G’MIC : 2.2, v’là les filtres !

Posté par  (site web personnel) . Édité par Davy Defaud, teoB, BAud, ZeroHeure et Pierre Jarillon. Modéré par ZeroHeure. Licence CC By‑SA.
Étiquettes :
101
16
fév.
2018
Graphisme/photo

L’équipe IMAGE du laboratoire GREYC (UMR CNRS 6072), situé à Caen, est ravie de vous annoncer la sortie d’une nouvelle version (numérotée 2.2) de G’MIC, son cadriciel libre, générique et extensible pour le traitement des images.
Comme à notre habitude, nous profitons de cette occasion pour faire un point sur les dernières fonctionnalités notables ajoutées depuis la version majeure précédente (2.0), sortie qui avait fait l’objet d’une dépêche sur LinuxFr.org, en juin 2017.

Sommaire

N. D. A. : Cliquez sur les images de la dépêche pour en visualiser des versions à meilleure résolution.

1. Contexte et évolutions récentes du projet

G’MIC est un projet libre développé depuis août 2008 (distribué sous licence CeCILL), dans l’équipe IMAGE du laboratoire GREYC, laboratoire de recherche public français localisé à Caen et chapeauté par trois tutelles : le CNRS, l’Université de Caen, et l’ENSICAEN. Cette équipe est composée de chercheurs et d’enseignants‐chercheurs spécialisés dans les domaines de l’algorithmique et des mathématiques du traitement d’images.
G’MIC logo  Fig. 1.1 : Logo du projet G’MIC, cadriciel libre pour le traitement d’images, et sa mignonne petite mascotte « Gmicky » (élaborée par David Revoy).

G’MIC est multi‐plate‐forme (GNU/Linux, macOS, Windows…) et fournit un ensemble d’interfaces utilisateur variées pour la manipulation de données images génériques, à savoir des images ou des séquences d’images hyperspectrales 2D ou 3D à valeurs flottantes (ce qui inclut de fait les images couleur « classiques »). Plus de 950 fonctions différentes de traitement d’images sont déjà disponibles dans ce cadriciel, nombre extensible à l’infini puisque les utilisateurs ont la possibilité de développer et d’ajouter leurs propres fonctionnalités via l’utilisation du langage de script intégré, spécifiquement dédié à la réalisation de pipelines de traitement d’images.
Greffon G’MIC pour GIMP  Fig.1.2 : Le greffon G’MIC-Qt pour GIMP, aujourd’hui l’interface utilisateur de G’MIC la plus populaire.

Deux événements d’importance dans la vie du projet ont eu lieu, depuis la sortie de la dernière version majeure :

1.1. Portage du greffon G’MIC-Qt vers Krita

Lors de la sortie de la version 2.0, nous étions heureux d’annoncer une refonte complète (en Qt) du code du greffon G’MIC pour GIMP, de façon à disposer d’un greffon G’MIC-Qt théoriquement « universel », c’est‐à‐dire déclinable pour fonctionner sur d’autres logiciels hôtes que GIMP. Eh bien, une étape supplémentaire a été franchie, puisque ce greffon a été effectivement étendu pour s’intégrer dans le logiciel libre de peinture numérique Krita.
Ceci a été rendu possible grâce au travail de développement de Boudewijn Rempt (mainteneur principal de Krita) et de Sébastien Fourey (développeur du greffon). Le greffon G’MIC-Qt est aujourd’hui disponible pour les versions 3.3+ de Krita et, même s’il n’implémente pas encore toutes les fonctionnalités d’entrées‐sorties de son équivalent pour GIMP, les retours d’utilisation que nous avons eu sont plutôt positifs.
Ce nouveau portage remplace de facto l’ancien greffon G’MIC pour Krita qui n’était plus maintenu depuis quelque temps. La bonne nouvelle pour les utilisateurs et les développeurs de Krita, c’est qu’ils disposent maintenant d’un greffon dont le code est commun avec celui fonctionnant sous GIMP, et dont nous allons pouvoir assurer la plus grosse partie de maintenance et de mise à jour.
À noter que ce portage a nécessité principalement l’écriture d’un fichier source host_krita.cpp (en C++) permettant la communication entre le logiciel hôte et le greffon, et on peut raisonnablement penser qu’un effort similaire permettrait à d’autres logiciels de disposer eux aussi de leur propre version du greffon G’MIC, et des quelques 500 filtres de traitement d’images livrés avec ! Avis aux développeurs…
G’MIC pour Krita  Fig. 1.3 : Aperçu du greffon G’MIC-Qt tournant sous Krita.

1.2. Une licence CeCILL-C, plus permissive

Seconde nouvelle importante, la licence d’utilisation CeCILL-C (licence dans l’esprit de la LGPL) est maintenant proposée pour certains composants du cadriciel G’MIC. Cette licence est plus permissive que la licence CeCILL (qui, elle, est compatible GPL) qui s’appliquait jusque ici, et plus adaptée à la distribution de bibliothèques logicielles. Cette extension de licence (double licence) concerne justement le cœur de calcul de G’MIC via sa bibliothèque C++ libgmic. Cette nouvelle licence autorise l’intégration des fonctionnalités de la libgmic (donc, de tous ses algorithmes de traitement d’images) dans des logiciels non licenciés en GPL/CeCILL (incluant les logiciels à sources fermées).
Le code source du greffon G’MIC-Qt, quant à lui, reste distribué sous licence unique CeCILL.

2. Collaboration féconde avec David Revoy

Si vous avez suivi nos épisodes précédents, vous avez peut‐être remarqué que nous citons très souvent l’artiste illustrateur David Revoy pour ses contributions multiples à G’MIC : dessin de la mascotte, idées de filtres, tutoriels écrits ou vidéo, tests en tout genre, etc. Plus généralement, David est un contributeur important au monde de l’art numérique libre, autant avec la bande dessinée Pepper & Carrot, qu’il élabore (distribuée sous licence libre CC-BY), qu’avec ses suggestions et rapports de bogues continuels pour les logiciels libres qu’il utilise.
Il paraît donc tout naturel de lui consacrer une section spéciale dans cette dépêche, relatant les différentes idées, contributions et expérimentations qu’il a apportées à G’MIC tout récemment. Un grand merci à lui pour sa disponibilité, le partage de ses idées, et tant qu’on y est, l’ensemble de son œuvre.

