Interview de Christine Peron des Ordis libres

Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Édité par Davy Defaud et ZeroHeure. Modéré par Davy Defaud. Licence CC By‑SA.
27
29
août
2019
Culture

Christine Peron fait partie de l’équipe des Ordis libres, une association qui a réalisé une exposition du même nom sur le thème des libertés numériques et qui tourne dans toute la France. L’exposition a, bien évidemment, été réalisée uniquement avec des logiciels libres. On pourra la voir le 20 septembre 2019 à la Digital Week de Nantes.1

Les Ordis libres


  1. [N. D. L. R.] N’hésitez pas à aller voir l'exposition. Elle est intéressante et vraiment bien faite. Je ne pensais pas qu’on pouvait faire quelque chose d’aussi chouette avec Draw. 

Tu as réalisé l’exposition « Les Ordis libres », peux‐tu la présenter ?

Il s’agit d’une exposition sur les logiciels libres et plus largement sur les nouvelles pratiques numériques. Notre objectif est de rendre les citoyens un peu plus autonomes et maîtres de leurs outils numériques. Notamment en se posant des questions sur les enjeux et les conséquences de certaines pratiques. Nous essayons d’être accessible à tous. L’idée est de rendre simple des concepts techniques, via des comparaisons avec des recettes de cuisine, par exemple. Il ne suffit pas de cliquer quelque part pour comprendre et maîtriser ce que l’on fait. Par exemple, quel rôle joue votre fournisseur d’accès Internet ? Est‐ce si important d’utiliser des formats ouverts alors qu’il semble si simple d’utiliser des fichiers de type .xls, format propriétaire ? Et, évidemment, le premier panneau donne la définition d’un logiciel libre. Contrairement à une croyance courante, la gratuité ne fait pas partie de la définition d’un logiciel libre, même si elle en est souvent une conséquence. Et un logiciel gratuit n’est pas nécessairement libre.

Panneau de titre de l’expo

Où peut‐on la voir ?

L’exposition comprend quatorze panneaux et est disponible sur notre site www.lesordislibres.fr. Les fichiers sont disponibles en deux formats, ODG et PDF, et sont sous licence CC-by-SA (pour tout savoir sur la licence CC-by-SA, voir le panneau sur les licences).

Elle est aussi disponible sous forme de panneaux imprimés sur bâche au format A0 (1,20 m × 84 cm). Elle est prêtée gratuitement, envoyée par la poste, contre une caution non encaissée. Tous les détails sur cette page.

Les endroits où elle est exposée sont en page d’accueil du site.

À partir de quels logiciels l’avez‐vous conçue ? Cela a‐t‐il été facile ? Pourquoi ces logiciels ?

LibreOffice Draw. Nous avons hésité entre Draw et Inkscape. Draw nous a semblé plus adapté et plus simple d’utilisation, ne nécessitant pas une formation importante pour des gens maîtrisant LibreOffice Writer et ayant l’habitude de faire de la mise en page. Draw est très adapté pour ce genre de travail où il faut manipuler du texte et des images.

Le choix des polices, étonnamment, nous a demandé du temps. Je précise que nous ne sommes pas graphistes et que nous ne travaillons pas dans l’édition.

À quelle périodicité la mettez‐vous à jour ?

En général une fois par an. Soit par rajout de panneaux, soit en améliorant le contenu de certains. La date est indiquée sur les panneaux. Nous réfléchissons à un nouveau panneau « C’est quoi une distribution GNU/Linux ? ».

Quels retours avez‐vous de l’exposition ? Pensez‐vous qu’elle a une certaine efficacité ?

En général, le retour est très bon ! Suivant le contexte, il arrive que les personnes la découvrent simplement en passant devant. Ils se mettent à lire mais n’ont pas le temps d’aller au bout. C’est pour cela que le livret (copie conforme de l’expo, au format A5) nous est très souvent demandé. Notre souci est plutôt qu’elle n’est pas assez connue. :-)

Les ordis libres c’est aussi une association. Quelles sont ses autres actions ?

