Ça remet en cause par principe toute action de l'État. L'État ne devrait pas construire de prisons, puisqu'elles pourraient être utilisée pour y mettre des opposants politiques. Ni d'écoles, qui pourraient être utilisées pour l'endoctrinement. L'État ne devrait pas entretenir d'armée ni de police, qui ont par le passé contribué aux saloperies du régime de Vichy. En gros, l'argument est quasiment anarchiste, et dénie à l'État par principe le droit de mettre en place les moyens de faire respecter la loi.
C'est un argument qui utilise une possibilité hypothétique (la possibilité d'un changement de régime) pour ne pas mettre en place les solutions à un problème réel (le fait que des délits peuvent être commis en toute impunité sur Internet). À mon avis c'est proche d'un raisonnement fallacieux : on ne peut pas mettre JF Copé en prison, car il sera peut-être le prochain président qui sortira la France de la crise. Dans ce raisonnement, il n'y a d'ailleurs aucune évaluation de la probabilité de l'évènement en question : le fait même que l'évènement soit possible est censé bloquer l'action.
Le fait qu'il y ai une chance que le système mis en place soit détourné de son but est toujours présent quel que soit le domaine. Bien sûr, on ne doit pas bloquer toute action, mais les probabilités que cela arrive et les risques correspondants devraient toujours être pris en compte.
Je pense que ceux qui utilisent cet argument sous-entendent que le risque que le système de surveillance soit utilisé tôt ou tard pour des causes anti-démocratique est trop grand vis-à-vis des gains potentiels.
L'argument est très très proche de l'idéologie complotiste nord-Américaine, qui voit l'État comme une entité indépendante et dangereuse et pas comme l'expression démocratique d'une volonté de vie en commun. Il est légitime de se méfier des personnes que le processus démocratique direct ou indirect ont mis aux responsabilités de l'État, mais il me semble idéologiquement coloré (en couleur foncée) de considérer l'État comme un ennemi. Du coup, l'argument devient quand même très orienté politiquement, et donc facilement réfutable.
Vu le nombre de fraude en tout genre et de détournement des services de renseignement de l'état qu'il y a eu ces vingt dernières années, je trouve qu'il est tout à fait plausible qu'un nouveau système de surveillance soit utilisé à mauvais escient.
Et la faiblesse principale, c'est que je pense simplement que l'argument est bidon. Factuellement, quand un régime devient autoritaire, il va mettre en place très rapidement tout un arsenal législatif et administratif pour faire ce qu'il veut, avec les moyens qu'il veut. L'existence de structures qui peuvent être réutilisées va pouvoir éventuellement faire gagner quelques semaines ou quelques mois, mais dans le principe, ça ne va rien changer. Pire, ces structures, si elles sont bien conçues, peuvent même ralentir le régime autoritaire. Par exemple, s'il existe une procédure carrée pour que les fournisseurs d'accès fournissent des données personnelles, l'État autotitaire devra faire l'effort d'annuler cette procédure pour passer au-delà. S'il n'existe pas de procédure, bah il n'y a rien à contourner. Mais bon, par principe, rien n'arrête un État autoritaire. En tout état de cause, il n'aura pas besoin d'accuser un site d'être pédopornographique pour le couper, il le coupera, et c'est tout.
Un état n'est pas complètement autoritaire ou complètement démocratique, et il y a un gouffre entre la politique de la Chine et celle de la Corée du Nord, alors qu'on considère généralement les deux comme des dictatures. Une démocratie peut très bien "glisser" peu à peu vers une dictature. Et elle aura plus de probabilité de le faire si elle possède déjà les outils pour. Mais c'est vrai que ça ne fera que retarder la catastrophe si l'on a affaire à un vrai coup d'état.
Il est aussi bien plus long de devoir créer l'outil de zéro que de devoir contourner une procédure. Et il n'est pas possible de récupérer les données qui ont déjà été collectées si elles n'existent pas.
[^] # Re: Rasoir d'Hanlon
Posté par BAKfr . En réponse au journal Manu se lance dans une croisade numérique contre les terroristes intégristes musulmans. Évalué à 1.
Le fait qu'il y ai une chance que le système mis en place soit détourné de son but est toujours présent quel que soit le domaine. Bien sûr, on ne doit pas bloquer toute action, mais les probabilités que cela arrive et les risques correspondants devraient toujours être pris en compte.
Je pense que ceux qui utilisent cet argument sous-entendent que le risque que le système de surveillance soit utilisé tôt ou tard pour des causes anti-démocratique est trop grand vis-à-vis des gains potentiels.
Vu le nombre de fraude en tout genre et de détournement des services de renseignement de l'état qu'il y a eu ces vingt dernières années, je trouve qu'il est tout à fait plausible qu'un nouveau système de surveillance soit utilisé à mauvais escient.
Un état n'est pas complètement autoritaire ou complètement démocratique, et il y a un gouffre entre la politique de la Chine et celle de la Corée du Nord, alors qu'on considère généralement les deux comme des dictatures. Une démocratie peut très bien "glisser" peu à peu vers une dictature. Et elle aura plus de probabilité de le faire si elle possède déjà les outils pour. Mais c'est vrai que ça ne fera que retarder la catastrophe si l'on a affaire à un vrai coup d'état.
Il est aussi bien plus long de devoir créer l'outil de zéro que de devoir contourner une procédure. Et il n'est pas possible de récupérer les données qui ont déjà été collectées si elles n'existent pas.