2.1. Perfectionnement du filtre de colorisation de dessins au trait

Évoquons tout d’abord les progrès apportés au filtre Black & White / Colorize lineart [smart-coloring], filtre qui était apparu lors de la sortie de la version 2.0 de G’MIC. C’est un filtre d’aide à la colorisation en aplats de dessins au trait (également dénommés line art), qui avait été élaboré en collaboration avec David. Le principe de ce filtre était de générer automatiquement un calque de colorisation aléatoire pour un dessin donné, à partir de l’analyse fine des contours présents dans le calque d’entrée contenant le dessin au trait.
En suivant les suggestions de David, nous avons pu ajouter un nouveau mode de colorisation : le mode Autoclean. Ce dernier permet de « nettoyer » automatiquement un calque de coloriage (réalisé grossièrement) fourni par l’utilisateur en plus du line art, en utilisant la même analyse géométrique des contours que pour les modes de colorisation précédents. L’utilisation de ce nouveau mode est illustré ci‐dessous, où un dessin donné (à gauche) a été colorisé de manière approximative par l’utilisateur. À partir des deux calques line art + colorisation grossière, le mode Autoclean du filtre de colorisation va générer l’image (de droite), où les couleurs ne débordent plus des contours (même des contours « virtuels » non fermés !). Le résultat n’est pas toujours parfait, mais permet néanmoins de réduire le temps passé au processus fastidieux de colorisation.
gmic_autoclean|690x302  Fig. 2.1 : Le nouveau mode Autoclean du filtre de colorisation de dessin au trait permet de nettoyer automatiquement un calque d’aplats de couleurs peint approximativement.

À noter que ce même filtre se dote également d’un nouveau module de détection de hachures, qui permet de ne pas générer trop de petites régions en utilisant l’ancien mode de colorisation aléatoire, lorsque le dessin au trait comporte un nombre important de hachures (résultat de droite sur la figure ci‐dessous). Assurément du temps gagné pour l’assignation des couleurs finales par l’artiste !
gmic_hatch_detect|690x187  Fig. 2.2 : Le nouveau module de détection de hachures limite le nombre de petites zones de couleurs inutiles générées par le mode de colorisation aléatoire automatique.

2.2. Égaliseur dans les espaces colorimétriques HSI, HSL et HSV

Plus récemment, David nous a suggéré l’idée d’un filtre permettant de faire varier séparément les teintes et les saturations des couleurs possédant certains niveaux de luminosité. L’idée sous‐jacente est de donner à l’artiste la possibilité de dessiner ou peindre numériquement en utilisant seulement des niveaux de gris, puis de coloriser après coup son chef d’œuvre simplement en assignant des couleurs particulières aux différentes valeurs de gris de l’image. La version couleur obtenue possède une palette certes limitée, mais dont l’ambiance colorimétrique globale est déjà en place. L’artiste n’a plus qu’à retoucher localement les couleurs plutôt que d’avoir à coloriser l’ensemble du dessin à la main.
La figure ci‐dessous illustre l’utilisation de ce nouveau filtre égaliseur Colors / Equalize HSI/HSL/HSV via le greffon G’MIC : chaque catégorie de valeurs peut être ajustée finement, avec pour résultats des colorisations préliminaires de dessins en noir et blanc assez bluffants ! On reconnaît dans tous ces exemples la patte artistique de David, qui a lui‐même effectué les tests de ce filtre.
Equalize HSI1
Equalize HSI2
Equalize HSI3  Fig. 2.3 : Le filtre Equalize HSI/HSL/HSV permet d’assigner des teintes quelconques à des pixels de différentes valeurs de gris.

Notons que dans le cas d’une image d’entrée en niveaux de gris, l’effet est équivalent à appliquer un gradient de couleurs aux différentes valeurs de l’image, ce qui pouvait déjà se faire assez facilement dans GIMP. Mais l’intérêt ici est de s’assurer que la luminosité des pixels reste inchangée lors de la transformation couleur appliquée, ce qui n’est pas une propriété évidente à préserver lorsqu’on effectue ce type de traitement manuellement via la définition d’un gradient couleurs.

Et ce qui est sympa avec ce filtre, c’est qu’il peut aussi s’appliquer aux photographies déjà en couleurs. On peut ainsi modifier la teinte et la saturation de couleurs possédant une certaine luminosité, avec un effet pouvant être parfois surprenant, comme celui obtenu sur la photographie de paysage ci‐dessous.
Equalize HSI4  Fig. 2.4 : Le filtre Equalize HSI/HSL/HSV appliqué sur une photographie couleur permet de changer son ambiance colorimétrique, ici de manière assez extrême.

2.3. Déformations anguleuses

Une autre demande de David a concerné l’élaboration d’un filtre de déformation locale aléatoire d’image, ayant la particularité de générer des déformations anguleuses. D’un point de vue algorithmique, ça semblait relativement simple à réaliser.
Notons qu’une fois l’implémentation effectuée (en style concis : 12 lignes !) et intégrée dans les mises à jour officielles, David a juste eu à appuyer sur le bouton Mettre les filtres à jour de son greffon G’MIC pour Krita et le nouvel effet Deformations / Crease est apparu dans sa liste de filtres, avec la possibilité pour lui de le tester immédiatement. C’est aussi ça le côté pratique de G’MIC !
G’MIC Crease  Fig. 2.5 : Nouvel effet Crease pour des déformations locales anguleuses.

En revanche, on ne savait pas franchement à quoi ce truc pouvait bien servir en pratique. Mais ce qui est bien quand on coopère avec David, c’est que, lui, il sait très bien ce qu’il va en faire ! Et sur ses expérimentations à lui, ça a tout de suite plus d’allure. En témoigne les deux utilisations qu’il en a fait ci‐dessous, d’une part pour donner un aspect crénelé aux bords de certaines de ses cases de BD, et d’autre part pour améliorer le rendu d’un « rayon alien de la mort ».
G’MIC Crease 2
G’MIC Crease 3  Fig. 2.6 : Utilisation du filtre Crease pour deux cas concrets de création artistique.

3. Toujours plus de filtres…

David Revoy n’est a priori pas le seul utilisateur de G’MIC, nous observons en effet entre 600 et 900 téléchargements quotidiens depuis le site principal du projet. Et il arrive, bien sûr, que d’autres utilisateurs emballés inspirent de nouveaux effets à ajouter, en particulier lors des discussions qui ont lieu sur notre forum principal, aimablement mis à disposition par la communauté PIXLS.US.

