GIMP 2.10.10 : « c’est dur de colorier ! »

Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Édité par Anonyme, Davy Defaud, teoB, palm123, ted, ZeroHeure, BAud, Peuc, Jona, Benoît Sibaud, Ysabeau 🧶 🧦 et antistress. Modéré par claudex. Licence CC By‑SA.
Étiquettes :
102
24
mai
2019
Graphisme/photo

Il s’est passé quelques mois depuis la dernière sortie de GIMP. Le résultat vaut probablement l’attente ! De nouvelles fonctionnalités en pagaille, des optimisations, corrections et améliorations de la stabilité font partie de cette version 2.10.10, sortie le 7 avril. Citons notamment :

  • la colorisation par détection de traits dans l’outil de remplissage ;
  • des outils de transformation améliorés ;
  • option « Échantillonner sur tous les calques » maintenant disponible sur l’outil correcteur et amélioré sur l’outil de clone ;
  • les brosses paramétriques maintenant en 32 bits par canal de couleur ;
  • création de nouvelles brosses et modèles simplifiée ;
  • sélection de calque sur canevas ;
  • enregistrement et exportation plus sûrs et rendu de groupe plus rapide ;
  • prise en charge du format DDS ;
  • de nombreuses améliorations dans le moteur graphique GEGL.

Colors are hard by Aryeom  « C’est dur de colorier ! », par Aryeom, CC By-SA 4.0

Sommaire

Améliorations remarquables

Outils améliorés

Outil de remplissage

L’outil de remplissage a connu toute une série d’améliorations le rendant plus utilisable. En outre, l’outil dispose maintenant d’un nouveau mode de « Remplissage par détection de traits » (parfois appelé « colorisation intelligente ») !

Prélèvement de couleur rapide

Comme pour les outils de peinture, on peut désormais prélever les couleurs avoisinantes sur le canevas en cliquant avec la touche Ctrl enfoncée, sans avoir besoin de changer d’outil.

Cliquer, déplacer pour remplir

Dans le mode « Remplir des couleurs similaires », ainsi que le nouveau mode « Remplir par détection de traits », vous pouvez désormais laisser le bouton pressé en déplaçant la souris pour continuer à remplir les zones alentours.

Remplissage par détection de traits

Enfin, un changement majeur est l’implémentation d’un nouvel algorithme de remplissage pour les peintres numériques. Cet algorithme remplit à l’intérieur de zones de trait, éventuellement non parfaitement fermées, en s’efforçant de ne pas laisser de pixels non coloriés.

Cette fonctionnalité originellement présente dans le greffon G’MIC, accompagnée d’une publication de recherche, fut contribuée par moi‐même dans le cadre d’un projet de l’équipe IMAGE du laboratoire GREYC (rattaché au CNRS, l’Université de Caen et l’école d’ingénieur ENSICAEN), avec un retour d’expérience important d’Aryeom du projet ZeMarmot.

Colorisation intelligente dans GIMP

Voir aussi mon article plus technique sur cette nouvelle fonctionnalité.

Outils de transformation

Ell a amélioré divers aspects sur plusieurs outils de transformation :

  • l’outil de mise à l’échelle redimensionne en gardant le centre fixe, même lors du redimensionnement par paramètres numériques ;
  • l’outil de transformation unifiée garde maintenant les proportions par défaut lors d’un redimensionnement ;
  • nouvelles options « Contraindre les poignées » et « Autour du centre » à l’interface de l’outil perspective, similaires aux options correspondants dans l’outil de transformation unifiée ;
  • nouveau bouton « Réajuster » dans plusieurs outils de transformation autorisant à réajuster les poignées sur le canevas en fonction du niveau de zoom en cours ;
  • les directions de transformation (en avant et en arrière) peuvent maintenant être liées, autorisant le réajustement manuel des poignées sans affecter la transformation en cours.

Outil correcteur et clone

Michael Natterer a amélioré l’outil correcteur en y ajoutant l’option « Échantillonner sur tous les calques » permettant de peindre sur un calque séparé, gardant ainsi les pixels à la source intacts. L’outil de clone avait déjà cette même option, qui fut améliorée pour fonctionner de même.

Ces changements sont importants pour manipuler des images sans modifier les pixels originaux, d’une manière non destructrice.

