Journal Liberticide et compagnie

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25
nov.
2005
Bonjour cher journal,

je m'interroge actuellement sur les projets de lois dites liberticides qui vont bientôt déferlées (exemple parmi tant d'autres : http://fr.news.yahoo.com/051125/206/4p22b.html). Ces lois partent d'un bon sentiment, la guerre sainte contre le terrorisme (il faut toujours un vrai méchant sinon ça ne se vend pas).
Lorsque j'évoque le problème autour du moi lié à la vidéo-surveillance, la réponse quasi immédiate est : "si tu n'as rien à te reprocher alors tu risque rien". Je ressens que cet adage est faux, mais je n'arrive pas à exprimer pourquoi ni trouver des exemples convaincants (à part peut-être "Bienvenu à Gattaca"). J'aimerai connaître vos parades à ces paroles de "sens commun" (TM Bush).

Sur les exemples trouvés, il est facile de rétorquer que ce sont des cas particuliers. Ne sont-ils pas tolérable si c'est pour le bien de la majorité ? Par exemple, la vidéo surveillance à Londre a permis des arrestations...

La liberté est vraiment un sujet compliqué :-(
Voir le récent journal : http://linuxfr.org/~mweber/20073.html et bien d'autres.
  • # comptes en banque

    Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 3.

    exemple :

    les mouvements d'argent sont des éléments qui peuvent permettre de débusquer entre autres la préparation d'attaque terroriste, c'est pourquoi le gouvernement à decider que vos comptes banquaires seront surveiller par l'ASCB.

    - quoi ? vous n'êtes pas d'accord ? vous avez quelque chose à vous reprochez ?
    - non, j'ai juste pas envie qu'on respecte ma vie privée. Et l'état de mon compte bancaire ne regarde que mon banquier et moi.

    M.
  • # "sens commun"

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10.

    si tu n'as rien a te reprocher tu ne risques rien est un precepte de la chretienneté.

    Si tu reprends d'un point de vu historique, ce precepte est mis en exergue essentiellement dans le discours occidental depuis ... un peu avant la renaissance.

    Moment, très interessant puisque cela correspond à l'officialisation de plein de concept très tendance depuis :
    - les femmes c'est mal ( et donc interdiction de precher, d'etudier aux femmes depuis )
    - les juifs déicides ( encore d'actualité malgré le concile Vatican II durant les années 60 )
    - si tu es dans la merde, c'est que dieu te puni alors vient te repentir vilain

    cette 3ieme proposition a toujours cours sous des versions assez subtil :
    - si tu es pauvre, au chomage c'est que tu bosse mal ou que tu fous rien
    - si tu es riche ou que tu as une promotion, c'est que tu bosses bien
    - si untel est devenu puissant c'est qu'il a bossé honnetement
    - si untel s'est retrouvé à la rue, c'est qu'il a du magouiller
    - si les flics vienne te voir c'est que tu es coupable.
    - si tu portes une minijupe c que tu veux te faire sauter / que t une salope
    - si tu t'es fait agressé(e), violé(e) tu as du le/la provoquer
    - tu n'as rien sans rien

    "si tu n'as rien à te reprocher alors tu ne risques rien" prend tout son absurdité maintenant.

    c'est une triste réalité, tu ne peux que te reprocher d'exister puisqu'à la fin, c'est la seule et unique origine à tous tes emmerdes si tu postules sous une forme ou une autre "si tu n'as rien à te reprocher alors tu ne risques rien".
  • # meuh

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

    En France le seul fichier national est celui de la sécurité sociale. Même les flics n'ont pas accès à ce fichier (enfin c'était vrai jusqu'à il y a quelques années, ensuite il y a eu des tentative pour changer la loi et qu'ils y aient accès, je ne sais pas si ça a abouti finalement).

    En grande partie, parce qu'on peut faire beaucoup de choses bien avec le traitement de données automatique (arrêter les dangereux terroristes pédophiles) mais aussi pas mal de choses pas bien (les assureurs ou les banquiers aimeraient bien pouvoir discriminer certains clients dont le "profil" est statistiquement moins "performant").

