Bien démarrer avec GnuPG

Posté par  . Édité par Davy Defaud, Benoît Sibaud, patrick_g et Ysabeau 🧶. Modéré par Ysabeau 🧶. Licence CC By‑SA.
59
23
mai
2020
Sécurité

N. D. M. : la dépêche est tirée du journal personnel de l’auteur, complétée des premiers commentaires suscités.

Suite à une diatribe de ma part à l’encontre de la mauvaise qualité de beaucoup de tutoriels consacrés à GnuPG, on m’a suggéré de créer le mien. Alors, without further ado, le voici.

Sommaire

Installation de GnuPG

Si vous utilisez GNU/Linux, GnuPG est dans les dépôts de toutes les distributions, et il est très souvent installé par défaut.

Il peut être utile néanmoins de vérifier que la version installée est bien issue de la dernière branche stable (2.2.x), et non de la branche 1.4.x (qui n’est maintenue que pour la compatibilité avec les versions de PGP datant des années 1990) ou des branches 2.0.x/2.1.x (qui sont obsolètes).

Il est possible de faire cohabiter GnuPG 1.4 et GnuPG 2.2 sur le même système ; dans ce cas, assurez‑vous que la version que vous utilisez en temps normal est bien la 2.2.

En 2020, il semble que sur la plupart des distributions GNU/Linux, demander l’installation d’un paquet gnupg installe bien GnuPG 2.2, le binaire correspondant étant disponible sous le nom gpg. Il y a quelques exceptions, comme Fedora, où gnupg installe GnuPG 1.4 — il faut demander l’installation de gnupg2 pour avoir GnuPG 2.2, le binaire correspondant étant appelé gpg2.

Dans le reste de cet article, je supposerai que gpg est le binaire de GnuPG 2.2 ; remplacez gpg par gpg2 si besoin, en fonction de votre distribution.

Sous Windows, Gpg4Win est la distribution GnuPG de référence. La version 3.1.11, à l’heure où ces lignes sont écrites, fournit GnuPG 2.2.17.

Sous macOS, GPG Suite est une distribution fournissant GnuPG 2.2.17. GnuPG est aussi disponible via MacPorts, sous le nom gnupg2.

Générer sa clef

Étape incontournable, la génération de la clef est malheureusement l’objet d’un volume considérable de désinformation. C’est l’étape où la plupart des « tutos » consacrés à GnuPG se fourvoient, et noient l’aspirant utilisateur sous une foule de « conseils » mal avisés, inutiles voire dangereux.

Alors, une bonne fois pour toutes : générer une clef, ça se fait en une seule étape, une seule commande :

$ gpg --gen-key
GnuPG doit construire une identité pour identifier la clef.

Nom réel : Alice
Adresse électronique : alice@example.org
Vous avez sélectionné cette identité :
    "Alice <alice@example.org>"

Changer le (N)om, l’(A)dresse électronique ou (O)ui/(Q)uitter ? o
De nombreux octets aléatoires doivent être générés. Vous devriez faire
autre chose (taper au clavier, déplacer la souris, utiliser les disques)
pendant la génération de nombres premiers ; cela donne au générateur de
nombres aléatoires une meilleure chance d’obtenir suffisamment d’entropie.
gpg: clef 54B4CC7749CAE7C3 marquée de confiance ultime
gpg: revocation certificate stored as '/home/alice/.gnupg/openpgp-revocs.d/7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3.rev'
les clefs publique et secrète ont été créées et signées.

pub   rsa2048 2020-05-13 [SC] [expires: 2022-05-13]
      7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3
uid                      Alice <alice@example.org>
sub   rsa2048 2020-05-13 [E]

Oui, c’est tout. Ça n’a pas besoin d’être plus compliqué que ça. Non, il n’est pas nécessaire d’ajouter préalablement trente‐cinq lignes dans le fichier de configuration de GnuPG pour changer les réglages par défaut. La configuration par défaut de GnuPG est saine ! Les réglages par défaut ont été choisis comme tels pour de bonnes raisons. Vous ne devriez y toucher que si vous savez exactement pourquoi ils ne conviendraient pas à votre cas d’utilisation — pas parce qu’un crypto‑nerd vous dit de le faire dans son billet de blog « générer une clef parfaite en dix‑sept étapes ».

À quoi ressemble une clef générée en suivant les réglages par défaut ? C’est une clef principale RSA de 2 048 bits, destinée aux opérations de signature, et une sous‑clef de chiffrement similaire. Elle a une durée de validité de deux ans à compter de sa création, et est associée aux préférences d’algorithmes suivantes :

  • pour le chiffrement : AES256, puis AES192, AES128 et 3DES ;
  • pour la condensation : SHA2‑512, puis SHA2‑384, SHA2‑256, SHA2‑224 et SHA‑1 ;
  • pour la compression : ZLIB, puis BZIP2, ZIP, pas de compression.

Une fois encore, ces préférences par défaut (qui ne datent pas d’hier — la plupart de ces réglages datent de 2009 ou 2010) sont saines et n’ont pas besoin d’être modifiées.

Éventuellement, si l’idée d’une clef RSA de 2 048 bits vous fait tiquer (ça ne devrait pas) et si vous êtes sûrs que vos correspondants utilisent tous des implémentations suffisamment modernes d’OpenPGP, vous pouvez opter pour une clef utilisant l’algorithme par défaut des prochaines versions de GnuPG1 :

$ gpg --quick-gen-key 'Robert <bob@example.org>' future-default
Sur le point de créer une clef pour :
    "Robert <bob@example.org>"

Faut-il continuer ? (O/n) o
De nombreux octets aléatoires doivent être générés. Vous devriez faire
autre chose (taper au clavier, déplacer la souris, utiliser les disques)
pendant la génération de nombres premiers ; cela donne au générateur de
nombres aléatoires une meilleure chance d’obtenir suffisamment d’entropie.
gpg: clef AC44CDC5733527A9 marquée de confiance ultime
gpg: revocation certificate stored as '/home/bob/.gnupg/openpgp-revocs.d/D7D0521F44673693DFFEB13FAC44CDC5733527A9.rev'
les clefs publique et secrète ont été créées et signées.

pub   ed25519 2020-05-13 [SC] [expires: 2022-05-13]
      D7D0521F44673693DFFEB13FAC44CDC5733527A9
uid                      Robert <bob@example.org>
sub   cv25519 2020-05-13 [E]

Pous obtenez alors une clef principale de signature de type Ed25519 et une sous‑clef de chiffrement de type cv25519 ; comme leur nom le laisse supposer, ces clefs sont basées sur la courbe elliptique dite « 25519 » (RFC 7748).

La courbe 25519 ne fait pas encore partie du standard OpenPGP, qui officiellement ne prend en charge pour l’instant que les courbes P‑256, P‑384, et P‑521 du NIST (RFC 6637). Elle a néanmoins été ajoutée dès les premiers brouillons du RFC « 4880bis » (la prochaine version du standard) en 2016 et peut être utilisée dès maintenant sans crainte pour la compatibilité future.

En pratique, la courbe 25519 est gérée par la plupart des implémentations d’OpenPGP — à ma connaissance, au moins GnuPG (≥ 2.1), OpenPGP.js, Sequoia-PGP, et RNP. Déterminer si elle est prise en charge par « Broadcom Encryption Desktop » (héritier de Symantec PGP), en dénichant des informations techniques au milieu des arguments commerciaux de Broadcom, est laissé en exercice au lecteur.

Concrètement, vous ne devriez pas rencontrer de problèmes si vous choisissez d’utiliser l’option future-default, à moins que certains de vos correspondants n’utilisent toujours GnuPG ≤ 2.0 — auquel cas, essayez de les convaincre de se mettre à jour, ce sera beaucoup plus productif que de suivre un tutoriel vous recommandant de générer une clef RSA de 8 192 bits.

Bien entendu, si la ligne de commande vous rebute, il est parfaitement possible de s’en passer. La manière exacte de générer une clef peut varier légèrement d’un frontal GnuPG à un autre (GPA, Seahorse, KGpg, etc.), mais les grandes lignes restent les mêmes et sont illustrées dans la suite.

Dans le reste de cet article, je privilégierai la ligne de commande aux frontaux graphiques. Nul élitisme de ma part, c’est simplement que l’interface en ligne de commande est la même partout, alors que chaque frontal a sa propre interface et qu’il n’est pas réaliste de les présenter tous — je reparlerai parfois de GPA parce que c’est le frontal que j’utilise, mais pour les autres, je vous renvoie à leur documentation.

Fig. 1Figure 1 — Les quatre étapes pour créer une clef avec GNU Privacy Assistant (GPA), le frontal officiel de GnuPG : saisissez votre nom (A), votre adresse de courriel (B), choisissez si vous voulez une copie de sauvegarde de votre future clef (C), observez votre clef nouvellement créée (D).

Que faire après avoir créé sa clef ?

Sauvegarder les clefs

Sauf contraintes très particulières, vos clefs doivent être sauvegardées ; n’en gardez qu’une seule copie sur la machine où elles ont été créées et sont utilisées, c’est courir le risque de les perdre (et avec elles, les données dont elles dépendent) le jour où le disque dur rend l’âme ou la machine est perdue ou volée.

S’il est possible d’adopter pour les clefs publiques une stratégie de sauvegarde torvaldienne (c.‐à‐d. les « mettre sur un serveur FTP et laisser le reste du monde en faire des miroirs »), ce n’est évidemment pas le cas des clefs privées…

Vous pourriez être tenté de faire une simple archive du dossier .gnupg, qui contient tous les fichiers manipulés par GnuPG (dont les trousseaux). Toutefois, ce n’est pas nécessairement une bonne idée : le contenu exact de ce dossier est considéré comme un détail d’implémentation interne à GnuPG, qui à ce titre est susceptible de changer au fil des versions (par exemple, la manière de stocker les clefs sur le disque a radicalement changé entre GnuPG 2.0 et GnuPG 2.1). Il est préférable de n’utiliser que l’interface publique de GnuPG, qui générera un fichier au format standard OpenPGP, dont il est garanti qu’il sera lisible par n’importe quelle version future de GnuPG (ou par une autre implémentation conforme du standard, indépendante de GnuPG).

Comme entr’aperçu en figure 1, si vous avez créé vos clefs avec GPA, vous avez pu choisir de créer automatiquement une copie de sauvegarde dès le début. Sinon, utilisez la commande suivante pour créer une telle copie :

$ gpg -o backup.gpg --export-secret-keys alice@example.org

Contrairement à ce que le nom de la commande --export-secret-keys peut laisser supposer, le fichier backup.gpg ne contient pas que la partie secrète des clefs, mais aussi tous les éléments qui composent la clef publique. Ce fichier est donc suffisant à lui seul pour restaurer l’intégralité de vos clefs.