Même si l’exposition reste notre principale occupation, deux importants projets ont été réalisés : un jeu et une vidéo de sept minutes sur les formats ouverts et propriétaires. Le jeu consiste à amener au port tous les bateaux représentant un format ouvert. Il a été réalisé avec GDevelop, logiciel libre.

Le jeu

À plus long terme, nous aimerions développer des formations autour de la suite LibreOffice.

Penses‐tu que la défense du logiciel libre est aussi une forme d’action politique au sens « Qui a rapport à la société organisée » pour reprendre la définition du CNRTL (donc, rien à voir avec la politique politicienne, les partis politiques et les élections mais plus avec une forme d’éthique) ?

Oui, complètement et c’est aussi le sens de notre exposition. Utiliser Google systématiquement comme moteur de recherche, avoir une adresse Gmail et n’utiliser que des logiciels Google ou Microsoft a des conséquences très concrètes. Payer automatiquement des licences propriétaires (via l’achat d’un PC déjà tout équipé) aux premiers milliardaires de la planète nous pose question. Nous préférons le partage. Nous aimerions que des instances publiques se développent pour mettre à disposition de tous, des services en ligne publics : serveur de messagerie, hébergement de sites, agenda en ligne, album photos en ligne…

Au niveau professionnel (ou associatif, à préciser), quels logiciels libres utilises‐tu, sur quel système ?

Au travail (jusqu’à récemment, puisque je viens tout juste d’arrêter de travailler) : la suite LibreOffice et Firefox sous Windows.

À titre associatif : LibreOffice, QGIS (système d’information géographique libre et open source).

Quelle est ta distribution GNU/Linux préférée et pourquoi, quels sont tes logiciels libres préférés ?

Linux Mint, entre autres pour son interface de gestion, mais j’utilise Xubuntu ! Je viens de changer récemment. J’ai eu des soucis pour la configuration de matériel avec Linux Mint et Mageia. J’ai essayé de dépanner, sans succès. Je suis ensuite allée au plus simple, Xubuntu marchait, je l’ai laissé et je le personnalise régulièrement en fonction des besoins. Je trouverais agréable que chaque distribution informe clairement quels sont les logiciels installés par défaut. C’est un peu la découverte à chaque installation !

Mes logiciels préférés : QGIS, Draw, Digikam/XnView. QGIS est mon préféré, c’est un logiciel de cartographie (mon métier), un véritable couteau suisse, très puissant et très agréable.

Quelle question aurais‐tu détesté qu’on te pose (en espérant que je ne l’ai pas posée) ?

Peut‐on se passer d’une adresse gmail.com ? Oui, mais ça complique la vie ! Je n’en ai pas. La conséquence est qu’installer des applications sur un ordiphone (smartphone) est compliqué. Je suis toujours scandalisée quand des services publics vous obligent à télécharger leurs applis uniquement sur Play Store ou App Store.

C’est comme si en arrivant sur l’autoroute, on vous disait « Ah, vous avez une Renault, ce n’est pas possible. Pour prendre cette autoroute, il vous faut une Ford ou une Volkswagen ! ».

Inimaginable et pourtant !

Quelle question aurais‐tu adoré qu’on te pose (évidemment, tu peux y répondre) ?

Pensez‐vous que le Libre a de l’avenir ? Oui, bien sûr ! Cela demande des efforts certains, mais c’est tellement motivant de savoir qu’on participe à une amélioration de notre société sur des valeurs de partage et de solidarité. On ne reste pas passif et on ne subit pas, c’est réconfortant.

Merci beaucoup Christine.

Aller plus loin

  • # suggestions pour une v2

    Posté par  . Évalué à 2.

    Belle réalisation, il est toujours difficile de vulgariser en quelques planches un domaine aussi vaste, voici quelques pistes d'améliorations:

    • Sur la définition du logiciel libre via ses 4 libertés (inspiration GNU donc), rajouter un élément clé: le droit de diffuser la version originale ou une version modifiée. La séparation de ce droit des 4 libertés a peut être à voir avec la notion droit d'auteur / licence, et si les 4 libertés sont concédées via le droit d'auteur, …(hors sujet),

    Ce qui permettrait de préciser la restriction imposée par la GPL: le copyleft et donc de définir ce terme bizarre utilisé plus loin. Voire de ne pas l'utiliser.

