Journal Les mésaventures d'un lecteur compulsif

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15
mai
2008
Quand je n'ai pas une vingtaine de livres d'avance à lire dans ma bibliothèque, je ne suis pas à l'aise. Suivant l'injonction de Rimbaud :
"Soyons moderne, résolument !" J'ai acquis un livre électronique, un ebook.

Mal inspiré en faisant confiance au format du fichier, pdf d'Adobe, j'ai téléchargé l'ouvrage. Je n'avais pas prévu que le système de gestion des droits d'utilisation (DRM) me poserait tant de problèmes.

En fait, pour pouvoir accéder au texte, il faut accréditer au moins un ordinateur non seulement auprès de l'éditeur qui envoie un identificateur qui permet d'ouvrir le fichier mais il faut aussi déclarer le programme de lecture de la machine auprès d'Adobe. Ces opérations d'identification doivent etre renouvelées pour chaque PC qui accueillerait une copie du livre.

Adobe préconise de s'inscrire à passeport.net de Microsoft mais propose, en cas de refus, l'inscription sur son site. L'identification permet ainsi de qualifier chaque programme de lecture.

Surprise désagréable, les versions d'Acrobat Reader qui ont un module de gestion des droits tournent seulement sur Windows et McOS !
Pour Linux, Adobe n'a pas encore planifié la mise à disposition d'une version qui gère les autorisations d'accès aux documents protégés.

Depuis la version du Reader 8.1.x, Adobe impose un nouveau module de lecture des livres protégés. Ce programme n'est pas au point.. L'interface d'accès aux bibliothèques de documents et celle du lecteur sont vraiment minimales. Si le livre n'a pas d'index associé, on est condamné au défilement des pages une à une. L'impression bogue ou ne tient pas compte des droits à imprimer s'ils existent pour le document. De plus Adobe oblige à mettre à jour le lecteur dès qu'une nouvelle release est disponible quelque soit la qualité du module fourni en bloquant l'accès aux documents tant que la mise à jour n'est pas effectuée.

Avec Windows, on peut se servir d'Acrobat Reader 7.1.0 dont le plugin de gestion des droits accorde de lire sur l'interface habituelle qui donne l'avantage, en l'absence d'index, de proposer sur la gauche du lecteur le défilement rapide des pages en format réduit (thumbnails) et l'accès direct à la page choisie.

J'ai tenté d'user de ce Reader windows avec wine sous linux. Et ça fonctionne !

Linux debiean etch
wine 1.0RC1
Flash player windows XP
Firefox 2 windows
Acrobat Reader windows XP sp2 7.1.0

Firefox windows est nécessaire pour accomplir à partir de la machine linux les démarches d'accréditation sur le site d'Adobe pour enregistrer l'hote et autoriser le Reader à gérer les pdf avec DRM.

Si je comprend que les éditeurs de livres défendent leurs droits et les rémunérations des ventes d'ouvrages. Je ne crois pas que le DRM soit la solution.

Trop de contraintes et de restrictions empèchent la jouissance de posséder un livre. En fait, on n'en devient pas le propriétaire, on paye pour le droit d'accéder à un fichier dont la moindre modification de l'environnement technique risque de vous priver de son contenu. Il faut sans cesse demander à Adobe et à l'éditeur la réactivation des droits d'usage.

Contrairement au livre papier, on ne peut ni le donner, ni le preter, ni le vendre. S'il est un peu moins cher qu'un exemplaire papier, l'encadrement stricte de son utilisation rend très inconfortable son utilisation.

La pérennité de l'usage n'est pas garantie car on peut avoir besoin de réactiver en contactant l'éditeur. Si celui-ci fait faillite ou est racheté, qui s'occupera du suivi de la gestion des droits ?

Un nouvel intermédiaire, au moins, apparait dans la chaine du livre, l'éditeur de logiciel de lecture avec la gestion des droits d'accès.
Tous les produits avec DRM sont des programmes propriétaires opaques et fermés, sans normes, les formats des livres numériques sont aussi propriétaires. De nombreux dispositifs de lecture se disputent le marché. Peu sont compatibles avec plusieurs formats ou systèmes de gestions de droit.