De meilleures brosses

Brosses paramétriques 32 bits

Michael Natterer et Ell ont amélioré la prise en charge des brosses dans GIMP. Une grosse amélioration pour les peintres fut de faire enfin le rendu des brosses paramétriques en nombres flottants sur 32 bits (par canal de couleur), dans la lignée du passage au traitement des couleurs en haute précision. L’avantage principal est d’éviter la postérisation lors de l’utilisation de larges brosses, en particulier dans les couleurs sombres.

Notons cependant que les brosses raster restent en 8 bits pour l’instant. Leur évolution en flottants sur 32 bits est aussi prévue.

Enfin, notons que les greffons n’ont encore accès qu’à des versions 8 bits par canal de couleur, même pour les brosses et modèles en haute précision. De nouvelles interfaces de programmation devront être ajoutées plus tard pour la prise en charge de ces données en haute précision par les greffons.

Création simple de brosses et motifs depuis le presse‐papiers

Il était déjà possible de créer de nouvelles brosses et motifs à la volée depuis le presse‐papiers (c’est‐à‐dire à partir d’images copiées, par exemple avec le fameux raccourci Ctrl + C), mais il n’était pas possible de les sauvegarder. Bien que pratique, cette fonctionnalité ne permettait donc que la création de brosses et motifs temporaires.

Ces brosses et motifs temporaires peuvent maintenant être dupliqués comme toute autre donnée, leur permettant ainsi de devenir des données stockées « normales », donc réutilisables. Bien que ce changement ait l’air simpliste, il est le résultat d’une grosse migration de code, par Michael Natterer : ce code était auparavant du code greffon, il fait maintenant partie du cœur de GIMP. Il y a des chances que cette migration ait davantage d’heureuses implications dans un futur proche !

Ouvrir en tant qu’image

L’ancrable « Brosses » propose maintenant un nouveau bouton « Ouvrir la brosse en tant qu’image » permettant l’édition rapide et simple d’une brosse enregistrée.

Sélection de calque depuis la zone de dessin

Quiconque travaillant avec un nombre conséquent de calques a parfois ressenti la frustration de ne pas trouver le bon calque dans la liste, même si ses pixels sont visibles sur la zone de travail.

J’ai donc implémenté un nouveau modificateur générique sur canevas (Alt + clic milieu) permettant de sélectionner un calque en cliquant sur les pixels. Le calque le plus haut contenant ce pixel sera sélectionné. En maintenant la touche Alt pressée et en continuant à cliquer, vous pourrez sélectionner chaque calque inférieur l’un après l’autre. Le nom du calque sélectionné sera aussi temporairement affiché dans la barre d’état. Les choix d’interactions ont grandement bénéficié de l’expérience d’Aryeom, du projet ZeMarmot, laquelle a d’ailleurs aussi eu l’idée de base de cette fonctionnalité.

Sélection de calque sur canevasSélection de calque sur canevas avec Alt + clic milieu

Plus rapide et plus sûr

Comme d’habitude, de nombreux bogues ont été corrigés et des optimisations faites. Citons notamment :

Enregistrements et exportations plus sûrs

Différentes sections du code dédié à l’écriture de fichier ont été rendues plus robustes en évitant la réécriture du fichier quand survient une erreur. En particulier la sauvegarde au format XCF et l’exportation (vers les formats de rendu d’image) devraient être plus sûres et vous éviter de vous retrouver avec un fichier corrompu (c’est‐à‐dire qu’en cas d’erreur, vous n’avez bien sûr pas de copie de la dernière version de l’image, mais au moins vous ne perdez pas votre précédente version).

Rendu des groupes de calques plus rapide

Le rendu des groupes de calques se fait maintenant par plus gros morceaux, plutôt que tuile par tuile (ce qui avait plus ou moins pour effet d’annuler l’avantage du calcul en parallèle du rendu des groupes sur de multiples fils d’exécution). La vitesse de rendu en est ainsi beaucoup améliorée.

Paquet macOS amélioré

La gestion des écrans à haute densité de pixels (HiDPI), comme Retina, a été améliorée pour la version macOS/OSX ce qui corrige des problèmes d’icônes floues.

De plus, le binaire pour macOS est enfin signé. L’installation sur cette plate‐forme est désormais beaucoup moins pénible !

Et plus encore !

Depuis GIMP 2.10.8, 775 modifications (en moyenne cinq par jour) ont été effectuées dans la branche 2.10 (voire davantage dans d’autres branches de développement). Beaucoup de bogues ont ainsi été corrigés (41 rapports ont été fermés durant cette fenêtre de développement), les performances ont été améliorées et plusieurs tâches sont exécutées de manière plus sûre.

