Journal Loi no 55-385 du 3 avril 1955 instituant un état d'urgence (version consolidée)

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nov.
2005
Art. 1er. - L'état d'urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, de l'Algérie ou des départements d'outre-mer, soit en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public, soit en cas d'événements présentant, par leur nature et leur gravité, le caractère de calamité publique.

Art. 2. - L'état d'urgence est déclaré par décret en Conseil des ministres. Ce décret détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur.

Dans la limite de ces circonscriptions les zones où l'état d'urgence recevra application seront fixées par décret.

La prorogation de l'état d'urgence au-delà de douze jours ne peut être autorisée que par la loi.

Art. 3. - La loi autorisant la prorogation au-delà de douze jours de l'état d'urgence fixe sa durée définitive.

Art. 4. - La loi portant prorogation de l'état d'urgence est caduque à l'issue d'un délai de quinze jours francs suivant la date de démission du Gouvernement ou de dissolution de l'Assemblée nationale.

Art. 5. - La déclaration de l'état d'urgence donne pouvoir au représentant de l'Etat dans le département dont le département se trouve en tout ou partie compris dans une circonscription prévue à l'article 2 :

1° D'interdire la circulation des personnes ou des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par arrêté ;

2° D'instituer, par arrêté, des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes est réglementé ;

3° D'interdire le séjour dans tout ou partie du département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l'action des pouvoirs publics.

Art. 6. - Le ministre de l'intérieur dans tous les cas et, en Algérie, le Gouvernement général, peuvent prononcer l'assignation à résidence dans une circonscription territoriale ou une localité déterminée de toute personne résidant dans la zone fixée par le décret visé à l'article 2 dont l'activité s'avère dangereuse pour la sécurité et l'ordre publics des circonscriptions territoriales visées audit article.

L'assignation à résidence doit permettre à ceux qui en sont l'objet de résider dans une agglomération ou à proximité immédiate d'une agglomération.

En aucun cas, l'assignation à résidence ne pourra avoir pour effet la création de camps où seraient détenues les personnes visées à l'alinéa précédent.

L'autorité administrative devra prendre toutes dispositions pour assurer la subsistance des personnes astreintes à résidence ainsi que celle de leur famille.

Art. 7. - Toute personne ayant fait l'objet d'une des mesures prises en application de l'article 5 (3°) ou de l'article 6 peut demander le retrait de cette mesure. Sa demande est soumise à une commission consultative comprenant des délégués du conseil général désignés par ce dernier et comportant, en Algérie, la représentation paritaire d'élus des deux collèges.

La composition, le mode de désignation et les conditions de fonctionnement de la commission seront fixés par un décret en Conseil d'Etat.

Les mêmes personnes peuvent former un recours pour excès de pouvoir contre la décision visée à l'alinéa premier ci-dessus devant le tribunal administratif compétent. Celui-ci devra statuer dans le mois du recours. En cas d'appel, la décision du Conseil d'Etat devra intervenir dans les trois mois de l'appel.

Faute par les juridictions ci-dessus d'avoir statué dans les délais fixés par l'alinéa précédent, les mesures prises en application de l'article 5 (3° ) ou de l'article 6 cesseront de recevoir exécution.

Art. 8. - Le ministre de l'intérieur, pour l'ensemble du territoire où est institué l'état d'urgence, le Gouverneur général pour l'Algérie et le représentant de l'Etat dans le département, dans le département, peuvent ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacle, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature dans les zones déterminées par le décret prévu à l'article 2.

Peuvent être également interdites, à titre général ou particulier, les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre.

Art. 9. - Les autorités désignées à l'article 6 peuvent ordonner la remise des armes de première, quatrième et cinquième catégories définies par l'article L. 2331-1 du code de la défense et des munitions correspondantes et prescrire leur dépôt entre les mains des autorités et dans les lieux désignés à cet effet.

Les armes de la cinquième catégorie remises en vertu des dispositions qui précèdent donneront lieu à récépissé. Toutes dispositions seront prises pour qu'elles soient rendues à leur propriétaire en l'état où elles étaient lors de leur dépôt.

Art. 10. - La déclaration de l'état d'urgence s'ajoute aux cas visés à l'article 1er de la loi du 11 juillet 1938 sur l'organisation générale de la Nation pour le temps de guerre pour la mise à exécution de tout ou partie des dispositions de ladite loi en vue de pourvoir aux besoins résultant de circonstances prévues à l'article 1er.

Art. 11. - Le décret déclarant ou la loi prorogeant l'état d'urgence peuvent, par une disposition expresse :

1° Conférer aux autorités administratives visées à l'article 8 le pouvoir d'ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit ;

2° Habiliter les mêmes autorités à prendre toutes mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales.

Les dispositions du paragraphe 1° du présent article ne sont applicables que dans les zones fixées par le décret prévu à l'article 2 ci-dessus.

Art. 12. - Lorsque l'état d'urgence est institué, dans tout ou partie d'un département, un décret pris sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense nationale, peut autoriser la juridiction militaire à se saisir de crimes, ainsi que des délits qui leur sont connexes, relevant de la cour d'assises de ce département.

