Rappel : le gouvernement régional d'Extremadure finance la création et le développement de la distribution LinEx (qui s'appelle maintenant gnuLinEx). Il s'agit d'une distribution Linux basée sur Debian et Gnome à destination de l'éducation, tenant sur un seul CD, et entièrement localisée en espagnol.
NdM : Benoît Minisini est l'auteur de Gambas, un environnement de développement proche de Visual Basic. 24 Octobre: Arrivée à Mérida
Après quelques péripéties à l'aéroport de Madrid (heureusement que mon portable fonctionne!), j'ai enfin un ticket pour me rendre à l'aéroport de Badajoz. Là-bas, un bus vient nous chercher, moi et un autre participant à la conférence.
Nous ne nous rendons pas directement à l'hôtel. Nous rejoignons le groupe des sud-américains, qui vient de terminer le repas de midi (vers 17 heures), et, avec d'autres, nous nous rendons dans un village voisin pour assister à la présentation d'une version spéciale de LinEx pour les enfants (c'est-à-dire avec plein de jeux).
Dans un gymnase, environ deux cents filles et garçons pianotent (bruyamment) devant deux cents PCs en réseaux, tous tournant sous LinEx. Les garçons jouent majoritairement à un "shoot-them-up" 3D, les filles naviguent plutôt sur Internet, ou utilisent la messagerie instantanée.
Nous retournons ensuite à l'hôtel (cinq étoiles !) pour le dîner. Au menu, salade de crudités élaborée, viande de porc et frites, gâteau en dessert. Dans le style cuisine française, avec tout le tralala.
25 Octobre: Premier jour de la conférence
8h00: Petit déjeuner. Un café est le bienvenu.
10h00: Cérémonie inaugurale. Il s'agit de trois discours politiques intégralement en espagnol. Je ne comprends rien, mais ce n'est pas dramatique. Tout est filmé par la télévision régionale. Derrière les intervenants, deux écrans géants affichent à droite ce que filme la caméra, à gauche les économiseurs d'écrans successifs d'un portable tournant sous LinEx.
Chose amusante: pendant que le premier ministre de l'Extremadure parle, l'ordinateur décide de jouer au PacMan tout seul :-)
11h00: Conférence du secrétaire général du CERN, le laboratoire de physique fondamentale international basé à Genève. Le secrétaire général rappelle que le CERN fonctionne dans l'optique de partage libre des connaissances depuis le début: c'est inscrit noir sur blanc dans les statuts institués à son lancement par les hommes politiques de l'époque. Il rappelle opportunément que ce sont bien eux qui sont à l'origine du Web. Il précise que les logiciels développés par le CERN sont sous licence GPL, avec la restriction supplémentaire qu'ils ne peuvent être utilisés pour fabriquer des armes.
11h30: Pause café.
12h00: Lancement de gnuLinEx 2006. Gambas y est préinstallé, et, contrairement à la version 2004, cette fois il fonctionne :-) Un panneau de configuration dans le style de celui de Mandriva est en cours de développement. Il sera réalisé en Gambas.
13h00: Conclusion des rencontres latino-américaines sur la connaissance libre. Ces rencontres ont eu lieu le jour précédant la conférence. Je n'y assiste pas car je dois préparer ma présentation qui a lieu à 18h00. Y participent des responsables des gouvernements de l'Argentine, du Panama, du Venezuela, de Colombie...
14h00: Repas. Au menu viande de porc, et un médaillon de pommes de terre. En entrée, une soupe froide. En dessert, gâteau.
16h00: La conférence du leader du projet Debian est annulée, il a raté son avion (si j'ai bien compris). À la place, quelqu'un nous parle de la théorie de jeux appliquée au développement de logiciels libres. Je suis profondément dubitatif...
17h30: Pause café. Encore! Je ne dépasse d'habitude jamais un café par jour...
18h00: Sessions thématiques. Cinq sessions se déroulent dans cinq salles différentes. Au sein de chaque session, un groupe d'intervenants enchaîne de courtes présentations d'environ une demi-heure. Je fais partie de la seule session présentant des projets de logiciel libres externes à LinEx. Je la partage avec Alvaro del Castillo (développeur Gnome et Debian), Patrick Sinz (projet Hephaïstos, visant à réunir l'ensemble des forges logicielles européennes destinées aux administrations publiques), et Jeff Waugh (développeur Ubuntu).
21h00: Repas officiel dans un grand restaurant de la région. Même menu en gros qu'à midi! Ne pousse-t-il que des pommes de terres en Extremadure ? Où est-ce parce qu'ils exportent tous leurs fruits et légumes en France ? Je commence à envier Pia Waugh, la vice-présidente de Linux Australie, qui est végétarienne. Je ne prends pas de café après le repas.
26 Octobre: Second jour de la conférence
10h00: Conférence de John "Mad Dog" Hall. Il retrace l'histoire du développement de logiciel. Il explique, de manière claire, drôle, et implacable, en quoi le logiciel propriétaire est incapable de répondre aux besoins de ses utilisateurs, faute de ressources suffisantes, et ce avec des arguments purement numériques et économiques. Il explique aussi qui sont les ennemis du logiciel libre, et pourquoi ils le sont. Enfin il donne les arguments qu'il utilise pour promouvoir le logiciel libre auprès des dirigeants d'entreprise: comme ces gens sont terrorisés dès que vous leur parler de "liberté", il vaut mieux utiliser le mot "contrôle", car ils adorent ça - ils veulent avant tout contrôler leurs clients. Le logiciel libre leur permet donc de mieux "contrôler" leur informatique, leur besoin, leur développement, etc. Il explique au passage pourquoi le genre de restriction à la GPL ajoutée par le CERN (voir plus haut) est à ses yeux une mauvaise idée. Je ne sais pas si sa présentation est disponible sur Internet. En tout cas elle vaut le détour!
