Lors d'une visite chez mes grand-parents aujourd'hui, je suis tombé par le plus grand hasard sur le numéro 3117 de La vie, hebdomadaire chrétien d'actualité (26 mai 2005). Je le parcours rapidement et me retrouve face à un personnage vêtu d'un t-shirt orné d'un manchot, une pince à la main, regardant l'oiseau fait de 1 et de 0 fuir la cage que l'homme vient d'ouvrir.
Étonné. Je parcours le texte en face, et je vois le mot « Linux ».
Surpris. Je remonte quelques pages en amont pour découvrir le titre de l'article : « Gratuit par-dessus le marché », dans la rubrique « biens culturels.»
Sur la couverture : « Dossier : Le tout gratuit va-t-il tuer la culture ? ». Je crains alors le pire. Cette question m'a tout l'air d'une question rhétorique. Je me lance malgré tout dans la lecture de l'article entier.
Cet article de Frédéric Théobald présente ce qui est gratuit dans le domaine de la culture, et donc de la musique. Définition du gratuit : le gratuit n'existe pas pour le consommateur. Il paye forcément à un moment ou un autre quelque chose en relation avec ce qu'il télécharge, c'est à dire un abonnement à un fournisseur d'accès, un cd vierge etc. Frédéric annonce ensuite « Un détour s'impose toutefois par les maisons de disques ». Chez elles, le discours est toujours le même, vous le connaissez : télécharger, c'est le mal. « Le pirate » est qualifié de profiteur, qui abuse et ne sait pas s'arrêter, et les « pirates » qui achètent malgré tout de temps en temps sont « rares ».
L'accent est ensuite mis sur les difficultés, voir l'impossibilité de gérer ces fichiers qui transitent sur internet. Le tout est entouré d'encadrés divers où tous les points de vues sont représentés : Guillaume, qui prône la découverte de nouveaux artistes grâce à internet et qui déclare acheter plus qu'il ne télécharge. Ou encore Daniel qui « refuse de payer quelque chose qu'il peut se procurer gratuitement », qui dénonce les prix exorbitants des sites de téléchargements légaux, le double jeu de l'industrie qui brade graveurs et cds vierges et qui nous interdit de s'en servir. Point de vue également d'Aziz Douzan , président de l'association des audionautes qui propose une aide juridique et financière aux téléchargeurs assignés en justice.
Réflexion. « Comment concilier légitime rémunération des auteurs et progrès technique? Peut-on rêver d'une gratuité qui ne tienne pas de la pure utopie? ». C'est là que nous entrons en scène. Un paragraphe entier sur le modèle libre, « du partage, de la libre circulation du savoir et des oeuvres de l'esprit. Une vision du monde à rebours de celle des multinationales, les Pfizer, Monsanto ou Microsoft [...] » Petit détour par le monde de Wikipedia, avant de parler économie du libre avec le PDG de Linagora, Alex Zapolsky. Le libre, ça marche, on fait des sous et les autres des économies sur les licences. La communauté est présentée comme un atout, par sa réactivité à remettre en cause le code. Le paragraphe conclue par « [Le libre est] nécessaire si la France entend préserver son indépendance technologique vis-à-vis des éditeurs de logiciels dits "propriétaires", majoritairement américains.»
« Mozart, premier des pirates». Deux modèles s'affrontent et chacun y va de son représentant, avec comme interrogation « le modèle Linux est-il transposable aux oeuvres culturelles ? ». On se prend alors à rêver d'un internet territoire libre de droit. Vient alors le copyleft, qui permet à chacun « d'écouter, d'enregistrer, de modifier, d'enrichir à conditions de citer le créateur original. » « C'est aussi un moyen pour les jeunes auteurs de diffuser leur musique et de se forger une réputation. » Bref, tout paraît clair, limpide et surtout possible.