Plus tard, lorsque vous aurez commencé à utiliser GnuPG pour échanger avec vos correspondants, vous aurez à sauvegarder deux éléments supplémentaires : les clefs publiques de vos correspondants et la confiance que vous leur accordez. Vous pouvez utiliser pour ça les deux commandes suivantes :

$ gpg -o public-keys.gpg --export
$ gpg --export-ownertrust > trust.txt

Ce que vous faites ensuite de votre copie de sauvegarde est de votre ressort. Notez qu’elle contient vos clefs privées sous leur forme protégée par votre phrase de passe (sauf si vous avez choisi de ne pas avoir de phrase de passe lors de la création de la clef). Donc, pour peu que ladite phrase de passe soit assez robuste, quiconque mettrait la main sur votre sauvegarde ne serait pas pour autant en mesure d’utiliser vos clefs.

Ah, et cela peut sembler évident, mais : ne stockez pas la copie de sauvegarde de votre clef privée sur un support chiffré avec la clef publique correspondante, qui nécessiterait la clef privée pour y accéder !

Une option de sauvegarde que j’apprécie particulièrement et que je recommande est celle de la sauvegarde sur papier. L’outil Paperkey est spécialement conçu pour ça : donnez‑lui votre copie de sauvegarde et il en fera une version imprimable :

$ paperkey --secret-key backup.gpg | lpr

Avoir des sauvegardes, c’est bien. Savoir les utiliser le jour où on en a besoin, c’est mieux. Les trois commandes suivantes restaurent successivement votre propre clef (parties publiques et privées), les clefs publiques de vos correspondants, et les informations de confiance :

$ gpg --import backup.gpg
$ gpg --import public-keys.gpg
$ gpg --import-ownertrust < trust.txt

Si vous devez restaurer votre clef à partir de la sauvegarde sur papier générée par paperkey, numérisez le papier en question, passez‑le à la reconnaissance optique de caractères (OCR) pour obtenir un fichier texte (appelé frompaper.txt dans la commande ci‑dessous), puis utilisez paperkey à nouveau pour reconstituer le fichier backup.gpg :

$ paperkey --pubring public-keys.gpg --secrets frompaper.txt --output backup.gpg

Notez l’utilisation du fichier public-keys.gpg, dans lequel paperkey vient trouver les parties publiques de votre clef (qui sont absentes de la version imprimable).

Mettre à l’abri le certificat de révocation

Un certificat de révocation vous permet de signaler à vos correspondants de ne plus utiliser votre clef publique, dans l’éventualité où vous ne seriez plus en mesure d’utiliser la clef privée correspondante — typiquement, soit parce que vous avez perdu la clef elle‑même (je vous avais bien dit de faire une copie de sauvegarde…), soit parce que vous avez oublié la phrase de passe qui la protège.

De nombreux tutoriels vous enjoignent de créer un tel certificat immédiatement après avoir créé votre clef. Toutefois, c’est inutile. En effet, GnuPG l’a déjà fait pour vous, comme vous l’avez peut‑être remarqué dans les sorties console plus haut :

gpg: revocation certificate stored as '/home/alice/.gnupg/openpgp-revocs.d/7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3.rev'

Vous le trouverez donc le dossier .gnupg/openpgp-revocs.d, dans un fichier nommé d’après l’empreinte de votre clef.

C’est probablement une bonne idée de stocker ce certificat ailleurs que sur la machine où vous avez déjà votre clef, puisque vous ne voulez pas perdre ce certificat en même temps que la clef elle‑même. Attention, où que vous décidiez de le stocker, gardez à l’esprit que quiconque met la main dessus peut unilatéralement révoquer votre clef, sans avoir en sa possession la clef privée et sans la connaissance de la phrase de passe (c’est tout l’objet de ce certificat que de ne pas avoir besoin de la clef privée).

N’utilisez ce certificat de révocation que dans le cas où vous perdez l’usage de votre clef. Si vous en avez toujours l’usage et que vous souhaitez la révoquer pour une toute autre raison (par exemple, simplement parce que vous estimez qu’elle a fait son temps et que vous souhaitez la remplacer par une nouvelle, ou si vous craignez qu’elle n’ait été compromise), générez un certificat de révocation ad hoc au moment où vous en avez besoin :

$ gpg -o revcert.asc --generate-revocation alice@example.org

sec  rsa2048/54B4CC7749CAE7C3 2020-05-13 Alice <alice@example.org>

Faut-il créer un certificat de révocation pour cette clef ? (o/N) o
Choisissez la cause de la révocation :
  0 = Aucune cause indiquée
  1 = La clef a été compromise
  2 = La clef a été remplacée
  3 = La clef n’est plus utilisée
  Q = Annuler
(Vous devriez sûrement sélectionner 1 ici)
Quelle est votre décision ? 2
Entrez une description facultative, en terminant par une ligne vide :
> 
Cause de révocation : La clef a été remplacée
(Aucune description donnée)
Est-ce d’accord? (o/N) o
Sortie forcée avec armure ASCII.
Certificat de révocation créé.

Veuillez le déplacer sur un support que vous pouvez cacher ; toute personne
accédant à ce certificat peut l’utiliser pour rendre votre clef inutilisable.
Imprimer ce certificat et le stocker ailleurs est une bonne idée, au cas où le
support devienne illisible. Attention tout de même : le système d’impression
utilisé pourrait stocker ces données et les rendre accessibles à d’autres.

L’avantage d’un certificat de révocation ad hoc, par rapport à un certificat « générique » généré préventivement à la création de la clef, est double. D’une part, comme illustré dans la sortie ci‑dessus, il permet de spécifier la raison motivant la révocation ; d’autre part, dans les cas où la clef est révoquée pour une raison autre qu’une compromission (choix 2 ou 3 ci‑dessus : clef remplacée ou plus utilisée), les signatures émises par la clef antérieurement à la révocation resteront valables, alors que dans le cas d’une clef révoquée sans raison explicitement spécifiée, toutes les signatures jamais émises par la clef sont remises en cause (comme dans le cas où la clef a été compromise).

Pour utiliser un certificat de révocation, importez‑le simplement dans votre trousseau avec gpg --import. Attention, importer un certificat de révocation ne demande pas de confirmation et est irréversible.

Diffuser la clef publique

Maintenant que vous avez une clef, il vous faut mettre la partie publique à disposition de vos correspondants.

Les serveurs de clefs SKS

Pendant longtemps, la méthode « classique » pour diffuser une clef publique a consisté à l’envoyer sur un des serveurs de clefs disponibles un peu partout sur Internet. Ces serveurs font typiquement partie d’un réseau au sein duquel les différentes instances se synchronisent régulièrement. Non seulement cela permet à l’utilisateur de ne pas se soucier du serveur auquel il s’adresse, mais cela fournit aussi une certaine résilience, aussi bien face aux incidents (un des serveurs du réseau devient subitement inaccessible) que contre certaines interférences de gens malintentionnés.

Malheureusement, aujourd’hui la survie à long terme du réseau des serveurs de clefs est incertaine. Il y a plusieurs raisons à cela, qui sortent du cadre de cet article, mais on peut citer pêle‑mêle : quasiment pas de développeurs motivés pour travailler sur le logiciel serveur de référence (SKS-Keyserver), un réseau entièrement dépendant de la bonne volonté des administrateurs (tous les nœuds sont gérés bénévolement), des désaccords dans la communauté sur les fonctionnalités que doit ou ne doit pas offrir un serveur de clefs, un principe de fonctionnement qui rend les serveurs vulnérables aux empoisonnements… C’est notamment ce dernier point qui, en 2019, a porté un coup probablement fatal au réseau, avec une attaque par empoisonnement visant quelques membres influents de la communauté.2

Quelles que soient les raisons, le fait est qu’il n’y a plus, à l’heure où j’écris ces lignes, qu’à peine une vingtaine de serveurs dans le groupe principal sks-keyservers.net, contre facilement plus d’une centaine habituellement. Le réseau est toujours utilisable pour l’instant, mais il faut se préparer à ne plus pouvoir compter dessus dans un futur plus ou moins proche.

Pour l’instant donc, GnuPG est toujours configuré pour utiliser le groupe sks-keyservers.net par défaut, alors tant que le pool est vivant et si vous acceptez une certaine incertitude sur la disponibilité, vous n’avez rien de particulier à faire. Pour envoyer votre clef dont l’identifiant est 7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3 sur un des serveurs du réseau, faites simplement :

$ gpg --send-keys 7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3

ou avec les huit derniers octets :

$ gpg --send-keys 54B4CC7749CAE7C3

voire seulement les quatre derniers octets :

$ gpg --send-keys 49CAE7C3

Le serveur keys.openpgp.org

Un nouveau serveur de clefs a récemment vu le jour, en partie en réaction aux déboires du réseau SKS : keys.openpgp.org. Il utilise non pas SKS-Keyserver, mais Hagrid (le « gardien des clefs » de Poudlard), un serveur de clefs basé sur Sequoia-PGP (une bibliothèque OpenPGP en Rust).

Bien qu’il puisse être considéré comme un remplaçant ou un successeur du réseau SKS, plusieurs différences importantes sont à noter avant de décider de l’utiliser.

Il s’agit d’un serveur, non d’un groupe (pool). Même si n’importe qui peut monter son propre serveur Hagrid (tout comme avec SKS), il n’y a aucune synchronisation possible entre serveurs (contrairement à SKS, pour lequel c’est même une fonctionnalité majeure). Même si les développeurs affirment qu’une certaine décentralisation est prévue à l’avenir, ils préviennent que, quelle que soit la forme que prendra cette décentralisation, il ne sera pas question d’une « fédération ouverte » similaire à SKS (ce qui personnellement me fait m’interroger sur ce que peut être une fédération « fermée » — d’autant que contrairement à ce qu’ils semblent suggérer, n’entrait déjà pas dans le groupe SKS qui veut). Le serveur keys.openpgp.org est donc un point de défaillance unique et un point d’attaque unique (single point of attack).

Hagrid vérifie les adresses de courriel lorsqu’une clef est déposée sur le serveur, afin que seul le titulaire d’une adresse ne puisse déposer une clef associée à cette adresse. Le but étant à la fois de permettre à chacun de garder le contrôle sur ce qui est publié par le serveur, et d’offrir la garantie qu’une clef trouvée sur le serveur appartient bien à qui elle déclare appartenir (deux garanties jamais offertes par les serveurs classiques, par conception). C’est sympathique, mais cela implique que le serveur est de fait analogue à une autorité de certification à laquelle vous devez faire confiance, une idée qui personnellement ne me plaît guère.3

Dernier point, et pas des moindres, Hagrid viole délibérément le standard OpenPGP dans certaines situations (notamment pour la diffusion des certificats de révocation), en diffusant des paquets de clef publique associés à aucune identité — ce que le standard ne permet pas. Cela conduit les implémentations conformes à refuser certains paquets en provenance d’un serveur Hagrid. Ce n’est pas un « bogue de GnuPG » comme le laisse entendre la FAQ de keys.openpgp.org.

