arnaudus a écrit 4597 commentaires

  • [^] # Re: Excellent !

    Posté par  . En réponse au journal Epidémie de Fraudes : Où l’on reparle de l’HCQ.. Évalué à 10 (+19/-3).

    Je comprends que dans "le feu de l'action", avec une information parcellaire et une culture scientifique défaillante, on puisse être amené à se tromper sur un fait de société, en particulier quand une explication est "satisfaisante" parce qu'elle confirme un présupposé politique par exemple.

    Je comprends un peu moins qu'on puisse dédier beaucoup d'énergie à faire du prosélytisme pour cette thèse. Après tout, on a tous tout un tas d'idées sur plein de choses auxquelles on ne comprends pas grand chose, et on a pour beaucoup d'entre nous bien mieux à faire que d'aller poster des choses sur les média sociaux, alors qu'on sait bien qu'en tant qu'ignorant sur le sujet, on ne fait que de servir de caisse de résonance, sans apporter aucune plus-value ou aucune expertise. Un peu comme une campagne politique, sauf que la "hiérarchie" est beaucoup plus floue, et il n'est pas évident de savoir pour qui on fait du porte à porte.

    Par contre, là où je ne comprends pas, c'est comment on peut être amené à continuer à propager la même rengaine 4 ou 5 ans après, quand tout est retombé, quand tout le monde a quitté le navire, quand des enquêtes sérieuses ont été menées. Le principe, c'est d'avoir raison tout seul jusqu'au bout? D'être une sorte de centre d'intérêt négatif, plus on est moinssé et plus on pense avoir raison? Ou alors de créer un contexte où les gens qui répondent positivement sont les 1 sur 1 million qui sont hyper-réceptifs aux thèses complotistes, un peu comme pour les spams? Pour quoi faire, créer des communautés d'adeptes prêts à s'engager pour n'importe quoi, même si c'est absurde, comme les platistes, ou ceux qui nient la chronologie de l'histoire et dont j'ai oublié le nom?

    À un moment, c'est de na naïveté, ou de la manipulation cynique?

  • [^] # Re: Sécurité sociale automobile ?

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 1 (+0/-2).

    Ça fait quelques années que je n'en avais pas entendu parler, mais je crois que c'est vrai qu'il n'est pas strictement obligatoire d'être affilié à la sécurité sociale. Il y avait une sorte de mouvement libertarien (ou anarchiste, il y a un moment ou c'est dur de faire la différence) qui militait pour refuser de s'affilier à la sécurité sociale, et il me semble qu'ils avaient eu quelques succès au tribunal face à l'Urssaf.

    Mais oui, bien sûr que la sécurité sociale existe. Ça serait comme de prétendre que l'Armée n'existe pas parce qu'officiellement il n'existe que des corps d'armée.

    La différence majeure avec une assurance ou une mutuelle est qu'il y a un droit opposable à bénéficier de la sécurité sociale. On ne peut pas s'en faire radier par exemple.

    Pour client/usager, ça me semble être un débat assez rhétorique. Je ne comprends pas la différence entre être un client d'Air France ou un usager de la SNCF (à part le fait que d'être usager semble justifier d'être traité comme de la m***).

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 1 (+0/-2).

    Les arguments sur la protection des données personnelles on les a déjà sortis en masse. C'est pas comme si ça ne faisait pas des années qu'on en parle.

    Ah mais si, ça fait des années qu'on en parle! Mais ça ne veut pas dire du tout que ça fait des années qu'on en parle avec des arguments.

    Si tu penses que toute ta vie devrait être un livre ouvert consultable par de grosses entreprises, grand bien te fasse.

    C'est une invective, pas un argument. "Si tu es bête et que tu votes pour YYY, grand bien te fasse!" n'est pas un argument politique.

    Les exemples de problèmes sont légions

    C'est ça, l'argument? Une liste d'anecdotes? Avec de nombreux cas où le problème n'était pas le traitement automatique des données mais la consultation illégale par une personne?