3.1. Faire ressortir les détails sans créer de « halos »

Beaucoup de photographes vous le diront : il n’est pas toujours évident de rehausser les détails dans des photographies numériques sans créer par ailleurs de vilains artéfacts qu’il faut souvent remasquer « à la main » après coup.
Il faut savoir que les algorithmes de rehaussement de contraste classiques se basent le plus souvent sur l’augmentation de la variance locale des intensités lumineuses des pixels, voire sur l’égalisation de leurs histogrammes locaux. Malheureusement, ces opérations se font généralement en considérant des voisinages à taille et géométrie fixées, où chaque pixel d’un voisinage est toujours considéré avec le même poids dans les calculs statistiques liés à ces algorithmes.
C’est plus simple et plus rapide, mais d’un point de vue qualitatif ce n’est pas une excellente idée : on se retrouve couramment avec des effets de « halos » autour des contours qui étaient déjà très contrastés dans l’image. Ce phénomène classique est illustré par le cas d’école ci‐dessous avec l’application du filtre Unsharp mask (présent par défaut dans GIMP) sur une partie d’image de paysage montagneux, et qui génère un « halo » indésirable à la frontière entre montagne et ciel (particulièrement visible sur les images en pleine résolution).
G’MIC details filters  Fig. 3.1 : Des effets de « halos » indésirables apparaissent souvent avec les filtres usuels de rehaussement de contraste.

Tout l’enjeu des algorithmes de rehaussement de détails est donc d’être capable d’analyser la géométrie locale des structures dans les images de manière plus fine, pour prendre en compte des « poids » locaux plus adaptés pour chaque pixel des voisinages considérés. Pour simplifier, on veut rendre anisotropes ces méthodes de rehaussement, en les orientant par les contours présents dans les images.
C’est en suivant cette voie que deux nouveaux filtres G’MIC ont fait leur apparition récemment, à savoir Details / Magic details et Details / Equalize local histograms, qui essayent de mieux prendre en compte le contenu géométrique de l’image pour ce travail de rehaussement local, grâce à l’utilisation du filtre bilatéral.
G’MIC magic details
G’MIC equalize local histograms
G’MIC equalize local histograms  Fig. 3.2 : Les nouveaux filtres de rehaussement de détails de G’MIC.

Ainsi, l’application du nouveau filtre d’égalisation locale d’histogrammes de G’MIC sur l’image de paysage montagneux donne un résultat plus contrasté en détails géométriques et en couleurs, et ne fait plus apparaître de halos.
G’MIC details filters
G’MIC magic details
G’MIC magic details  Fig. 3.3 : Différences de résultats entre le filtre Unsharp Mask classique et l’égalisation locale d’histogrammes de G’MIC, pour le rehaussement de détails.

3.2. Des déformations en tout genre

Régulièrement, de nouveaux filtres permettant de réaliser des déformations géométriques sur les images sont ajoutés à G’MIC, et cette nouvelle version majeure 2.2 ne déroge pas à cette règle.
Commençons donc par le filtre Deformations / Spherize, qui permet de déformer localement l’image pour donner l’impression que celle‐ci est projetée sur une sphère ou un ellipsoïde 3D. C’est le filtre idéal pour transformer votre odieux collègue de bureau en Monsieur Patate !
G’MIC spherize
G’MIC spherize  Fig .3.4 : Deux exemples de déformations sphériques 3D réalisées avec le filtre Spherize de G’MIC.

Le filtre Deformations / Square to circle, quant à lui, implémente des transformations directes et inverses d’un domaine carré (ou d’un rectangle) vers un disque (ainsi que décrit mathématiquement sur cette page), ce qui permet de générer ce type de déformations.
G’MIC square to circle  Fig. 3.5 : Transformations directes et inverses d’un carré vers un disque.

L’effet Degradations / Streak remplace une zone d’image masquée par l’utilisateur (remplie par une couleur uniforme) par une ou plusieurs copies d’une zone voisine. Il fonctionne principalement comme l’outil de clonage de GIMP mais évite à l’utilisateur de réaliser le remplissage de tout le masque à la main.
G’MIC streak  Fig. 3.6 : Le filtre Streak recopie une partie de l’image dans une zone masquée définie par l’utilisateur.

3.3. Abstractions artistiques

Vous allez me dire que les déformations c’est sympathique, mais qu’on désire parfois transformer une image de façon plus radicale. Tournons‐nous donc maintenant vers les nouveaux effets qui transforment une image en une version plus abstraite (simplifiée ou redessinée). Ces filtres ont en commun une analyse de la géométrie des structures de l’image, suivie d’une étape de re‐synthèse — avec plus ou moins de bonheur.
Par exemple, le filtre Contours / Super‐pixels tente de regrouper localement les pixels de même couleur pour former une image partitionnée, façon puzzle, par des formes géométriques qui collent aux contours. Cette partition est obtenue via la méthode SLIC (Simple Linear Iterative Clustering), un algorithme classique de partitionnement d’images, qui a l’avantage d’être relativement rapide en temps de calcul.
G’MIC super pixels 1
G’MIC super pixels 2  Fig. 3.7 : Décomposition d’une image en super‐pixels, par l’algorithme SLIC (Simple Linear Iterative Clustering).

Le filtre Artistic / Linify tente quant à lui de redessiner une image d’entrée en superposant des droites colorées semi‐transparentes sur un canevas initialement blanc, comme le montre la figure ci‐dessous. Cet effet est la ré‐implémentation d’un algorithme ingénieux initialement proposé sur le site http://linify.me/ (implémenté en JavaScript).
G’MIC linify 1
G’MIC linify 2  Fig. 3.8 : L’effet « Linify » cherche à redessiner une image en superposant uniquement des droites colorées semi‐transparentes sur un canevas blanc.

L’effet Artistic / Quadtree variations va pour sa part décomposer une image dans un premier temps en quadtree (arbre quaternaire), puis la re‐synthésiser en dessinant des ellipses orientées sur un canevas initialement vide, pour chaque feuille du quadtree ainsi obtenu, ce qui donne un petit effet « peinture » assez intéressant. Il est probable qu’avec des formes plus complexes que des ellipses pleines, on puisse synthétiser des rendus encore plus attrayants. Sûrement une idée à garder dans un coin du cerveau pour une prochaine mise à jour des filtres.
G’MIC quadtree 1
G’MIC quadtree 2  Fig. 3.9 : La décomposition d’image en quadtree permet par la suite de la re‐synthétiser en superposant uniquement des ellipses orientées et colorées.

3.4. « Y en a un peu plus, je vous le mets quand même ? »

Et maintenant que vous avez traité pleins de belles images, pourquoi ne pas les exposer sous la forme d’un superbe montage photo ? C’est précisément le rôle du filtre Arrays & tiles / Drawn montage, qui permet de créer très rapidement une juxtaposition de photographies en épousant des formes quelconques. L’idée est de fournir au filtre un patron (template) coloré en plus de l’ensemble des photographies (fig. 3.10a), puis d’associer chaque photographie à chaque couleur différente du patron (fig. 3.10b). L’incrustation se fait alors automatiquement par G’MIC, qui redimensionne les images de telle sorte qu’elles apparaissent le mieux cadré possible à l’intérieur des formes définies par le patron (fig. 3.10c).
Nous avons réalisé une vidéo tutorielle montrant l’utilisation de ce filtre particulier.