La juridiction de droit commun reste saisie tant que l'autorité militaire ne revendique pas la poursuite et, dans tous les cas, jusqu'à l'ordonnance prévue à l'article 133 du code d'instruction criminelle. Si, postérieurement à cette ordonnance, l'autorité militaire compétente pour saisir la juridiction militaire revendique cette poursuite, la procédure se trouve, nonobstant les dispositions de l'article 24, dernier alinéa, du code de justice militaire, portée de plein droit soit devant la chambre des mises en accusation prévue par l'article 68 du code de justice militaire, lorsque la chambre d'accusation saisie n'a pas encore rendu son arrêt, soit devant la juridiction militaire compétente ratione loci, lorsqu'un arrêt de renvoi a été rendu. Dans ce dernier cas, les dispositions de l'alinéa ci-après sont applicables, et il n'y a pas lieu, pour la Cour de cassation, de statuer avant le jugement sur les pourvois qui ont pu être formés contre cet arrêt. Le tribunal militaire est constitué et statue, dans les conditions fixées aux deux derniers alinéas de l'article 10 du code de justice militaire.

Lorsque le décret prévu à l'alinéa premier du présent article est intervenu, dans les circonscriptions judiciaires précisées audit décret et pour toutes les procédures déférées à la juridiction militaire, il ne pourra être exercé aucune voie de recours contre les décisions des juridictions d'instruction, y compris l'arrêt de renvoi, à l'exception de l'opposition contre les ordonnances statuant sur une demande de mise en liberté provisoire devant la chambre des mises en accusation qui statuera dans la quinzaine. Une nouvelle opposition ne pourra être élevée que contre une ordonnance rendue plus de deux mois après une précédente décision de rejet de la chambre des mises en accusation.

Les pourvois en cassation contre les décisions des juridictions d'instruction ne peuvent être formés qu'après jugement statuant au fond et, s'il y a lieu, en même temps que le pourvoi élevé contre celui-ci. Ils sont portés devant un tribunal militaire de cassation établi par décret en se conformant aux articles 126 à 132 du code de justice militaire et statuant dans les conditions de forme et de fond prévues aux articles 133 à 155 dudit code.

Aucune voie de recours, même en cassation, ne pourra également être exercée contre les décisions des juridictions d'instruction de droit commun statuant sur des faits prévus audit décret à l'exclusion de l'appel devant la chambre des mises en accusation qui statuera dans la quinzaine contre une ordonnance statuant sur une demande de mise en liberté provisoire et du pourvoi en cassation contre un arrêt de renvoi devant la cour d'assises. Un nouvel appel ne pourra être élevé que contre une ordonnance rendue plus de deux mois après une précédente décision de rejet de la chambre des mises en accusation.

Art. 13. - Les infractions aux dispositions des articles 5, 6, 8, 9 et 11 (2°) seront punies d'un emprisonnement de deux mois et d'une amende de 3 750 ¤ ou de l'une de ces deux peines seulement. L'exécution d'office, par l'autorité administrative, des mesures prescrites peut être assurée nonobstant l'existence de ces dispositions pénales.

Art. 14. - Les mesures prises en application de la présente loi cessent d'avoir effet en même temps que prend fin l'état d'urgence.

Toutefois, après la levée de l'état d'urgence, les tribunaux militaires continuent de connaître des crimes et délits dont la poursuite leur avait été déférée.
  • # comme l'autre..

    Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 9.

    ça me rappelle l'autre journal : c'est long et c'est pas drôle, même au second degré.

    C'est peut-être parce que j'ai pas lu l'original.

    Mes livres CC By-SA : https://ploum.net/livres.html

    • [^] # sur un air de deja vu

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 6.

      Si tu veux un peu plus d'humour ...

      ca commence par une menace fantome ...

      puis cela passe par les pleins pouvoirs, un etat d'urgence et l'attaque de Dom ...

      donc, normalement, ca va continuer avec la revanche de Sarkozy.

      et sur un air de marche imperial, dacques chirious et sark vador arrivent ...

      ... juste pour la sortie du coffret collector 80DVD sur l'integral de SW :D

      bon, fait beau, je <-Oo-> [-o-] >o<
  • # Comparatif

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 6.

    C'est presque aussi chiant que de lire une licence proprio. Je vous jure, j'ai déjà essayé, mais comme ce journal, je me suis arrêté après 5 lignes....
    • [^] # Re: Comparatif

      Posté par  . Évalué à 4.

      C'est pourtant au moins aussi instructif sur notre capacité à mettre de côté nos libertés.

      Sur la forme, ça ouvre tout un tas de questions et de réflexions : existe-t-il un site Web reprenant l'ensemble des textes de lois consolidé, accessible gratuitement ? Ce site fait-il un peu plus appel aux liens hypertextes que le journal ici présent ?
      Je fais référence à certaines phrases de ce journal, qui me laissent sur ma faim :
      à l'article 1er de la loi du 11 juillet 1938 sur l'organisation générale de la Nation pour le temps de guerre

      S'il n'y en a pas, est-ce que Wiki pourrait être une bonne infrastructure pour en réaliser un ?