On peut aussi compter 66 modifications pour babl 0.1.62 et 404 modifications pour GEGL 0.4.14.

Enfin, 21 traductions ont été mises à jour. Nous souhaitons d’ailleurs remercier nos traducteurs qui permettent de fournir GIMP dans énormément de langues à travers le monde !

Greffons

Prise en charge du format DDS

L’extension DDS, développée à l’origine par Shawn Kirst et Arne Reuter, fait maintenant partie des greffons de base fournis avec le logiciel. Ceci permet donc à GIMP de gérer les fichiers DirectDraw Surface sans installation supplémentaire.

Il est à noter que ce greffon est à la recherche d’un mainteneur actif. Le développement est arrêté et l’intégration n’a consisté qu’en une adaptation minimale. Donc, les correctifs pour améliorer cette prise en charge sont les bienvenus.

Réécriture du greffon Spyrogimp

Elad Shahar, l’auteur original du greffon Spyrogimp, l’a entièrement réécrit avec davantage d’options et une prévisualisation automatique (dessinant directement dans un calque temporaire à l’opposé d’une prévisualisation via GEGL).

Nouveau greffon SpyrogimpNouveau greffon Spyrogimp

L’ancien greffon est toujours disponible, par souci de compatibilité avec des scripts existants, mais il n’est plus disponible via le menu, la nouvelle version le remplaçant.

Filtres

Les flous cinétiques circulaire, linéaire et de zoom sont maintenant dotés d’une nouvelle interaction sur canevas permettant des modifications plus visuelles des paramètres.

Autour de GIMP

GEGL et babl

Cette version de GIMP est accompagnée d’une importante mise à jour de GEGL (désormais en 0.4.14), incluant aussi bien des améliorations internes que des ajouts visibles pour l’utilisateur.

En particulier, l’outil indépendant gegl, lequel peut être utilisé pour traiter des opérations GEGL directement en ligne de commande, a vu son interface graphique énormément retravaillée par Øyvind Kolås.

La nouvelle interface propose maintenant un visionneur d’image et un éditeur de graphes, permettant la manipulation d’image de maninère non destructive en temps réel.
The gegl binary features a reworked graphical editorLe binaire gegl propose un nouvel éditeur graphique

Non seulement cela fait donc office d’éditeur « preuve conceptuelle » non destructif, proposant même des fonctionnalités avancées basées sur le touché et l’exécution de scripts Lua. Mais en plus, cela sert de laboratoire d’essai pour des fonctionnalités GEGL, nouvelles comme existantes, telles que le rendu mipmap.
The editor can be extended using Lua, allowing for per‐operation UIL’éditeur peut être scripté avec Lua, permettant une interface adaptée à chaque opération

Øyvind Kolås a également travaillé dans l’intégration en profondeur de la gestion du CMJN à la fois dans babl, qui est sorti en version 0.1.62 plus tôt cette année, et GEGL. Cela inclut la gestion des profils ICC CMJN dans babl (actuellement, grâce à LCMS2), la prise en charge directe du CMJN dans les fonctions GEGL concernées et les opérations principales, et la gestion de la lecture et l’écriture de données CMJN dans les fichiers TIFF et JPEG. Même si ce n’est pas encore terminé, ce travail est une belle avancée pour ajouter une gestion CMJN de grande qualité dans GIMP.

Cette sortie s’accompagne bien sûr de diverses corrections de bogues et d’améliorations de performance, dont :

  • la factorisation de la plate‐forme de parallélisation ;
  • la compression des tuiles en swap ;
  • la suppression de l’interface de développement (API) dépréciée iterator ;
  • de nouvelles opérations dans l’atelier (workshop, la collection des opérations GEGL en cours de développement non jugées stables ou finales) ;
  • l’amélioration d’opérations existantes.

Consultez les notes de sortie de GEGL pour plus de détails.

Une note pour les mainteneurs de paquets : pour construire GEGL 0.4.14 sur plate‐forme Win32, deux commits nécessiteront du picorage (cherry‐picking, sélection d’un ou plusieurs commits à appliquer à une branche) : les commits 141a7aa7 et b3ff0df0.

Et ensuite ?