Cela étant dit, si vous souhaitez utiliser ce serveur pour y chercher des clefs, il vous suffit d’ajouter la ligne suivante dans le fichier ~/.gnupg/dirmngr.conf :

keyserver hkps://keys.openpgp.org

Puis relancer le démon réseau de GnuPG, dirmngr :

$ gpgconf --reload dirmngr

Pour déposer une clef, en revanche, la commande --send-keys de GnuPG ne suffit pas, puisqu’elle ne permet pas à Hagrid de vérifier l’adresse (ce n’est pas prévu par le protocole HKP, utilisé par GnuPG derrière cette commande). À la place, il vous faut exporter la clef :

$ gpg -o alice.pub --export alice@example.org

Puis télécharger le fichier alice.pub sur keys.openpgp.org/upload, et suivre les instructions d’Hagrid pour procéder à la vérification d’adresse.

Si vous utilisez le greffon Enigmail pour Thunderbird, il utilise déjà keys.openpgp.org par défaut et implémente l’API spécifique de Hagrid (en remplacement du protocole HKP), lui permettant de procéder à la vérification d’adresse en arrière‑plan sans intervention de l’utilisateur.

Autres méthodes de distribution

D’autres méthodes existent pour assurer la diffusion des clefs publiques, notamment la publication dans le DNS (DANE, RFC 7929) et dans un Web Key Directory (WKD). Pour ces deux méthodes je vous renvoie à un précédent journal ; néanmoins la mise en œuvre de DANE et de WKD dépend de celui qui contrôle le domaine de votre adresse de courriel (votre fournisseur d’accès à Internet ou de messagerie, votre employeur, votre université…) — à moins que vous ne disposiez de votre propre domaine, décider d’utiliser DANE ou WKD n’est pas vraiment de votre ressort.

Au‑delà des méthodes formalisées de distribution (serveurs de clefs décentralisés ou non, DANE, WKD), vous pouvez (devez ?) aussi distribuer votre clef par tous les moyens possibles et imaginables. La poster sur un forum, sur votre blog, dans votre profil Facebook (il y a un champ dédié à cet usage), etc.

Là où il n’est pas pratique de publier la clef proprement dite faute de place, n’hésitez pas à publier a minima son empreinte : sur votre profil Twitter ou Mastodon (ou n’importe quel autre type de réseau dit « social »), sur vos cartes de visite, en signature de vos messages sur les forums où vous intervenez, etc.

Pour obtenir l’empreinte d’une clef (dont la vôtre), demandez simplement à GnuPG d’afficher ladite clef :

$ gpg -k alice@incenp.org
pub   rsa2048 2020-05-13 [SC]
      7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3
uid           [ ultime ] Alice <alice@example.org>
sub   rsa2048 2020-05-13 [E]

Chiffrer, signer des fichiers

Cette section passe rapidement en revue la manière d’utiliser GnuPG sur des fichiers locaux, sans communication avec l’extérieur.

Chiffrer un fichier

Pour chiffrer un fichier à votre propre attention, la commande de base est la suivante :

$ gpg -r alice@example.org -e lorem.txt

L’option -r UID (ou --recipient UID) indique la clef publique avec laquelle chiffrer le fichier. Elle attend en paramètre l’identité (UID, User ID) associée à la clef que vous voulez utiliser. Ici, il s’agit de la vôtre (en supposant, comme dans tout le reste de ce journal, que vous êtes Alice). Notez que vous n’avez pas nécessairement besoin de spécifier l’identité en entier, dès lors qu’il n’y a aucune ambiguïté : si votre trousseau de clefs publiques ne contient qu’une seule clef dont l’identité associée contient la chaîne « alice », alors -r alice sera suffisant (dans le cas contraire, si plusieurs clefs peuvent correspondre, GnuPG sélectionnera arbitrairement la première qu’il trouve dans le trousseau, qui ne sera peut‑être pas celle que vous vouliez).

Si vous prévoyez de chiffrer des fichiers à votre attention assez fréquemment, vous pouvez envisager d’ajouter l’option default-recipient-self dans le fichier de configuration de GnuPG (~/.gnupg/gpg.conf) ; elle conduira GnuPG à sélectionner votre propre clef publique par défaut si vous ne spécifiez aucune clef explicitement. Avec cette option en place, la commande ci‑dessus devient simplement :

$ gpg -e lorem.txt

Le paramètre -e (ou --encrypt) est la commande de chiffrement. Elle attend simplement le nom du fichier à chiffrer, dans le cas présent lorem.txt. Cette commande produira un fichier lorem.txt.gpg contenant la version chiffrée du fichier précédent.

Quelle que soit l’opération que vous demandez à GnuPG (chiffrer, signer, déchiffrer), vous pouvez toujours utiliser l’option -o (ou --output) pour spécifier explicitement le nom du fichier de sortie.

Signer un fichier

Il y a trois commandes différentes pour effectuer une signature, qui correspondent aux trois types de signature possibles :

  • la signature « standard » (faute d’un meilleur nom pour la désigner), demandée avec la commande -s (ou --sign), qui produit un fichier contenant à la fois le document qui a été signé (enveloppé dans un paquet OpenPGP) et la signature correspondante ;
  • la signature en clair (cleartext signature), avec la commande --clear-sign, qui produit aussi un fichier contenant à la fois le document original et sa signature, mais ici le document original n’est pas enveloppé dans un paquet OpenPGP et reste sous une forme textuelle lisible — ce type de signature n’est utile que si le document original à signer est lui‑même de type texte, une signature en clair sur un document binaire n’a aucun sens ;
  • la signature détachée, avec la commande -b (ou --detach-sign), qui produit un fichier ne contenant que la signature, sans le document original ; lors de la vérification, le document original doit être fourni à GnuPG en même temps que la signature détachée — ce type de signature est typiquement utilisé pour signer les archives de code source, l’avantage dans ce cas de figure étant que ceux qui ne sont pas intéressés par la vérification de la signature peuvent utiliser l’archive directement, sans avoir à l’extraire de son enveloppe OpenPGP, comme dans le cas d’une signature « normale ».

Il est possible de signer et chiffrer en même temps en combinant les commandes -s et -e. Dans ce cas, le fichier produit contient à la fois le document chiffré et la signature correspondante. Ce n’est possible que pour les signatures « standard », combiner chiffrement et signature en clair ou détachée n’a pas de sens.

Toutes les commandes de signature utilisent par défaut la première clef trouvée dans le trousseau de clefs secrètes. La plupart des utilisateurs n’ont normalement qu’une seule clef secrète (compte non tenu des sous‑clefs), donc ce comportement convient la plupart du temps. Si néanmoins vous avez plusieurs clefs secrètes, vous pouvez ajouter l’option default-key UID1 dans le fichier de configuration de GnuPG pour toujours signer avec la clef associée à l’identité UID1, ou utiliser l’option -u UID2 sur la ligne de commande pour ponctuellement signer avec la clef associée à l’identité UID2.

Les commandes de signatures produisent par défaut un fichier portant le même nom que le fichier à signer plus une extension dépendant du type de signature :.gpg pour une signature normale, .asc pour une signature en clair, .sig pour une signature détachée. Ces extensions sont purement conventionnelles et n’ont aucune signification pour GnuPG, qui identifie les fichiers qu’il manipule sur la base du type de paquets OpenPGP qu’ils contiennent et non sur leur extension.

Déchiffrer, vérifier un fichier

La commande -d (ou --decrypt) déchiffre un fichier :

$ gpg -d lorem.txt.gpg
gpg: chiffré avec une clef RSA de 2048 bits, identifiant 45EDD81BCE62E9BD, créée le 2020-05-13
      "Alice <alice@example.org>
Lorem ipsum dolor sit amet, consectetuer adipiscing elit. Ut purus
[...]

Notez l’asymétrie entre les commandes de chiffrement (-e) et de déchiffrement (-d) : la première produit un fichier, tandis que la seconde écrit par défaut sur la sortie standard.

Si le fichier lorem.txt.gpg est un fichier chiffré et signé, GnuPG vérifiera la signature en même temps qu’il déchiffrera, et affichera le résultat à la fin de l’opération :

$ gpg -d lorem.txt.gpg
gpg: chiffré avec une clef RSA de 2048 bits, identifiant 45EDD81BCE62E9BD, créée le 2020-05-13
      "Alice <alice@example.org>
Lorem ipsum dolor sit amet, consectetuer adipiscing elit. Ut purus
[…]
gpg: Signature faite le mar. 19 mai 2020 23:23:21 BST
gpg:                avec la clef RSA 7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3
gpg: Bonne signature de « Alice <alice@example.org> » [ultime]

La commande -d, malgré son nom, s’utilise aussi sur un fichier signé uniquement, pour vérifier la signature et extraire le document signé de son enveloppe OpenPGP et le rendre ainsi utilisable.

On utilisera la commande --verify pour vérifier une signature en clair…

$ gpg --verify lorem.txt.asc
gpg: Signature faite le mar. 19 mai 2020 23:34:22 BST
gpg:                avec la clef RSA 7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3
gpg: Bonne signature de « Alice <alice@example.org> » [ultime]

… ainsi que pour vérifier une signature détachée. Dans ce cas, GnuPG attend en premier argument le fichier de signature proprement dit, et en second argument le document original (en l’absence de cet argument, GnuPG cherchera un fichier portant le même nom que le fichier de signature moins l’extension .sig, mais il est préférable de spécifier le fichier explicitement) :

$ gpg --verify lorem.txt.siglorem.txt
gpg: Signature faite le mar. 19 mai 2020 23:41:52 BST
gpg:                avec la clef RSA 7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3
gpg: Bonne signature de « Alice <alice@example.org> » [ultime]

Il est aussi possible d’utiliser la commande --verify sur une signature « standard » ; mais dans ce cas, GnuPG ne fera que vérifier la signature, sans extraire le document signé, contrairement à ce que fait la commande -d.

Fig. 2Figure 2 — Exemples d’opérations sur des fichiers avec GPA. Pour chiffrer un fichier, ouvrez‑le dans le File Manager (A) et cliquez sur le bouton correspondant dans la barre d’outils. Dans la fenêtre de dialogue qui s’ouvre (B), sélectionnez la clef publique avec laquelle chiffrer le document, et éventuellement la clef privée avec laquelle le signer. En (C), un exemple du résultat d’une vérification de signature.

Chiffrer, signer des courriels

Pour finir, il est temps d’utiliser GnuPG pour ce pour quoi il est en principe conçu (même si en vrai vous l’utilisez bien pour ce que vous voulez…), à savoir chiffrer et signer des courriels.

Si vous n’avez pas d’amis, vous pouvez toujours envoyer un courriel à Edward, un automate (bot) mis en place par la Free Software Foundation pour permettre aux gens d’essayer le chiffrement des courriels.

Obtenir la clef d’Edward

La première étape pour établir une communication chiffrée, que ce soit avec Edward ou n’importe qui d’autre, est d’obtenir la clef publique de votre correspondant.