    La GPL n'est pas "la mère de toutes les licences libre", ni la plus ancienne (MIT?), ni la plus utilisée. C'est juste celle qui fait le plus de prosélytisme, parce que c'est la plus contraignante. (*)

    • Sur internet: le terme "réseau en étoile" est-il adapté ? Ou simplement "réseau de réseaux" ? Et sa spécificité serait que le choix des "routes" pour acheminer l'information n'est pas préétabli et statique. D'où ses qualités.

    • Sur le le droit d'auteur et les licences, dommage d'utiliser ce terme américain "copyright" d'autant plus difficile à définir que juridiquement, bof.

    (*) On est vendredi, il serait aussi possible de préciser qu'un logiciel GPL est dit "prévaricateur", au sens ou il peut s'approprier le bien commun (du code disponible librement sous MIT, BSD, voire domaine public) et de restreindre ensuite l'usage des modifications à la communauté GNU/GPL. On peut d'ailleurs questionner la notion de "compatible GPL" utilisée par cette communauté, qui désigne une compatibilité à sens unique.

    • [^] # Re: suggestions pour une v2

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 1.

      Merci pour ce retour.
      Pour le terme copyright, effectivement le terme français est le droit d'auteur, mais c'est un terme qui parle à tout le monde. On pourrait le préciser la prochaine fois et retravailler ce que vous précisez sur les licences.

      A suivre donc.

      • [^] # Re: suggestions pour une v2

        Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 0. Dernière modification le 03 septembre 2019 à 08:36.

        Copyright et droit d'auteur ne sont pas synonymes.

        Le droit d'auteur protège très fortement les droits moraux de l'auteur et est relativement moins axé sur les droit patrimoniaux. Le copyright est surtout centré sur les droits patrimoniaux et beaucoup moins sur les droits moraux de l'auteur qui peut s'en trouver privé du fait des conventions passés avec les éditeurs alors que, dans le cadre du droit d'auteur, les droits moraux sont incessibles.

        En outre, le copyright exige, pour en bénéficier, que l'auteur soit inscrit en tant que tel sur des registres spécifiques. Le droit d'auteur, tel qu'il est défini en France et en Europe (sauf pour le Royaume-uni dont le droit d'auteur est très proche du copyright, un effet d'une langue qui assimile liberté et argent ?) exige uniquement que l'auteur puisse faire la preuve qu'il est bien l'auteur de l'œuvre.

        Le copyright implique enfin d'être renouvelé périodiquement, sous peine de perdre les droits sur l'œuvre. Le droit d'auteur a une durée fixée par la loi et reste valable tout ce temps.

        Ce sont deux notions différences qui se basent sur des conceptions différentes.

        « Tak ne veut pas quʼon pense à lui, il veut quʼon pense », Terry Pratchett, Déraillé.

        • [^] # Re: suggestions pour une v2

          Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 8. Dernière modification le 04 septembre 2019 à 13:28.

          Copyright et droit d'auteur ne sont pas synonymes.

          Alors soyons clair, "copyright" et "droit d'auteur", c'est kif kif. L'un est juste le terme francophone, et l'autre le terme anglophone (du moins ceux de Common Law, mais bon il se trouve que ce sont des pays anglophones puisque ça vient de la colonisation anglaise), c'est tout.

          Alors oui, bien sûr que notre droit d'auteur français a ses différences (parfois plus ou moins grandes) avec le copyright états-unien… de même que le droit d'auteur a des différences avec le "Diritto d'autore" (le terme italien d'après Wikipédia), ou même que le copyright américain est différent du copyright anglais. Ce sont des pays différents, avec des constitutions et des lois différentes. Bien sûr que ça diffère!
          En Europe, on sait pertinemment que les différents droits d'auteurs entre pays européens sont trèèès loin d'être bien harmonisés d'ailleurs (une tentative d'harmonisation, aussi bien des durées, que des exceptions et des redevances avait été tentée par la politicienne Julia Reda; mais la plupart des amendements en rapport avec l'harmonisation ont d'ailleurs été rejetés ou fortement dilués).

