veroniquebonnet a écrit 1 commentaire

  • [^] # Re: l’apprentissage du code à l’école

    Posté par  . En réponse à la dépêche Revue de presse de l’April pour la semaine 27 de l’année 2020. Évalué à 10.

    Bonjour antistress, et je salue aussi ceux qui ont répondu à ce fil que Fred m'a signalé. Malheureusement, lorsque le journaliste a écrit "Parmi ses préoccupations : faire de l’apprentissage du code à l’école un atout pour l’autonomie des individus", ce qui a généré des commentaires que je ne peux qu'approuver, il a totalement décontextualisé mon propos, que je rappelle :

    "Vous connaissez l'expression Code is Law : l'usage de tel ou tel code détermine telle ou telle manière de concevoir la société, et les rapports entre les êtres. Code is Law. On pourrait dire aussi Code is Education. Le code qu'utilise le futur adulte n'est pas innocent. Ce code peut respecter ce que nous déciderons d'être, ou pas. Il peut épanouir celui qui l'utilise, ou pas. C'est ainsi que le code que l'on propose aux élèves et aux étudiants fait partie intégrante de leur formation. Il peut les dresser à la dépendance, en faire des adultes consentants, ou les éduquer à l'indépendance."

    Loin de moi le projet de me mêler de ce de quoi je ne suis en rien compétente. Je ne me situe pas "dans l'obsession de faire apprendre le code à l'école", encore moins d'"imposer le logiciel libre à l'école", formulation bien paradoxale. Oui, le libre est respectueux et formateur et il serait intéressant d'amener le législateur à tirer les conséquences de nos analyses :l'informatique propriétaire n'est ni respectueuse ni formatrice. Mais mon propos était de rappeler qu'il y a des implications sociales et existentielles d'une manière de faire de l'informatique qui laisse les coudées franches à celui qui l'utilise ou pas, qui l'accoutume à laisser exécuter des opérations qui le contraignent et le spolient ou pas. Je prends éduquer par opposition à "dresser", "rendre passif", alors qu' "éduquer" signifie "conduire à l'écart de soi", "amener quelqu'un à prendre un recul" par rapport à ce qu'il aurait fait spontanément, pour préparer à l'autonomie, "rendre actif".

    Comme les propos que j'ai tenu à la fin de l'AG de l'April avaient vocation à être brefs, je n'ai pas pour l'instant développé suffisamment ce "Code is Education". D'où le contresens du journaliste dans l'article du Monde Informatique. J'ai l'intention, en septembre, de publier un éditorial complet sur le sujet. Voici son premier paragraphe :

    "Le monde d'après", qui fait sauter certains comme des cabris, dans la jubilation du "hors sol", peine à dissimuler ses pilotis idéologiques. A la résultante historique la plus surdéterminée, on prétend
    refaire une virginité. Telle Vénus surgissant de l'écume des flots, la mythologie de l'abolition du "monde d'avant" multiplie les représentations chaotiques, purement chronologiques, pour mieux berner.[…] Dans l'éducation nationale,l'informatique est actuellement présentée comme une amie prodigieuse, capable de remédier aux impossibilités du présentiel par la magie soudaine et massive du distanciel. Cette formulation discontinuiste laisse entendre que toute solution logicielle est bonne à prendre.[…] Restituons ici, par quelques chaînes de raisons, une ascendance pour l'opposer à une autre, pour ré-ancrer "l'informatique de l'après" dans les enjeux d'un avant toujours présent."

    J'ai lu ce matin les différents commentaires de ce fil, intéressants. Importants.
    Je vous souhaite un bel été.
    Librement.
    Véronique Bonnet.