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Propriétaire mais néanmoins historique, Skype fut pendant de nombreuses années un logiciel phare de la visio-conférence. Puis il fut racheté par Microsoft (pour 8,5 milliards de dollars) et, comme on dit parfois quand la politique se mêle hélas de la technique : on ne rachète pas un logiciel mais ses utilisateurs.
Une quinzaine d'années plus tard, Microsoft prend la décision de fusionner Skype à Teams, ce qui suscite des controverses malgré le transfert des contacts (et a priori de l'historique des messages), notamment en ce qui concerne la lourdeur du client. Le contexte politique international en rajoute une couche et la dépendance technologique aux États-Unis devient de moins en moins souhaitable.
Dans le cadre de la messagerie instantanée d'une PME, et après pas mal de veille technologique, nous avons donc pris la décision de passer à Nextcloud. Petit bilan de choses (importantes pour cet usage), peut-être utile pour ceux qui comme moi pensaient encore récemment que fournir directement de la visio, c'était réservé aux boîtes avec des moyens.
Fonctionnalités
Je liste ici, à destination des décideurs pressés, seulement les fonctionnalités. Voyez les détails techniques dans la section suivante.
- Il y a une messagerie instantanée, Talk. Ça peut surprendre pour qui ne connaissait Nextcloud, et son ancêtre Owncloud, que comme un logiciel de synchronisation de fichiers et calendriers. De plus, elle est assez développée, et il y a tout ce qu'il faut pour une petite équipe, avec des options pour de plus grands besoins.
- La "vraie" instantanéité, quoique parfois sporadique.
- Les groupes.
- Les appels audio et vidéo − qui fonctionnent bien même sans configuration spécifique.
- Les appels en groupe, que nous n'avons pas encore testés − jusqu'à 6 ou 7 personnes par groupe a priori dans la configuration de base, bien plus avec un serveur spécifique.
- Le partage d'écran lors d'un appel.
- La fédération (optionnelle, liste blanche ou totale). Oui, vous pouvez connecter plusieurs instances Nextcloud.
- Toutes les fonctions précédentes en fédération. Par exemple : chercher un contact dans une autre instance Nextcloud, l'ajouter à sa liste de contacts, puis l'appeler et partager son écran.
- Le partage de conversations par lien temporaire (sans compte), et toutes les fonctions précédentes idem. Idéal pour faire un partage d'écran & appel avec un client pour l'assisstance à distance.
- Le partage de fichier, par téléversement ou via un lien Files.
- Un client lourd (simple vue web).
Technologies utilisées
- L'instantanéité se fait sans surprise via WebSocket. Le serveur WS est fait en Rust, et le binaire est installé avec l'extension Nextcloud idoine. Il est trivial d'en faire un service au démarrage, par exemple avec Systemd.
- Elle nécessite Redis (ou un équivalent libre, telle Valkey).
- Pour une indépendance totale, pensez à remplacer stun.nextcloud.com et turn.nextcloud.com par vos propres serveurs (il y en a des libres écrits dans des langages applicatifs).
- L'audio-vidéo se fait via WebRTC, un protocole de pair-à-pair présent nativement dans les navigateurs web actuels. Il permet d'éviter à votre petit serveur maison d'avoir à traiter des flux vidéo. Mais comme tous les clients doivent s'envoyer mutuellement les flux de tous les autres, par nature cela limite le nombre de participants.
- Il est possible de remplacer WebRTC par un serveur dit haute performance en Go. Il a été libéré en 2020.
- La fédération fonctionne avec un protocole dédié, OCM (Open Cloud Mesh).
- Le client lourd, même s'il n'est qu'une vue web, a le mérite de permettre de désactiver l'optimisation de batterie pour une appli en particulier, afin de mieux recevoir les notifications (problème récurrent de toutes les messageries sur mobile).
Problèmes notables en 2025
- Les envois Websockets n'arrivent pas toujours, et même en arrivant les notifications navigateur (ou appli) ne sont pas toujours émises.
- Le défilement automatique des derniers messages ne se fait pas ou incorrectement, ce qui peut conduire à en rater.
- Il n'est pas possible de consulter les conversations avec d'autres personnes lors d'un appel.
- Il y a parfois des rechargements intempestifs de la page.
Conclusion et ouvertures
- Pourquoi ce truc n'est pas plus connu ? Ça me semble super important en termes de souveraineté (locale et nationale), au vu de l'intégration des différentes applis et de l'offre existante.
- Résultat un peu mitigé du point de vue des collègues, surtout au niveau de la fiabilité des notifications. Mais on n'est qu'au début et il se pourrait que le problème soit dû à des permissions MacOS. Moi je trouve ça pas mal.
- Des questions se posent quant à OCM :
- C'est un protocole fédéré : quid du spam ?
- En toute logique, on devrait voir apparaître des fournisseurs de messagerie OCM, sans forcément d'intégration Nextcloud.
- Qui me dira que c'est réinventer la roue, rapport à Jabber/XMPP… n'aura pas forcément tort. Une partie de l'expérience WebRTC provient de libjingle − voir aussi la XEP-0166.
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