          Il n'empêche que les divers droits d'auteur de divers pays autant que les copyrights d'autres sont (de nos jours) des ensembles de lois pour empêcher l'usage simple par des tiers d'œuvres dites "de l'esprit". Ensuite chaque pays adapte ça à son système et avec ses différences, et son histoire, c'est tout. De ce point de vue là, oui c'est différent. Mais pas parce que l'un s'appelle "copyright" et l'autre "droit d'auteur". Hormis l'implémentation, soyons clair, si, c'est la même chose.

          Pour en rajouter une couche, y a d'ailleurs eu de l'harmonisation même entre pays utilisant les termes copyright et droit d'auteur (lire un peu à ce sujet de la Convention de Berne, avec l'usage des deux termes. Car oui, c'est bel et bien la même chose nommé différemment).

          Le droit d'auteur protège très fortement les droits moraux de l'auteur et est relativement moins axé sur les droit patrimoniaux.

          Ok alors c'est un truc que j'ai remarqué sur des blogs ou forums français, on aime bien se dire que notre droit d'auteur, ben il est tout beau et tout mieux et il est fait pour protéger les pauvres petits artistes, alors que le méchant copyright, il est juste fait pour les intérêts financiers des méchantes corporations (a.k.a. droits patrimoniaux). Normal, les américains utilisent quoi! 🙄
          Bon là je vais te laisser le bénéfice du doute car tu ne dis pas clairement cela au moins, mais bon. 😛

          Alors déjà, mettons une chose au clair (je le précise, même si je suis pas sûr si c'est ce que tu sous-entendais, mais au moins ce sera clair pour tous): les droits patrimoniaux sont (comme le nom l'indique) le droit sur votre patrimoine. Techniquement (dans le cadre du droit d'auteur, car y a d'autres cadres) ça veut dire qu'en effet, c'est bien votre droit de faire business avec vos œuvres de l'esprit, donc d'obtenir de l'argent pour une diffusion ou copie d'œuvre. Et donc déjà soyons très clair: faire de l'argent avec le résultat de son travail, ce n'est pas une mauvaise chose aux dernières nouvelles! (Ensuite clairement oui un système plus juste serait qu'on puisse faire de l'argent avec son travail à la place du résultat du travail, comme le font la plupart des gens; ce serait un système bien plus juste pour 99% des créateurs d'œuvres de l'esprit. Mais je diverge, je vais me contenter dans ce commentaire de rester neutre et de parler du système tel qu'il est actuellement sans prendre partie)

          Donc ensuite:

          Le copyright est surtout centré sur les droits patrimoniaux et beaucoup moins sur les droits moraux de l'auteur qui peut s'en trouver privé du fait des conventions passés avec les éditeurs alors que, dans le cadre du droit d'auteur, les droits moraux sont incessibles.

          Comme je l'expliquais, les droits patrimoniaux sont la partie du droit d'auteur qui vous permet une rémunération, absolument pas le droit moral! Le fait que certains essaient d'extorquer de l'argent avec le droit moral (car il est perpétuel en France) une fois les droits patrimoniaux expirés (70 ans après mort de tous les auteurs, en France + plein d'exceptions permettant d'étendre pas mal) n'est pas la même chose que la rémunération normale permise par les droits patrimoniaux (on en arrive à ce type d'aberration où l'arrière-arrière petit-fils de Victor Hugo tente d'empêcher l'écriture de suites de livres de son ancêtre, dans le but évident d'obtenir de l'argent; notons qu'il a été débouté — heureusement — mais surtout car on a retrouvé des textes de Victor Hugo qui était finalement très libriste pour l'époque). Enfin bon pour moi le droit moral français est une horreur (oups, je devais rester neutre!).