Comme souvent, nous rappelons que vous pouvez faire un don au projet GIMP et financer plusieurs des personnes mentionnées dans cette dépêche, dont notamment notre projet ZeMarmot. C’est un moyen de rendre à la communauté si vous appréciez le travail accompli et souhaitez aider GIMP à s’améliorer !

Le travail sur la base de code de GIMP reste très actif, non seulement sur la branche stable 2.10.x, mais aussi sur la branche de portage vers GTK+ 3. On peut espérer annoncer sous peu de chouettes nouvelles sur cette partie moins visible du développement !

Entretemps, comme tous les ans, nous serons présent au Libre Graphics Meeting (aussi discuté sur LinuxFr.org), lequel se tient cette année à Sarrebruck (Saarbrücken) en Allemagne du 29 mai au 2 juin. N’hésitez pas à nous aborder pour discuter avec les membres de l’équipe GIMP !

Aller plus loin

  • # Gimp support

    Posté par  . Évalué à 10.

    Comme souvent, nous rappelons que vous pouvez faire un don au projet GIMP et financer plusieurs des personnes mentionnés dans cette dépêche, dont notamment notre projet ZeMarmot.

    Ben justement je me demandais, je fais un dons récurent à GIMP (tous les mois) via paypal et via Gnome (avec la mention for GIMP).

    Vous touchez les sous tout de même -> O_O c'est bête comme question mais bon… Ce que je veux dire c'est quelle est la différence entre "Support Core Team Developers Directly" ou donner comme je fais à the GIMP via Gnome.

    • [^] # Re: Gimp support

      Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 10.

      Ben justement je me demandais, je fais un dons récurent à GIMP (tous les mois) via paypal et via Gnome (avec la mention for GIMP).

      Quand tu donnes à "GIMP", tu donnes de l'argent pour une utilisation communautaire. En gros GIMP n'existe pas. Il n'y a pas vraiment d'entité derrière, ce pourquoi GNOME nous sert aimablement d'entité parapluie. L'argent donné à GIMP sert donc notamment à défrayer nos rencontres annuelles (à Libre Graphics Meeting en particulier) et à financer diverses actions communautaires. Comme GIMP a des rentrées décentes de donation, nous redistribuons aussi pas mal. Par exemple, on est l'un des rares projets qui est capable de défrayer complètement ses contributeurs à Libre Graphics Meeting, et tous les ans, on héberge aussi gratuitement des contributeurs d'autres projets (je me souviens de gens de GNOME Photo, de la fondation GNOME, de Kdenlive, etc.). Comme on considère cet évènement (Libre Graphics Meeting toujours) comme important pour l'écosystème du graphisme libre, on l'a sorti plusieurs fois de la panade en donnant des sous (parfois beaucoup), notamment pour les années où l'organisation n'avait pas assez pour payer ce qu'elle devait; et même au moins une fois (de ce que j'en sais), on a payé le défraiement de voyage d'une majorité des contributeurs, tout projet confondu. Enfin très régulièrement, GIMP offre un évènement communautaire à l'ensemble du Libre Graphics Meeting (genre une soirée dans un bar, avec tournée aux frais de GIMP!).
      En anecdote, y a aussi eu une année où l'organisation avait mal géré l'enregistrement vidéo, et on allait se retrouver sans traces des confs, ce qui aurait été très dommage. On avait donc acheté une caméra vidéo (aux frais de GIMP, à l'arrache) pour au moins enregistrer communautairement les conférences (de mémoire, un truc du genre); et cette année notamment on finance encore l'enregistrement des conférences en vidéo.
      Bon je connais pas tous les détails car je n'ai pas géré l'argent de GIMP jusque là (donc pardonnez moi si j'ai dit une bêtise sur une des anecdotes, ce n'est pas impossible; mais ça donne l'idée de comment l'argent de GIMP peut être utilisé, de toutes façons), mais c'est en gros l'usage qui est fait des donations. C'est vraiment un usage communautaire car on estime que le graphisme Libre, c'est pas que GIMP et qu'on doive aussi aider les autres projets. Note que ce n'est pas quelque chose dont on fasse particulièrement la pub (à tel point que même moi, au cœur du projet, je ne me tiens pas au courant des détails). On est juste content d'aider. :-)

      Un autre usage non négligeable est l'achat de matériel pour les contributeurs (moins fréquent que l'usage communautaire qui est annuel, pour le coup).

