Bah sur ce coup, permet-moi d'être pragmatique. Il y a eu une petite dizaine d'instaurations indépendantes de régimes communistes (ou d'inspiration communiste) dans le monde. Sans aucune exception, ces régimes ont mis en place progressivement ou dès le début un mode de fonctionnement totalitaire : parti unique, pas d'éléctions libres, pas d'opposition politique, pas de sortie démocartique possible du régime communiste. Dans une très large majorité des cas (à l'exception de Cuba, et encore), le régime devient quelque chose qui n'est plus vraiment communiste (disons que l'abolition de la propriété privée marche bien pour les pauvres, mais pas pour tout le monde).
Quand on fait une expérience 10 fois et qu'elle foire 10 fois, on peut avoir toutes les raisons du monde de penser que ça pourrait peut-être marcher la 11ème fois, ça n'est pas très convainquant. Surtout quand on n'a aucune idée de pourquoi ça a foiré 10 fois et de ce qu'il faudrait changer pour que ça marche la 11ème. Du coup, pragmatiquement, jusqu'à preuve du contraire, 1) la mise en place d'un régime communiste se termine toujours par un régime totalitaire, et 2) de nouvelles expériences coûtant des millions de vies humaines, on peut légitimiment douter du rapport coût/bénéfices de toute nouvelle tentative.
Justement, c'est ce que je dis : les seuls concepts qui ont survécu aux puissances communistes, c'est l'absence de démocratie. C'est plus une blague qu'autre chose pour les US, puisque je ne pense pas que Guantanamo ait une parenté idéologique avec les goulags sibériens (c'est plutôt de la convergence évolutive dans ce cas là), mais par contre c'est carrément vrai pour le système politique de la 1ere puissance mondiale.
Sauf que le logiciel (libre ou non) fait figure d’exception dans le droit d’auteur à de nombreux égards.
Le logiciel libre utilise le droit d'auteur de manière originale, mais complètement conforme au cadre légal. Je ne vois pas où tu veux en venir exactement ; tu veux dire qu'il y a des bons droits d'auteur et des mauvais droits d'auteur? Et qui décide de ce qui est bien ou pas? Où est la limite, est-ce que c'est l'argent qui rend le droit d'auteur sale?
L’un d’eux est justement l’absence de sociétés d’auteurs et de maisons de production.
Les maisons de production sont des investisseurs sans qui l'auteur ne pourrait diffuser son oeuvre. Les arts graphiques (peinture, sculpture, etc) sont souvent diffusés sans société de gestion des droits d'auteur, parce que la copie est interdite ou impossible.
La « liberté gigantesque aux auteurs » est en fait donnée à une société privée.
Une société privée à but non lucratif, mieux vaut le préciser quand même. La SACEM trempe dans un tas de magouilles pas jolies (y compris par un lobbying très puissant pour garantir son monopole, ou un système de redistribution douteux), mais il ne faudrait pas qu'on puisse penser que la SACEM exploite les artistes, ça serait absurde.
On peut tout à fait se passer de la SACEM, de nombreux artistes le font. Après, du coup, il faut se débrouiller pour négocier directement, et aucun acteur du système de veut ça (les radios ne veulent pas négocier directement avec X ou Y pour chaque morceau passé). Le système SACEM a aussi des avantages…
Au final, le « droit d’auteur » et ses protection sont dévoyées depuis un moment, effectivement dès avant Internet.
C'est un jugement moral? Dévoyé par rapport à quoi? On parle encore du "bon" et du "mauvais" droit d'auteur? Pour le cinéma par exemple, il y a plusieurs gros acteurs, il y a donc une forme de concurrence. Pour toi, c'est aussi "dévoyé"? Comment dans un monde non dévoyé, un producteur pourrait espérer rentrer dans ses frais? Produire un film ou un album de musique est un investissement parfois très conséquent; toucher un pourcentage sur les ventes (et donc partager les droits patrimoniaux entre l'auteur et le producteur) ne semble pas malsain par défaut, si? Après, ces ayant-droit embauchent des avocats et des employés pour collecter ce que la loi les autorise à collecter et poursuivre en justice ceux qui n'ont pas respecté les licences et contrats… On ferait pareil pour un logiciel libre, et on trouverait ça normal… Non, je ne comprends pas.
Par rapport à la licence globale tout le monde y perd, les artissssss et les consommateurs aussi, mais c’est une forme d’implémentation plus capitalo-libéro-compatible que la licence globale qui fournit le service que n’ont jamais fourni les gros acteurs.
La licence globale semble une généralisation d'un système SACEM que tu sembles dénoncer deux phrases plus haut, donc je ne comprends pas trop. Si elle est intégrée à l'abonnement Internet, elle devient même obligatoire en plus d'être monopolistique, et elle interdit à un acteur de faire valoir ses droits d'auteur différemment que de la manière capitalistico-jenesaispasquoi imposée par le système. Imagine qu'il existe une licence globale logicielle, quelle serait ta position en tant que libriste? Tu ne trouverais pas que la situation est écoeurante, puisque soit le libriste entre dans le système (et abandonne le libre) pour être rémunéré, soit il voit "son" argent lui passer sous le nez et aller vers les acteurs du logiciel propriétaire?
Bref, ton discours me semble assez contradictoire. Tu sembles vouloir opposer les gentils artistes et les gentils consommateurs et les gros acteurs intermédiaires, mais les solutions que tu proposes (licence globale) sont une généralisation d'un système que tu sembles détester (un énorme intérmédiaire monopolistique et incontournable). L'état des lieux actuels (quelques gros acteurs qui ont un gros catalogue et qui gèrent les droits d'auteurs le plus globalement possible en faisant payer une sorte de licence globale pour accéder à leur catalogue) ne semble pas te convenir non plus, mais visiblement payer à l'utilisation non plus.
D'autres mouvements ont connu des défaites : penses aux communistes par exemple
Tu as l'air d'insinuer que le Communisme peut envisager des victoires dans un avenir par trop lointain? À part la surveillance de masse, l'État policier, et le goulag, je ne vois pas trop quelles idées communistes ont de l'avenir dans notre société. Même le concept de classe sociale en tant que grille de lecture de la société est malmené…
J'ai plutôt l'impression que les avancées sociales envisagées (revenu universel, relance par la monnaie hélicoptère, …) sont plutôt d'inspiration libérale (on vous donne X, vous en fait ce que vous voulez) que communiste (on met en place une ressource commune et les règles pour que tout le monde puisse l'utiliser).
J'ai plutôt l'impression que ce qu'on vit, c'est simplement la "normalisation" d'Internet, qui rentre peu à peu dans le cadre législatif du quotidien.
Il faut quand même réaliser que le droit d'auteur et les lois sur la liberté de la presse prédatent Internet de beaucoup. Ces lois ayant été établies avant internet, elles ne prenaient pas en compte la possibilité de partager des fichiers numériques. Il y a donc eu une période au cours de laquelle "on" a pensé que ces lois pouvaient ne pas s'appliquer. Or, c'est mal connaitre le fonctionnement d'une société : après un temps plus ou moins long, les lois s'adaptent. C'est même plutôt sain, je trouve, qu'il n'existe pas à terme de zones de non-droit.
Après, on peut ne pas aimer certaines lois, souhaiter les changer, etc. Mais en soi ça n'a pas grand chose à voir avec l'application des lois.
Le principe du droit d'auteur donne une liberté gigantesque aux auteurs (et aux personnes que les auteurs choisissent pour faire appliquer leurs droits). L'auteur décide presque de tout : qui peut lire/regarder une oeuvre, les conditions de sa rémunération éventuelle, les conditions de la redistribution de l'oeuvre, etc. Les sociétés d'artistes "uniformisent" un peu ces droits, en collectant et redistribuant l'argent selon certaines règles, mais ça n'est pas une obligation. D'ailleurs, il est assez ironique que le logiciel libre doive justement son existence à cette force du droit d'auteur—il faut quand même réaliser que l'auteur d'un logiciel peut imposer les conditions de redistribution à quelqu'un qui l'a acquis légalement, y compris par un achat.
Pendant une vingtaine d'années, Internet a été de facto une zone où le droit d'auteur n'a pas été respecté. On peut toujours considérer ça comme un "espace de liberté", mais c'est assez réducteur comme vision : pour les auteurs qui souhaitaient simplement faire valoir leurs droits, ça ne l'était pas du tout. C'est un peu comme si on considérait une cité de banlieue comme une zone de liberté : pour les dealers, certainement, pour les autres, peut-être moins.
Encore une fois, tout ça, c'est bien indépendant de ce qu'on peut penser du droit d'auteur, ce n'est pas qu'Internet avait des règles différentes, c'est juste qu'on pouvait y faire des choses illégales sans qu'il n'y ait aucune conséquence.
D'ailleurs, c'est loin d'être fini. Il est encore très facile d'accéder à une infinité de fichiers sans l'autorisation des auteurs, et sans risque de poursuite. C'est devenu un peu moins facile peut-être, et moins centralisé qu'au temps de megaupload, mais c'est loin d'avoir changé radicalement.
En ce qui concerne la censure, il faut distinguer ce qui ressort des décisions administratives (qui, en effet, sont du ressort de la censure, comme par exemple le blocage des sites faisait la propagande du terrorisme, etc), et les blocages ordonnés par la justice. Pour de nombreux exemples cités, les blocages sont issus d'une décision de justice, c'est un fonctionnement acceptable et normal dans un État de droit (à moins de ne mettre aucune limite à la liberté de publication). Je trouve d'ailleurs qu'il reste très facile de publier n'importe quoi sans aucune conséquence. Je pense que malgré tout l'arsenal législatif, il n'a jamais été aussi facile de publier et de lire n'importe quoi, y compris des écrits racistes, négationnistes, des mensonges, des propos diffamatoires, de la retape pour les sectes, pour des contenus interdits aux mineurs, des insultes, bref, toute la panoplie de trucs illégaux qui seraient immédiatement censurés dans la presse écrite.
D'ailleurs, les États sont mis devant le fait accompli de l'impossibilité de contrôle, que ça soit par l'exécutif, le législatif, ou le judiciaire. La seule parade est de mettre les hébergeurs devant des responsabilités de filtrage, mais ça va de pair avec une grosse responsabilité, ainsi qu'à des retraits injustifiés.
Ceci dit, au final, il ne faut pas oublier qu'être hébergé par Youtube n'est pas un droit. Le droit fondamental, c'est de ne pas être censuré par l'État. Tant qu'il y a une possibilité d'héberger un contenu et de le diffuser, il n'y a pas d'atteinte à la liberté d'expression. La liberté d'expression n'a rien à voir avec le fait d'ouvrir toutes les plateformes à tout le monde, autrement, les journaux papier devraient publier tout ce que leurs lecteurs leur enverraient, c'est absurde. On a tout a fait le droit de créer un site où tous les contenus parlant de Windows, de vibromasseurs, ou de Rachmaninov sont interdits, et ça n'est pas une atteinte à la liberté d'expression. De même, Youtube a le droit de supprimer les vidéos montrant de courts extraits de films : ces extraits sont probablement légaux (dans un cadre législatif donné et à une date donnée), mais il n'existe pas d'obligation de publier tout ce qui est légal. Ça arrange Youtube pour plein de raisons (se mettre dans la poche des partenaires commerciaux, éviter les procédures, encourager la production de contenus originaux plutôt que les compilations, éviter de se faire reprocher de valider une vidéo et pas une autre, etc); il existe tout plein de plateformes sur lesquelles ont peut diffuser ses vidéos. Ah oui, on ne beneficie plus de la visibilité qu'apporte Youtube. Mais c'est complètement paradoxal de vouloir bénéficier des GAFAM et de critiquer leur monopole de fait.
Bon, bref, au lieu de se plaindre tout le temps de ce que fait Google, du fait que ça devienne plus dur de télécharger, que des acteurs privés s'emparent du marché à coup de services et d'investissements ,on peut aussi se demander pourquoi ces acteurs sont devenus incontournables. Il existe des belles exceptions à cet Internet des GAFAM (Wikipédia est un super exemple) : ça n'est pas une question d'argent, c'est une histoire de service et d'innovation. Le fait est que Youtube est un service inégalé, Google search est un service inégalé, Twitter offre un service inégalé, Amazon offre un service inégalé. D'ailleurs, derrière tous ses services, il y a de réelles innovations algorithmiques, logicielles et logistiques. On peut courrir derrière et rêver à des simili-clones libres, mais je ne comprends pas dans quel monde ça pourrait marcher (à moins que les gens soient prêts à utiliser un service moins bon pour protéger leurs données privées, ce qui me semble peu probable à grande échelle (1: les gens s'en foutent, 2: les données sont déja diffusées).