G’MIC drawn montage  Fig. 3.10a : Étape 1 : l’utilisateur dessine l’organisation désirée du montage avec des formes de différentes couleurs.

G’MIC drawn montage  Fig. 3.10b : Étape 2 : le filtre Drawn montage de G’MIC permet ensuite d’associer une photographie à chaque couleur.

G’MIC drawn montage  Fig. 3.10c : Étape 3 : le montage est finalement créé de manière automatique par le filtre, qui insère les photographies dans chaque forme de couleur en adaptant la résolution de chaque photographie.

Mais revenons en à des questions plus essentielles : avez vous déjà eu besoin de dessiner des rouages ? Non ?! C’est normal, ce n’est pas quelque chose que l’on fait tous les jours ! Mais, au cas où, le filtre Rendering / Gear se propose de le faire pour vous, avec différents réglages pour régler taille, couleurs et nombre de dents. Parfaitement inutile, donc totalement indispensable !
G’MIC drawn montage  Fig. 3.11 : Le filtre Gear tournant à plein régime.

Besoin rapide d’une texture de satin ? Non plus ?! Dommage, car le filtre Patterns / Satin aurait pu vous être d’un grand secours !
G’MIC satin  Fig. 3.12 : Le filtre Satin de G’MIC vous rend la vie plus soyeuse.

Et pour finir la série de ces « effets qui ne servent à rien sauf le jour où on en a besoin », notons la venue du filtre Degradations / JPEG artefacts qui simule l’apparition d’artefacts de compression JPEG due à la quantification des coefficients DCT encodant les blocs 8 × 8 composant l’image (oui, vous obtiendrez quasiment la même chose en sauvant votre image sous forme d’un fichier JPEG de la qualité désirée).
Simulate JPEG artefacts
Simulate JPEG artefacts  Fig. 3.13 : L’effet JPEG artefacts simule une dégradation d’image due à la compression DCT par bloc 8 × 8.

4. Autres améliorations notables

Cette revue des nouveaux filtres disponibles ne doit pas faire oublier les diverses améliorations qui ont également été apportées « sous le capot » et qui sont toutes aussi importantes, même si elles sont moins visibles en pratique.

4.1. Amélioration de l’interface du greffon G’MIC-Qt

Un gros effort de nettoyage et de restructuration du code du greffon G’MIC-Qt a été réalisé, avec pour conséquence pas mal de petits soucis réglés dans l’utilisation de l’interface graphique (GUI). Citons également en vrac quelques nouvelles fonctionnalités ayant fait leur apparition dans ce greffon : la possibilité de régler un délai d’expiration (timeout) lors de la prévisualisation du résultat de filtres un peu longs à calculer, une meilleure prise en compte des paramètres d’entrées‐sorties pour chaque filtre (persistance, meilleure localisation, bouton de réinitialisation), des facilités pour maximiser la taille de la fenêtre de prévisualisation, pour éditer à la main son coefficient d’agrandissement (zoom), ou encore pour choisir la langue de l’interface (indépendamment de la langue du système), etc. Au final, plein de petites choses qui, additionnées, améliorent progressivement l’expérience utilisateur.
Préférences de G’MIC  Fig. 4.1 : Aperçu de l’interface du greffon G’MIC-Qt dans sa dernière mouture 2.2.

4.2. Améliorations apportées au cœur de calcul

Encore moins visible, mais tout aussi important, beaucoup d’améliorations sont apparues dans le code du cœur de calcul de G’MIC et son interpréteur de langage de script associé. Il faut savoir que tous les filtres proposés dans le greffon sont écrits sous forme de scripts en langage G’MIC, et chaque petite amélioration apportée à l’interpréteur a donc une conséquence bénéfique pour l’ensemble des filtres proposés. Sans rentrer dans les détails techniques de ces améliorations internes, on peut citer pêle‐mêle :

  • des améliorations notables en ce qui concerne la syntaxe même du langage, allant de pair avec une meilleure performance d’analyse de cette syntaxe et, in fine, un temps d’exécution amélioré des scripts, pour une utilisation mémoire qui, elle, devient plus réduite ;
  • l’évaluateur d’expressions mathématiques intégré à G’MIC connaît lui aussi quelques améliorations et nouvelles fonctionnalités, pour envisager encore plus de possibilités de codage d’algorithmes réalisant des opérations non triviales au niveau pixel ;
  • une meilleure prise en charge des entrées‐sorties de séquences vidéo brutes en format .yuv avec la prise en charge des formats 4:2:2 et 4:4:4, en plus du format 4:2:0 qui était le seul géré auparavant ;
  • enfin, deux nouvelles animations ont été ajoutées au menu des démonstrations de G’MIC (qui s’affiche par exemple lorsque l’on lance l’interface CLI — gmic sans arguments, depuis la ligne de commande) :
    • tout d’abord, un effet de champ d’étoiles en 3D : Starfield demo  Fig. 4.2 : Nouvelle animation 3D Starfield ajoutée au menu de démonstration.
    • mais aussi une version 3D jouable des Tours de Hanoï : Démo Hanoi  Fig. 4.3 : La version 3D jouable des « Tours de Hanoï », disponible dans G’MIC.
  • pour finir, signalons l’apparition de la commande tensors3d dédiée à la représentation 3D d’un champ tensoriel d’ordre 2. Et, en pratique, ça ne sert pas qu’à donner envie de manger des Smarties® ! On peut par exemple l’utiliser pour visualiser certaines régions de volumes IRM de tenseurs de diffusion : tensors3d  Fig. 4.4 : La commande tensors3d permet la visualisation 3D de champs tensoriels d’ordre 2.

4.3. Nouveau design pour G’MIC Online

Pour en finir avec le rayon des nouveautés, mentionnons également la refonte complète du service en ligne G’MIC Online durant l’année 2017, réalisée par Christophe Couronne et Véronique Robert du service développement du laboratoire GREYC.
G’MIC Online est un service Web, qui propose d’appliquer un sous‐ensemble des filtres de G’MIC sur vos images, via un navigateur Web. Ces pages ont maintenant un design adaptatif, ce qui les rend utilisables de manière plus agréable qu’auparavant sur les appareils mobiles (smartphones et tablettes), comme illustré ci‐dessous avec une copie d’écran du service lancé depuis un navigateur Chrome tournant sous Android, le tout sur une tablette de 10 pouces de diagonale.
G’MICol  Fig. 4.5 : Nouvelle version adaptative du service Web G’MIC Online, tournant ici sur une tablette 10”.

