Journal L C E N

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31
jan.
2004
La polémique déclenchée par l'adoption par le parlement
du projet de la LCEN et de ses amendements a suscité de
nombreuses réactions.

L'ampleur des protestations, de l'ensemble des
prestataires techniques et des dizaines de milliers
d'internautes, démontrent qu'il y a pourtant une
attente que le gouvernement ne semble pas réaliser.

Au delà de la polémique, tentons d'en tirer quelques
enseignements. Les directives européennes enjoignent
aux états membres à assurer le juste équilibre entre la
liberté d'expression, la protection de la vie privée,la
régulation et l'harmonisation dans l'UE des actes
économiques dans le contexte des nouvelles technologies
de l'information. La directive CE de 2000 que la LCEN
doit transposer en droit français concernent les actes
de l'économie numérique.

La diffusion de contenu réalisé à titre de bénévolat ne
peut être considéré comme un acte économique. La LCEN
ne s'applique pas en principe à ce type de diffusion.
Qu'en est-il des prestataires bénévoles, ce qui est le
cas d'un certain nombre d'hébergeurs associatifs ? On
le voit la complexité propre aux médias numériques
aurait mérité de la part du législateur, une plus
grande attention dans l'élaboration de la loi.

Il incombe aux états de garantir la protection des
données personnelles, les droits et obligations des
différents acteurs économiques, d'assurer la libre
circulation de l'information, de définir le rôle de la
puissance publique. Il est donc inéluctable que les
responsabilités des prestataires soient clairement
définis. Il est évident que les prestataires de service
techniques y compris les hébergeurs aient quelques
obligations qui impliquent leur responsabilité.

Dans le cas où, un site hébergé ferait état indûment de
données personnelles, comme par exemple, nom, adresse,
n° de téléphone d'une personne sans son consentement,
l'hébergeur peut et doit participer au respect de la
vie privée et intervenir quand une atteinte manifeste
lui est signalée. On peut penser qu'il est du devoir du
FHI qu'il intervienne promptement sans pour autant
attendre une décision de justice. On peut admettre une
interruption momentanée de la diffusion de
l'information jusqu'à ce que le responsable du site ait
mis fin à la publication non autorisée.
Un prestataire technique marchand qui comprend dans
son offre un service d'hébergement même gratuit est
concerné directement par la LCEN. La directive
européenne interdit aux états d'imposer un contrôle
générale des contenus. Néanmoins, pour des cas précis,
les états peuvent imposer aux prestaires des
obligations particulières. La vision coercitive des
amendements a pris le pas sur l'obligation de respecter
la liberté d'expression, obligation dont la LCEN ne
fait pas mention comme ressortant de la responsabilité
des prestataires. Au contraire, en instituant une
obligation de contrôle permanent, on prend le risque
d'empécher ce droit d'expression. Les députés vont à
l'encontre de la directive européenne en imposant un
contrôle systématique qui s'apparente de fait à une
obligation générale. Le legislateur aurait du prendre
un soin particulier pour décrire sans ambiguités les
circonstances pour lesquelles l'hébergeur doit avoir
des obligations de contrôle et d'intervention.

La nature même des obligations de contrôle des contenus
qui relèvent de la pédophilie, de l'incitation au
racisme et du négationisme dépasse et de loin les
moyens raisonnables des hébergeurs pour en empécher la
diffusion sans attendre qu'on leur signale de tels
faits. N'était-il pas plus juste d'imposer une réaction
prompte dès la connaissance du fait délictueux, sans
attendre une décision de justice, même si de telles
mesures seraient provisoirement appliquées.

Sans définition particulière de l'acte sous jacent à la
diffusion, la LCEN impose aux prestatires d'intervenir
si on signale un contenu potentiellement litigieux et
engage la responsabilité du prestataire si la justice
confirme l'illicité du contenu. En terme clair,
n'importe qui peut obtenir une décision allant en
faveur d'une restriction de la liberté d'informer et de
sans arbitrage judiciaire. L'équilibre entre acteurs de
l'économie numérique est rompue. La libre circulation
de l'information, la liberté d'expression est mis à
mal. Les instances juridictionnelles supérieures,
nationales ou européennes, ne manqueront pas de statuer
contre ces dispositions comme le Conseil d'Etat l'a
déjà fait pour l'amendement BLOCHE. Pour finir, si a
directive européenne reconnait le droit aux états
d'imposer des obligation particulières pour des cas
précis correpondant à des actes illicites pour autant,
elle ne préconise pas de telles dispositions.

La LCEN concerne les actes économiques, ce qui exclu
toutes actions bénévoles de diffusion de contenus. Les
litiges d'ordre économique de quelque nature que ce
soit ont besoin d'un véritable droit. Chaque acteur
doit avoir la possibilté d'un recours équitable en
justice pour faire valoir ses intérêts. Cependant sous
prétexte d'efficacité, confier une forme de régulation
par nature juridique à des acteurs techniques sous
contraintes de responsabilité irait à l'encontre des
principes élémentaires du droit.
L'absence de cette régulation est une régression du
droit et du rôle de l'état. En ce sens LA LCEN est un
acte politique. Le gouvernement ne semble pas mesurer
la portée d'un tel dispositif qui sort largement du
cadre économique. Il serait bon que le legislateur en
revienne à de plus saines dispositions.

Il est dommage que le gouvernement n'est pas réuni tous
les acteurs de l'économie numérique pour négocier des
codes de bonnes conduite sous forme de charte
professionnelles. Ces codes librement consenti aurait
l'avantage de diminuer le risque de recours à la
justice. La LCEN en définissant le droits et devoirs de
chacun des acteurs dans le domaine d'intervention qui
est le sien, garantirait ainsi l'équité entre toutes
les parties.

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