    Je ne suis pas en désaccord avec toi, je pense justement que la situation actuelle est totalement inadmissible; il y a une perte totale de contrôle et les acteurs privés font n'importe quoi. Mais si l'argumentaire est hyper-creux, pseudo-complotiste, ou complètement confus (comme mélanger le traitement des données par les acteurs privés ou par l'État), alors jamais il ne sortira du (tout petit) cercle des gens qui sont déja convaincus.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 5 (+2/-0). Dernière modification le 26 avril 2024 à 16:54.

    La rogne, c'est tout d'abord contre les constructeurs qui collectent et mettent ces données à vendre.

    Ah mais ça je suis complètement d'accord. Mais ça n'est pas ce qui semble se dégager de cette discussion, puisque certains remettaient en doute la possibilité pour les assureurs de changer les primes ou résilier les contrats en fonction de l'historique des accidents repsonsables et non-responsables.

    Et non, la surveillance de la conduite n'est pas juste "une option que tu peux refuser"

    Tu peux la refuser comme tu peux refuser les cookies sur les sites des journaux, ce qui va te conduire sur une page où tu peux t'abonner, ou refuser les pubs sur Netflix, ce qui va augmenter ton abonnement. Fondamentalement, ça ne me semble pas attenter à ton droit de ne pas fournir ces données.

    À vrai dire je suis un peu sur le cul que ça passe aussi facilement auprès d'une population comme le lectorat de linuxfr.

    Je pense faire partie du lectorat de Linuxfr et je n'ai toujours pas compris pourquoi on devrait par principe refuser la collecte de données, et que ce refus devrait être tellement naturel qu'il n'est même pas nécessaire de donner un argument. À mon avis, le problème avec les militants anti-données, c'est qu'ils sont tellement intimement convaincus d'être dans le camps du bien qu'ils pensent n'avoir besoin d'aucune explication.

    Pour ma part, sur le principe, si la voiture envoie des statistiques résumées (une note globale sur 10 par exemple), si j'ai accès à cette note, et si la prise en compte de cette note est une option dans le contrat, alors je ne pense pas y être opposé, par exemple.

    après tout, les gens qui ont une alimentation saine, font une activité physique régulière ne devraient pas payer leurs primes plus chères alors que d'autres mangent n'importe quoi.

    Tu es conscient qu'il me semble tout à fait légitime d'être d'accord avec ce point de vue? Sans compte qu'un tel système aurait des externalités positives indéniables (amélioration de l'état de santé de la population et diminution des dépenses de santé)? Encore une fois, tu dis ça comme si tu parlais d'un truc répugnant ou d'un génocide. Ça me fait un peu penser à une militante vegan qui m'a un jour dit "mais tu réalises que manger du poulet nécessite d'égorger un animal"? Bah oui, même que je l'ai déja fait moi-même, donc oui je réalise! Ce n'est même pas un argument!

    Donc là, oui, je réalise que l'idée est que la voiture estime ton style de conduite (la mienne le fait déja pour noter ma conduite économique en carburant par exemple), et oui, je réalise que le principe est de diminuer les primes de ceux qui ont un bon score de conduite, et d'augmenter les primes de ceux qui ont un mauvais score, ou qui pour de multiples raisons qu'il ne m'est pas utile de juger, ne peuvent/veulent pas fournir leur score. Je considère également que mon style de conduite regarde directement mon assureur, ça n'est pas une atteinte à ma vie privée (on conduit sur la voie publique). Donc oui, tout ça, je pense que je réalise; je suis prêt à admettre que certains puissent y être opposés et demanderaient à ne pas participer à ce système, mais je ne comprends pas en quoi y être opposé devrait forcément impliquer qu'un tel système ne devrait pas être mis en place pour personne. Je suis opposé aux cartes de fidélité dans les magasins, je n'en demande pas, et tant que je peux acheter des trucs sans qu'on m'impose une carte, ça me va très bien. Je sais qu'en moyenne je paye plus cher parce que je n'ai pas accès aux réductions, et j'assume le surcoût. Je sais aussi que le magasin traque quand même mes habitudes de consommation avec le numéro de la carte de payement. Je ne vais pas m'enchaîner aux caddies et me mettre en grève de la faim pour interdire le système : on vit dans un monde où les gens sont différents, ont des idées différentes sur leur vie privée, c'est OK, tant qu'on me laisse vivre comme je veux, je n'ai pas de problème avec ça.