Pourvu que le livre papier ait encore de beaux jours devant lui !
  • # Et avec les autres ?

    Posté par  . Évalué à 10.

    ça donne quoi quand tu essaies d'ouvrir le pdf avec des lecteurs non adobes, comme kpdf, par exemple ?

    Tous les nombres premiers sont impairs, sauf un. Tous les nombres premiers sont impairs, sauf deux.

    • [^] # Re: Et avec les autres ?

      Posté par  . Évalué à 2.

      Avec kpdf, à la prelière tentative d'ouverture, kwallet propose d'entrer une clé d'accès au document. Evidemment je ne la connais pas. Donc, pas d'ouverture du document.
      xpdf signale qu'il ne gère pas les accès de sécurité et met fin au programme.

      Je ne suis pas assez technicien pour évaluer le niveau de défense de ces documents.

      Il me semble qu'un informaticien russe a été poursuivi par la justice américaine parce qu'il avait déjoué le verrou des ebooks d'Adobe. C'était il y a quelques années. Depuis, le DMCA a rendu illégal tout programme qui décode les verrous des fichiers protégés.
      • [^] # Re: Et avec les autres ?

        Posté par  . Évalué à 3.

        Peux-tu regarder si tu as décoché la case "Obéir aux limitations DRM", dans la configuration de kpdf (Configuration->Configurer kpdf->onglet général)

        Tous les nombres premiers sont impairs, sauf un. Tous les nombres premiers sont impairs, sauf deux.

        • [^] # Re: Et avec les autres ?

          Posté par  . Évalué à 1.

          Oui j'ai décoché l'option "Obéir aux limitations DRM"
          A l'ouverture du document, il demande toujours un mot de passe.
  • # Livre papier ou pas

    Posté par  . Évalué à 2.

    La bibliothèque d'ebooks non DRMisés, voire dans le domaine public, est tout de même suffisament imposante pour justifier l'achat d'un reader (du moins pour les lecteurs compulsifs). Enfin, en ce qui me concerne, je l'envisage sérieusement quand le prix descendra sous les 200€ (à la louche).
    Or ces machines ont des avantage indéniable sur le papier : poids, encombrement, choix de la taille de police...

    Donc non, le réflexe du c'était mieux à vent (et pourquoi pas à vapeur ?) à la moindre embûche, moi je dis bof.

    Cela dit, si j'en possèdais un, je serais tout de même un peu frustré de ne pas pouvoir en profiter pour les ebooks récents.
    • [^] # Re: Livre papier ou pas

      Posté par  . Évalué à 3.

      Oups, je suis un peu hors-sujet : il n'est pas question de reader ici !
      Dans ce cas, effectivement, la lecture à l'écran, ça va, mais quitte à payer, je préfère l'édition papier !
    • [^] # Re: Livre papier ou pas

      Posté par  . Évalué à 3.

      Je ne crois pas être nostalgique du temps des machines à vapeur et de l'analogique. Quoique je considère miraculeux qu'un énergumène ait trouvé le moyen d'enregistrer une voix de femme chantant sur une feuille de papier avec du noir de fumée, en 1860. La transcription la plus ancienne d'une voix humaine !

      J'écris directement mes textes avec un ordinateur et je ne saurais plus me passer des ressources du réseau.
      Comme par exemple le merveilleux dictionnaire des synonymes du CNRS : http://elsap1.unicaen.fr/cgi-bin/

      Le livre électronique tel qu'on nous le propose réduit au maximum les possibilités de traiter le texte à moins de manipulations fastidieuses.
      Et ça, quelque soit le lecteur utilisé.
  • # Captain copyright ...

    Posté par  . Évalué à 5.

    a encore frappé ... les DRM cémal
    • [^] # Re: Captain copyright ...

      Posté par  . Évalué à 0.

      L'édition, en tous cas en France, est un secteur économique très fragile. La moindre perte de revenus signifierait la fin des publications de qualité.
      C'est sans doute pour cette raison que les versions numériques ne se sont pas développées comme pour la musique ou la vidéo.