    À ma connaissance d'ailleurs, il est curieux de constater que la mentalité aux Etats-Unis est très différente de celles de l'Europe sur la question ; en Europe, faire attention à sa vie privée est vu d'un mauvais oeil ("tu as quelque chose à te reprocher ?"), là-bas il y a une vraie méfiance vis-à-vis de la bureaucratie (même si elle n'est pas forcément moins bonne ou plus corrompue ; c'est plus du domaine culturel et lié à leur attachement viscéral à la liberté garantie à la fondation des Etats-Unis).

    En pratique, il suffit de regarder autour de soi pour voir que les gens ne respectent pas toujours les règles ; les politiques, l'administration, la police, les grandes entreprises ne dérogent pas à ces pratiques. Il faut donc une juste proportion d'informations auxquelles ces gens ont accès pour faire le bien de la société, pour limiter les risques en cas de dérapage.

    Le problème c'est qu'avec l'informatisation de la société et des données, le traitement automatique permet de démultiplier l'efficacité. Il va être de plus en plus difficile de lutter contre le fait que « avec la vidéosurveillance on pourrait repérer les actes des pédophiles et des terroristes pour les arrêter » (d'ailleurs ce serait sûrement mieux de les arrêter avant leur méfaits mais bon). De même, en Angleterre un énorme fichier d'empreintes génétiques est lentement constitué grâce à un prélèvement à chaque suspicion de crime (et peut-être de délit aussi, mais je ne suis pas sûr). Ca avait conduit par exemple à l'arrêt d'un type pour un crime grave en Angleterre alors qu'il était barman dans un autre pays au moment des faits (manque de précision du procédé pour prendre l'empreinte génétique) ; la « précision mathématique » de l'empreinte génétique avait longtemps convaincu du bien fondé de l'accusation de cet innocent. Que se passe-t-il si un assassin « salit » sa victime avec l'empreinte génétique de quelqu'un d'autre, de préférence quelqu'un avec un parfait profil de suspect ?
    • [^] # Re: meuh

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2.

      JE suis globalement d'accord avec ce que tu dis sauf :

      "Que se passe-t-il si un assassin « salit » sa victime avec l'empreinte génétique de quelqu'un d'autre, de préférence quelqu'un avec un parfait profil de suspect ?"

      Je dirais la même chose quand un crime essait d'être maquillé.

      "La première sécurité est la liberté"

    • [^] # Re: meuh

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 2.

      En France le seul fichier national est celui de la sécurité sociale. Même les flics n'ont pas accès à ce fichier.


      Par contre, les ambulanciers, si. En théorie peut-être pas (je ne sais pas), mais en pratique c'est le cas (une amie s'est ainsi faite retrouver par un ambulancier "indélicat" qu'elle aurait préféré ne plus revoir).

      Depuis que j'ai appris ça, j'ai perdu tout illusion sur la confidentialité de telles données.

      NB : je rappelle que les ambulanciers ne sont pas plus médecins que les pompiers ou les policiers.
    • [^] # Re: meuh

      Posté par  . Évalué à 3.

      À ma connaissance d'ailleurs, il est curieux de constater que la mentalité aux Etats-Unis est très différente de celles de l'Europe sur la question ; en Europe, faire attention à sa vie privée est vu d'un mauvais oeil ("tu as quelque chose à te reprocher ?"), là-bas il y a une vraie méfiance vis-à-vis de la bureaucratie (même si elle n'est pas forcément moins bonne ou plus corrompue ; c'est plus du domaine culturel et lié à leur attachement viscéral à la liberté garantie à la fondation des Etats-Unis).

      C'est plutôt l'opposé. Aux USA, le droit à la vie privée est extrêmement limité et fortement contesté. Son histoire n'a rien à voir avec la constitution et ses amendements mais plutôt avec la lutte pour le droit à l'avortement (Roe v. Wade). Il est donc récent et repose sur des bases juridiques très violemment combattue.

      D'autant plus que de l'autre côté, il existe une liberté d'expression très fortement ancré qui tend à protéger à outrance la divulgation d'information. De la même façon, le droit à l'information, instauré dans les années 60 au moment de la lutte pour les droits civiques (Freedom of Information Act) dans un soucis de contre-pouvoir, est beaucoup plus consensuel. Bref le "droit" à la vie privée est assez limité.