    Mais encore une fois, ici, le problème n'est pas dans le principe, c'est plutôt dans la manière où c'est fait: non-consentement, pas d'accès aux données, opacité, etc. Là, on est d'accord, c'est le Far West. Et c'est là où la loi doit venir protéger les citoyens, et réglementer ce point fondamental qui n'est pas naturel : qui "possède" les données et a le droit de les consulter, les vendre, ou les détruire? Il me semblerait possible d'imposer par la loi que les données personnelles n'appartiennent qu'à la personne; que les intermédiaires n'ont pas le droit de les recueillir, les traiter, ou les vendre sans l'accord explicite des individus, un peu comme les droits d'auteurs (en gros, on donnerait / vendrait à ces tiers le droit de gérer ces données en notre nom, mais ils n'en seraient pas plus propriétaires qu'une maison de disques est propriétaire des droits d'auteurs des artistes). Ce genre d'initiative serait réellement protectrice.

  • [^] # Re: Réactionnaire

    Posté par  . En réponse au lien « Impact catastrophique » : le gouvernement explore le bannissement des smartphones des collèges . Évalué à 4 (+1/-0).

    Question probablement bête, mais la médecine et la plus grande adaptation de la société aux individus nés mal adaptés est peut-être une des causes?
    Pas assez de danger, combiné à des compensations techniques, ça pourrais réduire l'efficacité des mécanismes de sélection? Oui, je sais, c'est un terrain glissant niveau éthique.

    Ça n'est pas une question bête, mais je ne pense pas que ça puisse être une explication; les deux phénomènes sont sur des périodes de temps trop différentes. Pour la médecine "moderne", on ne parce que de quelques centaines d'années au mieux, pour les pressions de sélection détectables, on parle de centaines ou de milliers de générations.

    Le paradoxe (mais ça n'est pas le seul en biologie de l'évolution), c'est qu'il y a beaucoup de sélection dans l'espèce humaine; le nombre d'enfants dépend encore aujourd'hui énormément de caractéristiques physiques (dont pas mal de sélection sexuelle). Il ne faudrait donc pas du tout imaginer qu'on est dans une situation où il n'y a pas de différence de succès reproducteur entre les gens. Par contre, il semble qu'il y ait peu de sélection directionnelle, c'est à dire qu'il y a un avantage pour les gens qui sont "moyens". Dans cette situation, la sélection promeut l'absence de changement.

    Il y a un exemple que j'aime bien de sélection balancée, même si je ne suis pas complètement sûr qu'il soit parfaitement étayé scientifiquement. Toutes les études montrent que les femmes sont plus attirées par les hommes grands; par contre, les hommes sont attirés préférentiellement par les femmes plus petites qu'eux. En faisant l'hypothèse grossière d'un succès reproducteur proportionnel à l'attirance, comme les gènes impliqués dans la taille sont essentiellement les mêmes chez les hommes et les femmes, cette forte sélection n'a pas d'effet sur la taille moyenne: beaucoup de sélection, mais pas d'évolution.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 7 (+4/-0). Dernière modification le 26 avril 2024 à 15:05.

    Une assurance assure un risque, c'est à dire un évènement incertain. Tu ne peux pas t'assurer pour un évènement certain, ça n'a aucun sens.

