Comprends pas comment ça marche l'evergreening.

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2.

      Il semblerait, au vu de l’affaire, que le brevet englobe le médicament et son principe actif. J’utilise le conditionnel parce que je n’en sais rien, je déduis la cause des conséquences. Il suffirait alors d’un coup de pinceau sur le médicament pour le déguiser en nouveauté et reconduire le brevet sur le principe actif : c’est ce que veut obtenir Novartis, et que conteste le gouvernement indien. Je suppose que l’avocat de celui-ci va abonder dans ton sens pour étayer sa plaidoirie.

    • [^] # Re: Comprends pas comment ça marche l'evergreening.

      Posté par  . Évalué à 4.

      Ils s'en fichent de la logique. C'est l'argent qui les intéressent.
      Donc ils se débrouillent avec les arguments qu'ils trouvent.

      Comme d'habitude, il suffit que ça passe une fois pour gagner le gros lot.
      Donc tentative, puis tentative, puis tentative, etc.

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