5. Conclusion et perspectives

Voilà, le tour d’horizon de cette nouvelle version 2.2 de G’MIC est terminé. Une conclusion pourrait être : « Il y a plein de perspectives ! ». G’MIC est un projet libre que l’on peut qualifier de mature : les premières lignes de code ont été composées il y a presque dix ans, et l’on a aujourd’hui une bonne idée des possibilités (et des limites) de la bête. Nous espérons rencontrer toujours plus d’intérêt de la part des utilisateurs et développeurs libres, par exemple pour l’intégration du greffon générique G’MIC-Qt dans des logiciels divers et variés de traitement d’images ou de vidéos.
La possibilité d’utiliser le cœur de G’MIC sous une licence CeCILL-C — plus permissive — peut également être source de collaborations intéressantes dans le futur (certaines entreprises nous ont déjà approché à ce sujet).

Tout en étant à l’affût de collaborations potentielles, nous allons continuer à développer G’MIC dans la mesure de nos moyens et l’alimenter avec de nouveaux filtres et effets, au gré des suggestions de nos utilisateurs enthousiastes. Merci à eux pour leur aide et leurs encouragements constants (la motivation pour écrire du code ou des articles, passé 23 h, ne serait pas la même).

Et en attendant une prochaine dépêche sur G’MIC… « Vive le traitement d'images et la création artistique libre ! »

Aller plus loin

  • # Logiciel d’utilité publique

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10. Dernière modification le 19 février 2018 à 01:20.

    Logiciel d’utilité publique : voilà comment on devrait qualifier G’MIC !
    Ceci pour plusieurs raisons :

    • il utilise Qt, qui est porté sur toutes les grandes plates‐formes et portable sur les autres ;
    • il est financé par nos impôts, fourni sous une licence libre, ce qui devrait servir de modèle à bien d’autres travaux universitaires ;
    • il est utilisé par GIMP et Krita, les deux principaux logiciels graphiques libres ; il peut et devrait être une nouvelle matière enseignée dans les écoles.

    C’est une suggestion pour la DINSIC (gestionnaire du RGI) : déclarer les logiciels libres majeurs d’intérêt public. Cela permettrait par exemple de financer LibreOffice et pourquoi pas une distribution. Mageia par exemple ?

    • [^] # Re: Logiciel d'utilité publique

      Posté par  . Évalué à 6.

      Effectivement,

      Aujourd'hui, seuls les dons aux "Associations reconnues d'utilité publique ou d’intérêt général" sont déductibles.
      L'idée est donc de rendre partiellement déductibles les dons aux mainteneurs de logiciels libres "majeurs".
      Dans le détail,cela implique trois choses:
      1. Il existe une association dite "loi 1901" derrière le logiciel libre en question.
      2. L'association en question peut être reconnue "d'intérêt général". Selon moi l'utilité publique n'est pas appropriée.
      3. Un organisme lié à l'état lui a accordé ce statut.
      Pour les points 1 et 3, cela ne pose pas trop de problème. C'est pour le 2 que cela se complique. Est-ce que les logiciels libres peuvent prétendre à ce statut ?
      cela-dit, même dans la version actuelle de la loi, avec un bon dossier et quelques appuis bien choisis, ça doit pouvoir se faire.

  • # Intégration dans Kdenlive

    Posté par  . Évalué à 8.

    Hello,

    L'annonce de la 2.0 m'avait propulsé à écrire un filtre MLT appelant GMIC…
    Malheureusement je n'y ai passé que 2 soirées fatigué, freiné par une segfault par-ci, une corruption d'image par là…
    J'ai trouvé alors que votre documentation est encourageante (ça a l'air fastoche !), et finalement je suis resté rapidement avec des questions sans réponses (surtout sans connexion internet).
    J'ai regardé du côté de ZArt, ça m'a un peu aidé aussi. J'avais entendu parler de Natron & OpenFX mais je ne m'y suis pas retrouvé.

    Auriez-vous des conseils, déjà pour bricoler un prototype, et puis pour optimiser la vitesse de rendu (en limitant les interprétations redondantes de script, les allocations et copies de buffers, les conversions d'images…) ?
    Bon, mais c'est surtout à moi de me cravacher un peu !

    Merci merci pour ce beau travail, de matheux (pour les algos) et d'artiste (pour l'utilisation à bon escient) : David & David on vous aime !!

    • [^] # Re: Intégration dans Kdenlive

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10.

      Auriez-vous des conseils, déjà pour bricoler un prototype, et puis pour optimiser la vitesse de rendu (en limitant les interprétations redondantes de script, les allocations et copies de buffers, les conversions d'images…) ?

      Oui, surement des idées. Un petit mail pour amorcer la discussion ? :)
      Il faudrait déjà regarder si vous préférez utiliser l'API C++ (libgmic) ou C (libcgmic).
      Après, pour limiter les allocations/copies de buffer, il n'y a pas trop de miracle possible, sauf si vos buffers images utilisent exactement le même format que celui de G'MIC (et c'est peu probable!).
      Je peux en tout cas déjà conseiller des choses à tenter (ou pas!).

    • [^] # Re: Intégration dans Kdenlive

      Posté par  . Évalué à 2.

      @vpinon : La piste d'implémenter OpenFx dans MLT serait-elle beaucoup plus coûteuse en efforts ?
      En 2010, Dan Dennedy avait eu une réaction pour le moins mitigée sur le sujet ( https://forum.kde.org/viewtopic.php?t=112557 ) ; les choses ont-elles évolué depuis ?

  • # Impressionnant !

    Posté par  . Évalué à 4.

    Gros travail, bravo !

    Vivement GIMP 2.10 + GMIC 2.2…

  • # Retour d'expérience sur 10 ans

    Posté par  . Évalué à 10.

    Merci David pour ce logiciel fantastique et pour ces dépêches toujours intéressantes et agréables à lire. D'habitude tu restes purement factuel mais là tu as parlé de la relation avec David Revoy et c'était bien.

    Je me dis que depuis que tu développes G'mic et même avant, tu en aurais pas mal à raconter aussi sur l'évolution de l'acceptation et la reconnaissance du logiciel libre dans la recherche française et que ça peut intéresser du monde ici. Donc si tu ne sais pas quoi faire ce soir après 23h00…

    • [^] # Re: Retour d'expérience sur 10 ans

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10.