    La prime est calculée sur la base du risque : valeur du sinistre x probabilité de sinistre. Si l'objet assuré coûte plus cher (grande maison, grosse voiture…), la prime augmente. Si la probabilité du sinistre augmente (zone à risque, historique peu flatteur), la prime augmente.

    Ce que tu mutualises avec une assurance, c'est le côté aléatoire : tu prends 10 personnes qui ont chacun 10% de chances d'avoir un accident, chacun va payer 1000€, et quand quelqu'un aura réellement un accident tu lui rembourses 10000€ (moins les frais de gestion et la marge). Mais ça ne fonctionne que si tout le monde a 10% de chances d'avoir un accident. Si une des personnes a 20% de chances d'avoir un accident, alors il doit cotiser deux fois plus que les autres pour que le système soit juste.

    Les assureurs ne sont pas devins, ils ne peuvent pas savoir qui va avoir un accident ou pas. Ce qu'ils font, c'est qu'ils estiment les risques par rapport à leur historique de sinistres, et en considérant les variables auxquelles ils ont accès et qui sont autorisées par la loi : l'âge, l'adresse, le modèle de voiture, l'historique des sinistres, etc. Ils se moquent de qui tu es, ce qu'ils calculent, c'est qu'étant donné ton âge, ton adresse, ton véhicule, et ton historique, tu as plus ou moins de chances de déclarer un sinistre. Ils n'ont bien sûr aucune certitude si tu vas déclarer un sinistre ou non, ils évaluent juste la probabilité à partir des variables auxquelles ils ont accès.

    Ils évaluent également combien tu es susceptible de leur rapporter dans l'avenir. Une conception assez courante, mais fausse, est de dire "Ils refusent de m'assurer parce que j'ai eu par malchance beaucoup de sinistres les deux dernières années et ça leur a coûté trop cher". En fait, c'est pas comme ça que ça fonctionne. Ce qui les intéresse, ça n'est pas combien tu leur as coûté (ça, c'est des coûts irrécupérables), c'est combien tu vas cotiser sur la durée moyenne d'adhésion des gens qui sont dans cette situation, par rapport à leur estimation des sinistres sur la même période. Si le rapport est en leur défaveur, tu n'es plus assurable (ils estiment qu'en moyenne, tu vas coûter plus cher que ce que tu vas cotiser), et ils te demandent d'aller voir ailleurs.

    Je ne me fais pas l'avocat du diable, je n'ai aucune raison d'être bienveillant avec les assureurs, mais je trouve simplement la démarche des assureurs rationnelle et parfaitement juste, et je ne comprends pas vraiment pourquoi ça a l'air de mettre certains d'entre nous en rogne. Je vois bien à quel point l'idée que les assureurs ne sont pas malveillants déchaine les passions des gens qui ont eu leur assurance résiliée, mais ces gens ne sont simplement plus assurables d'après les calculs de leur assureur. Peut-être que l'assureur a fait une erreur dans son calcul, ou peut-être que les indicateurs qu'il utilise sont trop grossiers (mais ça, c'est contradictoire avec l'idée de leur interdire l'accès à plus de données). J'ai l'impression que la notion d'évaluation du risque (et plus généralement de probabilité) n'est pas aussi intuitive que je pensais.

    En résumé, je pense qu'il faut complètement se débarrasser de l'idée que les assureurs couvrent l'hétérogénéité des probabilités de sinistre. Les assureurs couvrent l'aléa des sinistres (le fait qu'on ne sait pas si la foudre va tomber sur la maison de Gugusse ou de Tartempion), mais pas les différences de risques entre les assurés (quand ta voiture couche dehors, la prime est plus élevée que quand ta voiture rentre au garage). C'est pour ça que le montant des primes est ajusté en fonction des situations individuelles (conditions générales vs conditions particulières des contrats).

