Journal L'UE révise sa directive sur la responsabilité du fait des produits

Posté par  . Licence CC By‑SA.
17
13
mar.
2023

Source : article Euractiv

De quoi s'agit-il :

une proposition législative visant à mettre à jour le cadre de responsabilité de l’UE datant des années 1980 afin de l’adapter aux technologies numériques.
Le régime de responsabilité définit les conditions selon lesquelles une personne ayant subi des dommages causés par un produit défectueux peut intenter une action en justice contre le fabricant du produit afin d’obtenir des dommages-intérêts.

Deux points importants :
1. Les logiciels entrent dans le champ de la directive, y compris les logiciels SaaS
2. Les logiciels libres ne sont pas dans le champ de la directive, parce que « ce ne sont pas des produits lancés sur le marché parce qu'ils sont développés et fournis gratuitement ».

Il s'agit d'un nouveau texte du conseil de l'UE et j'imagine qu'il va y avoir encore des évolutions. En attendant il me semble que les 2 points signalés ci-dessus sont plutôt pas mal.

  • # Pas d'accord avec le point 2

    Posté par  . Évalué à 4.

    Ce point montre un méconaissance de ce qu'est un logiciel libre. Je pensais qu'en 2023 on ne ferait plus ce genre d'erreur (au moins au nuiveau européen).

    • [^] # Commentaire supprimé

      Posté par  . Évalué à 10. Dernière modification le 13 mars 2023 à 15:23.

      Ce commentaire a été supprimé par l’équipe de modération.

    • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 8.

      En fait, le souci n'est pas une méconnaissance.

      Le souci, ça va être de faire un distinguo sur ce qui est un logiciel libre communautaire fait dans un garage (comme par exemple, garage) sans support avec 2/3 personnes hors d'une structure commercial, avec des logiciels principalement et/ou exclusivement financés par des boites avec pignon sur rue (par exemple, Ceph).

      Et surtout de distinguer le logiciel libre en soit (avec une licence qui indique qu'il n'y a pas de garantie, que ça soit dans le GPL ou dérivés, que dans la MIT ou dérivés) d'offre de presta ou d'offre de support sur des versions spécifiques.

      L'usage de l'expression "logiciel libre" montre une vocation à ne pas infliger un cadre réglementaire extrêmement lourd sur la communauté, donc plus ou moins le contraire d'une méconnaissance.

      Certes, il y a sans doute moyen d'être plus précis, et certes, certains acteurs peu scrupuleux (genre Linagora) vont pousser à faire passer pour du libre ce qui ne va pas être libre (exemple 1, exemple 2) pour s'éviter des obligations, mais l'UE ne va pas inventer des mots pour faire une distinction la ou la communauté, à tort ou à raison, n'en fait pas et ou il n'y a pas de consensus.

      Et sans avoir le texte exact sous les yeux, c'est assez dur de voir exactement ce qui est mis dans le document de travail.

      • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

        Posté par  . Évalué à 3.

        Je réagissais à la phrase ci-dessous :

        Les logiciels libres ne sont pas dans le champ de la directive, parce que « ce ne sont pas des produits lancés sur le marché parce qu'ils sont développés et fournis gratuitement ».

        Je pensais que cette phrase venait du texte original mais il semble d'après une réponse à mon commentaire que cette tournure est une approximation journalistique grossière. L'auteur de l'article ne connaît pas son sujet et mélange tout. Bel exemple de désinformation.

        Certes, il y a sans doute moyen d'être plus précis,

        Oui, d'après ce commentaire :

        With the aim of not hampering innovation: (i) free and open-source software developed or supplied outside the course of commercial activity, as well as (ii) the source code of software, should be excluded from the definition of products covered under the proposal (Recital 13).

        Ca me rassure.

        • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

          Posté par  (site web personnel) . Évalué à 7.

          Ca me rassure.

          Pas moi. "the course of commercial activity" va être un enfer à délimiter. Zenitram pourra en parler mieux que moi.

          "La première sécurité est la liberté"

          • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

            Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10.

            Mouais, la je vais botter pas mal en touche…

            De la lecture de l'original (et non pas du journal qui ne dit absolument pas la même chose), je comprend que c'est la notion commerciale qui importe et que "open source" semble avoir été mis la que pour faire plaisir à certains, il semble ne rien apporter (le logiciel open source non gratuit semble inclus, et le gratuit non open source exclut).

            Maintenant, quand je regarde mon cas je me demande ce qu'il va en être, étant donné que je file mes logiciels gratuitement (donc exclu?) mais fournit des développements d'évolution pas gratuitement (donc inclus? Mais pour qui, mon client ou tout le monde?). Mais que je file aussi un service d'installation facile via Mac App Store pour 1 € symbolique (je fais payer la facilité d'installation, du coup si le logiciel merde c'est lié ou pas au service d'installation?).

            Bref, ça va être un enfer à délimiter, oui! Et je ne m'engagerai pas à affirmer ce qui relève de la directive et ce qui n'en relève pas.

            • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

              Posté par  . Évalué à 6.

              Si je comprends bien ta situation, tu gagnes ta vie grâce à un logiciel que tu distribues gratuitement, en te rémunérant sur des services associés. Donc, bien que le logiciel ne soit pas vendu, il fait partie d'une stratégie commerciale avec une finalité lucrative. On est donc pleinement dans le champs du produit commercial, même si des personnes en bénéficient gratuitement. Dès lors, les critères "free and open-source", quelle que soit leur interprétation, ne s'appliquent pas. Ton produit phare est un logiciel compilé, donc tu ne bénéficies en général pas non plus de l'exemption qui concerne le code source.