      Par contre en Europe, on a une commission et un parlement européens qui, malgré leurs défauts et les problèmes posés par les groupes d'intérêt, ont produit plusieurs directives sur la protection de la vie privée, notamment face aux entreprises (plus qu'à l'Etat, tradition étatiste européenne oblige). Même dans les textes européens à la visibilité plus réduite instaurant des mesures plus menaçantes (je pense au traité sur la cybercriminalité du conseil de l'europe), il y a eu une forte opposition aussi bien de citoyens que d'hommes politiques. La rétention d'information est bien plus débattue de ce côté-ci de l'Atlantique.

      Et puis en Europe, plusieurs pays ont des dispositifs destinés à contrer la presse people, comme par exemple en France la notion de droit à l'image qui donne un pouvoir immense aux personnes dont la vie privée est menacée.

      Bref, vision personnelle :)
  • # ma pub :)

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

    Je peux faire la pub d'un de mes vieux articles qui essaye d'illustrer entre autre ce propos.

    http://olivier.rioland.free.fr/linux.php3?sujet=alien

    "La première sécurité est la liberté"

  • # Exemples de la lettre de Zimmermann et autres

    Posté par  . Évalué à 10.

    Un exemple simple contrant "si tu n'as rien à te reprocher, tu ne risques rien" est celui de la lettre de Zimmermann (créateur de PGP). Cet exemple lui a également servi de justification (si besoin était) pour la création de PGP.

    Si on n'a rien à se reprocher, pourquoi utilise-t-on des enveloppes pour y envoyer des lettres ? Pour protéger ces dernières de la pluie ? Certainement. Mais aussi et surtout pour protéger sa vie privée. Quand j'envoie une lettre à une personne, je n'ai pas nécessairement envie que mon voisin la lise (surtout si elle concerne le contentieux juridique que j'ai avec lui), ni que le facteur la lise (surtout si elle concerne une personne que nous connaissons tous les deux), ni le policier du coin, ni mon assureur, ni mon garagiste, ni mon jardinier, etc. Il y a des choses privées qui ne sont partagées qu'entre deux personnes (ici, une lettre mais çà pourrait être un e-mail, un secret, etc.) et que ces personnes n'ont pas envie que d'autres sachent. Pour 1001 raisons et pas nécessairement parce qu'elles ont quelque chose à cacher.

    Le "secret" me fait penser à autre chose : tout le monde a déjà, étant petit(e), dit des secrets à un(e) ami(e), tout bas, devant les autres. Et ces secrets étaient bien anodins, a posteriori. Alors pourquoi tout ce cinéma ? Pourquoi le dire tout bas, en cachant sa bouche avec sa main, ... ? Parce que ces enfants sont de dangereux terroristes, assassins et pédophiles ? Parce que ces enfants (que nous étions) ont tous quelque chose à se reprocher ? Non. Simplement une expérimentation naturelle de la notion de "vie privée".

    Un autre exemple de bon sens est la porte d'entrée. Vous rentrez chez vous, vous fermez votre porte d'entrée. Et je suis même sûr que vous vous enfermez à clé dans votre maison/appartement. Pourquoi ? Vous avez quelque chose à cacher, à vous reprocher, vous ne voulez pas que la police entre, que votre voisin entre ? Petit cachotier ! C'est pas bien ? Non, c'est votre vie privée : vous n'avez pas envie que n'importe qui sache ce que vous faites chez vous.

    Comme avec le RFID (l'ordinateur, internet, les CD-ROMs, le tournevis, ...), la vidéosurveillance n'est qu'un outil, une technologie. Mais, à mon avis, la question est : "jusqu'où peut-on aller ?". Et, pour moi, elle va de pair avec : "Est-on sûr qu'il y a un organisme ou un mécanisme indépendant de contrôle qui a les moyens de savoir jusqu'où la technologie, l'outil est appliqué ?".

    Une prison, c'est bien pour enfermer les méchants. Mais une prison secrète, zone de non-droit, sans existence légale, sans ouverture à la Croix-Rouge, ... ce n'est plus bien du tout.