    La théorie veut que le raisonnement soit un peu différent pour les mutuelles, mais en pratique c'est du flan: les mutuelles appliquent aussi des surprimes selon le même principe. Et pour cause: pour la même raison que les voitures se ressemblent parce que les lois de l'aérodynamique sont les mêmes pour tous les constructeurs, les contrats d'assurance se ressemblent car les lois des probabilités sont les mêmes pour tous. Demander une prime identique pour des risques différents, ça revient à renoncer à sa compétitivité, ou à risquer la faillite. Ça serait comme de vendre les cerises et les pastèques au même prix à la pièce, et de faire faillite parce que les gens sont venus acheter plus de pastèques que de cerises.

    Après, si vous préférez penser que les assureurs sont en fait des méchants, et qu'ils sont débiles parce que selon votre doigt mouillé les sinistres passés ne préjugent pas des sinistres futurs, bah personne ne vous force à me croire. Moi je dis juste que les assureurs ont tout intérêt à garder leurs clients, et que s'ils se débarrassent de vous, c'est que leur expertise dans la gestion du risque leur indique que vous n'êtes plus assurables. Demander à être quand même assuré, ça revient à leur demander de vous donner de l'argent (ou plus exactement, de mettre en place un flux financier qui va en moyenne des autres clients vers vous). Ça n'est pas impossible que ça soit juste de la malchance, mais c'est tellement peu probable qu'ils ne veulent pas prendre ce risque.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 3 (+1/-1).

    Savais-tu aussi qu'on ne choisit pas le civisme des riverains et individus qui se déplacent prêt de son domicile, lieu de travail, ou n'importe ou en fait.

    On ne choisit pas non plus les inondations, les mouvements de terrain, les tremblements de terre… Pourtant, ta prime est modulée en fonction de ces risques. Je ne comprends pas trop où tu veux en venir. Le principe de l'évaluation du risque est amoral. La question n'est pas de pourquoi le risque est plus élevé et si la personne en est responsable (et donc de lui faire "payer" sa responsabilité). Le principe est simplement d'ajuster la prime au risque: si la fréquence des sinistres est plus élevée, ta prime va augmenter.

    Bien sur qu'il y de l'injustice.

    Mais ça dépend juste où tu mets ton injustice. Si tu ne loues pas de parking, ta voiture dort dans la rue, et ta prime est plus élevée. Si tu as un garage privé, ta prime est moins élevée. Où serait l'injustice? Faire payer autant ceux qui ont investi dans un lieu plus sécurisé pour y mettre leur voiture?

    au final tu n'es qu'un chiffre dans un tableur

    Oui, ton assureur va se débarasser de toi quand il estime que le ratio cotisations futures/remboursements futurs est en sa défaveur, sans considérer ce que tu as déja cotisé. Ce qui m'étonne, c'est que certains puissent penser qu'il puisse en être autrement…

    Ça doit être sympa une vie sans tracas, profites-en.

    Je ne vois pas en quoi ce genre de remarques agressives peut faire avancer le débat. J'essaye d'argumenter sur la manière dont les assurances fonctionnent pour comprendre les raisons rationnelles des politiques de radiation. Pourquoi parler de morale ou de relations humaines? Une assurance est un contrat commercial; espérer que l'assureur joue en sa défaveur parce qu'il est "gentil", c'est comme anthropomorphiser un dialogue avec un modèle de langage: tu mets dans la relation un concept qui n'a aucune raison d'y être.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 2 (+1/-2).

    Donc oui la modulation de la prime à payer par usager est un choix.

    Pas vraiment convaincu. Imagine l'assurance A qui dit "100€ pour tout le monde", et l'assurance B qui dit "50€ pour les conducteurs qui ont un bonus, 150€ pour les conducteurs qui ont un malus". Si tu conduis prudemment, tu as plus de chance d'avoir un bonus, et tu vas donc préférer aller chez l'assureur B. Si tu conduis comme un kéké, tu vas plutôt avoir du malus et tu vas aller chez l'assureur A. L'assureur A va donc avoir de plus en plus de sinistres à rembourser, et il va devoir augmenter ses cotisations, donc devenir de moins en moins compétitif, et se spécialiser dans les cas désespérés. C'est un marché, il y a des assureurs qui font ça, mais du coup, en pratique, ça veut dire que la stratégie de ne pas moduler les primes, ça revient à mettre les primes au max.