      Vous touchez les sous tout de même

      Donc est-ce qu'on touche des sous? C'est utilisé pour nous faire nous rencontrer annuellement, mais cet argent n'est pas pour nous personnellement, non. Ça ne m'a jamais permis de vivre par exemple. GIMP ne peut pas nous donner de sous, ni en particulier faire de salaire (pas d'entité, je rappelle).

      Ce que je veux dire c'est quelle est la différence entre "Support Core Team Developers Directly"

      Quand tu donnes directement aux développeurs, là oui tu es sûr que cet argent va aux développeurs pour leur travail. Ensuite nous ne sommes que 2 développeurs (sur 4, si on considère les 4 gros développeurs de GIMP/GEGL/babl qui font la majorité du travail) qui ont organisé une vie professionnelle autour du Libre: moi (avec le projet ZeMarmot, c'est le côté GIMP même, et à ce jour, je suis historiquement le troisième plus gros contributeur de GIMP en nombre de commits) et Øyvind Kolås (le mainteneur de GEGL). Donc ça ne finance pas tout le monde (certains ne cherchent pas à être payés pour GIMP, comme le mainteneur qui a un emploi autre et ne contribue que dans son temps libre). Mais par contre, ça crée de vrais salaires (je ne sais pas comment le mainteneur de GEGL s'est organisé, mais de notre côté, l'association LILA crée de vraies fiches de paie pour financer le film ZeMarmot, et donc pour le développement de GIMP; donc là oui, on en vit, clairement).

      En conclusion, donner au projet GIMP, c'est pour l'aspect communautaire du projet. Donner à un contributeur (ou au projet qui le chapeaute, ZeMarmot dans mon cas), tu nous finances nous directement. Ça nous permet de vivre. C'est bien simple, il n'y aurait pas le projet ZeMarmot, je n'aurais jamais été en capacité de faire ce que j'ai fait jusque là. J'aurais probablement dû trouver un job "alimentaire" quelconque et aurait contribué un pouillème de ce que j'ai contribué à ce jour. Je n'aurais pas non plus été remarqué par le CNRS qui n'aurait alors pas décidé de m'engager personnellement, avec accord de principe que mon travail serve essentiellement dans les intérêts parallèles du CNRS (tester/implémenter des algorithmes et promouvoir le travail de recherche du CNRS) et de ZeMarmot/LILA (améliorer GIMP, le Libre en général et aider à notre travail de graphisme/animation). C'est à dire que le CNRS paie en ce moment du développement dans GIMP, avec de l'argent public, tout ça parce que ZeMarmot est devenu suffisamment visible pour leur faire de l'œil.

      Donc j'ai envie de te dire que c'est bien de donner à LILA/ZeMarmot, mais forcément je prêche pour ma paroisse. C'est donc totalement biaisé. :P
      Disons que c'est de l'argent direct pour du développement concret dans GIMP, surtout que le projet ZeMarmot est encore loin d'être stable et on n'est jamais complètement sûr si le projet sera en capacité de continuer, même un an de plus. C'est un équilibre plus que précaire et assez dur pour les nerfs.

      Il y a aussi un autre aspect très positif dans le développement qu'on fait à LILA: on aime améliorer les logiciels libres dans une démarche concrète. On fait un vrai projet, avec des vrais pros du graphisme. On ne développe pas pour développer sans se demander si notre code est utile ou même simplement utilisable. Quand je fais de la merde, je peux assurer que notre artiste me le dit directement que mon super code, dont j'étais trop fier, est juste pas utilisable dans la vraie vie. Et donc je cherche des solutions, j'essaie de faire une interface adapté, de revoir mes a-priori, et ainsi de suite. Perso c'est un truc que j'adore. C'est pas de la "preuve de concept". C'est une preuve d'utilisation. C'est là où je pense que notre association, LILA, est vraiment super utile pour faire de GIMP un logiciel pro. Et c'est dans nos statuts de faire de vrais projets (libres eux-même, nos films étant visibles par tous sous licence Creative Commons by-sa, et même les données téléchargeables quand le projet finit, cf. par exemple nos données pour le film Peertube qu'on a fait pour Framasoft). On a mis les projets en premier dans nos objectifs, dans les statuts d'association, c'est fait exprès. C'est ainsi d'après nous qu'on fait les meilleures avancées (on ne crée/promeut pas le logiciel libre pour lui-même mais bien parce qu'il est utile, utilisable et utilisé).