Cherchez donc la clef d’Edward sur les serveurs de clefs, et importez‑la :

$ gpg --search-keys edward-fr@fsf.org
gpg: data source: http://pgp.surf.nl:11371
(1)     Edward, el simpático robot GnuPG <edawrd-es@fsf.org>
        Edward the GPG Bot <edward@fsf.org>
        Edward, the GPG Bot <edward-en@fsf.org>
        Edward, le gentil robot de GnuPG <edward-fr@fsf.org>
        […]
        2048 bit RSA key 9FF2194CC09A61E8, créé : 2014-06-29
Keys 1-1 of 1 for "edward-fr@fsf.org". Entre le ou les nombres, (S)uivant, ou (Q)uitter > 1
gpg: clef 9FF2194CC09A61E8 : clef publique « Edward, el simpático robot GnuPG <edward-es@fsf.org> » importée
gpg: Quantité totale traitée : 1
gpg:               importées : 1

Si vous avez choisi, dans la section relative aux serveurs de clefs, d’utiliser le nouveau serveur keys.openpgp.org, la clef d’Edward n’y est malheureusement pas disponible. Dans ce cas, vous pouvez utiliser l’option --keyserver sur la ligne de commande pour ponctuellement ignorer le serveur que vous avez configuré dans ~/.gnupg/dirmngr.conf :

$ gpg --keyserver hkp://pool.sks-keyservers.net --search-keys edward-fr@fsf.org

En cas de problème avec le réseau SKS, une copie de la clef est incluse ci‑dessous :

-----BEGIN PGP PUBLIC KEY BLOCK-----

mQENBFOwfzoBCADpwK6sGC3EUzgD7IW1X5ZDR1nC5/rcXacAJLarPpvQBEz4pwjT
joAzATM7F9RwIzJ3hJTZHiYaQY4cfiGlKSnrd8GPC8A4QkxXIaQ0hLpcsBSbtZJp
o2iOzL2fRHmW2ZlnSHXPKbDwx5p0NcdQfjL9i2Yo31aLIO/Chhn5uyvIznOjaCSC
/O6x2C4m81Lu+B4UTDpl8y6ChtphUxyFGd7RXDXmkYQrxVqJbXKuSVmNMhM09myG
7iQ1l0YLOcCxa3IXDqQkte49BhMGB9wl4eDTE86HEzRjMtdhFpbTOW/+1N4XkOUV
y42HzGtmSAttojpIp00foNlWn1sn7JZJ18ojABEBAAG0NEVkd2FyZCwgbGUgZ2Vu
dGlsIHJvYm90IGRlIEdudVBHIDxlZHdhcmQtZnJAZnNmLm9yZz6JATgEEwECACIF
AlOxd9YCGwMGCwkIBwMCBhUIAgkKCwQWAgMBAh4BAheAAAoJEJ/yGUzAmmHorAwI
AI/THdk1Lj0IoYxGzOxGq1j2l1iRa2JcKNdsj0PzSpDHjtycCqJZrjBWAMJRymBt
WHeS6KLw992cEbmZ7wh0ObFXSicDTBOTAu3xwjNIRATAlH3f5nPNMnyULiNUbQin
naU7zOr/Iq88onb3FrjqhGETdxGXBm6RgoWGX7vdzdgY99CnC5bTt3TCu+9ddzVJ
NxS3yycwPl4IlRaSyQHQIMMRVs3p0e/8cqtZDBzsMOLPtoRGFoYBo3/pZWwF7kFX
n6u/z7UzuvW+COYtU2wIdSVkdmpn9jWl4+7UgKOXprDcQmrdGiCeErUxPbpWikza
VvVQkruAG9skMjuSk0Cmmai5AQ0EU7B/OgEIAMJfFthcYpgykvEHCBVm6vpMof1E
xuQ1bxNI1KVs2GTXF2sn9dXa6RvM6dz9xferglaZnsG+j7ACVaEHsgqe/E0VjhIS
NP1sJgH4dtyoL06dWp6Bs8SdI1Jasm+h55cXgYagahNpub1TUxjpsu8ZsyM/5cRp
B2HCmCXIsTYPEwIQu77XMpNo+mRi8oguOJ44ZMIYrvzivrJh1GnCbimSFfj7eMoF
1SHwl+e+k8reDqnoIWp514NGo9LLlwGIG0TQcg9S/tIchibmMZOV+xSS+MFxpMvm
eWCrgVJdK2paJ4d+8ZaxvkRDEtfGbmTOr7dFfA8i1heIPcbw4ejZEHGKWesAEQEA
AYkBHwQYAQIACQUCU7B/OgIbDAAKCRCf8hlMwJph6O+7CADBAYe5gTjFsA+vwVNt
gwrYXQv/w1XIndFUsOO3T7NjfTVETd652kIU4zFJRf3ebXbxz3E+1f1qPuVD8WJ9
5Roeyl8nsEoxr+iB6+/FqRIbHMnC0qqYRjVYvtD5ezgNpqGy/3dJmrhOuj7JHKIm
aB6tALq6JWb5URDHU5tCHPCyBJQhuMGBZzzyAexmBSk2CiKLX9DyX36ZO2+vlQK4
X0FW1M4qrC1gEB7sEpP9xTsST7MZr9USevwRcbRd/GvPFpTnI6JWazAmnhoRyOEA
ld6ORPNW1EUPBsIhfazP3v5SG5NXDAjYMHH/MbX872FhoBWerfHpi1yyZPHSkkXI
UAaY
=/0NJ
-----END PGP PUBLIC KEY BLOCK-----

Copiez‑la dans un fichier, puis importez‑la manuellement :

$ gpg --import edward.asc

Une fois la clef d’Edward dans votre trousseau public, il faut la signer pour la marquer comme valide (je vous renvoie à un précédent journal pour plus de détails sur la notion de validité, et notamment pour savoir en quoi le fait de signer une clef la rend valide). Pour cela, lancez l’éditeur de clefs sur la clef d’Edward :

$ gpg --edit-key edward-fr@fsf.org

pub  rsa2048/9FF2194CC09A61E8
     créé : 2014-06-29  expire : jamais      utilisation : SC
     confiance : inconnu       validité : inconnu
sub  rsa2048/469DDF6D9014D2D6
     créé : 2014-06-29  expire : jamais      utilisation : E
[ inconnue] (1). Edward, el simpático robot GnuPG <edward-es@fsf.org>
[ inconnue] (2)  Edward the GPG Bot <edward@fsf.org>
[ inconnue] (3)  Edward, the GPG Bot <edward-en@fsf.org>
[ inconnue] (4)  Edward, le gentil robot de GnuPG <edward-fr@fsf.org>
[…]

Affichez l’empreinte complète de la clef et vérifiez qu’elle correspond à l’empreinte dans la sortie ci‑dessous :

gpg> fpr
pub   rsa2048/469DDF6D9014D2D6 2014-06-29 Edward, el simpático robotGnuPG <edward-es@fsf.org>
 Empreinte clef princip. : F357 AA1A 5B1F A42C FD9F  E52A 9FF2 194C C09A 61E8

Si l’empreinte correspond, vous pouvez procéder à la signature :

gpg> sign

Voulez-vous vraiment signer toutes les identités ? (o/N) o

pub  rsa2048/9FF2194CC09A61E8
     créé : 2014-06-29  expire : jamais      utilisation : SC
     confiance : inconnu       validité : inconnu
Empreinte clef princip. : F357 AA1A 5B1F A42C FD9F  E52A 9FF2 194C C09A 61E8

     Edward, el simpático robot GnuPG <edwardes@fsf.org>
     Edward the GPG Bot <edward@fsf.org>
     Edward, the GPG Bot <edward-en@fsf.org>
     Edward, le gentil robot de GnuPG <edward-fr@fsf.org>
     […]

Voulez-vous vraiment signer cette clef avec votre
clef « Alice <alice@example.org> » (54B4CC7749CAE7C3)

Voulez-vous vraiment signer ? (o/N) o

gpg> save

Thunderbird et Enigmail

Si vous utilisez le client de messagerie électronique Thunderbird, vous devez (pour l’instant) installer le greffon Enigmail pour y ajouter la prise en charge d’OpenPGP, Thunderbird ne gérant nativement que S/MIME. Cherchez Enigmail depuis le gestionnaire de greffons de Thunderbird, puis installez‑le.

Enigmail ne fonctionnera plus à partir de Thunderbird 78, dont la sortie est prévue d’ici la fin de l’année 2020. À la place, la nouvelle version de Thunderbird prendra nativement en charge OpenPGP sans qu’un greffon ne soit nécessaire.

L’étendue de cette prise en charge native reste encore à voir, mais elle sera probablement, au moins dans l’immédiat, plus limitée que ce qui est actuellement offert par Enigmail.

Une chose semble déjà sûre, Thunderbird n’utilisera pas les trousseaux de GnuPG (pas plus le trousseau public que le trousseau privé). Il sera possible d’importer les clefs de GnuPG vers Thunderbird, mais une fois cela fait, les clefs importées seront gérées par Thunderbird indépendamment de GnuPG — toute modification faite dans GnuPG sera invisible depuis Thunderbird et inversement.

À titre personnel, je trouve que c’est une très mauvaise idée. Et je suis globalement assez dubitatif de l’approche consistant à jeter à la poubelle une implémentation pleinement fonctionnelle pour après coup se rendre que compte que « oh, ben zut, il y avait des fonctionnalités utiles en fait ; bon, comment on fait pour les réimplémenter from scratch maintenant ? », comme avec la gestion des cartes OpenPGP.

L’avenir dira si cette orientation aura permis d’attirer de nouveaux utilisateurs ou si elle aura surtout fait fuir les utilisateurs déjà existants. /rant

Fig3Figure 3 — Utilisation d’Enigmail dans Thunderbird. (A) Sitôt installé, Enigmail détecte votre installation de GnuPG et vos clefs pré‑existantes. (B) Envoi d’un courriel chiffré et signé à Edward, auquel on joint une copie de sa propre clef publique. (C) Réception et déchiffrement de la réponse automatique d’Edward.

Une fois Enigmail installé, il devrait automatiquement détecter GnuPG et vous proposer de se configurer pour utiliser la clef que vous avez déjà ; acceptez en cliquant sur Apply my keys (figure 3A).

Si vous installez Enigmail sans avoir préalablement généré vous‑même votre clef, Enigmail en générera silencieusement une pour vous, mais se configurera automatiquement pour utiliser p≡p plutôt que GnuPG. Sans rentrer dans les détails, p≡p est une solution de chiffrement opportuniste, basée entre autres sur OpenPGP mais où, en gros, l’utilisateur ne contrôle plus rien… L’utilisation de p≡p a parfois été appelée Junior mode, mais ce terme ne semble plus apparaître dans la documentation ou l’interface d’Enigmail.

Vous pouvez maintenant envoyer un courriel à edward-fr@fsf.org (figure 3B). Par défaut, le message sera signé, et comme la clef publique d’Edward est déjà dans votre trousseau, Enigmail devrait reconnaître son adresse et aussi activer le chiffrement. Si vous voulez qu’Edward puisse chiffrer également sa réponse à votre attention, pensez à joindre votre propre clef publique au message, en utilisant l’option appropriée dans le menu d’Enigmail.