    Honnêtement osef, cela ne doit pas entrer en considération.

    C'est la seule chose qui rentre en considération. L'assureur veut maximiser les primes et minimiser les remboursements, et plus un assureur ajustera son estimation du niveau du risque au risque réel, plus il sera rentable. Du point de vue de l'assureur, n'importe quel indicateur statistique qui est corrélé au risque DOIT entrer en considération, même si c'est la couleur de la voiture.

    S'il y avait une erreur de conduite, il serait responsable…

    Ah non, ça n'est pas la même chose. Tu es par exemple toujours responsable quand il y a une collision avec un piéton ou un cycliste (parce qu'eux ne sont pas assurés), même si tu n'as pas fait d'erreur. Il y a presque toujours co-responsabilité dans certains endroits (parkings, rond-points…) même si un des deux protagonistes n'a pas fait d'erreur de code. Inversement, la responsabilité n'est en général pas reconnue en absence de contact (tu grilles une priorité, l'autre voiture se déporte et se plante dans un arbre -> c'est sa responsabilité*). Idem pour un freinage brutal sans nécessité, qui est interdit par le code de la route. Ou un accrochage alors qu'on est en train de se garer (c'est autorisé par le code, mais c'est toujours le véhicule qui se gare qui est déclaré responsable). Du coup, non, responsabilité et erreur de conduite c'est assez différent.

    (*) en fait, c'est plus compliqué que ça. En théorie, on peut être déclaré responsable par la justice d'un accident qu'on a provoqué sans accrochage. En pratique, (tous?) les assureurs demandent de ne pas faire de constat en absence de contact (parce que chacun envoie le constat à son assurance pour se faire rembourser les dégats sur son véhicule, pas de dégats sur son véhicule -> pas de constat). En absence de constat, sauf preuves extraordinaires, il n'y aura aucun moyen d'attester de la responsabilité d'un des conducteurs, et aucun assureur n'acceptera probablement d'indemniser un tiers dans ces conditions, sauf décision de justice.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à -2 (+0/-5).

    Ce n'est pas étrange, c'est honteux.

    De moduler la prime en fonction de facteurs de risques statistiques? C'est un peu le principe de l'assurance.

    On discrimine des individus qui ne sont pas en tord.

    "Discrimination" a un sens, et là ça n'est pas le cas. Tu t'assures pour un risque, et l'assurance évalue le risque en fonction d'un certain nombre d'indicateurs.

    7 sinistres non-responsable en l'espace de 5ans, un enfer

    Bon, déja, il y a une chose à savoir : en deça d'un certain montant (dans les 5000€ de mémoire, mais je ne suis pas sûr et ça peut peut-être changer), les assureurs ne vont pas aller demander à leurs concurrents de couvrir les frais; en moyenne, ça va se balancer. Ça veut dire en pratique que de leur point de vue, responsable ou non-responsable, ça revient au même. En particulier, les frais de traitement du dossier sont constants (frais administratifs, bancaires, expertises…). Bref, pour l'assureur, il n'y a pas énormément de différence entre un accident responsable et non-responsable.

    Ensuite, les assureurs ne sont pas malveillants. S'ils refusent d'assurer les multi-sinistrés, c'est qu'ils considèrent que le nombre de sinistres non-responsables est un indicateur du nombre futur de sinistres responsables. Si ça n'était pas le cas, ils n'auraient aucune raison rationnelle d'agir comme ça.