          Revenons donc à nos moutons: donc non, tu confonds tout. En France, pour te faire rémunérer des droits d'auteur, c'est bien les droits patrimoniaux que tu négocies, jamais les droits moraux. Et ces droits sont tout à fait cessibles (note bien qu'un auteur bien informé ne les cède que partiellement, en général en précisant une durée, une zone et des supports de diffusion). Tu peux tout aussi bien te faire avoir, par un éditeur ou autre, en France qu'ailleurs de ce point de vue là.

          Les droits patrimoniaux sont très importants dans le droit d'auteur, en fait c'est la partie des droits la plus important pendant le vivant de l'auteur et 70 encore après. C'est quasiment la seule partie des droits utilisées par les gens pour vivre d'œuvres. Affirmer que "moins axé sur les droit patrimoniaux", c'est n'importe quoi et est une méconnaissance totale du droit d'auteur français. Désolé de te dire cela ainsi. 😛

          En outre, le copyright exige, pour en bénéficier, que l'auteur soit inscrit en tant que tel sur des registres spécifiques.

          Alors là encore, absolument pas! Si ça avait été le cas, le logiciel libre ne pourrait pas fonctionner. Si je me souviens bien d'ailleurs, c'est même un des prérequis de la Convention de Berne citée plus haut (c'est à dire que c'est ainsi dans quasi tous les pays du monde, pays utilisant le Copyright compris, depuis presque un siècle et demi!).

          Le droit d'auteur, tel qu'il est défini en France et en Europe (sauf pour le Royaume-uni dont le droit d'auteur est très proche du copyright, un effet d'une langue qui assimile liberté et argent ?)

          Euh… au Royaume Uni, ils utilisent le Copyright, et non un "droit d'auteur […] très proche du copyright". Ensuite la remarque sur une langue qui assimile liberté et argent (hein?! D'où ça sort?) me semble extrêmement mal placée.

          Le copyright implique enfin d'être renouvelé périodiquement, sous peine de perdre les droits sur l'œuvre. Le droit d'auteur a une durée fixée par la loi et reste valable tout ce temps.

          Alors je suis sûr que le cœur y est quand tu racontes tout cela, mais je ne sais pas d'où tu sors tes informations. Le copyright fonctionne aussi par durée fixée par la loi. Il n'y a absolument rien à renouveler.

          Par contre peut-être parles-tu de la nécessité de fixation sur un support (et plus globalement sur la publication) pour pouvoir prétendre à un Copyright. C'est en fait une très bonne chose car cela empêche un éditeur de tenter de faire disparaître (exprès ou par négligence, ou parce que jugées pas assez rentables) des œuvres, ce qui est un des principaux problèmes du droit d'auteur comme du copyright. On se souvient tous de la découverte (récente) du très triste jour (beaucoup moins récent car ça avait été caché depuis 2008) où de nombreux enregistrements ont été brûlés dans un incendie chez Universal Music, emportant avec lui de nombreux enregistrements originaux, et beaucoup d'œuvres jamais publiées!

          Notons qu'on a aussi quelque chose en droit français où un ayant-droit peut théoriquement perdre ses droits s'il ne fait pas usage de ceux-ci (c'est à dire s'il ne publie pas, par exemple, délai à l'appréciation d'un juge, de même que la sentence exacte). Je cite l'article L121-3 du code de la propriété intellectuelle (le gras est de moi):

          En cas d'abus notoire dans l'usage ou le non-usage du droit de divulgation de la part des représentants de l'auteur décédé visés à l'article L. 121-2, le tribunal de grande instance peut ordonner toute mesure appropriée. Il en est de même s'il y a conflit entre lesdits représentants, s'il n'y a pas d'ayant droit connu ou en cas de vacance ou de déshérence.

          Le tribunal peut être saisi notamment par le ministre chargé de la culture.

          Notons que ce droit de divulgation fait partie des droits moraux, mais cela concerne les droits patrimoniaux, puisque la divulgation implique la publication, ce qui ne veut pas dire nécessairement contre rémunération au passage! On peut aussi s'imaginer qu'on doit pouvoir forcer un éditeur/producteur à publier des œuvres cachées alors qu'elles sont dans le domaine public avec cette loi (il n'est pas forcé de les publier gratuitement ceci dit).