      Ensuite soyons clair, c'est aussi super important de donner à GIMP en tant que projet communautaire. C'est grâce à ça que je suis devenu un gros développeur moi-même. La première fois qu'on m'a invité au Libre Graphics Meeting (alors que j'avais juste une petite série de patchs à mon actif et était donc un petit contributeur), j'ai trouvé ça super cool. Puis ça m'a permis de rencontrer les autres et de sympathiser, ce qui a renforcé l'aspect "entre potes". Sans ça, je suis persuadé que je n'aurais pas décidé de m'impliquer davantage (à l'époque, je faisais juste des patchs par ci par là à divers projets en fonction de problèmes que je rencontrais, c'est tout; en l'occurrence, j'avais eu des bugs dans GIMP et avais juste décidé de les corriger pour mon utilisation propre; jamais je n'aurais imaginé être un jour l'un des développeurs principaux de GIMP, et l'un de ceux qui font les décisions cruciales sur la direction du projet), puis de co-créer le projet ZeMarmot pour faire un film qui me plait tout en développant du Libre, etc. Donc l'aspect communautaire est aussi super important. Ça fidélise les développeurs et la communauté, ça développe les échanges et les relations amicales, ça donne de l'importance à toutes les contributions, même les petites, etc.
      Simplement je me fais moins de souci de ce côté là, car je sais que GIMP a pas mal de fonds, n'a pas de problèmes financiers (et n'en aura sûrement pas dans le futur non plus), alors que nous, on galère un peu. J'aimerais beaucoup qu'on atteigne enfin un jour un état financier stable pour notre projet, qui puisse financer non seulement mon développement et le travail de notre réalisatrice, mais aussi d'autres développeurs et d'autres artistes, quitte à reverser nous-même dans l'aspect communautaire au besoin.

      Voili voilà. J'espère que c'est plus clair. :-)

      Film d'animation libre en CC by-sa/Art Libre, fait avec GIMP et autre logiciels libres: ZeMarmot [ http://film.zemarmot.net ]

      • [^] # Re: Gimp support

        Posté par  . Évalué à 7.

        Oui, très clair! et merci d'avoir pris le temps de répondre :)

        Ça serait bien pour l'asso LILA de pouvoir faire des déductions d'impôts.

        Bon pour l'instant je vais continuer à donner à the gimp (plus par flegme de faire un changement xD) mais je pense bientôt donner via Tipeee ou patreon je verrai.

        Encore merci

        • [^] # Re: Gimp support

          Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 9.

          Ça serait bien pour l'asso LILA de pouvoir faire des déductions d'impôts.

          Malheureusement ce n'est pas nous qui décidons cela. Très peu d'associations du libre (même les plus grosses) ont obtenu cela. 🙄

          Film d'animation libre en CC by-sa/Art Libre, fait avec GIMP et autre logiciels libres: ZeMarmot [ http://film.zemarmot.net ]

          • [^] # Re: Gimp support

            Posté par  . Évalué à 3.

            Malheureusement ce n'est pas nous qui décidons cela.

            Juste pour rebondir là dessus : techniquement si. C'est l'action de votre association et la façon dont elle est structurée qui détermine votre droit à émettre des reçus.

            Je ne sais pas comment vous êtes structurés, mais ça peut toujours se changer et je doute que votre action pose problème. Donc amha, à condition de bien mettre au clair votre structure, vous devriez pouvoir émettre des reçus de dons.

  • # .

    Posté par  . Évalué à 10.

    Je n'aurais pas non plus été remarqué par le CNRS qui n'aurait alors pas décidé de m'engager personnellement, avec accord de principe que mon travail serve essentiellement dans les intérêts parallèles du CNRS (tester/implémenter des algorithmes et promouvoir le travail de recherche du CNRS) et de ZeMarmot/LILA (améliorer GIMP, le Libre en général et aider à notre travail de graphisme/animation). C'est à dire que le CNRS paie en ce moment du développement dans GIMP, avec de l'argent public, tout ça parce que ZeMarmot est devenu suffisamment visible pour leur faire de l'œil.

    Félicitation, tu le mérites. Visiblement tu es un excellent développeur, via la licence de gimp ton travail peut bénéficier à tous et ça me désolait que tu aies du mal à en vivre. Si c'est de l'argent public qui te finance en partie, tant mieux, pour une fois je ne saurais critiquer l'utilisation qui est faite de mes impôts.

    • [^] # Re: .

      Posté par  . Évalué à 10.

      pour une fois je ne saurais critiquer l'utilisation qui est faite de mes impôts.