      Merci Jérôme pour ces gentillesses.
      En ce qui concerne le développement d'un logiciel libre au sein d'un labo de recherche public, je ne peux parler que de mon expérience personnelle, qui n'est pas franchement négative : Après presque 10 ans de développement, on a atteint un stade où on se sent quand même très soutenu moralement par la direction du laboratoire, et par les collègues.
      On peut quand même mentionner quelques petits points noirs qui pourraient s'améliorer (et qui vont le faire avec le temps, j'en suis persuadé) :

      1 - Les possibilités d'obtenir des aides financières spécifiquement pour le développement de logiciels libres ne semblent pas encore très variées, si on les compare avec les instruments qui existent pour financer la recherche en général (RIN, ANR et consorts).
      2 - En parallèle, il est difficile de mettre légalement en place des systèmes de dons ou de campagnes de financements participatifs pour aider au développement (achat de matériel, stage…). Ce n'est pas quelque chose qui apparemment se fait très souvent pour un labo de recherche.

      Donc les points 1 + 2 font qu'on peut pas vraiment obtenir de source de financement pour le développement du logiciel, et cela même si on avait des centaines/milliers d'utilisateurs prêts à donner un peu de sous (sur une plateforme de type Patreon/Liberapay par exemple). Je ne dis pas que c'est le cas hein, juste que de toute façon ça semble pas possible.

      3 - Par ailleurs, on a la forte impression que l'activité de développement de logiciels (libres en particulier) n'est que très peu valorisé lors de l'évaluation de notre activité de recherche par nos pairs. Si encore le logiciel générait des revenus (vente de licence d'exploitation à une entreprise par ex), alors ça serait surement mieux perçu. Mais pour du logiciel libre… J'entends souvent dire qu' "un logiciel compte comme une publication", ce qui fait un peu mal au coeur, car si on compare le temps passé à écrire une publi, et à développer/s'occuper d'un logiciel (comprenant la maintenance et toute l'activité autour)…
      Mieux vaudrait s'empêcher d'écrire du logiciel libre pour bien réussir sa carrière!

      1. De manière plus anecdotique : j'ai pu entendre deux trois remarques que je qualifierais d'étranges (pour rester poli), mais c'est surement du classique du genre : "mais si vous avez des milliers d'utilisateurs, pourquoi vous les faites pas payer 1 euro par téléchargement ?", ou encore "y a pas de différences fondamentales entre la CeCILL et la CeCILL-B" (venant d'un prétendu spécialiste des licences logicielles). (Pour ceux qui connaissent pas trop les licences CeCILL, ça revient à dire que les licenses GPL et BSD c'est la même soupe).

      Voilà, mais à part ça, rien de bien grave. On fait avec ce qu'on a, et on continue quand même :)

      • [^] # Re: Retour d'expérience sur 10 ans

        Posté par  (Mastodon) . Évalué à 8. Dernière modification le 21 février 2018 à 22:10.

        Par ailleurs, on a la forte impression que l'activité de développement de logiciels (libres en particulier) n'est que très peu valorisé lors de l'évaluation de notre activité de recherche par nos pairs. Si encore le logiciel générait des revenus (vente de licence d'exploitation à une entreprise par ex), alors ça serait surement mieux perçu. Mais pour du logiciel libre… J'entends souvent dire qu' "un logiciel compte comme une publication", ce qui fait un peu mal au coeur, car si on compare le temps passé à écrire une publi, et à développer/s'occuper d'un logiciel (comprenant la maintenance et toute l'activité autour)…

        Étant élu au CNU en section 27, je peux te répondre là dessus. Un logiciel ne compte comme une publication que pour les jeunes docteurs qui demandent la qualif (ça vient de l'ambiguïté du terme «travaux» utilisés dans les textes officiels qui peut se comprendre comme publication mais aussi comme tout autre résultat de la recherche, y compris les logiciels).

        Pour les permanents, un logiciel est valorisé indépendamment des publications (comprendre que ce n'est pas la même case dans les fiches de prise de notes). Les logiciels peuvent compter comme du rayonnement quand le candidat donne des chiffres de téléchargements et d'utilisateurs (ça indique que les résultats de sa recherche sont utilisés par d'autres). Ils peuvent compter comme de la production scientifique au même titre qu'un brevet (déposer son logiciel à l'APP peut être une bonne idée dans ce cas), mais pas tout à fait au même niveau qu'une publication. Dans le cas particulier de G'MIC, on peut aussi argumenter de son âge vénérable qu'atteignent assez peu les logiciels produits dans la recherche. Pour moi, c'est valorisable, ça indique une continuité et une évolution dans la thématique de recherche. En plus, il est utilisé dans des logiciels grand public, ce qui indique de la vulgarisation à grande échelle.

        Tu as un collègue dans l'équipe MAD qui est également au CNU (et que j'apprécie beaucoup au passage), tu peux aller lui poser la question mais je pense qu'il te dira la même chose que moi.

        Edit: je m'aperçois maintenant que tu es CR, et je ne connais pas les critères dans ce cas, mais bon je laisse le commentaire quand même, ça peut aider ;)

        • [^] # Re: Retour d'expérience sur 10 ans

          Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10.

          J'ai moi même siégé au CNU 27 (en tant que suppléant nommé) lors de l'investiture précédente, et cette impression de sous-évaluation de la production logicielle vient aussi en partie de cette expérience :) Tu le dis toi même :

          Ils (les logiciels) peuvent compter comme de la production scientifique au même titre qu'un brevet (déposer son logiciel à l'APP peut être une bonne idée dans ce cas), mais pas tout à fait au même niveau qu'une publication

          Alors, combien de temps pour écrire une publi considérée comme aboutie, from scratch ? En général, en informatique, moins de 6 mois, tout compris. Combien de gens ça touche (lecteurs potentiels) ? Quelques dizaines, au mieux quelques centaines (et dans ce cas faut vraiment faire un très bon papier!).
          Maintenant, combien de temps pour écrire un logiciel considéré comme abouti ? Quelques années ! Combien de gens ça touche (utilisateurs potentiels) ? Quelques milliers !
          On nous bassine pour l'évaluation avec des métrique d'"impact factor" ici, de "H-index" là, et on continue à entendre qu'un logiciel largement diffusé et utilisé, ça compte moins qu'une publi !! C'est à pleurer.

          Alors oui, ça va pas être forcément le même public concerné (d'un côté des scientifiques purs, de l'autre côté, le grand-public), mais il me semble qu'au niveau "mission service public" c'est quand même pas inutile de faire un logiciel largement diffusé, c'est surement même plus utile que d'écrire un n-ième papier que 8-10 personnes tout au plus vont lire. Et qu'on me dise pas que développer un logiciel c'est pas de la recherche mais de l'ingénierie…

          La publication scientifique a trop longtemps été le critère majeur d'évaluation de l'activité des chercheurs, et on voit ce que ça a donné : sur-multiplication des conférences et des publications (une même idée, publiée 10 fois de suite, un grand classique), création de métriques à la mords-moi-le-noeud, ranking des conférences et des journaux (ces deux liens sont très très connus des gens de la CNU27, c'est même ce qu'on apprend en premier quand on relit nos premiers dossiers :)). Les grands gagnants : les éditeurs. Bref on peut pas parler de grande réussite morale.