      Je comprends l'attitude des éditeurs qui espèrent, en protégeant les ouvrages numériques, profiter de la baisse des coûts de production des ouvrages tout en déployant leurs ventes grâce à Internet.

      Je suis bien évidemment d'accord pour considérer que les DRM ne sont pas la solution.

      En attendant Amazon vend à perte toutes sortes de produits culturels pour couler la concurrence et imposer sa domination sur la distributions des oeuvres.

      Amazon étrille les libraires et impose aux petits éditeurs des conditions désavantageuses pour apparaître dans leur référencement..
      • [^] # Re: Captain copyright ...

        Posté par  . Évalué à 2.

        sans me faire l'avocat du diable, les "pauvres librairies" qui prenne le client pour des pigeons, qui n'ont que les derniers best seller, qui sont incapable d'avoir des conseils interessants, il y en a aussi un certain nombre. (je ne dis pas qu'il n'y a qu'elles, mais elles existent!)

        La moindre perte de revenus signifierait la fin des publications de qualité.
        Il y a des publications de qualité ... mais quand on voit le niveau de nombreux "best seller" et des magazines, on se dit que c'est peut etre pas le facteur commun le plus frappant des maisons d'éditions.
        • [^] # Re: Captain copyright ...

          Posté par  . Évalué à 2.

          Il est exact que certaines librairies font un commerce médiocre de livres faciles à vendre. Mais il y a le réseau des librairies indépendantes qui font un bon boulot de diffusion d'ouvrages à la promotion moins tapageuse.

          L'éditeur, le plus souvent, a besoin des grosses ventes de best sellers qui, pour la plupart sont des bouquins sans grand intérêt effectivement. Mais, sans eux, il n'est pas possible d'investir dans des oeuvres de qualité qui mettent beaucoup plus de temps à trouver leurs lecteurs.

          C'est ce principe de réciprocité qui équilibre le niveau général de l'édition.

          Il y a aussi beaucoup de petits éditeurs qui ont la passion de leur métier et qui doivent utiliser les services d'un tout petit nombre de distributeurs pour faire connaitre leurs auteurs. Je crois que ceux-là rêveraient d'avoir un "block buster" qui doperait leur trésorerie.
      • [^] # Re: Captain copyright ...

        Posté par  (Mastodon) . Évalué à 2.

        Paradoxalement, j'ai l'impression que le milieu de l'édition d'aujourd'hui pourrait plus facilement proposer des ebooks sans DRM que ce qui sera possible dans le futur si les matériels de lecture s'améliorent.

        Lorsqu'un auteur (par exemple Cory Doctorow ou Charles Stross) diffusent leurs livres gratuitement et sans DRM sur le web, je peux jeter un coup d'oeil, voir si ça me plaît, mais ensuite j'achète le livre parce que je n'aime pas lire sur mon ordinateur. À ce jour j'ai acheté trois romans des auteurs cités, alors que je ne les connaissais pas.

        S'il devenait aussi agréable de lire sur un bidule électronique de poche que sur un vrai livre, je ne suis pas sûr que ce modèle serait viable. Reste à savoir si un modèle par souscriptions comme le nouveau journal de d'Edwy Plenel, ou à base de micro-paiements, pourrait fonctionner et continuer à faire vivre les éditeurs en plus des auteurs.
        • [^] # Re: Captain copyright ...

          Posté par  . Évalué à 1.

          L'intuition est bonne. Et ce phénomène de découverte de produits culturels sans DRM sur le web favorise la reconnaissance d'artistes méconnus. On achète souvent leurs oeuvres. Malgré tout, cela reste marginal.

          Il y a aussi des expériences d'édition et de diffusion de livres sans DRM dont on ne sait encore ce que cela va donner , par exemple
          http://www.publie.net/tnc/
          Il y en a certainement d'autres.

          Mais une numérisation massive non maîtrisée aboutirait probablement à une dissémination incontrôlable des textes et à l'effondrement des ventes.
          D'où la prudence du milieu éditorial.
  • # Incitation au piratage...

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 8.