L'article se termine par ces mots, que je trouve intéressants. Leur place à la fin de l'article n'est évidement pas anodine... « Mais dans un monde capitaliste gouverné par le profit, cette abondance qu'autorise le progrès, loin d'être une bénédiction, relève pour certains d'une malédiction. Cherchez l'erreur. »
Nous avons donc ensuite le droit à deux autres encadrés qui poursuivent cette idée de donner la parole à tout le monde. Le premier est celui d'Emmanuelle, qui annonce lire tous les jours les journaux gratuits Lillois et acheter ensuite un journal payant pour approfondir l'information. Tout le monde y trouve donc sont compte. L'autre encadré met en avant l'injustice qui frappe « un érémiste de Rennes, ou encore un enseignant, Alain » obligé de payer 10 200¤ de dommages et intérêts, « jugement, loin d'être dissuasif, [qui] a provoqué un tollé. »
La dernière page est une interview d'un sociologue, Jean-Louis Laville, « spécialiste des systèmes alternatifs en économie. » Son point de vue est intéressant. Il dresse un tableau d'une gratuité qui « crée de la valeur parce qu'elle renforce le lien économique et social », d'une gratuité synonyme de rébellion face aux tarifs exercés dans le domaine de la musique, face à la manière dont les oeuvres sont distribuées.
« La force des linuxiens c'est d'appartenir à un espace ouvert dans lequel les informations circulent publiquement. » Il pose finalement ce qui est à mon sens le vrai problème : « En réalité, ce qui est en cause avec la gratuité, ce n'est pas la dynamique, c'est le profit. »
Voilà donc pour le petit compte rendu. Je trouve l'article vraiment bien fait, car il me semble qu'aucun point de vue n'est oublié. L'article pose les vraies questions et pousse à la réflexion sur le système actuelle et à l'orientation qu'il devrait prendre. Un bon point pour ce Frédéric Théobald de La vie.
http://www.lavie.presse.fr(...)
# T'aurais mieux fait de scanner l'article ;-)
Posté par olosta . Évalué à 7.
Je l'ai lu ce dossier et c'est vrai qu'il est très bon, peu ou pas de mauvais raccourcis. Ca pourrait etre interessant de demander à "La Vie" si on a le droit de le reproduire pour voir si ils sont pret a s'engager dans la démarche eux même.
Pour ceux qui ne connaissent pas "La Vie", c'est un magazine chrétien (catholique même) qui appartient au même groupe que Le Monde. On peut ne pas être intéressé par les articles sur la religion mais leur approche des sujets de sociétés est souvent intéressantes et constructive. Ils ont de plus une grosse liberté par rapport à l'Eglise, si je me souvient bien ils avait très clairement fait campagne pour le PACS à l'époque ce qui devait être a contre courant d'une bonne partie de leur lectorat.
# Libre et religion?
Posté par kurun . Évalué à -2.
# Euh...
Posté par Florent Bayle (site web personnel) . Évalué à -2.
[^] # Re: Euh...
Posté par Thomas C. . Évalué à 1.
[^] # Re: Euh...
Posté par Florent Bayle (site web personnel) . Évalué à -2.
- Il faut que les admin s'en aperçoivent, et ils n'ont peut-être pas que ça à faire de regarder si il y a des journaux en double ou pas (surtout que dans ce cas les deux journaux ne sont pas juste à côté)
- Ça fait du travail pour les admins (imagine toi si chaque fois qu'une personne fait une erreur dans son journal elle le repostait
- De toutes façons, dans deux jours le journal n'apparaîtra plus sur la page des journaux, donc à part une ou deux personnes tombant dessus sur google, il ne sera quasiment plus lu passé ce délais
En fait l'idéal serait de pouvoir éditer les journaux (enfin, pour éviter les abus de journaux changeant du tout au tout, ce serais bien de limiter les modifications possibles).
[^] # Re: Euh...
Posté par jerome (site web personnel) . Évalué à 2.
Je pourrais le supprimer, mais je pense que je vais plutôt le laisser dans ce cas.
Sinon, une approche plus pertinente pourrait être de contacter les modéros/admins/relecteurs par mail (moderateurs@) ou par le système de messagerie intégré.
De même pour les remarques de forme, autant les faire par le système de messagerie, ça n'intéresse pas grand monde et c'est plus efficace !
[^] # Re: Euh...
Posté par B16F4RV4RD1N . Évalué à 1.
Only wimps use tape backup: real men just upload their important stuff on megaupload, and let the rest of the world ~~mirror~~ link to it
[^] # Re: Euh...
Posté par M . Évalué à 2.
M'enfin le concepte n'a pas pris..
# Hors des sentiers battus
Posté par DocteurCosmos . Évalué à 2.
Mon avis (à 2 centimes d'euro) : on gagne toujours à lire des magazines portés par un courant de pensée exotique.
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