Lors de l’envoi, il se peut qu’Enigmail vous propose une option appelée protected headers, qui vise à chiffrer certains en‑têtes du message (notamment l’objet) et non seulement le corps du message. Je déconseille personnellement cette option qui repose sur une proposition de standard à mon sens beaucoup trop complexe pour le bénéfice qu’elle apporte, et dont la prise en charge par un grand nombre de clients de messagerie est incertain. Gardez plutôt à l’esprit que les en‑têtes ne sont pas chiffrés,4 et abstenez‑vous de divulguer trop d’informations dans les objets de vos messages.

Après quelques minutes, vous devriez recevoir une réponse automatique d’Edward. Vous aurez ainsi confirmation que tout s’est bien passé (figure 3C). Félicitations, vous venez de procéder à votre premier échange de courriels chiffrés.

(Neo)Mutt

Si vous utilisez le client Mutt ou la divergence (fork) Neomutt, tous deux prennent nativement en charge OpenPGP et ne nécessitent qu’un minimum de configuration. Ajoutez simplement les deux lignes suivantes à votre fichier mutrc :

set crypt_use_gpgme = yes
set pgp_default_key = 0x7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3

La première ligne configure (Neo)Mutt pour utiliser la bibliothèque GpgME pour interagir avec GnuPG (ce qui est la manière recommandée par les développeurs de GnuPG), au lieu d’appeler le binaire gpg directement (ce qui est toujours possible mais « error‑prone »). La seconde ligne indique la clef à utiliser par défaut ; cette clef sera utilisée pour signer vos messages, et pour en chiffrer une copie à votre attention (afin que vous puissiez toujours déchiffrer les messages envoyés à des tiers). Remplacez la valeur indiquée par l’empreinte de votre propre clef.

Fig4Figure 4 — Utilisation de Neomutt. (A) Préparation d’un message chiffré et signé dans Neomutt. (B) Le menu PGP permettant de sélectionner si un message doit être chiffré, signé, signé avec une clef autre que celle configurée par défaut, chiffré et signé. (C) Le menu de sélection de la clef publique du destinataire.

Une fois (Neo)Mutt configuré, envoyez donc un courriel à Edward. Préparez le message de la manière habituelle jusqu’à arriver à la fenêtre d’envoi (figure 4A). Par défaut, le message sera seulement signé, appuyez sur la touche p pour appeler le menu PGP (figure 4B), puis sur la touche b, comme indiqué, pour demander que le message soit chiffré et signé.

Attachez au message une copie de votre clef publique en tapant Échap puis k et en sélectionnant votre clef dans le menu correspondant. Au moment d’envoyer le message, vous serez invité à sélectionner la clef publique avec laquelle chiffrer le message (figure 4C), parmi les clefs associées à une adresse correspondant à celle du destinataire du message. Sélectionnez la clef d’Edward (qui logiquement devrait être la seule, vous ne devriez pas avoir plus d’une clef associée à l’adresse edward-fr@fsf.org), puis envoyez.

Attendez quelques minutes de recevoir la réponse d’Edward, et vérifiez que tout s’est bien passé.

Autres clients

Il ne serait pas réaliste de vouloir couvrir tous les clients de messagerie existants et je n’essayerai même pas.

Beaucoup de clients libres ont une gestion native d’OpenPGP : GNOME Evolution, KMail, Claws-Mail… En général, ils n’opposent pas de difficultés majeures.

Sous Windows, la distribution Gpg4Win, déjà mentionnée dans la première section, est fournie avec GpgOL, un greffon pour Microsoft Outlook.

Sous macOS, GPG Suite fournit un greffon pour Apple Mail appelé GPG Mail. Attention, ce greffon est libre (comme le reste de GPG Suite) mais, depuis peu, payant.

Sous Android, OpenKeychain apporte la prise en charge d’OpenPGP à plusieurs applications, dont le client de messagerie K‑9 Mail.

À titre personnel, il est hors de question que j’accepte de stocker une quelconque clef privée sur un téléphone Android. Je ne recommande l’utilisation d’OpenKeychain que couplée à un jeton cryptographique comme la Yubibey 5 NFC.

Comment changer la date d’expiration de sa clef ?

N. D. M. : tiré de ce fil de commentaires.

La clef générée a donc une validité de deux ans. Que faire en 2022 pour pouvoir encore utiliser sa clef ?

Il suffit de changer la date d’expiration, ce qui se fait avec la commande expire dans l’éditeur de clefs de GnuPG :

$ gpg --edit-key alice
La clef secrète est disponible.

sec  rsa2048/54B4CC7749CAE7C3
     créé : 2020-05-13  expire : 2022-05-13  utilisation : SC
     confiance : ultime        validité : ultime
ssb  rsa2048/45EDD81BCE62E9BD
     créé : 2020-05-13  expire : 2022-05-13  utilisation : E
[  ultime ] (1). Alice <alice@example.org>

gpg> expire
Modification de la date d’expiration de la clef principale.
Veuillez indiquer le temps pendant lequel cette clef devrait être valable.
         0 = la clef n’expire pas
      <n>  = la clef expire dans n jours
      <n>w = la clef expire dans n semaines
      <n>m = la clef expire dans n mois
      <n>y = la clef expire dans n ans
Pendant combien de temps la clef est-elle valable ? (0) 0
La clef n’expire pas du tout
Est-ce correct ? (o/N) o

sec  rsa2048/54B4CC7749CAE7C3
     créé : 2020-05-13  expire : jamais      utilisation : SC
     confiance : ultime        validité : ultime
ssb  rsa2048/45EDD81BCE62E9BD
     créé : 2020-05-13  expire : 2022-05-21  utilisation : E
[  ultime ] (1). Alice <alice@example.org>

Attention, comme on le voit ici seule la date d’expiration de la clef principale a été changée. Pour changer celle de la sous‑clef de chiffrement, il faut relancer la commande expire après avoir sélectionné ladite sous‑clef avec la commande key :

gpg> key 1

sec  rsa2048/54B4CC7749CAE7C3
     créé : 2020-05-13  expire : jamais      utilisation : SC
     confiance : ultime        validité : ultime
ssb* rsa2048/45EDD81BCE62E9BD
     créé : 2020-05-13  expire : 2022-05-21  utilisation : E
[  ultime ] (1). Alice <alice@example.org>

La sous‑clef de chiffrement est maintenant sélectionnée (notez l’astérisque dans ssb*), on peut changer sa date d’expiration :

gpg> expire
Modification de la date d’expiration d’une sous-clef.
Veuillez indiquer le temps pendant lequel cette clef devrait être valable.
         0 = la clef n'expire pas
      <n>  = la clef expire dans n jours
      <n>w = la clef expire dans n semaines
      <n>m = la clef expire dans n mois
      <n>y = la clef expire dans n ans
Pendant combien de temps la clef est-elle valable ? (0) 0
La clef n’expire pas du tout
Est-ce correct ? (o/N) o

sec  rsa2048/54B4CC7749CAE7C3
     créé : 2020-05-13  expire : jamais      utilisation : SC
     confiance : ultime        validité : ultime
ssb* rsa2048/45EDD81BCE62E9BD
     créé : 2020-05-13  expire : jamais      utilisation : E
[  ultime ] (1). Alice <alice@example.org>

gpg> save

À noter que la date d’expiration d’une clef peut être changée à tout moment — y compris une fois que la clef a déjà expiré ! Donc même si vous vous réveillez le 21 mai 2022 et que vous vous rendez compte que vous avez oublié de prolonger la période de validité de votre clef et qu’elle a expiré hier, il n’est pas trop tard pour la changer.

Les changements de date d’expiration sont possibles dans tous les sens : on peut rendre « inexpirable » une clef qui avait auparavant une date d’expiration, tout comme on peut à l’inverse mettre une date d’expiration à une clef qui auparavant n’expirait jamais. Sitôt une nouvelle date d’expiration (y compris « pas de date d’expiration ») mise en place, les dates d’expirations précédentes sont complètement ignorées.

La seule contrainte est qu’il n’est pas possible de spécifier une date d’expiration postérieure au 7 février 2106 — c’est une limitation du format OpenPGP qui stocke les dates sous forme d’entiers non signés de 32 bits (or, 1ᵉʳ janvier 1970 + 232 secondes ≈ 7 février 2106). Mais si vous avez besoin d’une clef valable aussi longtemps, autant rendre la clef « inexpirable »…

Après avoir changé la date d’expiration d’une clef, il faut permettre à ses correspondants de prendre connaissance de la nouvelle date d’expiration, en republiant la clef via n’importe quel moyen qui a été utilisé pour la publier en premier lieu (par exemple, en la renvoyant vers un serveur de clefs avec --send-keys).

De manière générale, toute modification de la clef (ajout ou révocation d’une identité, ajout ou révocation d’une sous‑clef, changement des algorithmes préférés, changement de la date d’expiration) est une modification locale, qui n’a pas d’effets au‑delà de votre machine tant que vous ne republiez pas explicitement votre clef. À aucun moment GnuPG ne prendra l’initiative de transmettre vos modifications au monde extérieur.

N. B. — Le changement de la phrase de passe ne nécessite évidemment pas de republication, puisque cela ne concerne que la clef privée.

Utilisation dans un logiciel ne prenant pas en charge GPG

N. D. M. : tiré de ce fil de commentaires.

Si l’on doit utiliser un client qui ne gère pas OpenPGP, ou une interface Web à laquelle on ne fait que moyennement confiance, il est possible de chiffrer, déchiffrer, signer ou vérifier un courriel autrement. Par exemple, en copiant le contenu depuis ou vers un fichier texte et en utilisant la ligne de commande via gpg ou en utilisant l’extension pour navigateur Mailvelope.

Pour le cas plus général d’un client (Web ou non) sans aucune prise en charge possible d’OpenPGP, oui, il est toujours possible en dernier recours de procéder aux opérations de chiffrement, déchiffrement et signature à l’extérieur du client. GPA, par exemple, a un mode « clipboard » (presse‑papiers), où vous pouvez écrire votre courriel, le chiffrer et/ou le signer, puis copier le résultat vers votre client (et inversement, vous pouvez y copier un message chiffré que vous avez reçu et l’y déchiffrer).

C’est quand même une solution du pauvre, et dans la mesure du possible changer de client serait recommandé, surtout si c’est un client lourd (qu’un webmail ne prenne pas en charge OpenPGP, ce n’est pas surprenant, mais un client lourd, ça pourrait largement être une raison suffisante pour le disqualifier d’office).

Un des gros problèmes de cette solution est qu’elle interdit pratiquement toute utilisation de PGP/MIME, sauf pour les fous furieux qui aiment construire et analyser des structures MIME « à la main ».