Bon, bref, je trouve que le problème principal d'Internet aujourd'hui est plus de limiter la visibilité des trucs toxiques pour la société, plutôt que de favoriser la liberté d'expression. Ça n'a pas à passer par la censure, mais plutôt à proposer des algorithmes éthiques qui ont des objectifs utilitaristes—pas facile à imposer à des boîtes privées pour de bonnes raisons, d'ailleurs.
L'économie est une science humaine, pas une science dure. […] Donc tout le monde a sa théorie, mais au final, il est très très dur de savoir quelles mesures engendrent quel résultat,
Le constat est probablement vrai, mais je te trouve très défaitiste. L'histoire des sciences a montré que certains champs disciplinaires noyautés et pourris par une culture non-scientifique pouvaient à terme devenir des voies de recherche tout à fait crédibles. Souvent, ça passe par un remplacement de la communauté par des scientifiques externes qui se reconvertissent. Typiquement, la psychologie a suivi cette voie-ci, grâce notamment aux apports des neurosciences. Malheureusement, il y a souvent un gros décalage entre la réalité d'une discipline et l'image que les gens et les institutons s'en font (par exemple, les experts auxquels la justice fait appel sont encore issus des anciennes pratiques).
Pour l'économie, 1) il semble que notre principale source d'information (média et politiques) soit très déconnectée des travaux universitaires, et 2) ce n'est pas parce que ça patine en France que c'est le cas partout. Par exemple, de ce que je connais des prix Nobels d'économie, ça vole un peu plus haut que l'analyse politique traditionnelle.
Posté par arnaudus .
En réponse au journal La Bourse ou la vie ?.
Évalué à 4.
Dernière modification le 02 avril 2021 à 15:28.
C'est aussi ce que j'ai cru comprendre. Mais en plus, il y a un truc pas clair sur le sens d'"inflation", puisque la planche à billet crée bien de l'inflation monétaire (il y a plus de monnaie); c'est juste que ce "plus de monnaie" ne se traduit pas forcément par une augmentation des prix, contrairement aux théories économiques orthodoxes. Je n'ai pas compris où va la nouvelle monnaie par contre (dans les bulles spéculatives?).
Si j'ai bien compris, cette théorie de l'inflation liée à la planche à billets est fondatrice du modèle Européen, sous pression des Allemands à cause de l'hyperinflation -> Hitler (et paf, point Godwin).
D'ailleurs, le rôle principal de la BCE est de maintenir l'inflation à un niveau désiré (~ 1 ou 2%). Le paradoxe, c'est que certains semblent penser que l'action de la BCE n'a absolument aucun effet sur l'inflation. Il est en effet tout à fait possible que la BCE joue le rôle du gamin qui joue 10 minutes à une démo de jeu vidéo avant de s'apercevoir que c'était une démo et que ses actions sur la manette n'avaient aucun effet; dans un monde aussi complexe, on peut avoir l'illusion qu'une politique économique a une relation de cause à effet (on fait X et ça cause Y), alors que la politique économique ne fait que répondre à une autre cause (il se passe Z qui cause Y, et la BCE répond à Z en faisant X, et croie ainsi que X a causé Y).
J'ai cru comprendre que les politiques économiques en Europe étaient assez éloignées des travaux universitaires, ce qui fait qu'il est tout à fait possible qu'on fasse en fait n'importe quoi tout en étant persuadés de contrôler quelque chose.
Je ne sais pas si c'est surprenant, mais il semble que les gens qui trouvent le système financier révoltant sont ceux qui comprennent le moins comment il fonctionne. Ce n'est pas toujours le cas; par exemple, les gens qui sont anti-religieux connaissent souvent mieux les textes religieux que les croyants, la plupart des végétariens connaissent bien le fonctionnement de l'élevage et de l'industrie qui va avec, etc. Mais la finance, c'est toujours "J'y comprends rien c'est révoltant".
Je m'auto-réponds, mais j'ai oublié d'écrire que l'idée ordo-libérale (sur laquelle est basée le fonctionnement de l'Europe) repose sur l'hypothèse que l'obligation d'emprunter aux banques est censée réguler l'envie d'utiliser trop la planche à billets pour les États. Avec une monnaie commune et des politiques économiques indépendantes, il y a un problème de contrôle : si un État se mettait à faire marcher la planche à billets à fond, la dévaluation serait subie par tout le monde. Du coup, on impose de passer par les marchés, qui sont censés jouer un rôle de régulateur : les marchés ne prêteraient pas à un État qui emprunterait trop pour pouvoir faire rouler sa dette. (Bon, en plus, il y a les règles budgétaires, les 3% du PIB et tout). C'était le compromis pour fonctionner tous ensemble malgré des gouvernements indépendants.
Ça a "bien" marché pour la Grèce : en effet, les marchés ont arrêté de prêter. Par contre, ça a donné l'impression que la suite n'a pas été anticipée : l'effet domino et les conséquences pour tous les pays de la zone Euro. La BCE a rectifié le coup, mais ça a pris du temps, et les Grecs s'en sont pris plein les dents. Au passage, les marchés aussi, parce que la dette a été restructurée (mais quand on prête à des taux d'intérêt de 20%, on accepte les risques).
Disons qu'elles ont la confiance des acteurs du système pour prêter de l'argent qu'elles n'ont pas. C'est quand même pas à la portée de tout le monde, et c'est pour ça qu'on ne peut pas monter une banque en auto-entreprise.
Et puis, elles n'ont pas besoin d'argent pour prêter, mais elles ont besoin de clients qui ont des comptes sur lesquels il y a de l'argent prêté par les autres banques, sinon ça ne marche pas.
Ça ne fonctionne quand même pas comme une planche à billets, puisque si tu ne rembourses pas, la banque l'a dans l'os et elle doit couvrir les pertes avec du vrai pognon.
J'ai dû écrire "le fait de pouvoir prêter de l'argent donne du pouvoir" tout court, ça suffit en fait :-)
Je pense que tu évoques deux choses qui n'ont pas grand chose à voir : l'État Grec n'a pas été insolvable parce que les riches ont échappé à l'impôt, les problèmes sont arrivés parce que les banques ont eu un doute sur la capacité de l'État à rembourser les prêts. Ça aurait pu être réglé très facilement si la BCE avait dit "OK, on couvre", par exemple.
Au passage, j'ai l'impression que ce qui était reproché à la Grèce sur la perception de l'impôt, ce n'était pas seulement l'évasion fiscale des riches, c'était l'évasion fiscale tout court. Au moment où elles accordent leurs prêts, les banques se foutent pas mal de savoir si le pognon vient des riches ou des pauvres, elles veulent avoir la certutitude que l'État sera capable de faire rentrer du pognon s'il a des difficultés à faire rouler sa dette. Là, comme les banques centrales disaient "niet", que les autres États européens étaient mous, que l'État Grec était réputé pour ne pas savoir collecter l'impôt, et que les perspectives de croissance étaient mauvaises, le doute s'est installé, et dès qu'un prêteur doute, c'est un effet boule de neige : il y a encore moins de chance de pouvoir refinancer sa dette dans le futur, donc on ne prête pas, donc il y a encore moins de chance de pouvoir refinancer sa dette, etc.
Au final, avec du retard, la BCE a accepté de couvrir (donc finalement les États européens ont accepter de mutualiser une partie de la dette Greque), et ça s'est "arrangé".
Je suis d'accord sur un point : les intérêts ne participent pas à l'augmentation de la masse monétaire.
Par contre, les intérêts correspondent à la rémunération d'un service (et à la couverture du risque associé). Si tu vas par là, payer un médecin ou un avocat, c'est aussi un mécanisme pour transférer de l'argent des pauvres aux riches :-) Ou plus généralement, toute entreprise qui réalise une partie de ses bénéfices en vendant quelque chose au public est une machine à transférer l'argent des pauvres vers les actionnaires. Il y a quelque chose de tordu dans ton raisonnement. Considère juste que prêter du pognon, c'est comme prêter une voiture; tu peux profiter de la chose prêtéé le temps du prêt, parce que tu en as besoin, et en échange, tu payes quelque chose.
Note que la banque a travaillé pour gagner ces intérêts : elle a installé des agences, payé des agents, des comptables, des logiciels, (corrompu des politiciens ou des concurrents—eh, quoi, c'est du travail aussi), et pris un risque (puisque si tu ne rembourses pas, le trou dans la caisse de la banque est réel—les autres banques sont d'accord pour accepter l'argent magique, mais ça ne marche que si l'argent magique ne disparait pas).
Le fait est quand dans notre monde actuel, le fait d'avoir de l'argent et de pouvoir le prêter donne du pouvoir, puisqu'il y a plus de gens qui ont besoin d'argent que de gens qui peuvent le prêter. De même que dans un monde où tout le monde crève la faim, avoir des stocks de bouffe donne du pouvoir, c'est un principe d'offre et de demande.
D'ailleurs, ça marche à toutes les échelles. Si tu as un prêt en cours, ta banque a en effet un certain pouvoir sur toi. Si tu es à découvert de 2000€, elle en a encore plus. Si par contre tu as rempli des comptes rémunérés, alors tu as du pouvoir sur ta banque, tu peux négocier des trucs sous la menace de partir à la concurrence.
C'est l'une des interprétations possibles sur le sujet, mais ça n'est généralement pas celle qui est utilisée lorsque l'on estime le patrimoine d'un particulier ou d'une entreprise.
Je ne pense pas qu'il y ait plusieurs interprétations, il y a juste des problèmes de définition.
Le patrimoine, ce n'est pas ton solde. Par exemple, si tu achètes un appart 100000€ et que pour le financer, tu empruntes 70000€, alors ton patrimoine augmente de 70000€ le jour de l'achat. Si par contre tu finances les 100000€ à partir de tes économies, alors ton patrimoine ne change pas. Il n'y a pas plusieurs manières d'interpréter ça, c'est juste que la définition du patrimoine ne correspond pas du tout à ce que certains essayent de lui faire dire.
Le taux de réserve obligatoire imposé par la BCE est de 1%
Sur les dépots à vue? Ça m'étonnerait, ça doit être plus. De toutes manières, les réserves des banques sont toujours supérieures aux réserves obligatoires (je n'ai jamais compris pourquoi, c'est toujours compliqué, la finance). Il ne faut pas non plus oublier que les banques peuvent emprunter aux banques centrales également, ce qui élimine une grosse partie des problèmes liés aux positions qui ne sont pas liquides.
Il s'agit entre-autres des prêts accordés aux particuliers et entreprises.
Ah non, ça ce n'est pas vrai. C'est parfois ce que les banquiers croient, mais je pense que tous les économistes sont d'accord pour dire que les prêts correspondent à de l'argent «magique»(1) créé par un jeu d'écriture au moment où le prêt est accordé, et détruit au fil des remboursements. Ça fonctionne parce que les banques se font confiance, et que l'argent «magique» devient «réel» au moment où il sort de la banque émettrice du prêt.
C'est un peu pour ça que ça ne change pas grand chose que les États empruntent aux banques où à la BCE, puisque l'argent des banques n'est pas plus ou moins magique que celui de la BCE (2), et que les intérêts seront payés aussi avec de l'argent magique. Emprunter aux banques permet d'injecter des € dans l'économie via les intérêts et à sécuriser les banques avec des avoirs sûrs, alors qu'emprunter à la BCE n'a aucun effet sur l'économie puisque les intérêts reviennent dans la poche des actionnaires des banques centrales (les états).