          Je n'ai évidemment pas de recette miracle pour évaluer l'activité des chercheurs, mais je vois quand même que la tendance c'est de prendre de plus en plus en compte les activités "autres" que la publication pure et dure d'articles scientifiques (en tout cas, ça semble être le cas au CNRS, section 07). Je crois néanmoins que la production de logiciels est encore sous-évalué par rapport à : 1. l'effort que ça demande, et 2. le rayonnement que ça peut apporter à un labo. J'espère juste que ça va évoluer dans le bon sens. Mais clairement aujourd'hui, pour sa carrière, mieux vaut écrire 10 publis sur 10 ans plutôt qu'un logiciel.

          • [^] # Re: Retour d'expérience sur 10 ans

            Posté par  (Mastodon) . Évalué à 8.

            Je ne peux qu'être d'accord avec toi. Ces normes comptables m'exaspèrent au quotidien et au CNU. Ça biaise tout le jugement qu'on devrait avoir sur des travaux scientifiques dans toutes leurs dimensions. Mais, parce qu'il y a un mais de taille, c'est la moins pire des solutions.

            En fait, le CNU n'évalue pas les activités de recherche, il se contente de chercher et compiler les indicateurs d'une activité de recherche pour produire un jugement ou un classement. C'est très différent ! Si on devait évaluer réellement une activité de recherche, on y passerait beaucoup plus de temps (puisqu'il faudrait comprendre l'objet des recherches, évaluer leur pertinence, évaluer les résultats obtenus, etc) et ce temps, nous ne l'avons pas. Sans compter que nous n'avons sans doute pas les compétences pour le faire pour tous les collègues. Un article publié, en revanche, donne une indication : ce chercheur a été évalué par des pairs et son travail a été validé pour être publié. Doit-on refaire le travail du comité de lecture ? Ça dépend de ce qu'on cherche à faire. Si on voulait réellement évaluer, alors il faudrait (mais il faudrait également d'autres méthodes et d'autres moyens pour le faire correctement). Mais ce n'est pas la tâche qui a été assignée au CNU, donc on ne le fait pas, on se contente de l'indicateur.

            Dans ce cadre, un logiciel, c'est compliqué à intégrer dans la fiche de notes. Parce qu'il y a assez peu d'indicateurs pertinents du point de vue de la recherche. Je les ai donné auparavant : nombre d'utilisateurs, nombre de téléchargements, etc. Mais ça n'indique pas la qualité de la recherche, juste sa diffusion. Là encore, si on faisait réellement un travail d'évaluation, on pourrait décortiquer le logiciel et se rendre compte qu'il contient des algorithmes originaux non-triviaux (qui peuvent avoir fait l'objet d'une publication ou non) et que c'est bien une production scientifique à part entière. Et comme tu le dis, vu le temps qu'on peut y passer, ça vaudrait largement des publications en plus du côté utilisabilité (parce qu'une publication vient rarement avec le bout de code qui va bien, et même pire, il est souvent difficile de refaire le bout de code en lisant la publication, ce qui est un comble).

            Bref, on ne trouvera pas la solution ici mais je ne désespère pas de convaincre des collègues au fur et à mesure (beaucoup le sont déjà même s'ils continuent de «jouer le jeu»).

            • [^] # Re: Retour d'expérience sur 10 ans

              Posté par  (site web personnel) . Évalué à 5.

              J'imagine que c'est le même bazard pour les 2 autres activités sous évaluées : la vulgarisation et l'expertise pour l’État.

              Lors d'une interview a la radio, il était question des problèmes de conflit d’intérêt avec les experts fiscalistes qui conseillent à la fois les Etats et les entreprises, avec un énorme conflit d’intérêt. L'excuse pour l’État est de dire 'c'est compliqué', alors qu'ils ont des experts mais peu intéressé à ses questions car cela ne rentre pas en compte dans leur évaluation de carrière. Ses chercheurs pourraient aider entre autre, avec des livres ou article de vulgarisation.

              "La première sécurité est la liberté"

  • # Conf' au THSF ?

    Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 9.

    Bonjour David et David.

    Il y a eu une tentative avortée pour je ne sais plus quoi, mais à la lecture de cette dépèche, je ne peux m'empecher de réitérer ma proposition : venez présenter vos travaux au prochain THSF. La thématique de cette année est « Autour du langage », et vu comment on peut scripter gmic, vous êtes en plein dedans :)

    D'autre part, Myrys, où se passe l'évènement, est un collectif d'artistes chez qui les images numériques sont de plus en plus pratiquées. et votre collaboration ressemble un peu à ce que nous essayons de pratiquer ici.

    Vous avez jusque au 10 mars pour répondre, le #TKD est à votre écoute.

    tTh.

    • [^] # Re: Conf' au THSF ?

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

      Oui je me rappelle que l'an dernier j'étais en conf sur les même dates. Et cette année, j'essaye de limiter mes déplacements au maximum, pour diverses raisons.
      Je pense toujours que j'aurais plus de temps l'an prochain (et ça se vérifie jamais en fait).

      • [^] # Re: Conf' au THSF ?

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4. Dernière modification le 22 février 2018 à 01:50.

        eh oh une invit' par TTh ça ne se refuse pas :-) tu ne le regretteras pas àmha, Toulouse ayant cette aura comme Bordeaux ou Lyon de capitale de la France vu son centre d'activité (avec les embouteillages afférents).

        le lieu est intéressant, le collectif déjà intronisé aussi, donne-toi quelques bons moments cette année justement, je pense que tu auras un accueil au-delà de tes espérances et en gérant tes impétrants :-)

  • # super travail

    Posté par  . Évalué à 3.

    Bravo, c est vraiment superbe.
    Etant utilisateur sporadique de G'MIC je ne peut que vous feliciter pour votre travail.
    Par contre j aurai une petite suggestion: il y a enormement de filtres et de possibilites a tel point qu un neophyte ne sait pas exactement quoi utiliser (meme si comme moi il a fait une fois, il ne se rappelle plus comment des mois plus tard)
    Ca serait pas mal que sur votre site vous mettiez les exemples que vous avez fait ici, ou a defaut au moins les liens sur linuxfr

    en tout cas bravo et merci encore

    • [^] # Re: super travail

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

      Oui, la doc est encore incomplète. J'avoue que j'ai du mal à m'y mettre, en plus de développer de nouveaux filtres, d'améliorer le code existant, de répondre aux questions des forums, sans compter que j'ai aussi un travail à assurer en journée :)
      Mais toute aide est bienvenue !