  1. Rien n’est encore décidé du côté des développeurs de GnuPG concernant l’entrée en vigueur du nouveau choix d’algorithme par défaut ; le plus probable est que cela arrivera dans la prochaine branche 2.3. 

  2. L’identité et les motivations de l’attaquant sont pour autant que je sache inconnues à ce jour, mais la nature ciblée de l’attaque pointe vers certains utilisateurs mécontents vis‑à‑vis du principe de fonctionnement des serveurs SKS et qui voulaient ainsi démontrer avec force que le réseau était vulnérable. Si tel est le cas, c’est stupide à plus d’un titre. Ils n’ont rien démontré que la communauté ne sache pas déjà (la vulnérabilité du réseau aux empoisonnements était bien connue) ; ils ont surtout réussi à saper les quelques bonnes volontés qui restaient parmi les développeurs et administrateurs SKS ; leur action est équivalente à « je vais mettre le feu à cet immeuble d’habitation, ça prouvera à tout le monde que le promoteur a utilisé un revêtement inflammable — je ferai ça de nuit quand les occupants dormiront, la démonstration sera plus convaincante ». S’ils me lisent : vous êtes des connards. 

  3. L’intégrité des développeurs d’Hagrid et administrateurs de keys.openpgp.org n’est pas en cause. Ce sont des membres reconnus de la communauté OpenPGP, il ne fait aucun doute qu’ils sont dignes de confiance. C’est l’idée même de devoir faire confiance à une entité centralisée qui me dérange, indépendamment des personnes qui sont derrière. 

  4. Du moins, pas chiffrés de bout en bout par OpenPGP. Si le message est acheminé à travers des connexions SMTP chiffrées par TLS (ce qui est de plus en plus courant aujourd’hui), les en‑têtes sont chiffrés au même titre que le reste du message, en mode point à point. 

Aller plus loin

  • # Je n'ai jamais rien compris à PGP.

    Posté par  . Évalué à 8.

    Faute de temps (d'organisation) ou d'intérêt visible, je n'ai jamais su si je devais me mettre ou non à PGP.

    Après la lecture de ce tutoriel, je n'y comprends toujours rien, mais le travail accompli pour sa rédaction va m'obliger à m'y mettre. Je ne peux décemment pas ne pas faire honneur à de telles explications.

    Je serai au fond, souriant, l'ingénu honnête.

    • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

      Posté par  . Évalué à 4.

      Salut,

      Si ça peut te rassurer, oui, ça prend un peu de temps au début.

      Par exemple, PGP est propriétaire, alors que GPG est GPLv3.

      Donc Faut choisir le camp, camarade ! (et oui, je suis d'accord que ça, déjà, de base, c'est pas facile à expliquer vu la proximité des sigles).

      Ensuite il faut habituer les correspondants à ce que tu mette un petit fichier joint qu'ils ne sauront probablement jamais lire quand tu leur envoie un mail. Moi je fais ça vite : C'est pas grave, c'est juste une signature numérique. Si vous ne savez pas l'ouvrir, ignorez. Bottage en touche, quoi.

      Après, là où ça commence à devenir plus subtil, c'est la gestion de son trousseau de clefs. Là, on commence à être dans le rude et il ne faut pas se tromper sur les choix, comme "la clef publique m'a été communiqué de manière privée, donc je la signe pas en public sauf si le détenteur me dit que c'est OK".

      Et aussi garder en tête qu'un mail chiffré avec PGP/GPG - peu importe - aura toujours une partie publique (faut bien le router ce message).

      Matricule 23415

      • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

        Posté par  . Évalué à 7.

        Bonsoir à tous

        Ça fait des années que j'essaye de convaincre (parents, enfants, employeurs, etc.) de chiffrer ou au moins signer les emails … jamais réussi à convaincre qui que ce soit.

        Pareil pour le chiffrage : j'ai des enfants qui bossent avec des données sensibles, se baladent avec les clefs usb non chiffrées, ou des laptops avec tout en clair dessus : quand je dis que c'est de la folie, ils me répondent : c'est au service info de s'en occuper et de mettre ça en place.

        Alors je m'envoie des mails chiffrés à moi-même (oui, je sais …) et je chiffre mes dossiers/fichiers avec ma "openpgp card" … seul dans mon coin.

        J'ai réessayé de mettre en place l'authentification ssh (connexion avec mes serveurs) avec la carte à puce : le problème du ssh-agent/gpg-agent est traité depuis des années avec des solutions diverses : mes essais du jour, sous Debian/Buster n'ont pas été concluants : j'ai toujours un agent ssh qui se lance :(:(

        J'avais pourtant réussi à le mettre en place il y a quelques années pourtant !

        Tant que ce ne sera pas traité par une question lors de l'installation de gnupgp du style : "Voulez-vous remplacer l'agent SSH par l'agent gpg ?" on n'est pas sortis de l'auberge.

        Eric

        ps : bien sûr, encore merci pour tous ces journaux ; j'ai passé ma soirée d'hier à les décortiquer :)

        • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

          Posté par  . Évalué à 2. Dernière modification le 24 mai 2020 à 18:34.

          Salut,

          Alors je m'envoie des mails chiffrés à moi-même (oui, je sais …)

          Copain \o/

          Je fais ça aussi pour du quick & dirty

          j'ai toujours un agent ssh qui se lance :(

          Faut régler les trucs, j'ai pas fini et eu des déboires en déplacement, mais tout se passe en gros pas trop mal en fixant bien :

          export GPG_TTY="$(tty)"

          dans un .bash|.zshrc|.whatervertuutilise et en ajoutant selon ton mode un agent quivabien, du genre gpg-agent et un de ses petits agents.

          Matricule 23415

          • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

            Posté par  . Évalué à 2.

            Le problème, c'est qu'il ne faut pas que ce soit une bidouille, différente sur chaque distribution, et non reproductible quand on met à jour sa distribution avec la suivante.

            C'est tellement important que ce devrait être configuré "out of the box", pour les smartcards, les yubikeys et autres, ainsi que pour les lecteurs nfc.

            Chiffrage, authentification, signature, 2FA, etc.

            • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

              Posté par  . Évalué à 2.

              Salut,

              Ce n'est pas de la bidouille, c'est de la configuration de ton agent :)

              Ce n'est pas trivial, mais ce n'est pas impossible ;)

              Matricule 23415

        • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

          Posté par  . Évalué à 7.

          le problème du ssh-agent/gpg-agent est traité depuis des années avec des solutions diverses : mes essais du jour, sous Debian/Buster n'ont pas été concluants : j'ai toujours un agent ssh qui se lance :(:(

          Le problème de l’agent SSH qui démarre alors que tu ne le veux pas, c’est malheureusement hors de portée de GnuPG, c’est plutôt au niveau du système (de la distribution) que ça se passe.

          Je n’utilise pas assez Debian pour être d’une grande aide, mais ce serait un bon début d’identifier quel agent se lance : est-ce que c’est le ssh-agent fourni avec OpenSSH, ou est-ce que c’est cette plaie de GNOME Keyring Manager ?

          Si c’est le GNOME Keyring Manager, il est probablement lancé par un fichier gnome-keyring-ssh.desktop dans /etc/xdg/autostart. Si c’est le cas, tu peux le désactiver en « surchargeant » ce fichier, en plaçant un fichier avec le même nom dans ton $XDG_CONFIG_HOME/autostart et contenant ;

          [Desktop Entry]
          Type=Application
          Name=SSH Key Agent
          Hidden=true
          

          (Peut-être que GNOME fournit un outil graphique permettant de configurer ce genre de choses sans avoir à manipuler les fichiers .desktop soi-même. Oh pardon, je viens de réaliser que j’ai écrit « GNOME » et « configurer » dans la même phrase, je ne sais pas ce qui m’a pris.)

          Cela dit, au pire, même si un agent SSH non-désiré continue à se lancer, dans le fond ce n’est pas grave, l’essentiel est que SSH contacte bien l’agent GnuPG et pas un autre. Et pour ça, normalement la seule chose à faire est de définir la variable SSH_AUTH_SOCK pour qu’elle pointe vers la socket de l’agent GnuPG et non vers celle du GNOME Keyring Manager, en ajoutant la ligne suivante dans un script exécuté au démarrage de la session graphique (p.ex ~/.xprofile) ou au pire au démarrage d’un shell (p.ex ~/.bashrc) :

          export SSH_AUTH_SOCK=$(gpgconf --list-dirs agent-ssh-socket)

          En gros peu importe comment, mais il faut que $SSH_AUTH_SOCK pointe vers /var/run/user/<uid>/gnupg/S.gpg-agent.ssh et non vers la socket de n’importe quel autre agent ta distribution ou ton environnement de bureau a cru bon de démarrer.

          • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

            Posté par  . Évalué à 5.

            re-bonsoir

            ça fonctionne! merci beaucoup. (Debian/Buster)

            Première étape, copier /etc/xdg/autostart/gnome-keyring-ssh.desktop dans ~/.config/autostart
            Deucième étape: effacer le contenu et y mettre ce que vous avez indiqué:

            [Desktop Entry]
            Type=Application
            Name=SSH Key Agent
            Hidden=true

            Sortir de la session et se re-loger:

            eric@sarah:~$ ps aux | grep ssh
            root       567  0.0  0.1  15852  6400 ?        Ss   19:40   0:00 /usr/sbin/sshd -D
            eric      4604  0.0  0.0   6092   888 pts/0    S+   20:27   0:00 grep ssh

            Le ssh-agent n'est plus lancé! yipie :)

            un ssh-add indique: "Could not open a connection to your authentication agent."

            3ème étape:

            Créer un fichier ~/.xprofile et y mettre la ligne suivante (la votre):

            export SSH_AUTH_SOCK=$(gpgconf --list-dirs agent-ssh-socket)

            Sauver le fichier et ensuite, sourcer ce fichier:

            eric@sarah:~$ source .xprofile

            Ressayez ssh-add:

            Enter passphrase for /home/eric/.ssh/id_rsa: 
            Identity added: /home/eric/.ssh/id_dsa (/home/eric/.ssh/id_dsa)

            ça fonctionne!

            re-merci!

            A tester sur d'autres distributions pour voir si la procédure est identique, et à documenter ici.

            Eric

      • [^] # Re: Je n'ai jamais rien compris à PGP.

        Posté par  . Évalué à 4.

        Par exemple, PGP est propriétaire, alors que GPG est GPLv3.

        On a une assez bonne explication ici : https://twitter.com/VessOnSecurity/status/995933981320282112.

        En gros : PGP est un logiciel propriétaire, OpenPGP est un standard basé sur ce que faisait PGP mais incompatible avec lui, GPG est l’implémentation de référence de ce standard.

  • # bravo. super travail

    Posté par  . Évalué à 2.

    ca m a donné l envie de my remettre (j utilisais pgp il y a longtemps (mais j ai laissé tomber vu que personne d autre n utilisait: a quoi bon chiffrer ses mails si l autre bout est incapable de les decoder ?)