Après, savoir s'il vaut mieux injecter le pognon par le haut (les actionnaires des banques) ou par le bas (les pauvres), c'est juste politique. J'ai l'impression que le préjugé que les riches savent mieux dépenser leur argent que les pauvres n'est pas confirmé par les faits. À ma connaissance, il n'est pas non plus établi que les pauvres dépenseraient leur pognon de manière optimale pour l'économie et pour l'écologie, donc ce n'est pas non plus comme si une des deux options était rationnellement réfutée (c'est juste qu'on a rarement tenté de donner directement des billets neuf aux pauvres). Peut-être que le plus proche, c'est ce qu'on fait en France, avec l'État qui s'endette et un système social plutôt protecteur par rapport aux autres pays, mais il n'a échappé à personne que les performances économiques de la France n'étaient pas extraordinaires…
(1) mauvais vocabulaire puisque tout l'argent est «magique». Il y en a juste une partie un peu moins magique de l'autre :-)
(2) enfin si, l'argent de la BCE est quand même un peu plus magique, dans le sens où la BCE fabrique le pognon officiel et qu'elle ne peut pas faire faillite.
Imaginons que tu achètes une action 100€. Son prix monte et elle vaut maintenant 150€. D'où viennent ces 50€ supplémentaires, si ce n'est de "l'argent créé" ?
Bah non, c'est juste que tu te trompes quand tu penses que tu as 50€ de plus. Tant que tu n'as pas vendu cette action, tu n'as rien gagné.
Tu as la possibilité de vendre l'action quasi-immédiatement.
Si tu es un petit porteur, peut-être. Et encore, c'est pas toujours le cas : soit tu ne vas pas pouvoir la vendre au prix que tu voulais (parce qu'il y a eu des fluctuations du cours entre temps), soit la cotation a pu être suspendue (en cas de grosse gamelle, par exemple).
Si l'on considère que les 50 n'existent pas, alors les milliardaires n'existent pas.
Bah… oui. C'est parfaitement vrai, il y a des gens très très très riches, mais ils n'ont pas autant d'argent que la somme de leurs portefeuilles boursiers.
C'est vrai, mais ce n'est pas différent d'un compte en banque, ou il est impossible pour tout le monde de retirer son argent physiquement.
Deux manières de comprendre cette phrase. Si tu penses que les DAB vont tomber en panne de billets rapidement, alors c'est vrai. Il va y avoir un problème de logistique pour produire, acheminer, et distribuer le cash.
Si tu penses que la banque n'a pas les fonds pour restituer les dépots à vue, alors c'est probablement faux. Peut-être pas la totalité, mais une partie des dépots à vue est couverte par des réserves obligatoires (et certaines banques vont même au-delà), et en quelques jours elles peuvent revendre des positions pour se renflouer. Sans être un spécialiste du sujet, je pense que le manque de cash 'physique' va arriver beaucoup plus vite que la revente des positions. Et de toutes manières, le retrait d'argent de change pas la balance totale (l'argent déposé n'est pas un revenu pour la banque). Après, c'est évident que si tous les clients se barrent, la banque va faire faillite, mais pas parce qu'elle aurait déja dépensé l'argent des dépots.
Si j'ai bien compris, l'idée serait de diffuser le logiciel sous une licence "libre" permettant à tout le monde d'utiliser le logiciel, sauf dans un but précis.
Du style "vous pouvez utiliser ce logiciel pour dessiner tous les plans que vous voulez, sauf si vous êtes une entreprise et que vous dessinez des plans de fusée à destination de la Lune."
Sans être un pro des licences, quelques remarques:
1) une telle licence ne serait pas libre (selon toute définition raisonnable du libre)
2) en fonction de la licence de départ, une telle restriction peut ne pas être possible (par exemple, la GPL exlcut toute clause supplémentaire restreignant la liberté de l'utilisateur).
3) en fonction du pays où ça se passe et du droit des contrats que je ne connais absolument pas, une telle clause pourrait très bien ne pas être légale (par exemple, une clause telle que "vous êtes libre de modifier ce logiciel sauf si vous êtes une femme" n'a pas à être respectée, et il est fort probable que "vous pouvez vendre ce logiciel seulement après avoir passé 1h23 à sauter à cloche-pied sur le pied gauche" ne soit pas défendable devant un tribunal). En gros, ce n'est pas parce qu'on écrit quelque chose dans une licence ou dans un contrat que le signataire du contrat a l'obligation de la respecter, il peut choisir de ne pas la respecter et de choisir de régler ça au tribunal.
Au final, il semblerait quand même plus facile de maintenir une branche "privée" pendant 2 ans, diffusée seulement à la boîte qui a financé le développement, sous une licence non-libre. Je pense que je comprends pourquoi la question se pose, mais je ne suis pas convaincu par les solutions basées sur "je vous fournis la fonctionnalité, vous avez pas le droit de l'utiliser pour faire ceci mais pas cela".
En fonction de la fonctionalité en question, peut-être que de mentionner le sponsor de manière à ce que les clients le voient pourrait être assez dissuasif? Par exemple, si la fonction génère un rapport au format pdf, le fichier pourrait mentionner "Rapport généré par la méthode MaBoite", ce qui la fout suffisamment mal pour le concurrent pour éviter de refiler ça à un client. Bien sûr, on peut modifier le logiciel, on peut trouver plein de moyens de contourner, mais c'est quand même un peu la honte. Évidemment, ça va dépendre du service en question et ça n'est pas complètement applicable. Mais bon, quand on peut dire aux clients "oui oui, je sais que mon concurrent X vous fournit tel service, c'est nous qui l'avons développé et ils ne font qu'utiliser notre méthode sans savoir comment elle marche", ça a de la valeur…
J'imagine que ça n'aurait aucun sens de quantifier la puissance des moteurs autrement qu'en fournissant des Elo comparables aux Elo FIDE en partie longue…
Le score Elo est relatif, donc les Elo proposés par les sites d'échecs sont évidemment incomparables avec les Elo FIDE (il faut les corriger; en général il faut augmenter les Elo faibles (il y a plus de joueurs faibles et moyens sur les sites que dans les compétitions officielles), et diminuer les Elo forts (parce que la concentration des joueurs forts est plus forte en compet officielle). Si les Elo en parte rapide sont plus élevés, c'est soit parce que la base est plus large (plus il y a de joueurs et plus il y a de points Elo à se partager), soit parce qu'il y a plus de variance entre les joueurs forts et les joueurs faibles.
Ce qui n'est pas très clair, c'est comment calculer l'Elo d'un programme informatique, faut-il le mettre à la même cadence qu'une partie longue, mais comment prendre en compte la machine? L'Elo des programmes augmente avec les progrès techniques des machines; c'est à la fois anormal (puisque du coup, c'est la perf du couple machine/logiciel qui est mesurée), mais ça correspond à une réalité. Sans compter qu'il est parfois difficile de distinguer logiciel et matériel, puisque la programmation sur cartes graphiques a par exemple amélioré les perfs des logiciels.
Le texte de la dépêche dit "Ce programme a un Elo autour de 3000", mais ça doit être beaucoup plus que ça. On en avait discuté lors de la récente dépêche sur Stockfish, le principal concurrent; si Leela est à peu près au niveau de Stockfish, son Elo doit être largement supérieur à 3500. Il me semble que pout Stockfish 12, on parlait même de 3800.
3000, c'est pas beaucoup pour un moteur, ça veut dire que le programme perd parfois (rarement, certes, mais c'est possible) contre les meilleurs joueurs (qui sont autour de 2800).
Après, les Elo sont plus difficiles à évaluer quand il y a peu de concurrence et de gros écarts, il faut les calculer en prenant en compte les versions précédentes (moins performantes) des programmes et faire des approximations non vérifiables. 3500 ou 3800, de toutes manières, c'est totalement imbattable pas un humain.
Pour les programmes, les perfs dépendent évidemment des machines sur lesquels ils tournent. Du coup, peut-être qu'un Elo de 3000, c'est sur un ordinateur de bureau? Ça m'étonnerait quand même, c'est vraiment peu.
De toutes manières, 1) introduire des données bidons indistinguables des données réelles semble très difficile (par exemple, je pense qu'il est trivial pour n'importe quel vendeur/acheteurs de données de vérifier l'activité des comptes Facebook ou Twitter affiliés aux contacts, et de "nettoyer" les bases), 2) même si c'était possible, il n'est pas du tout exclu que ça n'ait aucun effet sur le marché des données personnelles, puisque les vraies données sont présentes de toutes manières. Envoyer une pub ciblée par e-mail à 10000 vraies personnes, où à 100000 personnes dont 90% sont des comptes bidons, ne génère pas spécialement de coûts supplémentaires. Les tarifs seraient réajustés automatiquement du fait du faible taux de retours, mais je ne suis pas certain que la "pureté" des bases de données soit un critère essentiel (à moins que l'objectif soit le démarchage téléphonique par exemple, mais c'est typiquement un cas où il est rentable de faire un pré-filtre—par exemple, ne pas appeler un numéro à l'indicatif international inexistant.
Dans le même style, des hordes de robots cliqueurs sur tous les liens commerciaux d'une page me semblent bien plus efficaces, puisqu'ils pourrissent les données d'un utilisateur réel : plus moyen de savoir si vous vous intéressez aux tournevis ou aux couches culottes si votre navigateur clique sur un lien aléatoire par seconde (votre bande passante en prend un coup, mais celle du fournisseur de service aussi). De même, si tous les liens de la page de retours de Google sont cliqués, pas moyen de savoir ce qui vous a intéressé. Bien sûr, vos vraies données sont aussi quelque part là-dedans, mais elles sont noyées par 99% de données bidon, et là, c'est vraiment dur de trier.
En même temps, c'est pas comme s'il venait s'expliquer, et la dernière fois, il avait engagé une discussion trollesque qui était tout sauf sincère, remplie d'arguments qui n'étaient pas de lui.
Cette description ne serait pas un stéréotype voire une homme de paille?
Une homme de paille, je ne pense pas, parce que je n'ai pas avancé d'arguments à sa place. Pour le stéréotype, peut-être, mais je fais ce que je peux avec ce que j'ai. Son argument, c'est quand même que le logiciel propriétaire enrichit Bill Gates qui finance l'OMS qui émet des recommandations liberticides et qui favorisent les entreprises pharmaceutiques. Pas besoin de faire d'homme de paille, je trouve.
Ici le but est de contre-carrer des source et des arguments douteux mais pas de stigmatiser les personnes.
Bah je ne sais pas. Réfuter les arguments complotistes, on fait ça depuis très longtemps. Est-ce qu'il ne serait pas temps d'essayer de stigmatiser les messagers? La dernière fois, les gens ont essayé de discuter avec lui, de présenter des arguments scientifiques, logiques sourcés. Il n'a visiblement aucune intention d'aller lire les méta-analyses sur l'hydroxychloroquine, ce qui l'intéresse, c'est de diffuser une rhétorique pseudoscientifique.
Du coup, je dirais que le but, c'est 1) de montrer qu'il est minoritaire; ce n'est pas parce qu'il a une énergie démesurée à consacrer à la diffusion de ses thèses qu'on ne peut pas le contredire, 2) que le lecteur de Linuxfr a le droit d'être protégé des bonimenteurs. Et pour moi, 3) j'aimerais comprendre comment ça marche dans sa tête. Je propose une interprétation, elle est peut-être complètement fausse, je ne peux pas savoir. Mais si elle est proche de la réalité, j'espère peut-être qu'en lisant ce que j'ai écrit, il va se dire "OK, je n'aime pas Bill Gates et je n'aime pas l'OMS; imaginer qu'ils sont de mèche pour brider les libertés individuelles justifierait cette opinion, mais ce n'est pas parce qu'un scénario est compatible avec mes opinions qu'il est réel." Encore une fois, je ne comprends pas pourquoi certaines personnes ont du mal, spontanément, à expliquer la différence entre ce qui est vrai et ce qui pourrait, ou aurait pu, être vrai. Mais il est peut-être sincère dans sa démarche, comme un témoin de Jéhovah qui est sincèrement désolé pour ceux qui lui ont claqué la porte au nez parce qu'ils vont aller en enfer et être torturé par leur Dieu miséricordieux (?). Quelle que soit la force de cette conviction, si on ne cherche pas à comprendre ses motivations, on ne pourra pas le convaincre de se poser et de réfléchir à ce qu'il raconte. Et du coup, il faut s'intéresser au bonhomme, et pas au message. Le message, de toutes manières, c'est le même que ce qu'on trouve partout sur Facebook, il n'y a rien d'intéressant là-dedans.
