Journal Oeuvres visuelles orphelines et licence libre

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32
28
oct.
2010
Cher journal,

je viens de tomber sur le communiqué de presse de l'AFUL en ce qui concerne le projet de loi du Sénat sur les oeuvres visuelles orphelines. Vous pouvez lire ce communiqué ici: http://aful.org/communiques/senat-organise-viol-droits-auteu(...)

Pour résumer le communiqué (qui lui-même résume le projet de loi), les propositions de la haute assemblée visent à permettre l'exploitation par une société civile de perception et de répartition des droits d'auteur (SCPRD) des oeuvres visuelles orphelines (en gros les images dont on ne peut retrouver trace de l'auteur).

A priori, de ce que j'en ai compris, aujourd'hui les oeuvres orphelines sont exploitées gratuitement et sans problème juridique. Le projet de loi semble viser la remise en circulation de ces oeuvres dans le but de faire du fric. Mon opinion (et visiblement celle de l'AFUL): premier mauvais point...

Ensuite, on peut se poser la question des images libres et passer au deuxième mauvais point. En effet, dès lors qu'un auteur est introuvable, peut-on considérer l'oeuvre comme orpheline, peu importe sa licence ? Concrètement, je créé une image et désire la mettre en licence libre (CC-BY-SA). Je la publie sur mon site web, elle est reprise dans un tas de sites différents qui en assurent la diffusion. Mais comme je créé de l'art pour l'art, je ne passe pas trop de temps à gérer l'image. Comme elle est reprise à droite et à gauche, peut-être qu'un jour, une SCPRD passera dans le coin et dira: "pas mal, l'adresse de l'auteur n'est pas mentionné, après recherche, impossible de le contacter... Bon, la licence semble être libre mais comme l'oeuvre est orpheline, à nous la gestion et faisons fi de la licence !!!" Au final, on passerait d'une licence libre à une gestion de droits complètement fermée. Ou pour résumer: comment faire du copyright avec du copyleft !

Bien entendu, le projet de loi précise que si l'auteur se manifeste, la gestion des droits par la SCPRD s'arrête. Mais le risque est grand de passer complètement à côté... Imaginons, une petite procédure simple qui cherche les images dans Wikimedia Commons [http://commons.wikimedia.org/wiki/Accueil] dont les comptes des auteurs sont non valides ou fermés. A priori, même si la licence est explicite, du moment que l'auteur n'est pas joignable (pas d'adresse email valide par exemple), rien n'empêche, à la lumière du projet de loi, une SCPRD d'en gérer les droits et donc de réclamer de la monnaie sonnante et trébuchante pour que Wikimedia Commons continue à la publier.

De plus, n'oublions pas qu'une SCPRD a des moyens financiers et humains bien plus importants que les citoyens individuels qui auraient sans doute des difficultés à réclamer leurs droits, qui plus est sur des oeuvres libres dont ils auront permis une large diffusion dans un objectif non pécunier. A priori, qui dit oeuvre libre, dit gestion plus "libre" (plus légère): les droits et les devoirs de l'auteur sont moins encadrés dans les licences libres que dans les licences fermées. Avec le projet de loi, les auteurs d'oeuvres libres auraient donc de plus grandes responsabilités, notamment, celle de veiller à être joignable facilement ce qui est assez couteux (en temps ou en €) comparativement à la démarche plus légère qui consiste à choisir une licence libre et à "balancer" l'oeuvre dans le cyberspace...

Mon analyse qui est peut-être alarmiste (mais peut-être pas en fait) me laisse penser qu'en l'état, le projet de loi n'est pas recevable: il va falloir en modifier les termes, au moins pour veiller à préserver les droits des oeuvres libres qui ont une vie en dehors de l'auteur...
  • # sans voix

    Posté par  . Évalué à 9.

    tout le monde ici en reste sans voix visiblement...

    Alors que je passe mon temps sur linuxfr à essayer de trouver des commentaires pour faire un bon mot dessus, pendant ce temps-là, certains passent leur temps à essayer de gagner plus de pouvoir en favorisant les bénéfices de leurs petits copains, en gagnant du fric et en restreignant les libertés là où cela n'aurait pas lieu d'être. Révoltant !

    Only wimps use tape backup: real men just upload their important stuff on megaupload, and let the rest of the world ~~mirror~~ link to it

  • # wtf

    Posté par  . Évalué à 10.

    J'ai peut-être un neurone qui a lâché, mais à quoi peut bien servir une société de répartition de droits d'auteurs gérant des oeuvres dont on ne retrouve pas les auteurs?
    • [^] # Re: wtf

      Posté par  . Évalué à 9.