    En disant "oui on vend", puis en frustrant le client qui finalement a acheté du vent, tout ce que l'industrie arrive à faire est à inciter au piratage...
    • [^] # Re: Incitation au piratage...

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

      hum, pour ceux qui veulent lire sur un Galion, le " vent acheté" permet d'aller plus loin à l'abordage dans de riches contrées, bandeau sur l'oeil, sabre au clair et jambe de bois en avant ? Ou alors peut-être parles-tu d'incitation à la contrefaçon, non ?

      et ceux qui aiment lire des histoires de contrebandiers et autres flibustiers alors ? Heureusement que le livre est un moyen d'évasion aussi :)
  • # et on a le droit de

    Posté par  . Évalué à 3.

    Faire des commentaires directement sur le bouquin ? (le pdf permet ça ... Mais utiliser des clients plus léger et puissant que le reader classique qq fois (comme foxit sous windows) ?

    De copier une ou qq images en jpg afin de les envoyer à un pote?
    (il est même autorisé de photocopier une (faible) partie d'un ouvrage dans une bibliothèque (elle paie des droits spécifiques qui couvre ce cas)
    • [^] # Re: et on a le droit de

      Posté par  . Évalué à 0.

      La numérisation des documents et leur indexation ouvrent des perspectives fascinantes pour atteindre la source des références avec une rapidité confondante et la dupliquer.
      La possibilité de produire des copies à l'infini et pour presque rien menace les revenus des éditeurs et des ayant-droit. Il faudrait lever cette contradiction en inventant un modèle satisfaisant pour toutes les parties.
    • [^] # Re: et on a le droit de

      Posté par  . Évalué à 3.

      Hum, ça me donne une idée de site web 2.0 à breveter et à vendre des millions à Google ou Amazon, ça : une appli (AJAX, évidemment !) d'annotations partagées (façon whiteboard) sur un ebook en ligne.
      Comme ça, on peut partager ses impressions avec les autres lecteurs, dans le contexte, sans aller sur un forum à des kilomètres virtuels du bouquin.
  • # Le droit de lire

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

    Rho, on se rapproche dangereusement de cette nouvelle de RMS :(
    http://www.gnu.org/philosophy/right-to-read.fr.html
    • [^] # Re: Le droit de lire

      Posté par  . Évalué à 1.

      C'est malheureusement de l'anticipation ... assez réaliste. La menace d'une domination totale et mondiale des biens culturels par une seule entreprise avec la complicité des administrations est un scénario plausible. Le capitalisme serait bien soluble dans le "soviétisme".

      Néanmoins, ce qui a changé depuis 97, c'est que d'autres acteurs économiques très puissants contestent la position dominante de Microsoft et donc tempèrent son hégémonie. Pour autant ces concurrents ne sont pas des philantropes et la limitation de l'accès aux oeuvres sert leurs intérêts.

      Il ne faut pas sombrer dans le pessimisme ! Des expériences en cours entraineront l'apparition de nouveaux protagonistes sur le marché des biens culturels. Tout ne se réduit pas à la propriété des droits sur l'oeuvre.

      Ce site décrit le travail des pionniers de l'édition en ligne :
      http://amontour.wordpress.com/
      • [^] # Re: Le droit de lire

        Posté par  . Évalué à 2.

        > Néanmoins, ce qui a changé depuis 97, c'est que d'autres acteurs
        > économiques très puissants contestent la position dominante de
        > Microsoft et donc tempèrent son hégémonie.

        Dans ce rôle, je ne vois que Google. Qui sont les « autres » ?

        Et je suis pas convaincu qu'on gagne beaucoup à l'échange microsoft -> google, même si gtalk, gg summer of code toussa…
    • [^] # Re: Le droit de lire

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 1.

      La profusion de blogs me fait dire exactement l'inverse.

      Et d'ailleurs, aux US comme en Europe, avec l'inscription a la fac, tu payes les frais de bibliotheque... (et le prix des publications scientifiques est tres cher, et l'a toujours ete' [1])

      [1] ACM, Springerlink et consorts. Pas arXiv ou TEL...

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