    Bien sûr, il existe une chance infime qu'on ait 7 accidents non-responsables alors qu'on n'y est pour rien. Mais soyons honnêtes: est-ce que c'est réellement crédible? Très peu de gens ont 7 accidents dans leur vie. Dans une période de temps réduite, c'est encore moins probable, et l'hypothèse alternative (erreurs de conduite) semble bien plus raisonnable. Évidemment que les raisonnements basés sur les statistiques et les probabilités font des erreurs sur les cas particuliers, mais comme personne ne peut prévoir l'avenir, c'est difficile d'y voir de l'injustice.

    On peut aussi prendre l'exemple des vols de voiture : tu te fais voler ta voiture 3 fois en un an, radié. Tu n'y es pour rien, mais l'assureur n'a pas à couvrir à perte ta malchance ou le fait que tu te gares dans des quartiers pourris.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 3 (+1/-1).

    On peut aussi imaginer le cas d'un conducteur qui accélère et freine brutalement sur des routes désertes avec une vue bien dégagée et conduit très calmement dès qu'il y a des piétons, vélos ou autre véhicules autour de lui.

    Les assureurs évaluent les risques, et l'évaluation des risques est fondée sur des calculs de probabilités. Le cas que tu décris ayant une probabilité proche de 0, il ne va avoir aucun effet sur le calcul des primes.

    Par ailleurs, un conducteur qui ferait ça régulièrement devrait probablement aller consulter un médecin, parce que ça a l'air de relever de la psychiatrie. Et c'est quand même dangereux de toutes manières, parce qu'accélérer et freiner brutalement, même en ligne droite, ça peut facilement mener dans le fossé.

    Si les assureurs étaient soucieux de l'état de la planète, les primes d'assurance des voitures les plus polluantes seraient dissuasives.

    Elles le sont, d'une certaine manière (les grosses voitures sont plus polluantes et coûtent plus cher à assurer). Mais non, je suis bien d'accord, les assurances se moquent complètement de l'environnement, mais c'est une externalité positive. Il ne faut jamais cracher sur les externalités positives, c'est même un moteur très efficace dans un système politique libéral, où il est difficile et coûteux de réglementer.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 4 (+1/-0).

    Moi j'avais compris que tu disais que les assureurs utilisaient ce genre de procédé pour augmenter les primes de manière générale (pénaliser les clients à risque sans diminuer la prime des clients plus "sûrs").

    Au final, il ne s'agit "que" d'un réajustement des primes du fait d'une meilleure estimation des risques. L'acceptabilité d'un tel réajustement ne dépend pas vraiment, à mon avis, de la nature des données sur lesquelles le risque est calculé. Si tu remplaçais le tracking par les données de la voiture par l'usure des pneus par exemple, tu serais plus d'accord? L'usure des pneus est probablement un bon proxy pour l'aggressivité du style de conduite.

    Ce qui veut dire qu'un conducteur prudent mais qui ne veut pas être constamment espionné EST pénalisé.

    Ça veut plutôt dire qu'un conducteur "qui refuse d'être espionné" est associé à un facteur de risque plus élevé, et que ce risque est répercuté sur la prime. Je pars du principe que les assureurs se foutent complètement de ce que tu fais tant que ça n'affecte pas les sinistres, mais jusqu'à preuve du contraire cette hypothèse est assez robuste (à moins que les assureurs commencent à revendre les données analysées à des publicitaires ou d'autres officines qui s'intéressent à autre chose).

  • [^] # Re: 11 sept ?

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 4 (+1/-0).

    Est-ce que ça ne serait pas tout simplement que "inverser la présomption d'innocence" n'a aucun sens, et que même si elle en avait un, ça ne correspondrait absolument pas à la réalité?

    Il faut quand même réaliser que la présomption d'innocence est un concept juridique. Ça indique que tu es présumé innocent de ce dont la justice t'accuse jusqu'à un jugement définitif, c'est ce qui justifie par exemple que tu aies le droit à un procès équitable même si les preuves sont écrasantes ou que tu as avoué.