      • [^] # Re: super travail

        Posté par  . Évalué à 2.

        Je suis pas un expert en graphisme .mais je suis pret a donner un coup de main.
        On fait comment ?

        • [^] # Re: super travail

          Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

          La doc "collaborative" est ici : https://github.com/dtschump/gmic-community/wiki
          Il y a déjà 2 articles sur l'explication de filtres dans le plug-in, l'idéal serait d'enrichir cette doc avec des pages explications certains filtres intéressants ?

          • [^] # Re: super travail

            Posté par  . Évalué à 4.

            La documentation s'est beaucoup améliorée. Notamment on comprend beaucoup plus vite la fonction de chaque paramètre.

            Ce qu'il manque au néophyte, c'est un catalogue d'exemples classifiés avec des mots clés. Par exemple la question posée plus bas : peut-on obtenir un effet vieux papier ? Au fil des ans, des questions que j'avais ont trouvé une réponse simplement grâce aux noms des nouveaux filtres. Ce n'est pas toujours le cas. Ça devient aussi plus compliqué de passer la liste de tous les filtres en revue car il commence à y en avoir pleins.

            La documentation de GIMP et ImageMagick a évoluée dans ce sens avec un exemple illustrant l'utilisation des fonctions natives. Beaucoup de fonctions de G'mic sont présentées dans les dépêches de Linuxfr mais pas forcément centralisées dans la documentation de G'mic.

            Cette signature est publiée sous licence WTFPL

    • [^] # Re: super travail

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

      Même problème ici. D'ailleurs, j'utilise souvent les dépêches publiées sur LinuxFr pour retrouver les outils qui m'intéressent dans G'MIC. Comme quoi un langage c'est un vrai problème pour les non-communiquant qui ne peuvent l'utiliser que via le langage des signe (le GUI). C'est du moins l'argument que je donne toujours à mes étudiants pour les motiver à apprendre des langages de programmation ; argument vérifié ici.

      Pour en revenir au problème, je ne connais pas la solution. Mais vue le foisonnement des possibilités, le travail de documentation et la réflexion sur la présentation de la doc et des outils ont un bel avenir devant eux.

      En tout cas, merci pour le boulot et les nouvelles.

      « IRAFURORBREVISESTANIMUMREGEQUINISIPARETIMPERAT » — Odes — Horace

  • # Est-ce utilisable pour des filtres légers ?

    Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 2.

    Bonjour et bravo pour ce travail et superbe outil !

    Est-ce que G'MIC serait utilisable dans un logiciel non spécialisé traitement d'image, je pense notamment à l'application de filtres rapides pour des photos (sur téléphone par exemple) sans ouvrir un logiciel lourd ? Je n'ai pas regardé le code/la taille générale des bibliothèques, est-ce lourd à embarquer ?

    D'autre part je me demandais si ça pouvait être utilisé pour générer un Diaporama vidéo (par exemple en donnant un effet photo papier, ou vieux film) ?

    merci

    • [^] # Re: Est-ce utilisable pour des filtres légers ?

      Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

      Je n'ai pas regardé le code/la taille générale des bibliothèques, est-ce lourd à embarquer ?

      Tout dépend de ce qu'on appelle "lourd", mais pour info, la libgmic compilée fait moins de 6.5 Mio, ce qui semble raisonnable pour une utilisation sur application mobile. Cette bibliothèque comprends l'ensemble des implémentation des filtres de G'MIC (mais rien concernant l'interface graphique).
      Un exemple d'utilisation de l'API C++ est dispo ici : http://gmic.eu/libgmic.shtml

      D'autre part je me demandais si ça pouvait être utilisé pour générer un Diaporama vidéo (par exemple en donnant un effet photo papier, ou vieux film) ?

      Oui tout à fait. Ca semble adapté pour ce genre de choses.

  • # pixel art

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

    Merci pour l'article et ce logiciel! Je suis retombé sur un article à propos de «dépixelisation» de pixel art: http://johanneskopf.de/publications/pixelart/index.html

    Cela pourrait être une idée pour un nouveau filtre :)

    Au delà de l'intérêt direct pour un petit nombre d'utilisateurs, le principe pourrait être adapté pour améliorer des scans, ou d'autres documents monochromes.

    Un LUG en Lorraine : https://enunclic-cappel.fr

    • [^] # Re: pixel art

      Posté par  . Évalué à 2.

      Sur cette page, il est raconté que certains ont essayé, mais ont abandonné parce que gérer les graphs avec G'mic, c'est chaud:
      https://www.flickr.com/groups/1316653@N22/discuss/72157633518893081/72157633715506107

      Je dis pas que c'est impossible de le faire, mais j'y ai mis du temps et de l'énergie et j'ai pas réussi.

      • [^] # Re: pixel art

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

        Oui effectivement, à l'époque c'était carrément courageux de te lancer là dedans :)
        Aujourd'hui les choses devraient être un peu plus simple je pense (mais non triviales quand même), du fait des améliorations significatives qu'a connu l'évaluateur d'expression mathématiques intégré.
        Faudrait peut-être que je m'y replonge quand j'aurais un moment (autant dire que c'est pas gagné :) ).

  • # Bravo !

    Posté par  . Évalué à 3.

    Bonjour David,

    Bravo pour cet outil magnifique que j'utilise trop peu sur Gimp, et pas encore sur Krita ! :( En tous les cas, ça me fait plaisir en tant qu'ancien de la filière Imagerie Numérique de voir que le GREYC participe à produire des outils de cette qualité, et que ça profite à beaucoup de gens :)

    Bravo encore pour le gros travail !

  • # Auteur pour article G'Mic orienté photo

    Posté par  . Évalué à 6.

    Bonjour,
    je suis à la recherche d'une personne pour écrire un article présentant l'utilisation de G'MIC dans une perspective photographique. Je sais que les possibilités du logiciel sont énormes, mais je voudrais pouvoir présenter dans le magazine www.focus-numerique.com un éventail des fonctionnalités de G'MIC pour les photographes.
    D'avance merci

  • # Commentaire supprimé

    Posté par  . Évalué à 1. Dernière modification le 26 février 2018 à 23:57.

    Ce commentaire a été supprimé par l’équipe de modération.

Suivre le flux des commentaires

Note : les commentaires appartiennent à celles et ceux qui les ont postés. Nous n’en sommes pas responsables.