C'est de toutes manières totalement impossible de savoir si les gens sont juste obtus / ignorants / méthologiquement inaptes / aveuglés par une idéologie ou par un gourou, ou s'ils sont entrés dans une démarche de négationnisme et de manipulation active. Peut-être ne le savent-ils même pas eux mêmes.
J'ai découvert très récemment que certaines personnes, quand on leur posait la question, acceptaient qu'ils faisaient une différence entre "croire" et "penser être vrai". Quand j'y réfléchis, je me demande si cette espèce de schizophrénie n'est pas courante également dans les familles religieuses, par exemple. Tu vis dans un environnement social dans lequel la cohésion est basée sur un ensemble de croyances, ça peut être des croyances religieuses, ou un ensemble de théories plus ou moins complotistes qui te donnent une grille de lecture du monde ("Le gouvernement profite de la pandémie pour installer un régime autoritaire", par exemple, avec tout un tas de croyances corrélées sur l'efficacité de la chloroquine, la distribution ou la dangerosité des vaccins, l'influence du capitalisme, de Bill Gates, de la 5G, c'est hétérogène et incohérent, voire parfois même complètement autocontradictoire, mais ça n'est pas un problème à partir du moment où on vit dans un environnement où remettre en cause ces croyances n'est pas envisageable et entrainerait une expulsion du groupe, et éventuellement une forme de harcèlement). Bref, les gens ne sont pas complètement débiles, et quand tu leur demandes "Mais cette histoire de puce 5G dans les vaccins, tu penses que c'est vrai?", ils peuvent te répondre "nooon, pas vraiment, mais c'est l'idée, tu vois, ce qui est important, c'est qu'on nous manipule." Ils "croient" en ces trucs, les relaient, et ressortent ces "mèmes" au cours des discussions, mais ils ressentent plus ou moins que c'est factuellement absurde.
Je ne voudrais pas parler à la place de papap, il faudrait qu'il s'exprime sincèrement s'il le souhaite, mais mon interprétation, il croit qu'il y a quelque chose de malsain avec le capitalisme et le logiciel propriétaire, il déteste Bill Gates (parce qu'il est riche, ou parce qu'il est devenu riche en vendant des logiciels pourris), il déteste probablement des grands concepts comme "Big Pharma", il déteste les organisations internationales comme l'OMS qu'il considère comme corrompues. Et voila, son histoire comme un tout, c'est pas cohérent mais c'est pas très grave, c'est une grille d'interprétation simple qu'on peut appliquer aux problèmes hyper-complexes du monde réel. Et je ne pense pas que papap croie vraiment que c'est vrai. Il n'a pas l'air complètement idiot, il sait que France-Soir est un journal qui relaie des thèses nationalistes et complotistes, il sait que le Raoultisme ne tient plus face aux faits, il sait que la fondation Gates fournit des médocs aux petits africains. Et je pense qu'il sait que le lien entre la défiance d'un élu local envers le logiciel libre et la gestion internationale de la pandémie est un mensonge qu'il se fait à lui-même. Je ne sais pas s'il admettrait en public que ce qu'il a écrit n'est probablement pas vrai, que c'est une sorte de dissertation uchronique ou d'essai politique, comme ces jeux de rôles dans certaines formations où il faut défendre successivement deux points de vue opposés. Le seul truc malsain dans cette histoire, c'est qu'il n'est pas sincère sur le fait qu'il s'agisse d'un jeu (avec nous et avec lui-même également, probablement).
Je ne trouve pas ce genre de conneries drôles du tout. De mon temps de vieux, les trolls, c'était à vocation humoristique. Là, c'est à vocation politique, et ça peut avoir des conséquences graves sur la diffusion des informations scientifiques (et sur l'image du site).
Ce genre de trucs, c'est à l'opposé des valeurs du logiciel libre. Caser des mensonges relayés par des journaux populistes, et les cacher derrière une pseudo-défense des logiciels libres, c'est juste complètement nul. Je ne voudrais pas que quelqu'un puisse penser que les logiciels libres aient quoi que ce soit à voir avec ce genre de mouvements, qui ont largement assez de caisses de résonance dans les médias et sur les réseaux sociaux pour épargner les sites spécialisés avec leurs faits alternatifs.
Cabinet qui est aussi bien spécialisé en licenciements, qu'en logistique. Bref, des parasites.
OK, donc c'est des méchants (on ne sait pas pourquoi, peut-être parce qu'ils sont chers? Comme les footballeurs, ceux qui sont trop payés, c'est des méchants). Ça a quoi à voir avec l'incompétence de l'administration?
L'administration n'est pas défaillante par essence, elle ne tourne juste pas pour satisfaire en premier lieu les besoins de la population mais pour faire tourner l'économie pour le plus grand bénéfice de la bourgeoisie française.
Si la préfecture paume ton dossier, c'est parce que la secrétaire qui l'a mis dans le mauvais tiroir fait tourner l'économie pour le plus grand bénéfice de la bourgeoisie française? Faut arrêter de picoler.
Encore une fois, l'administration n'est juste pas conçue pour être efficace ou réactive.
Dire que ce cabinet a débloqué la situation c'est oublié les hôpitaux qui ont géré les vagues.
Le rapport entre les hopitaux et la logistique de la distribution de vaccin? Ah, on me dit dans l'oreillette qu'il n'y en a aucun.
Au passage, les hopitaux qui ont (plus ou moins) bien géré la crise, c'est beaucoup plus du fait de l'implication des soignants que de l'efficacité de l'administration…
C'est oublié que c'est maintenant un problème est de production.
C'est pour l'instant faux, on a vacciné 700000 personnes et il y a encore >800000 vaccins en réserve. Donc pour l'instant, c'est encore un problème de logistique.
Concurrence et brevet.
Voila, même pas de phrase, comme ça c'est au lecteur d'essayer de trouver une logique.
Une autre différence assez importante, c'est que la grippe est dangereuse pour les très jeunes enfants (< 2 ans), avec une mortalité non-négligeable, surtout avec comorbidités. Rien de ça pour le COVID, les bébés ne semblent même pas l'attrapper (les enfants produisent très peu de récepteur ACE2, qui est la cible du coronavirus).
Par ailleurs, la mortalité due à la grippe est le plus souvent due à des surinfections. Alors que pour le Covid, on meurt soit directement à cause du Coronavirus, soit à cause du système immunitaire qui finit par bousiller les poumons. C'est pas du tout la même stratégie pour sauver les patients graves.
Non, il n'y a pas de données. La position du gouvernement UK est intenable, le vaccin est certifié selon une certaine procédure, et s'écarter de la procédure, ça revient à sortir du sentier en espérant trouver "au jugé" un raccourcis.
Une autre idée dans le même genre serait de jouer autour de la chaine du froid (très contraignante), un peu comme quand on mange un yaourt périmé et que ça n'est pas très grave. Il est en effet largement possible qu'on puisse conserver le vaccin Pfizer à -18°C dans un congélateur grand public, mais ça n'a juste pas été testé. Donc, on ne sait pas. Et quand on ne sait pas, on prend un gros risque à faire comme si on savait.
Les anglais ont même par exemple considéré la possibilité de "mélanger" les vaccins, par exemple de donner une première dose du Pfizer et une deuxième avec le Moderna. À ce niveau, c'est de la pure inconscience. La seule manière de l'expliquer, c'est de réaliser que les gens qui prennent ce genre de décisions n'ont absolument aucune culture scientifique; ils se "croient" intelligents, mais ils n'ont pas les connaissances suffisantes pour réaliser l'absurdité de leur raisonnement.
Sur la forme : c'est parfaitement OK de ne pas tout comprendre et de ne pas tout connaitre. On a même le droit de ne rien comprendre à rien. Par contre, je ne comprends pas comment on peut à la fois ne rien comprendre, l'avouer, et écrire des torchons agressifs et accusateurs. Quand on ne connait pas un sujet, on se renseigne ou on laisse les autres parler, non?
Sur le fond, beaucoup de choses ont été dites.
La grippe n'a pas le même R0 que le Covid (plutôt 2 pour la grippe). > 80% de la population a déja des anticorps pour la grippe (infections ou vaccins dans les années précédentes). La grippe reste épidémique parce que le taux de mutation du virus est très élevé et qu'il évolue très vite pour échapper au système immunitaire.
La campagne de vaccination grippale vise les plus âgés. Ça n'est pas très logique : ne vacciner que les vieux ne permet pas de stopper l'épidémie (le danger pour les bébés et les personnes fragiles reste donc élevé), et le vaccin est peu efficace chez les personnes âgées. Il faudrait vacciner tout le monde bien sûr, ce qui éviterait la plupart des épidémies de grippe. C'est bien sûr sans compter les antivax et ceux qui ont peur d'une petite piqûre et seraient prêts à inventer n'importe quoi pour l'éviter. La campagne de vaccination Covid est plus rationnelle : elle vise à arrêter l'épidémie, pas seulement à protéger les vieux.
La campagne de vaccination grippale semble "rouler" parce qu'elle a lieu tous les ans. Il suffit d'un grain de sable (par exemple, une plus forte demande cette année) pour que ça coince (rupture de stock). Imaginez aussi qu'il faille un vaccin + un rappel : les infirmières et les médecins seraient tout un coup débordés. Et comme dit plus haut, la logistique pour distribuer et conserver des vaccins au -80°C est très très différente de celle du vaccin contre la grippe, que les gens achètent et conservent 3 semaines au frigo avant d'aller voir leur médecin.
L'administration patine et est inefficace : bien sûr. Mais il faut avoir vécu dans une grotte ces 50 dernières années pour faire semblant de le découvrir. L'administration arrive à peine à gérer les affaires courantes en temps normal. À chaque changement mineur de logiciel ou de système, il y a 2 ans de cafouillage qui peut même conduire à des condamnations de l'État à la cour Européenne de justice (dernièrement : permis de conduire et carte grise, émission de cartes de séjour, déni d'accès aux prestations sociales, etc). De toutes manières, ces défaillances administratives ne sont pas directement liées au gouvernement, elles sont dues à une politique RH défaillante dans la fonction publique, au sous-financement, à l'inefficacité des chaines de commandement, et à l'incompétence (voire à la malveillance) des cadres de la fonction publique. Donc, en cas de crise, évidemment que rien ne fonctionne; blâmez le gouvernement si vous voulez, ça n'y changera rien. Vous noterez que la situation s'est débloquée suite à l'intervention d'un cabinet privé pour gérer la logistique, d'ailleurs (je trouve ça triste à en pleurer…).
Un dernier mot sur la judiciarisation de la société : je me demande à quoi servent ces poursuites. Les élus sont bien sûr responsables de leurs actions (ou de leur inaction), mais là, on est face à une catastrophe naturelle. On ne va pas porter plainte contre un virus! Parfois, quand on est aux responsabilités, on se trompe, on ne prend pas les bonnes décisions, ou on doit prendre des décisions douloureuses (fermer un service parce qu'on n'a pas l'argent pour le laisser ouvert, faire tourner des services en conditions dégradées, etc). Faire des erreurs par inexpérience ou par manque de lucidité n'est pas illégal, et je ne vois pas ce que la justice a à voir là-dedans. C'est juste une affaire de pognon? La satisfaction de savoir ce qui s'est réellement passé, qui a réellement pris les décisions, au prix d'une enquête de 10 ans payée par la société? Ça ne fera pas revenir tata Jeanine de toutes manières. En tout cas, pour la gestion du Covid, je n'ai pas l'impression qu'il n'y ait aucune infraction réellement constituée. Bien sûr, il y a de l'incompétence, de l'impréparation, des choix politiques qui ont fait que le système de santé était déja en mauvais état au début de la crise. Mais tout ceci est du ressort du débat politique, et pas du débat judiciaire! Quand on voit des cabinets d'avocats qui recrutent de manière putassière des familles de victimes, je me dis que tous ces procès ne sont pas du tout à l'avantage de la société ou des victimes.
[^] # Re: La vie est un combat…
Posté par arnaudus . En réponse au journal Nostalgie d'Internet des années 2000.. Évalué à 5.