          Quoiqu'il en soit, non ni le droit d'auteur ni le copyright ne demande d'enregistrement, et encore moins de "renouvellement". Par contre, oui il y a des obligations de faire usage de ses droits (pas si souvent respectées malheureusement) et c'est très bien! C'est un garde-fou contre les abus des ayant-droits, bien que peu utilisé.

          Peut-être aussi faisais-tu référence à la loi Mickey (de son nom moins trollifère "Copyright Term Extension Act). Mais encore une fois, aucun rapport avec un enregistrement/renouvellement quelconque d'œuvres, juste avec des énormes groupes financiers capables de faire pression avec des lobbys sur les gouvernements pour étendre le droit d'auteur (qui a bien une durée dans les pays avec Copyright, comme avec le droit d'auteur).

          Ce sont deux notions différences qui se basent sur des conceptions différentes.

          Je me répète donc. Elles se basent sur un historique dans des pays différents, c'est tout. Mais dans les deux cas, c'est à propos des droits sur ses œuvres de l'esprit. C'est absolument la même chose.

          Je conclurai en disant que je trouve absolument contre-productif de toujours croire qu'on a un super droit d'auteur en France, pas comme ces méchants avec le Copyright. Encore une fois, je ne suis pas sûr que c'était ce que tu disais, ce n'est pas clair mais ça en avait un peu l'allure. Si ce n'était pas ton propos, ça reste une chose importante à dire pour les autres car j'ai noté ce truc très franco-français de croire que le droit d'auteur français, il est tout beau tout propre, contrairement au méchant copyright américain. Un argument très courant, c'est aussi de dire «bah d'ailleurs regarde, y a le mot "auteur" dedans, ça veut tout dire» 🙄; oui c'est un peu comme dire que les caméras de surveillance euh… protection, c'est vraiment pour protéger (novlangue?)!
          La vérité, c'est qu'on a un droit d'auteur très fort en France, car historiquement commencé tôt, avec de gros lobbys et pas mal d'organisations (notamment les organismes de gestion de droits font leur beurre sur le droit d'auteur et font tout pour qu'il soit le moins juste possible, car cela engraisse davantage les intermédiaires, c'est-à-dire eux-même) pour le défendre et surtout répandre de fausses idées (je pense que toutes ces images sur le droit d'auteur vs copyright viennent de là; je reçois moi même régulièrement des courriers très orientés de ces organismes qui font clairement du lobbying auprès des créateurs d'œuvres de l'esprit ou de détenteurs de droits voisins). À chaque fois qu'y a des tentatives d'améliorations dans le bon sens, que ce soit en France ou en Europe, les députés français sont parmi les premiers à monter au créneau pour tout faire capoter (cf. encore le rapport Reda où les députés français étaient parmi les principaux adversaires). Il n'y a pas de quoi être fier.

          Je finirai en parlant d'un texte de Stallman qui parle du copyright US. Il explique notamment qu'originellement le copyright fut créé en faveur non des auteurs (encore moins des éditeurs), mais des gens qui reçoivent (lire, écouter, utiliser, etc.) parce qu'il est important que les sciences et l'art soient promus (c'est à dire qu'on veut répandre la connaissance). Le copyright n'était donc qu'une autorisation à exclusivité, pour durée temporaire, pour permettre aux auteurs de vivre, tout en prenant en compte que cela ne doit pas empêcher à l'art de se répandre. En gros, c'est une super belle origine (et bien plus belle que celle du droit d'auteur selon moi).

          Mais bon, plutôt que faire mes propres paraphrases, voici les citations que donne aussi Stallman:

          La constitution des États-Unis (Article 1 - section 8):

          [Congress shall have the power] to promote the Progress of Science and the useful Arts, by securing for limited Times to Authors and Inventors the exclusive Right to their respective Writings and Discoveries.

          La cour suprême (je rappelle qu'en Common Law, la jurisprudence fait office de loi, donc une décision de cour suprême est particulièrement importante):

          The sole interest of the United States and the primary object in conferring the [copyright] monopoly lie in the general benefits derived by the public from the labors of authors.