              La proposition de loi précise bien que la responsabilité du fait du produit n'est pas tributaire d'un lien contractuel entre la victime et le fournisseur du produit (p. 4).

              Donc quelqu'un pourrait télécharger ton logiciel gratuitement, subir un préjudice associé à son utilisation, et porter plainte pour obtenir des dommages et intérêts.

              Ça pourrait remettre en question le modèle économique de nombreuses SSLL, il y a là un lobbying à faire qui serait tout à fait entendable par les personnes qui proposent la loi.

              Cela dit, je ne suis pas juriste, je préfère préciser :)

              • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

                Posté par  (site web personnel) . Évalué à 5.

                il fait partie d'une stratégie commerciale avec une finalité lucrative. On est donc pleinement dans le champs du produit commercial, même si des personnes en bénéficient gratuitement.

                Bah, si tu me cherches avec ça, ça me coûtera un peu plus cher en paperasse mais il y aura une asso à but non lucrative montée pour faire écran, mon entreprise n'aura aucun lien avec cette asso (je file du code sur mon repo entreprise en libre non compilé, l'asso ne fait que le récupérer sans aucun lien commercial) donc impossible d'être responsable de quoi que ce soit, et voila.

                A noter que je n'inventerai rien de nouveau, c'est déjà le mode de fonctionnement de pas mal de logiciels libres pour que les "anti-capitalistes anti-systèmes anti-etc" se la pètent à participer à une "aventure contre les méchants" en fermant les yeux (il n'y a pas plus aveugle que ceux qui ne veulent pas voir, pratique) sur le business qui fait vivre le logiciel libre.
                Et même ça marche ailleurs de manière similaire, par exemple des trackers de bourse qui reflètent le marché américain tout en étant compatible PEA réservé aux actions européennes, il y a même un contrat de "swap" et le législateur ne trouve rien à redire, c'est marqué européen donc ça va c'est tamponné.

                Non, ce n'est pas si évident du moment où on met des "exceptions"…

                • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

                  Posté par  . Évalué à 2.

                  il y aura une asso à but non lucrative montée pour faire écran

                  Oui, ça doit pouvoir marcher :D Cela dit, je préférerais une loi mieux faite, et c'est sans doute encore possible. En réalisant un montage visant à contourner une loi, on cautionne un peu tous ceux qu'on pointe si volontiers du doigts et qui utilisent le même genre de dispositifs : trafiquants de drogue, ultra-riches, esclavagistes, …

          • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

            Posté par  . Évalué à 4.

            Je crois que je me suis mal exprimé : la directive semble ne pas avoir fait la même confusion que le journaliste et c'est ça qui me rassure. Maintenant en pratique je suis d'accord que la mise en pratique ne sera pas simple.

          • [^] # Re: Pas d'accord avec le point 2

            Posté par  . Évalué à 5.

            Autre cas potentiellement problématique : une boite développe un truc pour un usage en interne, décide de le libérer. On entre dans quel cas ?

  • # Des activités commerciales

    Posté par  . Évalué à 7.

    Comme dit plus haut, cette proposition législative ne semble pas parler des logiciels libres, mais plutôt des logiciels gratuits développés ou fournis hors de toute activité commerciale. La question est donc celle de la définition de l'activité commerciale.

    En France, il y a un corpus de textes qui en donnent une définition : c'est la doctrine fiscale concernant les organismes sans but lucratif. Cela concerne principalement les associations à but non lucratif. Il n'y a pas de lien direct entre les associations et les activités commerciales mais, dans une logique de cohérence juridique avec une doctrine bien établie, je m'autorise à penser que la définition donnée pourrait s'appliquer dans d'autres contextes sans modification significative.

    Je cite en adaptant le contexte, je vous épargne des détails de raisonnement qui ne vous intéresseront sans doute pas :

    570) Le fait qu'[une activité] à but non lucratif intervienne dans un domaine d'activité où coexistent des entreprises du secteur lucratif ne conduit pas ipso facto à [en faire une activité commerciale]. Il convient en effet de considérer l'utilité sociale de l'activité, l'affectation des excédents dégagés par l'exploitation, les conditions dans lesquelles le service est accessible, ainsi que les méthodes auxquelles l'organisme a recours pour exercer son activité.

    En résumé, la gestion de l'activité doit être désintéressée et, si elle concurrence des organismes du secteur lucratif, elle doit respecter la règle des 4P :
    * Produit répondant à un besoin insuffisamment pris en compte
    * Public bénéficiaire désavantagé socialement ou économiquement
    * Prix nettement inférieur à ceux du marché
    * Publicité : moyens de promotion mis en œuvre modérés, par exemple pas de recours à la publicité payante

    Les critères sont appréciés dans cet ordre hiérarchique. Il y a un certain nombre d'exceptions, mais en gros, on s'en fiche.

    Cela peut donner des indications pour savoir si une ressource sous licence non commerciale est employée dans un usage commercial : par exemple, si c'est un bout de code réutilisée dans un logiciel édité par une asso pour aider les proches des victimes de morsures de canards, c'est ok. Si c'est un thème graphique pour un navigateur internet gratuit, c'est envisageable. Si c'est une image de chat imprimée sur des mugs vendus sur Amazon, c'est pas ok.

    Il ne s'agit là que d'une généralisation personnelle d'une doctrine, mais je trouve cette doctrine assez pertinente pour ceux qui s'intéressent à ce genre de licence.

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