Bah sur ce coup, permet-moi d'être pragmatique. Il y a eu une petite dizaine d'instaurations indépendantes de régimes communistes (ou d'inspiration communiste) dans le monde. Sans aucune exception, ces régimes ont mis en place progressivement ou dès le début un mode de fonctionnement totalitaire : parti unique, pas d'éléctions libres, pas d'opposition politique, pas de sortie démocartique possible du régime communiste. Dans une très large majorité des cas (à l'exception de Cuba, et encore), le régime devient quelque chose qui n'est plus vraiment communiste (disons que l'abolition de la propriété privée marche bien pour les pauvres, mais pas pour tout le monde).
Quand on fait une expérience 10 fois et qu'elle foire 10 fois, on peut avoir toutes les raisons du monde de penser que ça pourrait peut-être marcher la 11ème fois, ça n'est pas très convainquant. Surtout quand on n'a aucune idée de pourquoi ça a foiré 10 fois et de ce qu'il faudrait changer pour que ça marche la 11ème. Du coup, pragmatiquement, jusqu'à preuve du contraire, 1) la mise en place d'un régime communiste se termine toujours par un régime totalitaire, et 2) de nouvelles expériences coûtant des millions de vies humaines, on peut légitimiment douter du rapport coût/bénéfices de toute nouvelle tentative.
[^] # Re: La vie est un combat…
Posté par arnaudus . En réponse au journal Nostalgie d'Internet des années 2000.. Évalué à 3.
Justement, c'est ce que je dis : les seuls concepts qui ont survécu aux puissances communistes, c'est l'absence de démocratie. C'est plus une blague qu'autre chose pour les US, puisque je ne pense pas que Guantanamo ait une parenté idéologique avec les goulags sibériens (c'est plutôt de la convergence évolutive dans ce cas là), mais par contre c'est carrément vrai pour le système politique de la 1ere puissance mondiale.
[^] # Re: Normalisation
Posté par arnaudus . En réponse au journal Nostalgie d'Internet des années 2000.. Évalué à 2.
Le logiciel libre utilise le droit d'auteur de manière originale, mais complètement conforme au cadre légal. Je ne vois pas où tu veux en venir exactement ; tu veux dire qu'il y a des bons droits d'auteur et des mauvais droits d'auteur? Et qui décide de ce qui est bien ou pas? Où est la limite, est-ce que c'est l'argent qui rend le droit d'auteur sale?
Les maisons de production sont des investisseurs sans qui l'auteur ne pourrait diffuser son oeuvre. Les arts graphiques (peinture, sculpture, etc) sont souvent diffusés sans société de gestion des droits d'auteur, parce que la copie est interdite ou impossible.
Une société privée à but non lucratif, mieux vaut le préciser quand même. La SACEM trempe dans un tas de magouilles pas jolies (y compris par un lobbying très puissant pour garantir son monopole, ou un système de redistribution douteux), mais il ne faudrait pas qu'on puisse penser que la SACEM exploite les artistes, ça serait absurde.
On peut tout à fait se passer de la SACEM, de nombreux artistes le font. Après, du coup, il faut se débrouiller pour négocier directement, et aucun acteur du système de veut ça (les radios ne veulent pas négocier directement avec X ou Y pour chaque morceau passé). Le système SACEM a aussi des avantages…
C'est un jugement moral? Dévoyé par rapport à quoi? On parle encore du "bon" et du "mauvais" droit d'auteur? Pour le cinéma par exemple, il y a plusieurs gros acteurs, il y a donc une forme de concurrence. Pour toi, c'est aussi "dévoyé"? Comment dans un monde non dévoyé, un producteur pourrait espérer rentrer dans ses frais? Produire un film ou un album de musique est un investissement parfois très conséquent; toucher un pourcentage sur les ventes (et donc partager les droits patrimoniaux entre l'auteur et le producteur) ne semble pas malsain par défaut, si? Après, ces ayant-droit embauchent des avocats et des employés pour collecter ce que la loi les autorise à collecter et poursuivre en justice ceux qui n'ont pas respecté les licences et contrats… On ferait pareil pour un logiciel libre, et on trouverait ça normal… Non, je ne comprends pas.
La licence globale semble une généralisation d'un système SACEM que tu sembles dénoncer deux phrases plus haut, donc je ne comprends pas trop. Si elle est intégrée à l'abonnement Internet, elle devient même obligatoire en plus d'être monopolistique, et elle interdit à un acteur de faire valoir ses droits d'auteur différemment que de la manière capitalistico-jenesaispasquoi imposée par le système. Imagine qu'il existe une licence globale logicielle, quelle serait ta position en tant que libriste? Tu ne trouverais pas que la situation est écoeurante, puisque soit le libriste entre dans le système (et abandonne le libre) pour être rémunéré, soit il voit "son" argent lui passer sous le nez et aller vers les acteurs du logiciel propriétaire?
Bref, ton discours me semble assez contradictoire. Tu sembles vouloir opposer les gentils artistes et les gentils consommateurs et les gros acteurs intermédiaires, mais les solutions que tu proposes (licence globale) sont une généralisation d'un système que tu sembles détester (un énorme intérmédiaire monopolistique et incontournable). L'état des lieux actuels (quelques gros acteurs qui ont un gros catalogue et qui gèrent les droits d'auteurs le plus globalement possible en faisant payer une sorte de licence globale pour accéder à leur catalogue) ne semble pas te convenir non plus, mais visiblement payer à l'utilisation non plus.
[^] # Re: La vie est un combat…
Posté par arnaudus . En réponse au journal Nostalgie d'Internet des années 2000.. Évalué à 3.
Tu as l'air d'insinuer que le Communisme peut envisager des victoires dans un avenir par trop lointain? À part la surveillance de masse, l'État policier, et le goulag, je ne vois pas trop quelles idées communistes ont de l'avenir dans notre société. Même le concept de classe sociale en tant que grille de lecture de la société est malmené…
J'ai plutôt l'impression que les avancées sociales envisagées (revenu universel, relance par la monnaie hélicoptère, …) sont plutôt d'inspiration libérale (on vous donne X, vous en fait ce que vous voulez) que communiste (on met en place une ressource commune et les règles pour que tout le monde puisse l'utiliser).
# Normalisation
Posté par arnaudus . En réponse au journal Nostalgie d'Internet des années 2000.. Évalué à 9.
J'ai plutôt l'impression que ce qu'on vit, c'est simplement la "normalisation" d'Internet, qui rentre peu à peu dans le cadre législatif du quotidien.
Il faut quand même réaliser que le droit d'auteur et les lois sur la liberté de la presse prédatent Internet de beaucoup. Ces lois ayant été établies avant internet, elles ne prenaient pas en compte la possibilité de partager des fichiers numériques. Il y a donc eu une période au cours de laquelle "on" a pensé que ces lois pouvaient ne pas s'appliquer. Or, c'est mal connaitre le fonctionnement d'une société : après un temps plus ou moins long, les lois s'adaptent. C'est même plutôt sain, je trouve, qu'il n'existe pas à terme de zones de non-droit.
Après, on peut ne pas aimer certaines lois, souhaiter les changer, etc. Mais en soi ça n'a pas grand chose à voir avec l'application des lois.
Le principe du droit d'auteur donne une liberté gigantesque aux auteurs (et aux personnes que les auteurs choisissent pour faire appliquer leurs droits). L'auteur décide presque de tout : qui peut lire/regarder une oeuvre, les conditions de sa rémunération éventuelle, les conditions de la redistribution de l'oeuvre, etc. Les sociétés d'artistes "uniformisent" un peu ces droits, en collectant et redistribuant l'argent selon certaines règles, mais ça n'est pas une obligation. D'ailleurs, il est assez ironique que le logiciel libre doive justement son existence à cette force du droit d'auteur—il faut quand même réaliser que l'auteur d'un logiciel peut imposer les conditions de redistribution à quelqu'un qui l'a acquis légalement, y compris par un achat.
Pendant une vingtaine d'années, Internet a été de facto une zone où le droit d'auteur n'a pas été respecté. On peut toujours considérer ça comme un "espace de liberté", mais c'est assez réducteur comme vision : pour les auteurs qui souhaitaient simplement faire valoir leurs droits, ça ne l'était pas du tout. C'est un peu comme si on considérait une cité de banlieue comme une zone de liberté : pour les dealers, certainement, pour les autres, peut-être moins.
Encore une fois, tout ça, c'est bien indépendant de ce qu'on peut penser du droit d'auteur, ce n'est pas qu'Internet avait des règles différentes, c'est juste qu'on pouvait y faire des choses illégales sans qu'il n'y ait aucune conséquence.
D'ailleurs, c'est loin d'être fini. Il est encore très facile d'accéder à une infinité de fichiers sans l'autorisation des auteurs, et sans risque de poursuite. C'est devenu un peu moins facile peut-être, et moins centralisé qu'au temps de megaupload, mais c'est loin d'avoir changé radicalement.
En ce qui concerne la censure, il faut distinguer ce qui ressort des décisions administratives (qui, en effet, sont du ressort de la censure, comme par exemple le blocage des sites faisait la propagande du terrorisme, etc), et les blocages ordonnés par la justice. Pour de nombreux exemples cités, les blocages sont issus d'une décision de justice, c'est un fonctionnement acceptable et normal dans un État de droit (à moins de ne mettre aucune limite à la liberté de publication). Je trouve d'ailleurs qu'il reste très facile de publier n'importe quoi sans aucune conséquence. Je pense que malgré tout l'arsenal législatif, il n'a jamais été aussi facile de publier et de lire n'importe quoi, y compris des écrits racistes, négationnistes, des mensonges, des propos diffamatoires, de la retape pour les sectes, pour des contenus interdits aux mineurs, des insultes, bref, toute la panoplie de trucs illégaux qui seraient immédiatement censurés dans la presse écrite.
D'ailleurs, les États sont mis devant le fait accompli de l'impossibilité de contrôle, que ça soit par l'exécutif, le législatif, ou le judiciaire. La seule parade est de mettre les hébergeurs devant des responsabilités de filtrage, mais ça va de pair avec une grosse responsabilité, ainsi qu'à des retraits injustifiés.
Ceci dit, au final, il ne faut pas oublier qu'être hébergé par Youtube n'est pas un droit. Le droit fondamental, c'est de ne pas être censuré par l'État. Tant qu'il y a une possibilité d'héberger un contenu et de le diffuser, il n'y a pas d'atteinte à la liberté d'expression. La liberté d'expression n'a rien à voir avec le fait d'ouvrir toutes les plateformes à tout le monde, autrement, les journaux papier devraient publier tout ce que leurs lecteurs leur enverraient, c'est absurde. On a tout a fait le droit de créer un site où tous les contenus parlant de Windows, de vibromasseurs, ou de Rachmaninov sont interdits, et ça n'est pas une atteinte à la liberté d'expression. De même, Youtube a le droit de supprimer les vidéos montrant de courts extraits de films : ces extraits sont probablement légaux (dans un cadre législatif donné et à une date donnée), mais il n'existe pas d'obligation de publier tout ce qui est légal. Ça arrange Youtube pour plein de raisons (se mettre dans la poche des partenaires commerciaux, éviter les procédures, encourager la production de contenus originaux plutôt que les compilations, éviter de se faire reprocher de valider une vidéo et pas une autre, etc); il existe tout plein de plateformes sur lesquelles ont peut diffuser ses vidéos. Ah oui, on ne beneficie plus de la visibilité qu'apporte Youtube. Mais c'est complètement paradoxal de vouloir bénéficier des GAFAM et de critiquer leur monopole de fait.
Bon, bref, au lieu de se plaindre tout le temps de ce que fait Google, du fait que ça devienne plus dur de télécharger, que des acteurs privés s'emparent du marché à coup de services et d'investissements ,on peut aussi se demander pourquoi ces acteurs sont devenus incontournables. Il existe des belles exceptions à cet Internet des GAFAM (Wikipédia est un super exemple) : ça n'est pas une question d'argent, c'est une histoire de service et d'innovation. Le fait est que Youtube est un service inégalé, Google search est un service inégalé, Twitter offre un service inégalé, Amazon offre un service inégalé. D'ailleurs, derrière tous ses services, il y a de réelles innovations algorithmiques, logicielles et logistiques. On peut courrir derrière et rêver à des simili-clones libres, mais je ne comprends pas dans quel monde ça pourrait marcher (à moins que les gens soient prêts à utiliser un service moins bon pour protéger leurs données privées, ce qui me semble peu probable à grande échelle (1: les gens s'en foutent, 2: les données sont déja diffusées).