    Pour revenir à la vidéosurveillance, jusqu'où tes interlocuteurs 'qui n'ont rien à se reprocher" sont d'accord d'aller ? L'outil (les caméras) sont toutes installées et le gouvernement (ou la société commerciale qui s'en occupe pour le compte du gouvernement) jure qu'elle ne s'en sert qu'après un attentat, un viol, un meurtre, etc. Tes interlocuteurs sont en droit de le croire puisqu'"ils n'ont rien à se reprocher". Mais l'outil est là. Qui va empêcher quelqu'un de l'utiliser pour contrôler les plaques d'immatriculation des véhicules (jusqu'à présent "seulement" pour voir qui n'a pas payé une taxe de circulation à Londres, par exemple) ? Qui va empêcher quelqu'un de suivre les gens (voir "Minority Report" ou, plus pratiquement, après les attentats de juillet dans le métro de Londres) ? Et ces gens "sans reproches" seront-ils prêt à ce qu'"on" installe des caméras dans leur salon et leur chambre à coucher, au cas où cela permettrait de coincer le méchant voleur qui est venu prendre le chandelier de grand-mère et la chaîne hifi du fiston ? Poussons le raisonnement jusqu'au bout et cela devient absurde. Malheureusement, petit à petit, "on" nous fait accepter toutes ces "entorses" à la vie privée au nom d'une sorte de nouveau diable : le terrorisme.
    • [^] # Re: Exemples de la lettre de Zimmermann et autres

      Posté par  . Évalué à 0.

      Les terroristes c'est les nouveaux communistes.
    • [^] # Re: Exemples de la lettre de Zimmermann et autres

      Posté par  . Évalué à 7.

      Parce que ces enfants sont de dangereux terroristes, assassins et pédophiles ?


      Bon en même temps les gosses pédophiles, j'ai presque envie de les excuser... ;-)
    • [^] # Re: Exemples de la lettre de Zimmermann et autres

      Posté par  . Évalué à 3.

      Poussons le raisonnement jusqu'au bout et cela devient absurde.

      C'est justement là le problème : lorsque l'on donne ces exemples, on nous rétorque que l'on a trop d'imagination, que l'on va trop loin, que personne ne fera cela, p.ex. qu'aucun postier ne lira le courrier, il s'en fout, ou bien que les personnes qui vérifieront le courrier le feront comme des robots, qu'ils ne nous connaissent pas, qu'ils s'en foutent, qu'ils ne s'intéressent qu'aux pédophiles...

      Pousser vers des exemples extrêmes et absurdes décribilise les exemples plus plausibles, plus immédiats.

      On a déjà parfois du mal à convaincre de la réalité des dangers avec des exemples réels (déjà survenus) (= « ça n'arrivera pas chez nous », « ils l'ont fait et ils se sont fait prendre, personne ne le refera »...), alors faire de la SF¹...

      ¹ : ceux qui en lisent savent que cela signifie bien science-fiction et que les deux termes y ont leur place. Les autres pensent qu'il s'agit, au mieux, de fantaisies débordantes d'exagération ou, au pire, de stupidités irrationnelles invraisemblables, et, en tout cas, qu'il s'agit plus d'imagination que d'extrapolation scientifique.
  • # "si tu n'as rien à te reprocher alors tu risque rien"

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

    Ma réponse :

    "C'est pas parce que j'ai rien à cacher que je vais me balader à poil !"

    (surtout qu'en ce moment il gèle dehors....)
  • # Lisez et faites lire Globalia

    Posté par  . Évalué à 1.

    A ce propos, je ne saurais trop conseiller la lecture de Globalia de Jean-Christophe Rufin paru en 2004 aux éditions Gallimard.

    dans ce roman de SF, il y décrit une "démocratie" poussée à l'extrème dans laquelle la devise que nous connaissont tous est devenue "Liberté, sécurité, prosperité"

    Je n'en dis pas plus, je m'en voudrais de gacher votre plaisir, et je ne mets pas de lien vers Amazon, j'ai pas envie de lui rajouter un pt de pagerank.

    my 2 ç

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