    • [^] # Re: bravo. super travail

      Posté par  . Évalué à 3. Dernière modification le 24 mai 2020 à 18:59.

      Salut,

      mais j ai laissé tomber vu que personne d autre n utilisait: a quoi bon chiffrer ses mails si l autre bout est incapable de les decoder ?

      Alors je ne sais pas pour les autres, mais en fait, mes mails passent (statistique au pifomètre) 99% du temps en clair. Il y a juste la signature, que le destinataire peut vérifier (vu que dans mon cas, elle est publique et publiée sur les serveurs officiels).

      C'est quand j'ai pas envie que Bob sache ce que je dis à Alice que je monte un peu la sécurité.

      Là, le pauvre Bob saura que j'ai murmuré des choses dans l'oreille d'Alice. C'est tout.

      Matricule 23415

  • # Ouh là lààààà

    Posté par  . Évalué à 7. Dernière modification le 26 mai 2020 à 09:40.

    Bon, rien à redire sur le tutoriel. J'ai tout compris. C'est clair comme de l'eau de roche et instructif: on sait pourquoi on fait chaque étape.

    Mais sérieusement, est-ce que vous vous rendez compte à quel point ça peut être imbitable pour des utilisateurs pas à l'aise avec l'outil informatique?
    Honnêtement ça m'a rappelé les instructions pour recompiler un noyau Linux dans ma jeunesse…

    Déjà que c'est difficile de promouvoir des outils sains (il suffit de voir la déferlante Zoom alors que Jitsi-meet était déjà censé faire le boulot).

    Maintenant on voudrait promouvoir le chiffrage des emails… mais là y'a aucune chance de voir le grand-public là-dedans!

    Tout ça en plus pour qu'à la fin il n'y ait pas de façon standard de distribution les clés!
    Question bête mais: pourquoi les serveurs mails ne gèrent-ils pas la distribution des clés?
    Si je veux la clé publique de toto@tartempion.fr, le serveur mail tartempion.fr devrait offrir la clé publique de toto si elle existe et si toto le souhaite.

    • [^] # Re: Ouh là lààààà

      Posté par  . Évalué à 8.

      Mais sérieusement, est-ce que vous vous rendez compte à quel point ça peut être imbitable pour des utilisateurs pas à l'aise avec l'outil informatique?

      À ton avis ? Tu crois que j’écrirais des articles de 50 000 signes, dans lequel je prends la peine d’expliquer les choses autant que possible, si je pensais qu’OpenPGP était abordable par tout un chacun sans efforts ?

      Je suis parfaitement conscient qu’utiliser OpenPGP est plus difficile qu’on ne le voudrait. Toute la communauté OpenPGP en est consciente — en dépit de l’image tenace selon laquelle les développeurs et utilisateurs d’OpenPGP sont des vieux barbus élitistes perchés en haut de leur tour d’ivoire, s’amusant des déboires des noobs

      Il y a des efforts en cours (et depuis pas mal de temps) pour faciliter l’utilisation d’OpenPGP. Par contre, désolé (non), mais on ne rendra jamais OpenPGP aussi facile à utiliser que Signal & Co. D’une part parce que sécuriser l’e-mail est un problème difficile (tellement difficile que beaucoup de cryptologues ont purement abandonné cette idée et disent aujourd’hui « utilisez Signal »), mais aussi et surtout parce qu’un des intérêts d’OpenPGP en général et de GnuPG en particulier est de donner le contrôle aux utilisateurs (empowering the users, comme on dit en anglais), ce que les approches à la Signal ne font pas.

      Du coup, oui, l’utilisateur d’OpenPGP aura toujours un certain apprentissage à faire. Et après ?

      Allez, l’analogie foireuse du jour : ceux qui n’ont pas envie d’apprendre à cuisiner peuvent se contenter de télécharger Deliveroo, Uber Eats ou je ne sais quoi et se faire livrer des plats tout prêt (ou aller au restaurant, ou acheter des plats micro-ondables etc.). Est-ce que ça rend obsolète les batteries de cuisine ou les livres de recettes ? Les gens ne devraient pas avoir la possibilité de se faire leurs propres plats s’ils le souhaitent ?

      Question bête mais: pourquoi les serveurs mails ne gèrent-ils pas la distribution des clés?
      Si je veux la clé publique de toto@tartempion.fr, le serveur mail tartempion.fr devrait offrir la clé publique de toto si elle existe et si toto le souhaite.

      Oh, un yakafocon !

      Oui, la distribution des clefs par les fournisseurs de de messagerie seraient une très bonne idée. C’est une idée poussée par les développeurs de GnuPG justement, avec le protocole WKD qui est précisément conçu pour ça.

      Maintenant si tu as une idée pour convaincre les fournisseurs de messagerie de mettre en œuvre ce protocole, on t’écoute. Je le fais sur mon propre serveur, posteo.de le fait, plusieurs serveurs gérés par des projets libres le font, mais au-delà ? Que dalle, y compris et surtout parmi les « gros » fournisseurs. (Se pourrait-il que ces gros brasseurs d’informations personnelles n’aient pas à cœur la vie privée de leurs utilisateurs ? Nooon, je ne puis le croire.)

      • [^] # Re: Ouh là lààààà

        Posté par  . Évalué à 7.

        Je crois que tu prends mon retour un peu trop personnellement.

        C'est pas une critique d'OpenPGP. Je pense que je n'ai juste jamais réalisé à quel point chiffrer un email était compliqué (je suis resté au documentaire sur Edward Snowden dans lequel il disait au journaliste que c'est simple…).

        Et oui, du coup (et cette opinion pourrait ne pas te plaire parce que tu es investi dedans), je me demande s'il ne faudrait pas plutôt militer pour un remplacement complet de l'email (encore qu'il faudrait un consensus assez large non seulement sur la nécessité de changer, mais aussi sur l'outil de remplacement et je crois qu'on n'a pas ça aujourd'hui).

        Le "yakafokon" n'est pas non plus une critique. Je me demandais s'il y avait une raison qui m'aurait échappée qui ferait que ce n'est pas jouable (soit parce que problème de sécu, soit cas d'usage qui ne marcherait pas, auxquels je n'aurais pas pensé).
        Visiblement c'est plutôt le contraire: non seulement c'est possible mais c'est déjà sur la table.

      • [^] # Re: Ouh là lààààà

        Posté par  . Évalué à 4.

        Oui, la distribution des clefs par les fournisseurs de de messagerie seraient une très bonne idée. C’est une idée poussée par les développeurs de GnuPG justement, avec le protocole WKD qui est précisément conçu pour ça.

        Oh, je n'avais aucune idée de l'existence de ce protocole.

        Si ce n'est pas trop velu, mon serveur mail apprendra à distribuer des clés dans les jours qui viennent ;)

        • [^] # Re: Ouh là lààààà

          Posté par  . Évalué à 6.

          Si ce n'est pas trop velu, mon serveur mail apprendra à distribuer des clés dans les jours qui viennent ;)

          Pour info, je prépare un journal là-dessus.

          (Ça se voit un peu, que je m’emmer… m’ennuie pendant le confinement, ou pas du tout ?)

          • [^] # Re: Ouh là lààààà

            Posté par  . Évalué à 4.

            Pour info, je prépare un journal là-dessus.

            Lance directement une dépêche, comme ça on zappera l'inévitable promotion du journal en dépêche ;P

      • [^] # Re: Ouh là lààààà

        Posté par  . Évalué à 5.

        D’une part parce que sécuriser l’e-mail est un problème difficile (tellement difficile que beaucoup de cryptologues ont purement abandonné cette idée et disent aujourd’hui « utilisez Signal »), mais aussi et surtout parce qu’un des intérêts d’OpenPGP en général et de GnuPG en particulier est de donner le contrôle aux utilisateurs (empowering the users, comme on dit en anglais), ce que les approches à la Signal ne font pas.

        Par curiosité, pourrais-tu présenter les arguments qui t'incitent à continuer dans la voie d'essayer de sécuriser l'e-mail ? Je suis personnellement pour, même si je ne pratique pas, parce qu'un système de messagerie historique, ouvert, simple et a-centré comme l'email est pour moi indispensable à une vraie informatique libre, même s'il est très imparfait, mais je cherche d'autres arguments si possible :-)

        • [^] # Re: Ouh là lààààà

          Posté par  . Évalué à 4. Dernière modification le 27 mai 2020 à 17:30.

          Par curiosité, pourrais-tu présenter les arguments qui t'incitent à continuer dans la voie d'essayer de sécuriser l'e-mail ?

          En gros, je suis convaincu que ça en vaut toujours la peine. Je pense que l’e-mail n’est pas prêt de disparaître, même si ça fait au moins quinze ans qu’on prédit le contraire.

          Aucune des alternatives, y compris celles présentées comme des « e-mail killers » n’offre les mêmes caractéristiques, comme :

          • la décentralisation (incluant la possibilité pour quiconque d’être son propre fournisseur tout en interopérant avec le reste du monde) ;
          • la bidouillabilité (incluant le fait qu’on peut exploiter l’e-mail pour des usages pour lesquels il n’était pas du tout prévu) ;
          • le côté « je peux joindre n’importe qui n’importe où dans le monde du moment que j’ai son adresse e-mail ».

          Les détracteurs de l’e-mail diront que ces caractéristiques sont des points faibles. La décentralisation est une des raisons pour lesquelles l’e-mail est difficile à sécuriser (c’est toujours plus facile quand on est le seul joueur autour de la table, hein Signal ?), la bidouillabilité a probablement pas mal à voir avec la complexité de l’e-mail aujourd’hui (on bidouille, on bidouille, et avant qu’on s’en rende compte on a monté une usine à gaz), et la possibilité d’envoyer un mail à quiconque, même sans aucun contact préalable, est ce qui nous a donné le spam.

          Ces critiques sont valables, l’e-mail a les défauts de ses qualités. Mais dans la balance, pour moi les défauts de l’e-mail sont largement acceptables au vu de ses avantages. Et je ne dois pas être tout-à-fait le seul à penser ça vu qu’en quinze ans, aucun des « e-mail killers » auto-proclamés n’a réussi à s’imposer comme le remplaçant des e-mails.

          • [^] # Re: Ouh là lààààà

            Posté par  . Évalué à 6.

            Bon je vais un peu prêcher une paroisse et c'est presque une réponse bateau, mais il me semble qu'on avait déjà un candidat qui pourrait marcher: XMPP
            -décentralisé
            -il fait beaucoup plus que l'échange de messages
            -je ne suis pas sûr que tu puisses envoyer un message hors-ligne a quelqu'un qui ne t'a pas en contact, mais on peut déjà mettre un message dans les demandes de contact

            Après, je suis sûr qu'il y a du boulot:
            -sur le protocole pour couvrir tous les cas d'usage de l'email
            -sur les clients
            -sur l'adoption…

            Mais j'y vois beaucoup d'avantages, surtout sur les applications émergentes (réseau social, partages de fichiers, forums, etc.).