Bon, bref, je trouve que le problème principal d'Internet aujourd'hui est plus de limiter la visibilité des trucs toxiques pour la société, plutôt que de favoriser la liberté d'expression. Ça n'a pas à passer par la censure, mais plutôt à proposer des algorithmes éthiques qui ont des objectifs utilitaristes—pas facile à imposer à des boîtes privées pour de bonnes raisons, d'ailleurs.
[^] # Re: Intérêts
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 4.
Le constat est probablement vrai, mais je te trouve très défaitiste. L'histoire des sciences a montré que certains champs disciplinaires noyautés et pourris par une culture non-scientifique pouvaient à terme devenir des voies de recherche tout à fait crédibles. Souvent, ça passe par un remplacement de la communauté par des scientifiques externes qui se reconvertissent. Typiquement, la psychologie a suivi cette voie-ci, grâce notamment aux apports des neurosciences. Malheureusement, il y a souvent un gros décalage entre la réalité d'une discipline et l'image que les gens et les institutons s'en font (par exemple, les experts auxquels la justice fait appel sont encore issus des anciennes pratiques).
Pour l'économie, 1) il semble que notre principale source d'information (média et politiques) soit très déconnectée des travaux universitaires, et 2) ce n'est pas parce que ça patine en France que c'est le cas partout. Par exemple, de ce que je connais des prix Nobels d'économie, ça vole un peu plus haut que l'analyse politique traditionnelle.
[^] # Re: Intérêts
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 4. Dernière modification le 02 avril 2021 à 15:28.
C'est aussi ce que j'ai cru comprendre. Mais en plus, il y a un truc pas clair sur le sens d'"inflation", puisque la planche à billet crée bien de l'inflation monétaire (il y a plus de monnaie); c'est juste que ce "plus de monnaie" ne se traduit pas forcément par une augmentation des prix, contrairement aux théories économiques orthodoxes. Je n'ai pas compris où va la nouvelle monnaie par contre (dans les bulles spéculatives?).
Si j'ai bien compris, cette théorie de l'inflation liée à la planche à billets est fondatrice du modèle Européen, sous pression des Allemands à cause de l'hyperinflation -> Hitler (et paf, point Godwin).
D'ailleurs, le rôle principal de la BCE est de maintenir l'inflation à un niveau désiré (~ 1 ou 2%). Le paradoxe, c'est que certains semblent penser que l'action de la BCE n'a absolument aucun effet sur l'inflation. Il est en effet tout à fait possible que la BCE joue le rôle du gamin qui joue 10 minutes à une démo de jeu vidéo avant de s'apercevoir que c'était une démo et que ses actions sur la manette n'avaient aucun effet; dans un monde aussi complexe, on peut avoir l'illusion qu'une politique économique a une relation de cause à effet (on fait X et ça cause Y), alors que la politique économique ne fait que répondre à une autre cause (il se passe Z qui cause Y, et la BCE répond à Z en faisant X, et croie ainsi que X a causé Y).
J'ai cru comprendre que les politiques économiques en Europe étaient assez éloignées des travaux universitaires, ce qui fait qu'il est tout à fait possible qu'on fasse en fait n'importe quoi tout en étant persuadés de contrôler quelque chose.
[^] # Re: Journal vide…
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 3.
Je ne sais pas si c'est surprenant, mais il semble que les gens qui trouvent le système financier révoltant sont ceux qui comprennent le moins comment il fonctionne. Ce n'est pas toujours le cas; par exemple, les gens qui sont anti-religieux connaissent souvent mieux les textes religieux que les croyants, la plupart des végétariens connaissent bien le fonctionnement de l'élevage et de l'industrie qui va avec, etc. Mais la finance, c'est toujours "J'y comprends rien c'est révoltant".
[^] # Re: Intérêts
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 3.
Je m'auto-réponds, mais j'ai oublié d'écrire que l'idée ordo-libérale (sur laquelle est basée le fonctionnement de l'Europe) repose sur l'hypothèse que l'obligation d'emprunter aux banques est censée réguler l'envie d'utiliser trop la planche à billets pour les États. Avec une monnaie commune et des politiques économiques indépendantes, il y a un problème de contrôle : si un État se mettait à faire marcher la planche à billets à fond, la dévaluation serait subie par tout le monde. Du coup, on impose de passer par les marchés, qui sont censés jouer un rôle de régulateur : les marchés ne prêteraient pas à un État qui emprunterait trop pour pouvoir faire rouler sa dette. (Bon, en plus, il y a les règles budgétaires, les 3% du PIB et tout). C'était le compromis pour fonctionner tous ensemble malgré des gouvernements indépendants.
Ça a "bien" marché pour la Grèce : en effet, les marchés ont arrêté de prêter. Par contre, ça a donné l'impression que la suite n'a pas été anticipée : l'effet domino et les conséquences pour tous les pays de la zone Euro. La BCE a rectifié le coup, mais ça a pris du temps, et les Grecs s'en sont pris plein les dents. Au passage, les marchés aussi, parce que la dette a été restructurée (mais quand on prête à des taux d'intérêt de 20%, on accepte les risques).
[^] # Re: Intérêts
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 5.
Disons qu'elles ont la confiance des acteurs du système pour prêter de l'argent qu'elles n'ont pas. C'est quand même pas à la portée de tout le monde, et c'est pour ça qu'on ne peut pas monter une banque en auto-entreprise.
Et puis, elles n'ont pas besoin d'argent pour prêter, mais elles ont besoin de clients qui ont des comptes sur lesquels il y a de l'argent prêté par les autres banques, sinon ça ne marche pas.
Ça ne fonctionne quand même pas comme une planche à billets, puisque si tu ne rembourses pas, la banque l'a dans l'os et elle doit couvrir les pertes avec du vrai pognon.
J'ai dû écrire "le fait de pouvoir prêter de l'argent donne du pouvoir" tout court, ça suffit en fait :-)
[^] # Re: Intérêts
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 3.
Je pense que tu évoques deux choses qui n'ont pas grand chose à voir : l'État Grec n'a pas été insolvable parce que les riches ont échappé à l'impôt, les problèmes sont arrivés parce que les banques ont eu un doute sur la capacité de l'État à rembourser les prêts. Ça aurait pu être réglé très facilement si la BCE avait dit "OK, on couvre", par exemple.
Au passage, j'ai l'impression que ce qui était reproché à la Grèce sur la perception de l'impôt, ce n'était pas seulement l'évasion fiscale des riches, c'était l'évasion fiscale tout court. Au moment où elles accordent leurs prêts, les banques se foutent pas mal de savoir si le pognon vient des riches ou des pauvres, elles veulent avoir la certutitude que l'État sera capable de faire rentrer du pognon s'il a des difficultés à faire rouler sa dette. Là, comme les banques centrales disaient "niet", que les autres États européens étaient mous, que l'État Grec était réputé pour ne pas savoir collecter l'impôt, et que les perspectives de croissance étaient mauvaises, le doute s'est installé, et dès qu'un prêteur doute, c'est un effet boule de neige : il y a encore moins de chance de pouvoir refinancer sa dette dans le futur, donc on ne prête pas, donc il y a encore moins de chance de pouvoir refinancer sa dette, etc.
Au final, avec du retard, la BCE a accepté de couvrir (donc finalement les États européens ont accepter de mutualiser une partie de la dette Greque), et ça s'est "arrangé".
[^] # Re: Intérêts
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 5.
Je suis d'accord sur un point : les intérêts ne participent pas à l'augmentation de la masse monétaire.
Par contre, les intérêts correspondent à la rémunération d'un service (et à la couverture du risque associé). Si tu vas par là, payer un médecin ou un avocat, c'est aussi un mécanisme pour transférer de l'argent des pauvres aux riches :-) Ou plus généralement, toute entreprise qui réalise une partie de ses bénéfices en vendant quelque chose au public est une machine à transférer l'argent des pauvres vers les actionnaires. Il y a quelque chose de tordu dans ton raisonnement. Considère juste que prêter du pognon, c'est comme prêter une voiture; tu peux profiter de la chose prêtéé le temps du prêt, parce que tu en as besoin, et en échange, tu payes quelque chose.
Note que la banque a travaillé pour gagner ces intérêts : elle a installé des agences, payé des agents, des comptables, des logiciels, (corrompu des politiciens ou des concurrents—eh, quoi, c'est du travail aussi), et pris un risque (puisque si tu ne rembourses pas, le trou dans la caisse de la banque est réel—les autres banques sont d'accord pour accepter l'argent magique, mais ça ne marche que si l'argent magique ne disparait pas).
Le fait est quand dans notre monde actuel, le fait d'avoir de l'argent et de pouvoir le prêter donne du pouvoir, puisqu'il y a plus de gens qui ont besoin d'argent que de gens qui peuvent le prêter. De même que dans un monde où tout le monde crève la faim, avoir des stocks de bouffe donne du pouvoir, c'est un principe d'offre et de demande.
D'ailleurs, ça marche à toutes les échelles. Si tu as un prêt en cours, ta banque a en effet un certain pouvoir sur toi. Si tu es à découvert de 2000€, elle en a encore plus. Si par contre tu as rempli des comptes rémunérés, alors tu as du pouvoir sur ta banque, tu peux négocier des trucs sous la menace de partir à la concurrence.
[^] # Re: La bourse n'est pas un jeu à somme nulle
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 5.
Je ne pense pas qu'il y ait plusieurs interprétations, il y a juste des problèmes de définition.
Le patrimoine, ce n'est pas ton solde. Par exemple, si tu achètes un appart 100000€ et que pour le financer, tu empruntes 70000€, alors ton patrimoine augmente de 70000€ le jour de l'achat. Si par contre tu finances les 100000€ à partir de tes économies, alors ton patrimoine ne change pas. Il n'y a pas plusieurs manières d'interpréter ça, c'est juste que la définition du patrimoine ne correspond pas du tout à ce que certains essayent de lui faire dire.
Sur les dépots à vue? Ça m'étonnerait, ça doit être plus. De toutes manières, les réserves des banques sont toujours supérieures aux réserves obligatoires (je n'ai jamais compris pourquoi, c'est toujours compliqué, la finance). Il ne faut pas non plus oublier que les banques peuvent emprunter aux banques centrales également, ce qui élimine une grosse partie des problèmes liés aux positions qui ne sont pas liquides.
Ah non, ça ce n'est pas vrai. C'est parfois ce que les banquiers croient, mais je pense que tous les économistes sont d'accord pour dire que les prêts correspondent à de l'argent «magique»(1) créé par un jeu d'écriture au moment où le prêt est accordé, et détruit au fil des remboursements. Ça fonctionne parce que les banques se font confiance, et que l'argent «magique» devient «réel» au moment où il sort de la banque émettrice du prêt.
C'est un peu pour ça que ça ne change pas grand chose que les États empruntent aux banques où à la BCE, puisque l'argent des banques n'est pas plus ou moins magique que celui de la BCE (2), et que les intérêts seront payés aussi avec de l'argent magique. Emprunter aux banques permet d'injecter des € dans l'économie via les intérêts et à sécuriser les banques avec des avoirs sûrs, alors qu'emprunter à la BCE n'a aucun effet sur l'économie puisque les intérêts reviennent dans la poche des actionnaires des banques centrales (les états).
Après, savoir s'il vaut mieux injecter le pognon par le haut (les actionnaires des banques) ou par le bas (les pauvres), c'est juste politique. J'ai l'impression que le préjugé que les riches savent mieux dépenser leur argent que les pauvres n'est pas confirmé par les faits. À ma connaissance, il n'est pas non plus établi que les pauvres dépenseraient leur pognon de manière optimale pour l'économie et pour l'écologie, donc ce n'est pas non plus comme si une des deux options était rationnellement réfutée (c'est juste qu'on a rarement tenté de donner directement des billets neuf aux pauvres). Peut-être que le plus proche, c'est ce qu'on fait en France, avec l'État qui s'endette et un système social plutôt protecteur par rapport aux autres pays, mais il n'a échappé à personne que les performances économiques de la France n'étaient pas extraordinaires…
(1) mauvais vocabulaire puisque tout l'argent est «magique». Il y en a juste une partie un peu moins magique de l'autre :-)
(2) enfin si, l'argent de la BCE est quand même un peu plus magique, dans le sens où la BCE fabrique le pognon officiel et qu'elle ne peut pas faire faillite.