      En tant que fonctionnaire (qui contribue aussi au logiciel libre) je trouve ça un poil vexant de lire ça. J'espère que cet exemple particulier (et, je suis d'accord, particulièrement sympathique) te fera réfléchir au fait qu'il existe plein de gens qui travaillent, grâce à nos impôts à tous, pour l'intérêt général, au CNRS et ailleurs. C'est un peu dommage ces petites formules qui critiquent tous les services publics, alors que ce sont des milieux très diversifiés qui sont remplis de beaucoup d'êtres humains qui font des choses importantes avec générosité.

      • [^] # Re: .

        Posté par  (site web personnel) . Évalué à 10. Dernière modification le 29 mai 2019 à 10:11.

        Pour être plus précis sur ce point.
        Formellement, il est faux d'affirmer que le CNRS finance Jehan pour travailler sur GIMP ou sur ZeMarmot.
        (en particulier, Jehan ne reçoit pas de sous du CNRS via ses campagnes de dons Tipee ou via l'association LILA!).

        Jehan est sous contrat d'ingénieur de développement au laboratoire GREYC (UMR CNRS 6072), situé à Caen. C'est un CDD d'un an fourni par l'institut INS2I du CNRS, en réponse à l'appel à manifestation "Soutien Plateformes" de 2018.

        J'ai réussi à obtenir ce financement pour l'aide au développement du projet G'MIC, logiciel open source de traitement d'images développé au sein du GREYC/CNRS par moi-même et un collègue du laboratoire.

        Il s'avère que nous avons des besoins pour le projet G'MIC qui sont compatibles avec le fait d'améliorer GIMP, ce qui est tout à fait satisfaisant pour nous (Jehan et moi-même), mais ça serait un raccourci un peu hasardeux d'affirmer que le CNRS finance volontairement le développement de GIMP. Le fait que G'MIC propose un greffon a priori très utilisé pour GIMP fait qu'on a clairement des intérêts communs à ces deux développements libres.

        Quant à regretter l'utilisation faite de vos impôts, c'est encore autre chose, mais je peux au moins affirmer que le projet G'MIC n'existerait pas en tant que tel sans le CNRS (et vos impôts), car si on a pu se permettre de le développer (depuis plus de 10 ans maintenant) et de le distribuer sous licence libre, c'est aussi grâce au CNRS (et sa délégation Normandie, que je salue au passage).

        • [^] # Re: .

          Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 8.

          Tout à fait! Ma formulation était clairement un peu hasardeuse et cette phrase résume bien ce que j'entendais dans mon commentaire:

          Il s'avère que nous avons des besoins pour le projet G'MIC qui sont compatibles avec le fait d'améliorer GIMP, ce qui est tout à fait satisfaisant pour nous (Jehan et moi-même)

          Le travail est techniquement le soutien au développement de G'MIC (qui est d'ailleurs aussi un logiciel Libre, et pas des moindres, rappelons le!) et c'est bien ce que je fais. Cela a simplement été fait de manière qu'on s'y retrouve tous, notamment moi aussi dans mes buts personnels (ZeMarmot et GIMP), mais "développer GIMP" n'est pas le but de mon poste en effet. C'est seulement un effet collatéral non négligeable. 🥳

          Film d'animation libre en CC by-sa/Art Libre, fait avec GIMP et autre logiciels libres: ZeMarmot [ http://film.zemarmot.net ]

        • [^] # Commentaire supprimé

          Posté par  . Évalué à 6. Dernière modification le 29 mai 2019 à 16:29.

          Ce commentaire a été supprimé par l’équipe de modération.

          • [^] # Re: .

            Posté par  . Évalué à 4.

            Il existe des postes d'ingénieur de recherche dans la plupart des instituts de recherche publique française, qui cherchent des compétences souvent assez pointues pour contribuer à la recherche scientifique. À chaque fois, il y a des postes en CDD et aussi des postes permanents (moins nombreux, plus difficiles à obtenir). Exemples:

            (attention, certains postes "ingénieurs" sont plus administratifs que R&D, c'est dit clairement dans la description du poste.)

  • # Nouvelle version ?

    Posté par  . Évalué à 2. Dernière modification le 25 mai 2019 à 09:31.

    Super dépêche, comme d'hab', mais…c'était quoi, la précédente version ? Ces améliorations sont faites par rapport à la version 2.10.8, c'est bien ça ? Ou j'ai raté quelque chose ? Merci !