          Donc en gros: on est conscient que ces créateurs doivent en vivre (d'où le copyright), mais il ne faut pas oublier qu'au final, on œuvre dans l'intérêt du public.

          Voilà pour finir, histoire de rompre une fois pour toute (espérons) que Le copyright serait pire que le droit d'auteur, voire carrêment qu'il aurait des bases purement pécuniaires (c'était l'inverse, comme prouvé ici!), parce que ce seraient de vils capitalistes, blablabla.

          Notons enfin que je ne suis pas là pour défendre le copyright. Droit d'auteur tout comme copyright sont juste tout aussi mauvais de nos jours pour moi. Je ne fais qu'essayer de rétablir quelques faits pour ceux qui veulent absolument (pourquoi?) vouloir y faire une différence fondamentale, voire ceux qui vont souvent essayer de donner une meilleure aura à l'un en pourrissant l'autre (c'est — je pense — d'ailleurs la raison principale de ces images, et propager ces on-dit ne fait que faire le jeu des lobbys car cela permet de ne pas faire le ménage devant sa porte parce qu'on est occupé à regarder par la fenêtre du voisin).

          Film d'animation libre en CC by-sa/Art Libre, fait avec GIMP et autre logiciels libres: ZeMarmot [ http://film.zemarmot.net ]

          • [^] # Re: suggestions pour une v2

            Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à -1. Dernière modification le 04 septembre 2019 à 13:33.

            Je ne confonds pas tout ! je sais très exactement la différence entre les droits patrimoniaux et les droit moraux et je sais aussi pertinemment que seuls les premiers ouvrent à rétribution. Mais les seconds sont également importants et à signaler et, en France ils sont incessibles.

            Que tu donnes une leçon, je veux bien, mais pas en ayant lu un mot sur deux et en ayant un a priori négatif (oh l'imbécile qui ne sait pas) et ça c'est assez agaçant.

            « Tak ne veut pas quʼon pense à lui, il veut quʼon pense », Terry Pratchett, Déraillé.

            • [^] # Re: suggestions pour une v2

              Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 7. Dernière modification le 04 septembre 2019 à 14:25.

              Uh? Pourquoi cette réaction?

              Je n'ai pas lu un mot sur deux (je pense même avoir cité tout ton message). À la base, je répondais principalement à l'affirmation comme quoi c'était des notions différentes, et ensuite j'étayais sur d'autres choses que tu disais, donc certaines que j'avais l'impression que tu sous-entendais, sans pour autant être sûr que c'est bien ce que tu sous-entendais (ce que je précisais). Mais je me disais que cela restait des infos utiles de toutes façons, si ce n'est à toi, au moins à d'autres (ça reste un forum public que plein de gens lisent). Je répondais de manière générale à des idées qu'on lit beaucoup au sujet des gens qui comparent droit d'auteur et copyright. C'est le genre de choses qu'on fait sur des forums, d'élargir un sujet.

              Ensuite pour la leçon, oui peut-être qu'on peut voir cela ainsi. Je donne peut-être un peu une leçon, je peux comprendre que c'est l'image que ça donne. Personnellement je considérais juste faire un échange, une conversation (aussi une chose courante sur les forums), en certes donnant mon avis sur certaines choses et en partageant certaines connaissances (je rappelle tout de même que le droit d'auteur, c'est un peu la base de notre association pour l'Art Libre et qu'on baigne un peu dedans tous les jours; je pense que ce n'est pas totalement usurpé).

              Mais bon désolé si tu l'as mal pris. Ce n'était absolument pas le but. Je voulais juste échanger en tombant sur un début de discussion qui était totalement dans mon créneau. La prochaine fois, je me raviserai avant de répondre sur des sujets que je connais bien. 😕

              P.S.: par contre, je ne t'ai jamais qualifiée d'imbécile. Je veux bien m'excuser si tu prends mal le côté donneur de leçon, mais sûrement pas accepter une telle accusation. Je fais toujours attention d'écrire mes messages et textes le plus aimablement possible. Je suis absolument contre le type d'écriture conflictuel et considère que cela n'apporte rien (ensuite chacun son truc, je sais que d'autres considèrent cela comme efficace d'être dans le conflit en permanence). Mon but était juste de partager dans une discussion, et pas de t'insulter. Merci de ne pas faire de même (je considère cela assez insultant de dire que j'aurais asséné ce type de méchancetés en fait). 😢