11h30: José Redrejo, un des initiateurs de LinEx, m'emmène visiter le premier lycée de Mérida a être intégralement passé sous Linex. C'est impressionnant. Il y a un PC pour deux élèves, soit 8000 PC en réseau. Le répertoire de chaque utilisateur est monté par NFS, ce qui permet de se loguer n'importe où. Il y a DEUX serveurs: un pour NFS, un pour l'annuaire LDAP. Ces 8000 PC sont administrés par... DEUX administrateurs (ils comptent un administrateur pour 5000 PC). Et ils n'avaient pas l'air débordés :-). Grâce à Gambas (publicité), José a réalisé un programme qui permet au professeur de contrôler entièrement les ordinateurs des élèves: allumage, extinction des ordinateurs, diffusion de vidéo, ouverture de Firefox à distance, envoi de fichiers, prise en main à distance, diffusion du contenu de l'écran du professeur à tous, etc. L'utilisation de l'informatique est entièrement intégré au processus d'éducation. Les professeurs ont bien sûr suivi une formation, et maintenant, après deux ans d'utilisation, même s'il est encore trop tôt pour faire un bilan, environ 6 professeurs sur 10 sont contents. Pour José Villar, un des organisateurs de la conférence, c'est un résultat inespéré.
13h00: Sessions thématiques. Je participe à la présentation du livre "Gambas, programmation visuelle avec le logiciel libre", réalisé par José Redrejo et Daniel Campos. J'ai écrit la préface. Ce livre de 300 pages fait brièvement le tour des possibilités du langage. Comme il est écrit intégralement en espagnol, je ne peux pas en garantir le contenu. :-)
14h30: Repas à l'hôtel. Inutile que je vous détaille le menu, vous l'aurez devinez vous-même. :-)
16h00: Conférence sur l'évolution du logiciel libre. Je découvre qu'on peut disposer d'une traduction en anglais simultanée. Mais je n'en profite pas, car je m'endors pendant la conférence. J'ai trop peu dormi ces derniers jours...
17h30: Session thématiques. J'assiste brièvement à la présentation d'une version de LinEx adaptée aux hôpitaux et au ministère de la Santé d'Extremadure.
19h00: Cérémonie de clôture. Retour des hommes politiques, et lancement de la conférence suivante qui aura lieu à Málaga en 2006. Ils n'arrêteront donc jamais ! :-)
21h00: On va manger des tapas dans un restaurant avec José Villar, Patrick Sinz (projet Hephaïstos), sa petite fille, et John Maddog. Les tapas sont des petits sandwiches de toute sorte. Ils sont servis avec... des chips. Bien sûr, j'en ai pris aux gambas :-)
Conclusion
Dire que je suis impressionné par ce que fait la région d'Extremadure avec Linux et les logiciels libres serait bien faible. J'en ai même honte quand je compare avec ce qui existe en France. Quand on voit l'intérêt de l'ensemble des nations latino-américaines pour cette expérience, quand on imagine ce que donneront dans 10 ans ces dizaines milliers d'élèves formés à Linux dès leur plus jeune âge, on se rend compte du retard technologique considérable qu'accumulent les pays (comme la France ou l'Italie) qui continuent à utiliser les logiciels propriétaires dans l'éducation.
Aller plus loin
- Site de la conférence (1 clic)
- gnuLinEx (5 clics)
- Logiciel de contrôle des PCs d'une classe d'élèves (5 clics)
# Des détails !!!
Posté par littletux . Évalué à 2.
Et comment s'appelle cet outil, quelle en est la licence ?
(je le crois pas, je réclame plus de publicité;)
[^] # Re: Des détails !!!
Posté par Benoît Minisini (site web personnel) . Évalué à 1.
Un suisse est en train de le traduire en français...
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Benoît Minisini
# Restriction sur la GPL
Posté par Benoît Sibaud (site web personnel) . Évalué à 2.
- si cette restriction supplémentaire fait partie de la licence, alors les logiciels concernés par cette licence sont non-libres.
- si par contre c'est dû à la législation nationale suisse, voir http://www.gnu.org/philosophy/free-sw.fr.html
« Parfois le contrôle gouvernemental des exportations ou des sanctions économiques peuvent vous priver de la liberté de distribuer des copies de programmes à l'étranger. Les développeurs de logiciels n'ont pas le pouvoir d'éliminer ou de passer outre ces restrictions, mais ce qu'ils peuvent et doivent faire, est de refuser d'imposer eux-mêmes des conditions à l'utilisation des programmes. De cette manière, les restrictions n'affecteront pas les activités et les personnes se trouvant hors de la juridiction de leurs gouvernements. »
[^] # Re: Restriction sur la GPL
Posté par Benoît Minisini (site web personnel) . Évalué à 1.
J'en ai discuté avec Jonh Mad Dog le lendemain. Il estime que ce genre de restriction est inapplicable (si je fabrique un marteau à partir d'un logiciel du CERN, est-ce une arme ou un outil ?) et la déconseille.
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Benoît
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