    • [^] # Re: Nouvelle version ?

      Posté par  (site web personnel, Mastodon) . Évalué à 6.

      Oui ce sont des améliorations par rapport à 2.10.8. Depuis GIMP 2.10.0, on autorise de nouvelles fonctionnalités, même lors de sorties macro. Et on s'en prive pas! :)

      Film d'animation libre en CC by-sa/Art Libre, fait avec GIMP et autre logiciels libres: ZeMarmot [ http://film.zemarmot.net ]

  • # Merci

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 5.

    Cela fait tellement longtemps que j'utilise (The) Gimp que le format xcf n'existait pas au départ ;) Je donnais à Lisanet.de pour ses binaires pour MacOs, je vois que le site fédérateur le fait maintenant. Je vais faire un petit versement bien mérité :)

  • # Commentaire supprimé

    Posté par  . Évalué à 3. Dernière modification le 26 mai 2019 à 22:51.

    Ce commentaire a été supprimé par l’équipe de modération.

    • [^] # Commentaire supprimé

      Posté par  . Évalué à 0. Dernière modification le 26 mai 2019 à 22:50.

      Ce commentaire a été supprimé par l’équipe de modération.

  • # Question Gimp

    Posté par  . Évalué à 1. Dernière modification le 27 mai 2019 à 14:39.

    Merci pour cette dépêche et les mises à jours :)

    Je profite du thread :

    Peut-on faire des copier-coller de plusieurs calques (par exemple j'ai une animation Gif A dans laquelle je souhaiterais ajouter une seconde animation B) avec éventuellement la possibilité de positionner plusieurs calques en en positionnant un seul.
    Genre pour cette image j'ai du gérer chaque image au sein de chaque calque manuellement. Aurais-je pu, plus simplement, ajouter le pingouin à côté du démon sans devoir gérer (insérer, positionner, fusionner avec les calques déjà existant) chaque image de chacun ?

    Quelle alternative libre&gratuite (ou module) à Gimp pour créer des animations Gif/MP4 facilement ?

    PS : pour les groupes de calques, je ne sais pas vous mais je galère complet avec leur utilisation.

    • [^] # Re: Question Gimp

      Posté par  (Mastodon) . Évalué à 5.

      Quelle alternative libre&gratuite (ou module) à Gimp pour créer des animations Gif/MP4 facilement ?

      une rapide recherche mentionne synfig studio, Pencil2D et TupiTube.

      Jami: beabb2b063da0a2f0a2acaddcd9cc1421245d5de

  • # Génial !

    Posté par  (site web personnel) . Évalué à 5. Dernière modification le 29 mai 2019 à 07:35.

    Alors là, je suis bien heureux de voir ces modifications majeures de Gimp ! Le remplissage, ça a l'air chouette, mais ça ne me servira pas tous les jours.

    Par contre, l’échantillonnage de tous les calques pour l'outil correcteur, c'est aussi une énorme avancée. C'est très utile pour de la retouche non destructive de photo, et c'était un gros manque face au concurrent commercial très cher que je ne citerais pas :o

    Idem pour la signature des paquets MacOS, j'ai fait une formation d'infographie à des étudiants avec le trio Gimp / Inkscape / Scribus, et c'était un frein pour les personnes sur Mac qui ne voulaient pas installer "mon truc chelou" (et, finalement, c'est tout à leur honneur de se soucier de la sécurité de leur ordinateur).

    Finalement, face au concurrent cité plus haut, la seule fonction qui me manque toujours, c'est l'outil correction de perspective par recadrage. Est-il prévu un équivalent un jour dans Gimp ? Ce n'est pas un algorithme de haut niveau je pense, ce n'est qu'une simplification de l'outil cage qui fait sensiblement la même chose, mais nécessite bien plus de manip…

    • [^] # Re: Génial !

      Posté par  . Évalué à 8.

      face au concurrent cité plus haut

      C'est dommage, tu ne l'as pas cité :-) Et je trouve ça d'autant plus dommage qu'en le citant, il y a plus de chances que ce journal paraisse dans les résultats d'un moteur de recherche que je ne citerai pas quand le nom du dit concurrent est cité.

      Allez, je me lance, Corel photo-paint ? Paint Shop Pro ? Affinity Photo ?

Suivre le flux des commentaires

Note : les commentaires appartiennent à celles et ceux qui les ont postés. Nous n’en sommes pas responsables.