[^] # Re: La bourse n'est pas un jeu à somme nulle
Posté par arnaudus . En réponse au journal La Bourse ou la vie ?. Évalué à 3.
Bah non, c'est juste que tu te trompes quand tu penses que tu as 50€ de plus. Tant que tu n'as pas vendu cette action, tu n'as rien gagné.
Si tu es un petit porteur, peut-être. Et encore, c'est pas toujours le cas : soit tu ne vas pas pouvoir la vendre au prix que tu voulais (parce qu'il y a eu des fluctuations du cours entre temps), soit la cotation a pu être suspendue (en cas de grosse gamelle, par exemple).
Bah… oui. C'est parfaitement vrai, il y a des gens très très très riches, mais ils n'ont pas autant d'argent que la somme de leurs portefeuilles boursiers.
Deux manières de comprendre cette phrase. Si tu penses que les DAB vont tomber en panne de billets rapidement, alors c'est vrai. Il va y avoir un problème de logistique pour produire, acheminer, et distribuer le cash.
Si tu penses que la banque n'a pas les fonds pour restituer les dépots à vue, alors c'est probablement faux. Peut-être pas la totalité, mais une partie des dépots à vue est couverte par des réserves obligatoires (et certaines banques vont même au-delà), et en quelques jours elles peuvent revendre des positions pour se renflouer. Sans être un spécialiste du sujet, je pense que le manque de cash 'physique' va arriver beaucoup plus vite que la revente des positions. Et de toutes manières, le retrait d'argent de change pas la balance totale (l'argent déposé n'est pas un revenu pour la banque). Après, c'est évident que si tous les clients se barrent, la banque va faire faillite, mais pas parce qu'elle aurait déja dépensé l'argent des dépots.
# Très (trop?) compliqué?
Posté par arnaudus . En réponse au message Droits d'utilisation réservés et licence libre. Évalué à 7. Dernière modification le 24 mars 2021 à 18:02.
Si j'ai bien compris, l'idée serait de diffuser le logiciel sous une licence "libre" permettant à tout le monde d'utiliser le logiciel, sauf dans un but précis.
Du style "vous pouvez utiliser ce logiciel pour dessiner tous les plans que vous voulez, sauf si vous êtes une entreprise et que vous dessinez des plans de fusée à destination de la Lune."
Sans être un pro des licences, quelques remarques:
1) une telle licence ne serait pas libre (selon toute définition raisonnable du libre)
2) en fonction de la licence de départ, une telle restriction peut ne pas être possible (par exemple, la GPL exlcut toute clause supplémentaire restreignant la liberté de l'utilisateur).
3) en fonction du pays où ça se passe et du droit des contrats que je ne connais absolument pas, une telle clause pourrait très bien ne pas être légale (par exemple, une clause telle que "vous êtes libre de modifier ce logiciel sauf si vous êtes une femme" n'a pas à être respectée, et il est fort probable que "vous pouvez vendre ce logiciel seulement après avoir passé 1h23 à sauter à cloche-pied sur le pied gauche" ne soit pas défendable devant un tribunal). En gros, ce n'est pas parce qu'on écrit quelque chose dans une licence ou dans un contrat que le signataire du contrat a l'obligation de la respecter, il peut choisir de ne pas la respecter et de choisir de régler ça au tribunal.
Au final, il semblerait quand même plus facile de maintenir une branche "privée" pendant 2 ans, diffusée seulement à la boîte qui a financé le développement, sous une licence non-libre. Je pense que je comprends pourquoi la question se pose, mais je ne suis pas convaincu par les solutions basées sur "je vous fournis la fonctionnalité, vous avez pas le droit de l'utiliser pour faire ceci mais pas cela".
En fonction de la fonctionalité en question, peut-être que de mentionner le sponsor de manière à ce que les clients le voient pourrait être assez dissuasif? Par exemple, si la fonction génère un rapport au format pdf, le fichier pourrait mentionner "Rapport généré par la méthode MaBoite", ce qui la fout suffisamment mal pour le concurrent pour éviter de refiler ça à un client. Bien sûr, on peut modifier le logiciel, on peut trouver plein de moyens de contourner, mais c'est quand même un peu la honte. Évidemment, ça va dépendre du service en question et ça n'est pas complètement applicable. Mais bon, quand on peut dire aux clients "oui oui, je sais que mon concurrent X vous fournit tel service, c'est nous qui l'avons développé et ils ne font qu'utiliser notre méthode sans savoir comment elle marche", ça a de la valeur…
[^] # Re: Estimation Elo
Posté par arnaudus . En réponse à la dépêche Leela Chess Zero. Évalué à 5.
J'imagine que ça n'aurait aucun sens de quantifier la puissance des moteurs autrement qu'en fournissant des Elo comparables aux Elo FIDE en partie longue…
Le score Elo est relatif, donc les Elo proposés par les sites d'échecs sont évidemment incomparables avec les Elo FIDE (il faut les corriger; en général il faut augmenter les Elo faibles (il y a plus de joueurs faibles et moyens sur les sites que dans les compétitions officielles), et diminuer les Elo forts (parce que la concentration des joueurs forts est plus forte en compet officielle). Si les Elo en parte rapide sont plus élevés, c'est soit parce que la base est plus large (plus il y a de joueurs et plus il y a de points Elo à se partager), soit parce qu'il y a plus de variance entre les joueurs forts et les joueurs faibles.
Ce qui n'est pas très clair, c'est comment calculer l'Elo d'un programme informatique, faut-il le mettre à la même cadence qu'une partie longue, mais comment prendre en compte la machine? L'Elo des programmes augmente avec les progrès techniques des machines; c'est à la fois anormal (puisque du coup, c'est la perf du couple machine/logiciel qui est mesurée), mais ça correspond à une réalité. Sans compter qu'il est parfois difficile de distinguer logiciel et matériel, puisque la programmation sur cartes graphiques a par exemple amélioré les perfs des logiciels.
# Estimation Elo
Posté par arnaudus . En réponse à la dépêche Leela Chess Zero. Évalué à 3.
Le texte de la dépêche dit "Ce programme a un Elo autour de 3000", mais ça doit être beaucoup plus que ça. On en avait discuté lors de la récente dépêche sur Stockfish, le principal concurrent; si Leela est à peu près au niveau de Stockfish, son Elo doit être largement supérieur à 3500. Il me semble que pout Stockfish 12, on parlait même de 3800.
3000, c'est pas beaucoup pour un moteur, ça veut dire que le programme perd parfois (rarement, certes, mais c'est possible) contre les meilleurs joueurs (qui sont autour de 2800).
Après, les Elo sont plus difficiles à évaluer quand il y a peu de concurrence et de gros écarts, il faut les calculer en prenant en compte les versions précédentes (moins performantes) des programmes et faire des approximations non vérifiables. 3500 ou 3800, de toutes manières, c'est totalement imbattable pas un humain.
Pour les programmes, les perfs dépendent évidemment des machines sur lesquels ils tournent. Du coup, peut-être qu'un Elo de 3000, c'est sur un ordinateur de bureau? Ça m'étonnerait quand même, c'est vraiment peu.
[^] # Re: Area 21
Posté par arnaudus . En réponse au lien Une appli qui créé de faux contacts pour empoisonner les données revendues. Évalué à 5. Dernière modification le 01 mars 2021 à 11:46.
De toutes manières, 1) introduire des données bidons indistinguables des données réelles semble très difficile (par exemple, je pense qu'il est trivial pour n'importe quel vendeur/acheteurs de données de vérifier l'activité des comptes Facebook ou Twitter affiliés aux contacts, et de "nettoyer" les bases), 2) même si c'était possible, il n'est pas du tout exclu que ça n'ait aucun effet sur le marché des données personnelles, puisque les vraies données sont présentes de toutes manières. Envoyer une pub ciblée par e-mail à 10000 vraies personnes, où à 100000 personnes dont 90% sont des comptes bidons, ne génère pas spécialement de coûts supplémentaires. Les tarifs seraient réajustés automatiquement du fait du faible taux de retours, mais je ne suis pas certain que la "pureté" des bases de données soit un critère essentiel (à moins que l'objectif soit le démarchage téléphonique par exemple, mais c'est typiquement un cas où il est rentable de faire un pré-filtre—par exemple, ne pas appeler un numéro à l'indicatif international inexistant.
Dans le même style, des hordes de robots cliqueurs sur tous les liens commerciaux d'une page me semblent bien plus efficaces, puisqu'ils pourrissent les données d'un utilisateur réel : plus moyen de savoir si vous vous intéressez aux tournevis ou aux couches culottes si votre navigateur clique sur un lien aléatoire par seconde (votre bande passante en prend un coup, mais celle du fournisseur de service aussi). De même, si tous les liens de la page de retours de Google sont cliqués, pas moyen de savoir ce qui vous a intéressé. Bien sûr, vos vraies données sont aussi quelque part là-dedans, mais elles sont noyées par 99% de données bidon, et là, c'est vraiment dur de trier.
[^] # Re: Responsabilité
Posté par arnaudus . En réponse au journal La relation entre les logiciels libres et le Covid-19. Évalué à 6. Dernière modification le 22 février 2021 à 19:02.
En même temps, c'est pas comme s'il venait s'expliquer, et la dernière fois, il avait engagé une discussion trollesque qui était tout sauf sincère, remplie d'arguments qui n'étaient pas de lui.
Une homme de paille, je ne pense pas, parce que je n'ai pas avancé d'arguments à sa place. Pour le stéréotype, peut-être, mais je fais ce que je peux avec ce que j'ai. Son argument, c'est quand même que le logiciel propriétaire enrichit Bill Gates qui finance l'OMS qui émet des recommandations liberticides et qui favorisent les entreprises pharmaceutiques. Pas besoin de faire d'homme de paille, je trouve.
Bah je ne sais pas. Réfuter les arguments complotistes, on fait ça depuis très longtemps. Est-ce qu'il ne serait pas temps d'essayer de stigmatiser les messagers? La dernière fois, les gens ont essayé de discuter avec lui, de présenter des arguments scientifiques, logiques sourcés. Il n'a visiblement aucune intention d'aller lire les méta-analyses sur l'hydroxychloroquine, ce qui l'intéresse, c'est de diffuser une rhétorique pseudoscientifique.
Du coup, je dirais que le but, c'est 1) de montrer qu'il est minoritaire; ce n'est pas parce qu'il a une énergie démesurée à consacrer à la diffusion de ses thèses qu'on ne peut pas le contredire, 2) que le lecteur de Linuxfr a le droit d'être protégé des bonimenteurs. Et pour moi, 3) j'aimerais comprendre comment ça marche dans sa tête. Je propose une interprétation, elle est peut-être complètement fausse, je ne peux pas savoir. Mais si elle est proche de la réalité, j'espère peut-être qu'en lisant ce que j'ai écrit, il va se dire "OK, je n'aime pas Bill Gates et je n'aime pas l'OMS; imaginer qu'ils sont de mèche pour brider les libertés individuelles justifierait cette opinion, mais ce n'est pas parce qu'un scénario est compatible avec mes opinions qu'il est réel." Encore une fois, je ne comprends pas pourquoi certaines personnes ont du mal, spontanément, à expliquer la différence entre ce qui est vrai et ce qui pourrait, ou aurait pu, être vrai. Mais il est peut-être sincère dans sa démarche, comme un témoin de Jéhovah qui est sincèrement désolé pour ceux qui lui ont claqué la porte au nez parce qu'ils vont aller en enfer et être torturé par leur Dieu miséricordieux (?). Quelle que soit la force de cette conviction, si on ne cherche pas à comprendre ses motivations, on ne pourra pas le convaincre de se poser et de réfléchir à ce qu'il raconte. Et du coup, il faut s'intéresser au bonhomme, et pas au message. Le message, de toutes manières, c'est le même que ce qu'on trouve partout sur Facebook, il n'y a rien d'intéressant là-dedans.
[^] # Re: Responsabilité
Posté par arnaudus . En réponse au journal La relation entre les logiciels libres et le Covid-19. Évalué à 10. Dernière modification le 22 février 2021 à 14:32.