      Je ne cautionne pas mais la réponse est référencée dans l'article :
      [4] Rapport de la Commission sur les oeuvres orphelines, Jean Martin (prés.) et Sophie-Justine Lieber (rapp.), CSPLA, 19 mars 2008, page 23. http://www.cspla.culture.gouv.fr/CONTENU/rapoeuvor08.pdf
      veiller à ce que l'exploitation d'oeuvres orphelines ne concurrence pas artificiellement l'exploitation d'oeuvres sous droits non orphelines

      Donc en gros organiser artificiellement la rareté pour rentabiliser les oeuvres dont les titulaires de droit sont encore connues.
      • [^] # Re: wtf

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

        Tout ça parce que quelques sites web connus utilisent des images qui viennent du web (généralement sans citer les auteurs) et donc ne sont plus client chez la SCPRD ...
      • [^] # Re: wtf

        Posté par  . Évalué à 3.

        Ça j'entends bien : ce sont des gros fumiers. J'eus dû ajouter une emphase sur répartition. Je ne comprenais pas comment ils se débrouilleraient (mais c'est répondu plus bas, c'est au cas où on retrouve l'auteur).

        Au fait ça ne vous paraît pas tellement énorme au point qu'ils retireraient tous les machins trop débiles au soulagement de tous mais se débrouilleraient quand même pour faire passer un bidule bien vicieux caché au fin fond du texte? (désolé de parler en termes de "machins" et "bidules" mais j'y connais pas grand chose)
    • [^] # Re: wtf

      Posté par  . Évalué à 9.

      À filer du fric aux auteurs qui ont décidé de s'inscrire dans ce type de dinosaure institutionnel parti en croisade contre la gratuité crypto-communiste des pédonazis.

      THIS IS JUST A PLACEHOLDER. YOU SHOULD NEVER SEE THIS STRING.

  • # oO

    Posté par  . Évalué à 6.

    Bien entendu, le projet de loi précise que si l'auteur se manifeste, la gestion des droits par la SCPRD s'arrête.
    Et on lui verse les droits recueillis sur son oeuvre ou c'est du foutage de gueule complet ?
    • [^] # Re: oO

      Posté par  . Évalué à 4.

      Visiblement tu n'as pas ete lire la proposition de loi.

      Art. L. 311-13. - La rémunération perçue au titre de la cession des droits d'exploitation d'une oeuvre visuelle orpheline est conservée par la société qui a conclu le contrat d'exploitation des droits, conformément à l'article L. 311-9. À l'issue du délai figurant au troisième alinéa de l'article L. 321-1, si l'oeuvre est toujours réputée orpheline, le montant de la rémunération est utilisé dans les conditions prévues par le 2° de l'article L. 321-9.

      http://www.senat.fr/leg/ppl09-441.html
      http://www.celog.fr/cpi/lv3_tt1et2.htm

      L'article de l'AFUL est deja assez critique pour ne pas en rajouter une couche.
      • [^] # Re: oO

        Posté par  . Évalué à 2.

        L'article de l'AFUL ou du CSPLA ?

        Ah zut, en fait ce sont les mêmes.
        • [^] # Re: oO

          Posté par  . Évalué à 3.

          Ah bah au moins, cet article-là n’est pas orphelin…
  • # Abandonware ?

    Posté par  . Évalué à 2.

    Cela veut dire qu'une société pourra légalement vendre des copies d'abandonwares ? (p.ex. jeux anciens de toute évidence plus exploités commercialement) ?
    • [^] # Re: Abandonware ?

      Posté par  . Évalué à 3.

      Dans ce cas là, il me semble que l'utilisation gratuite est tolérée par l'éditeur, mais que les auteurs sont toujours connus, et donc possèdent encore des droits dessus.
      • [^] # Re: Abandonware ?

        Posté par  . Évalué à 2.

        Et puis surtout, un abandonware ce n'est pas une oeuvre visuelle ...

        Sinon, pour les abandonware, il y a les éditeurs qui tolèrent, ceux dont les ayants droits actuels quels qu'ils soient s'en foutent / ignorent le fait que ce soit dispo en abandonware, ... C'est trompeur de sous entendre "si c'est en abandonware, c'est que c'est toléré par l'éditeur".
        • [^] # Re: Abandonware ?

          Posté par  . Évalué à 1.

          Certes, mais s'ils s'en foutent, ils tolèrent. S'ils ignorent, c'est qu'ils s'en foutent un peu, donc tolère (quand tu fais du fric sur quelque chose, tu vérifies au moins la disponibilité abandonware).
          • [^] # Re: Abandonware ?

            Posté par  . Évalué à 8.

            Non non, la logique de la SPCRD:
            "Oh non! Un auteur qui ne se rend pas compte qu'on peut faire du fric avec son travail l'a abandonné! Aidons-le! Ramassons des sous sur ce travail qu'on n' a pas fait. Si on le retrouve un jour, il nous dira merci!"
            • [^] # Re: Abandonware ?

              Posté par  . Évalué à 5.

              s/Si on le retrouve un jour/Si un jour il vient réclamer/

              J’ai dans l’idée que la recherche des auteurs, si elle était rendue obligatoire, ne serait que de pure forme…

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