          • [^] # Re: Ouh là lààààà

            Posté par  . Évalué à 2.

            Merci pour ta réponse. Sur les qualités de l'e-mail hors confidentialité (persistante ou non), intégrité, signature/attestation, non-répudiation je les connais bien, mais ma question était plus orientée sur qu'est-ce qui te fait croire en la sécurisation possible de l'e-mail, au sens des qualités que je viens de citer ? Ta réponse est peut-être uniquement « gnupg le fait bien », mais c'était pour savoir si tu savais argumenter plus précisément dans ce sens, quand d'autres répliquent que « ça ne marchera jamais ».

            Tu soulignes bien en tous cas que les qualités que tu voies à l'e-mail sont effectivement décrites comme étant des défauts par d'autres, mais j'ai effectivement la même approche « libre » des technologies : apprendre à l'utilisateur à lire et à écrire, qu'on désignait entre autre comme faisant partie de « l'instruction » des élèves, est essentiel pour en faire des citoyens libres (enfin, leur équivalent numérique).

            Par contre, sur l'e-mail killer dont j'en ai effectivement vu passer un paquet, j'ai un peu moins d'espoir que toi : Facebook a bouffé une bonne partie des communications inter-personnelles, et pour une très grande partie de la population (c'est ce qui manquait aux précédents, l'étendue générationnelle). Il reste la communication « entreprise », mais c'est en train d'être attaqué par d'autres. Je tiens toujours à mon e-mail, j'aime le low-tech, mais j'ai un peu peur de l'avenir.

            • [^] # Re: Ouh là lààààà

              Posté par  . Évalué à 5.

              qu'est-ce qui te fait croire en la sécurisation possible de l'e-mail

              Outre le fait que « GnuPG le fait bien », ce qui me rend optimiste est l’activité autour d’OpenPGP.

              Ce n’est pas forcément encore visible pour l’utilisateur, mais il y a eu des apports significatifs depuis quelques années. Pêle-mêle et sans prétendre être exhaustif :

              • deux nouveaux protocoles de distribution des clefs :
                • distribution via le DNS, par Paul Wouters (DANE OPENPGP) ;
                • protocole Web Key Directory, par Werner Koch ;
              • un nouveau modèle de confiance, trust-on-first-use, par Neal Walfield ;
              • de nouvelles implémentations :
                • RNP (Ronald Tse) ;
                • Sequoia-PGP (Vincent Breitmoser, Justus Winter) ;
              • la future prise en charge native d’OpenPGP par Thunderbird¹ (Patrick Brunschwig)
              • un profil d’utilisation d’OpenPGP pour le chiffrement opportuniste, Autocrypt (Daniel Kahn Gilmor, Vincent Breitmoser) (probablement un truc que je devrais présenter dans un journal, d’ailleurs) ;
              • un nouveau logiciel serveur de clefs, Hagrid² (Vincent Breitmoser)
              • une révision du standard dans les tuyaux³ (toutes les personnes déjà mentionnées, plus quelques autres).

              ¹ J’ai des réserves sur la manière dont cette prise en charge est amenée, comme mentionné dans le journal, mais fondalement c’est quand même une bonne nouvelle.
              ² Idem. J’ai des réserves sur certains comportements de Hagrid et sur le principe d’un serveur centralisé comme keys.openpgp.org, mais j’accueille favorablement toute initiative faisant avancer OpenPGP, et Hagrid en est une.
              ³ Certes, l’élaboration du RFC 4880bis aura été beaucoup plus longue que prévu — le plan était de sortir le RFC pour 2017 au plus tard…

              • [^] # Re: Ouh là lààààà

                Posté par  . Évalué à 3.

                Merci encore. Bref, tu es optimistes parce qu'il semble y avoir un certain nombre de personnes de qualité qui y croient également, et ça se comprend. C'est vachement intéressant ta liste d'évolutions récentes ! Et bravo de citer les auteurs.

          • [^] # Re: Ouh là lààààà

            Posté par  (site web personnel) . Évalué à 3.

            la possibilité d’envoyer un mail à quiconque, même sans aucun contact préalable, est ce qui nous a donné le spam

            Sur ton site, tu indiques ton adresse email personnelle, entre autres, tout simplement. Tu précises aussi que les messages t’arriveront toujours. Est-ce que tu reçois beaucoup de spam du coup ? Comment gère-tu cela ? Et comment es-tu tellement sûr de toi ? Je trouve ça très bien, mais je ne suis pas sûr de le faire moi-même, si cela devient difficilement gérable ensuite.

            • [^] # Re: Ouh là lààààà

              Posté par  . Évalué à 7.

              Le mieux (ou du moins le plus rapide pour moi…) est que je te renvoie vers mon blog, où j’ai expliqué pourquoi je ne cache pas mon adresse et comment je gère le spam.

              Ces billets datent de 2012, mais sont toujours valables aujourd’hui, seuls quelques détails techniques ont changé — par exemple j’utilise maintenant pypolicyd-spf au lieu de tumgreyspf pour la validation SPF), et un script Sieve au lieu de procmail pour envoyer les messages dans la boîte spam.

              Le point important est que, hors les messages invalidés par SPF (que je n’ai aucun scrupule à rejeter d’entrée sans jamais les voir, dès lors que la politique SPF du domaine émetteur l’autorise), tous les messages marqués comme étant probablement des spams arrivent quand même jusqu’à une boîte mail sur ma machine, que je peux consulter de temps à autres (je fais typiquement ça une fois par jour) et ainsi vérifier qu’il n’y a pas de faux positifs. C’est pour ça que je dis qu’un message envoyé à mon adresse me parviendra toujours — au pire je mettrais un ou deux jours à le voir s’il a été classé comme spam par erreur, mais je finirai par le voir quand même. Le serveur ne prend aucune décision définitive à ma place — contrairement à ce que font certains fournisseurs qui ont la main lourde en la matière…

              Est-ce que tu reçois beaucoup de spam du coup ?

              En gros, une dizaine de spams rejetés par jour par SPF, et à peu près autant de messages marqués comme « spam probable » — et qui sont systématiquement bel et bien des spams, les faux positifs étant en fait virtuellement inexistants (j’en ai eu en tout et pour tout quatre depuis que j’ai mis en place mon filtre, le dernier remontant à 2013).

  • # Sous-clefs ?

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

    Merci beaucoup pour ce tuto, qui démystifie pour moi cet outil que j’ai toujours délaissé du fait de son apparente complexité !

    Après lecture, il reste un flou : quid des sous-clefs ? À quoi correspondent-elles ? Faut-il en avoir ou est-ce facultatif ? Est-ce automatique ? Faudrait-il en avoir plusieurs ? etc.

    • [^] # Re: Sous-clefs ?

      Posté par  . Évalué à 4.

      Les sous-clefs ont été introduites par PGP 5 (RFC 2440) pour plusieurs raisons, la principale étant le besoin de séparer les clefs de signature des clefs de chiffrement.

      Cette séparation était elle-même motivée par plusieurs considérations :

      • Tous les algorithmes de cryptographie asymétrique ne permettent pas forcément d’utiliser une même paire de clefs pour à la fois signer et chiffrer. RSA le permet (on chiffre avec la clef publique, on signe avec la clef privée), mais en fait c’est l’un des seuls (en fait parmi les algorithmes disponibles dans OpenPGP c’est le seul). Une clef DSA ne peut servir qu’à signer, une clef ElGamal ne peut servir qu’à chiffrer.

      • Même quand il est possible d’utiliser une même paire pour signer et chiffrer (avec RSA donc), les cryptologues ne voient pas ça comme une bonne idée, ça peut entr’ouvrir la porte à certaines attaques, au moins théoriquement.

      • Certains pays ont passé des lois obligeant à la remise des clefs de chiffrement sous injonction judiciaire (notamment le Regulation of Investigatory Powers Act au Royaume-Uni). Séparer les clefs de signature des clefs de chiffrement permettait de ne remettre aux autorités que ces dernières, sans compromettre les clefs de signature.

      Un autre avantage des sous-clefs est de permettre une rotation plus facile des clefs, puisqu’on peut changer de sous-clef de manière transparente pour les correspondants (contrairement à la clef principale).

      Faut-il en avoir ou est-ce facultatif ? Est-ce automatique ?

      La clef principale est une clef de signature. Il faut au minimum une sous-clef de chiffrement associée. GnuPG en génère une automatiquement.

      La plupart des utilisateurs n’ont pas besoin de s’en soucier davantage. Il y a des raisons valables de vouloir d’autres sous-clefs, mais ça les fait basculer du côté obscur des utilisateurs « avancés ».

      • [^] # Re: Sous-clefs ?

        Posté par  . Évalué à 4.

        Il faut au minimum une sous-clef de chiffrement associée.

        Enfin, « il faut » : non, pas vraiment. Si tu sais que tu ne vas jamais utiliser OpenPGP que pour signer (par exemple, cas d’un développeur de logiciels libres qui signe ses commits ou ses release tarballs), tu peux parfaitement te passer d’une sous-clef de chiffrement.

  • # fonctionnement de --send-keys ?

    Posté par  . Évalué à 6. Dernière modification le 29 mai 2020 à 21:12.

    Bonjour,

    J'ai suivi tout le tuto qui est fort instructif mais j'ai sur un truc: envoyer la clé avec --send-keys. Invariablement ça me dit:

    gpg: « xxxx@xxxx.fr » n'est pas un identifiant de clef : ignoré

    Par contre l'envoi fonctionne bien depuis gpa …

    • [^] # Re: fonctionnement de --send-keys ?

      Posté par  . Évalué à 7.

      Ooh, pan sur le bec ! C’est une erreur de ma part, désolé.

      La commande --send-keys attend un « identifiant de clef », pas un « identifiant utilisateur » comme je l’ai écrit.

      Un identifiant de clef (key ID) peut être : les 4 derniers octets de l’empreinte de la clef (short key ID), les 8 derniers octets de l’empreinte (long key ID), ou l’empreinte entière.

      Dans les exemples du journal, la clef d’Alice a pour empreinte 7685DC4214D727BB011BD6B754B4CC7749CAE7C3 (gpg -k alice@example.org pour afficher l’empreinte), et donc pour identifiant court 49CAE7C3 ou pour identifiant long 54B4CC7749CAE7C3. C’est l’une de ces trois valeurs qu’il faut passer comme argument à --send-keys, à la place de alice@example.org.

  • # Lien cassé

    Posté par  . Évalué à 4.

    Le lien vers le brouillon de WKD (https://www.ietf.org/id/draft-koch-openpgp-webkey-service-09.txt) est cassé : le brouillon «09» expirait le 21 mai passé et est désormais remplacé par le brouillon «10». À mon avis, le lien vers le datatracker des versions du brouillon est plus intéressant pour qui veut suivre cette RFC en devenir.

  • # Pour les gens pressés

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 4.

    Je suis un peu étonné de ne pas voir de lien vers cet excellent tutoriel.

    Un LUG en Lorraine : https://enunclic-cappel.fr

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