C'est de toutes manières totalement impossible de savoir si les gens sont juste obtus / ignorants / méthologiquement inaptes / aveuglés par une idéologie ou par un gourou, ou s'ils sont entrés dans une démarche de négationnisme et de manipulation active. Peut-être ne le savent-ils même pas eux mêmes.
J'ai découvert très récemment que certaines personnes, quand on leur posait la question, acceptaient qu'ils faisaient une différence entre "croire" et "penser être vrai". Quand j'y réfléchis, je me demande si cette espèce de schizophrénie n'est pas courante également dans les familles religieuses, par exemple. Tu vis dans un environnement social dans lequel la cohésion est basée sur un ensemble de croyances, ça peut être des croyances religieuses, ou un ensemble de théories plus ou moins complotistes qui te donnent une grille de lecture du monde ("Le gouvernement profite de la pandémie pour installer un régime autoritaire", par exemple, avec tout un tas de croyances corrélées sur l'efficacité de la chloroquine, la distribution ou la dangerosité des vaccins, l'influence du capitalisme, de Bill Gates, de la 5G, c'est hétérogène et incohérent, voire parfois même complètement autocontradictoire, mais ça n'est pas un problème à partir du moment où on vit dans un environnement où remettre en cause ces croyances n'est pas envisageable et entrainerait une expulsion du groupe, et éventuellement une forme de harcèlement). Bref, les gens ne sont pas complètement débiles, et quand tu leur demandes "Mais cette histoire de puce 5G dans les vaccins, tu penses que c'est vrai?", ils peuvent te répondre "nooon, pas vraiment, mais c'est l'idée, tu vois, ce qui est important, c'est qu'on nous manipule." Ils "croient" en ces trucs, les relaient, et ressortent ces "mèmes" au cours des discussions, mais ils ressentent plus ou moins que c'est factuellement absurde.
Je ne voudrais pas parler à la place de papap, il faudrait qu'il s'exprime sincèrement s'il le souhaite, mais mon interprétation, il croit qu'il y a quelque chose de malsain avec le capitalisme et le logiciel propriétaire, il déteste Bill Gates (parce qu'il est riche, ou parce qu'il est devenu riche en vendant des logiciels pourris), il déteste probablement des grands concepts comme "Big Pharma", il déteste les organisations internationales comme l'OMS qu'il considère comme corrompues. Et voila, son histoire comme un tout, c'est pas cohérent mais c'est pas très grave, c'est une grille d'interprétation simple qu'on peut appliquer aux problèmes hyper-complexes du monde réel. Et je ne pense pas que papap croie vraiment que c'est vrai. Il n'a pas l'air complètement idiot, il sait que France-Soir est un journal qui relaie des thèses nationalistes et complotistes, il sait que le Raoultisme ne tient plus face aux faits, il sait que la fondation Gates fournit des médocs aux petits africains. Et je pense qu'il sait que le lien entre la défiance d'un élu local envers le logiciel libre et la gestion internationale de la pandémie est un mensonge qu'il se fait à lui-même. Je ne sais pas s'il admettrait en public que ce qu'il a écrit n'est probablement pas vrai, que c'est une sorte de dissertation uchronique ou d'essai politique, comme ces jeux de rôles dans certaines formations où il faut défendre successivement deux points de vue opposés. Le seul truc malsain dans cette histoire, c'est qu'il n'est pas sincère sur le fait qu'il s'agisse d'un jeu (avec nous et avec lui-même également, probablement).
# Responsabilité
Posté par arnaudus . En réponse au journal La relation entre les logiciels libres et le Covid-19. Évalué à 10.
Je ne trouve pas ce genre de conneries drôles du tout. De mon temps de vieux, les trolls, c'était à vocation humoristique. Là, c'est à vocation politique, et ça peut avoir des conséquences graves sur la diffusion des informations scientifiques (et sur l'image du site).
Ce genre de trucs, c'est à l'opposé des valeurs du logiciel libre. Caser des mensonges relayés par des journaux populistes, et les cacher derrière une pseudo-défense des logiciels libres, c'est juste complètement nul. Je ne voudrais pas que quelqu'un puisse penser que les logiciels libres aient quoi que ce soit à voir avec ce genre de mouvements, qui ont largement assez de caisses de résonance dans les médias et sur les réseaux sociaux pour épargner les sites spécialisés avec leurs faits alternatifs.
[^] # Re: Avoir un avis sur tout, même quand on n'y connait rien
Posté par arnaudus . En réponse au journal genre, ils nous prendraient pour des neuneux ?. Évalué à 9.
OK, donc c'est des méchants (on ne sait pas pourquoi, peut-être parce qu'ils sont chers? Comme les footballeurs, ceux qui sont trop payés, c'est des méchants). Ça a quoi à voir avec l'incompétence de l'administration?
Si la préfecture paume ton dossier, c'est parce que la secrétaire qui l'a mis dans le mauvais tiroir fait tourner l'économie pour le plus grand bénéfice de la bourgeoisie française? Faut arrêter de picoler.
Encore une fois, l'administration n'est juste pas conçue pour être efficace ou réactive.
Le rapport entre les hopitaux et la logistique de la distribution de vaccin? Ah, on me dit dans l'oreillette qu'il n'y en a aucun.
Au passage, les hopitaux qui ont (plus ou moins) bien géré la crise, c'est beaucoup plus du fait de l'implication des soignants que de l'efficacité de l'administration…
C'est pour l'instant faux, on a vacciné 700000 personnes et il y a encore >800000 vaccins en réserve. Donc pour l'instant, c'est encore un problème de logistique.
Voila, même pas de phrase, comme ça c'est au lecteur d'essayer de trouver une logique.
[^] # Re: Non, la grippe est potentiellement mortelle
Posté par arnaudus . En réponse au journal genre, ils nous prendraient pour des neuneux ?. Évalué à 7.
Une autre différence assez importante, c'est que la grippe est dangereuse pour les très jeunes enfants (< 2 ans), avec une mortalité non-négligeable, surtout avec comorbidités. Rien de ça pour le COVID, les bébés ne semblent même pas l'attrapper (les enfants produisent très peu de récepteur ACE2, qui est la cible du coronavirus).
Par ailleurs, la mortalité due à la grippe est le plus souvent due à des surinfections. Alors que pour le Covid, on meurt soit directement à cause du Coronavirus, soit à cause du système immunitaire qui finit par bousiller les poumons. C'est pas du tout la même stratégie pour sauver les patients graves.
[^] # Re: double dose
Posté par arnaudus . En réponse au journal genre, ils nous prendraient pour des neuneux ?. Évalué à 10.
Non, il n'y a pas de données. La position du gouvernement UK est intenable, le vaccin est certifié selon une certaine procédure, et s'écarter de la procédure, ça revient à sortir du sentier en espérant trouver "au jugé" un raccourcis.
Une autre idée dans le même genre serait de jouer autour de la chaine du froid (très contraignante), un peu comme quand on mange un yaourt périmé et que ça n'est pas très grave. Il est en effet largement possible qu'on puisse conserver le vaccin Pfizer à -18°C dans un congélateur grand public, mais ça n'a juste pas été testé. Donc, on ne sait pas. Et quand on ne sait pas, on prend un gros risque à faire comme si on savait.
Les anglais ont même par exemple considéré la possibilité de "mélanger" les vaccins, par exemple de donner une première dose du Pfizer et une deuxième avec le Moderna. À ce niveau, c'est de la pure inconscience. La seule manière de l'expliquer, c'est de réaliser que les gens qui prennent ce genre de décisions n'ont absolument aucune culture scientifique; ils se "croient" intelligents, mais ils n'ont pas les connaissances suffisantes pour réaliser l'absurdité de leur raisonnement.
# Avoir un avis sur tout, même quand on n'y connait rien
Posté par arnaudus . En réponse au journal genre, ils nous prendraient pour des neuneux ?. Évalué à 10.
Sur la forme : c'est parfaitement OK de ne pas tout comprendre et de ne pas tout connaitre. On a même le droit de ne rien comprendre à rien. Par contre, je ne comprends pas comment on peut à la fois ne rien comprendre, l'avouer, et écrire des torchons agressifs et accusateurs. Quand on ne connait pas un sujet, on se renseigne ou on laisse les autres parler, non?
Sur le fond, beaucoup de choses ont été dites.
La grippe n'a pas le même R0 que le Covid (plutôt 2 pour la grippe). > 80% de la population a déja des anticorps pour la grippe (infections ou vaccins dans les années précédentes). La grippe reste épidémique parce que le taux de mutation du virus est très élevé et qu'il évolue très vite pour échapper au système immunitaire.
La campagne de vaccination grippale vise les plus âgés. Ça n'est pas très logique : ne vacciner que les vieux ne permet pas de stopper l'épidémie (le danger pour les bébés et les personnes fragiles reste donc élevé), et le vaccin est peu efficace chez les personnes âgées. Il faudrait vacciner tout le monde bien sûr, ce qui éviterait la plupart des épidémies de grippe. C'est bien sûr sans compter les antivax et ceux qui ont peur d'une petite piqûre et seraient prêts à inventer n'importe quoi pour l'éviter. La campagne de vaccination Covid est plus rationnelle : elle vise à arrêter l'épidémie, pas seulement à protéger les vieux.
La campagne de vaccination grippale semble "rouler" parce qu'elle a lieu tous les ans. Il suffit d'un grain de sable (par exemple, une plus forte demande cette année) pour que ça coince (rupture de stock). Imaginez aussi qu'il faille un vaccin + un rappel : les infirmières et les médecins seraient tout un coup débordés. Et comme dit plus haut, la logistique pour distribuer et conserver des vaccins au -80°C est très très différente de celle du vaccin contre la grippe, que les gens achètent et conservent 3 semaines au frigo avant d'aller voir leur médecin.
L'administration patine et est inefficace : bien sûr. Mais il faut avoir vécu dans une grotte ces 50 dernières années pour faire semblant de le découvrir. L'administration arrive à peine à gérer les affaires courantes en temps normal. À chaque changement mineur de logiciel ou de système, il y a 2 ans de cafouillage qui peut même conduire à des condamnations de l'État à la cour Européenne de justice (dernièrement : permis de conduire et carte grise, émission de cartes de séjour, déni d'accès aux prestations sociales, etc). De toutes manières, ces défaillances administratives ne sont pas directement liées au gouvernement, elles sont dues à une politique RH défaillante dans la fonction publique, au sous-financement, à l'inefficacité des chaines de commandement, et à l'incompétence (voire à la malveillance) des cadres de la fonction publique. Donc, en cas de crise, évidemment que rien ne fonctionne; blâmez le gouvernement si vous voulez, ça n'y changera rien. Vous noterez que la situation s'est débloquée suite à l'intervention d'un cabinet privé pour gérer la logistique, d'ailleurs (je trouve ça triste à en pleurer…).
Un dernier mot sur la judiciarisation de la société : je me demande à quoi servent ces poursuites. Les élus sont bien sûr responsables de leurs actions (ou de leur inaction), mais là, on est face à une catastrophe naturelle. On ne va pas porter plainte contre un virus! Parfois, quand on est aux responsabilités, on se trompe, on ne prend pas les bonnes décisions, ou on doit prendre des décisions douloureuses (fermer un service parce qu'on n'a pas l'argent pour le laisser ouvert, faire tourner des services en conditions dégradées, etc). Faire des erreurs par inexpérience ou par manque de lucidité n'est pas illégal, et je ne vois pas ce que la justice a à voir là-dedans. C'est juste une affaire de pognon? La satisfaction de savoir ce qui s'est réellement passé, qui a réellement pris les décisions, au prix d'une enquête de 10 ans payée par la société? Ça ne fera pas revenir tata Jeanine de toutes manières. En tout cas, pour la gestion du Covid, je n'ai pas l'impression qu'il n'y ait aucune infraction réellement constituée. Bien sûr, il y a de l'incompétence, de l'impréparation, des choix politiques qui ont fait que le système de santé était déja en mauvais état au début de la crise. Mais tout ceci est du ressort du débat politique, et pas du débat judiciaire! Quand on voit des cabinets d'avocats qui recrutent de manière putassière des familles de victimes, je me dis que tous ces procès ne sont pas du tout à l'avantage de la société ou des victimes.