      Que faudrait-il pour qu'un tel texte devienne franchement plus facilement lisible (sans changer le fond) ?
  • # ça sent le phoque icitte

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

    > Art. 1er. - L'état d'urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, de l'Algérie

    Ah, elle commence bien ta loi.
    Elle serait pas un peu périmée ?
    • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

      Posté par  . Évalué à -10.

      L'Algérie c'est la France pour toujours : Nous reviendrons !
      • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à -7.

        DLFPiens, DLFPiennes, excusez moi je marche dedans...

        Et toi tu serais pas un connard collonialiste des fois ? T'as bien raison, on y retournera, d'ailleurs passe devant, je te suis sac à merde... Il sauront t'accueillir...

        J'avoue que ça va mieux :-)
        • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

          Posté par  . Évalué à 9.

          Je suis tombé sur quelqu'un de tes commentaires, et je pense que tu devrais franchement prendre quelque chose pour te calmer.
          On a l'impression que les récents évènements t'ont tellement tendu le string que tu dois être en mesure de jouer de la harpe avec ton cul :)
          • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

            Posté par  (site web personnel) . Évalué à -1.

            Je t'avoue m'être laissé échauffé par ce m***eux qui a rien d'autre à f**tre que de chercher le point Godwin à chaque commentaire. Maintenant que son compte de trolleur est fermé, je vais pouvoir reprendre une activité normale (mouler).

            Au passage, j'adore ta métaphore du string, si elle est libre, je la replacerai ;-)
          • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

            Posté par  . Évalué à -1.

            Voila au moins une bonne maniere d'insulter sans passer pour un petit cretin inculte...
            Meme si au final, c'est pas mieux, je prefere encore lire ça !
    • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

      Posté par  . Évalué à 1.

      Périmée ou pas, elle s'apllique à compter de ce soir minuit !
      Et les restrictions aux libertés publiques accompagnées des garanties judiciaires qui en découlent sont assez effrayantes...;
      • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 1.

        > Périmée ou pas, elle s'apllique à compter de ce soir minuit !

        Je ne comprends pas comment une loi qui contient des articles faux peut s'appliquer ?
        Elle a été modifiée cette loi ?

        >Et les restrictions aux libertés publiques accompagnées des garanties judiciaires qui en découlent sont assez effrayantes...

        Bof, au niveau lois liberticides, ils ont fait pas mal ces derniers temps, avec la LEN, les lois anti-terroristes...
        • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

          Posté par  . Évalué à 1.

          Elle a été modifiée cette loi ?
          Il s'agit de la version consolidée donc incorporant des modifications postérieures à 1955.
          • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

            Posté par  . Évalué à 1.

            et donc, ça leur serait pas venu à l'idée, en modifiant la loi, que le couvre-feu en algérie décrété par la france, c'est euh...
            ben vous voyez, quoi!
            • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

              Posté par  . Évalué à 1.

              Il doit y avoir un léger malentendu entre TyrandO et toi.
              Il dit qu'il s'agit de la version "consolidée" et explique que par définition ça veut dire qu'elle contient toutes les modifications ultérieures s'il y en a eu.

              Apparemment, il n'y en a probablement pas eu, ou alors pas depuis les accords d'Evian (1962), ce qui ne serait pas très étonnant vu le peu d'utilité pratique que les gouvernements successifs ont trouvé à cette loi (très limite côté liberté, donc à consommer avec modération).
              • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

                Posté par  . Évalué à 2.

                Cette loi a été actualisée depuis au moins 2001 puisque le montant des amendes est en euros....
                • [^] # Mise à jour législative

                  Posté par  . Évalué à 2.

                  Honte sur moi, je n'avais pas vu. Il me reste à apprendre à utiliser le site Légifrance pour éviter ce genre d ebourde...

                  Et honte sur les législateurs incapables de mettre à jour proprement une loi.

                  (au passage, apparemment ce texte a été appliqué en Nouvelle Calédonie, alors qu'il s'agit d'un Territoire, pas d'un Département d'Outre-Mer, mais je n'ai pas la force de vérifier pourquoi on a pu ignorer ce détail sémantique à l'époque).
      • [^] # Re: ça sent le phoque icitte

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

        >Et les restrictions aux libertés publiques accompagnées des garanties judiciaires
        >qui en découlent sont assez effrayantes...

        Non non, ne t'inquete pas, tout va bien :
        En aucun cas, l'assignation à résidence ne pourra avoir pour effet la création de camps où seraient détenues les personnes visées à l'alinéa précédent.

        Ouff...
  • # hum ...

    Posté par  . Évalué à 1.

    Art. 1er. - L'état d'urgence peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain, de l'Algérie ou des départements d'outre-mer ...

    Ça la fout mal d'avoir encore des textes imprégnés de colonialisme :'-(

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