              Film d'animation libre en CC by-sa/Art Libre, fait avec GIMP et autre logiciels libres: ZeMarmot [ http://film.zemarmot.net ]

              • [^] # Re: suggestions pour une v2

                Posté par  . Évalué à 1. Dernière modification le 04 septembre 2019 à 18:04.

                réaction d'un lecteur qui n'y connait rien, je ne comprends pas trop la réaction d'Ysabeau, et j'aurais aimé qu'elle explique en quoi Jehan se trompe ou en quoi il a mal compris ce qu'elle a dit, c'est toujours intéressant d'avoir des avis différents argumentés, et d'essayer de comprendre ou peuvent être les convergences et divergences, pour se faire une idée d'un sujet qu'on ne maîtrise pas.

                L'argumentation de jehan est crédible, on voit qu'il sait de quoi il parle, mais la première recherche que je fais semble aller dans le sens d'ysabeau : https://www.jurifiable.com/conseil-juridique/propriete-intellectuelle/copyright

                par exemple

                Quelles sont les différences entre le copyright et le droit d’auteur ?
                Le copyright relève d’une logique principalement économique. Il s’agit d’un droit d’exploitation. Il protège les personnes qui investissent dans la propriété intellectuelle (les producteurs, les employeurs…) plus que les auteurs de la création. A l’inverse, le droit d’auteur est un droit qui protège avant tout les créateurs. C’est la différence essentielle entre copyright et droit d’auteur.
                La conséquence principale de cette différence de fond, c’est que le droit moral a une importance beaucoup moins grande dans les pays appliquant le copyright. Le droit d’auteur, au contraire, insiste sur le lien fort qui existe entre l’auteur et son œuvre.
                Dans la conception du droit d’auteur, il existe un lien inaliénable, imprescriptible et perpétuel entre l’auteur et sa création, dans la mesure où l’œuvre est considérée comme consubstantielle à son auteur. C’est ce que l’on appelle le droit moral de l’auteur sur son œuvre. Un auteur ne peut pas céder ce droit à un tiers. Il est à ce titre inaliénable. Dans les pays où le copyright est en application, un auteur peut au contraire céder son droit moral. S’il le fait, l’acquéreur de ce droit détermine librement l’utilisation qu’il souhaite faire de l’œuvre.

                (ce qui ne veut évidemment pas dire que jehan a tort)

                • [^] # Re: suggestions pour une v2

                  Posté par  . Évalué à 1. Dernière modification le 04 septembre 2019 à 18:55.

                  Pour un logiciel, je crois que le droit d'auteur est "simplifié", le droit moral de l'auteur est très réduit par rapport au droit patrimonial (pas le droit de repentir ou d'interdire des modifications par exemple). Il ne reste en pratique que le droit inaliénable d'être reconnu comme auteur. Tout le reste est basculé vers le détenteur des droits patrimoniaux, qui très souvent n'est pas l'auteur.

                  D'où peut être l'usage de préciser 2 choses dans les entêtes de code: auteur (souvent nom et email) ET copyright (souvent une société). Du coup, en mode américain et dans le monde du logiciel, le copyright devient très proche de ce que nous avons en général ici comme "droit patrimonial", seul subsiste comme "droit moral" la paternité (authorship).

                  En bref, il n'est pas forcément nécessaire de faire une présentation complète du droit d'auteur dans le contexte informatique de la présentation.

                  Et ça se complique pour la GPL qui repose en partie sur le droit d'auteur (partie droit patrimonial/copyright américain) pour les 4 libertés et en partie sur le contrat (licence) pour la partie copyleft. La GPL a encore d'autres spécificités, bien sûr.

Suivre le flux des commentaires

Note : les commentaires appartiennent à celles et ceux qui les ont postés. Nous n’en sommes pas responsables.