    Il ne me semble y avoir aucun rapport entre la présomption d'innocence et le partage de données sur le style de conduite avec les assureurs. Par définition, les assureurs évaluent des facteurs de risque, donc c'est le principe de leur activité d'estimer tes primes d'assurance en fonction de leur évaluation du risque, avant que tu demandes un remboursement. Par exemple, tu vas payer plus cher pour assurer ta maison en zone innondable, même si ça fait longtemps qu'il n'y a pas eu d'innondation, et que tu n'es d'ailleurs absolument pas responsable de l'occurrence d'une innondation. Tu vas payer plus cher pour assurer une BMW qu'une Twingo, en partie parce que les conducteurs de BMW sont moins prudents que les conducteurs de Twingo. Ça ne "présume" pas grand chose sur ton cas personnel, c'est juste ce que dit l'analyse des risques.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 6 (+3/-0).

    Ah oui, j'ai oublié un argument aussi: la loi impose aux assurances auto un système de notation des conducteurs basé sur l'historique des accidents responsables (le système de bonus-malus). On pourrait penser qu'un tel système centralisé est souhaitable, puisqu'il permet d'augmenter proportionnellement les primes des mauvais conducteurs, en plus des facteurs de risques traditionnels (jeune permis…) et des critères liés aux montants à rembourser (prix des réparations sur le modèle de voiture).

    Mais voila, ça coince un peu, parce que les assureurs ne veulent pas se voir imposer des critères plus ou moins artificiels. Ils ont découvert par exemple qu'un indicateur du risque n'était pas seulement les accidents responsables, mais aussi les accidents non-responsables. Ça parait étrange, mais en fait pas tant que ça, parce qu'une conduite prudente n'est pas forcément liée au respect strict du code de la route (sans compter que la notion de responsabilité est beaucoup liée à la capacité de prouver cette responsabilité). Par exemple, un conducteur qui aurait pris l'habitude de freiner brutalement sans raison apparente risque de se faire tamponner par l'arrière, et donc de faire porter la responsabilité de l'accident sur les autres. Un peu la même chose pour quelqu'un qui aurait pris l'habitude de "forcer" les priorités à des endroits où l'usage impose la prudence (priotités à droite sans visibilité, insertion en "fermeture éclair" sur les voies rapides…). Bref, tout ça pour dire que les assureurs ont une parade; ils refusent de renouveler les contrats avec les conducteurs ayant un historique de sinistres non-responsables. Ce que j'en déduis, c'est qu'il est très difficile de légiférer sur les critères officiels qui devraient déterminer les primes d'assurance, parce que tout assureur qui serait capable d'intégrer des facteurs de risque plus fins et plus pertinents aurait un avantage concurrentiel.

    Pour reprendre l'exemple de la voiture qui espionne le style de conduite, les assureurs ayant accès à ces données seraient capables de bien mieux ajuster les montants des primes; ça leur permettrait d'avoir plus de clients bons conducteurs et moins de mauvais conducteurs. Bien sûr, des concurrents pourraient utiliser un argument publicitaire ("nous, on respecte votre vie privée"), mais comme les mauvais conducteurs iraient plutôt chez eux, ils devront augmenter le montant des primes, et donc faire fuir les conducteurs prudents chez la concurrence. Ils deviendraient alors des espèces d'assureurs spécialisés dans les malus.

    Au final, on peut interdire l'utilisation de données issues de la voiture, mais l'assureur pourra toujours utiliser des proxys douteux (adresse, modèle de la voiture, nombre d'assurés dans la famille, âge des conducteurs, historique des sinistres, historique des incidents de payement, fréquence de renouvellement du véhicule…) pour ajuster les montants des primes. Ce qui compte pour l'assureur, ça n'est pas la causalité, c'est la corrélation, donc toutes ces variables sont pertinentes de son point de vue. Au final, avec probablement bien plus d'injustices et moins d'efficacité qu'avec une mesure directe du style de conduite.

  • [^] # Re: ce qui est le pus désolant ...

    Posté par  . En réponse au journal Quand votre voiture vous espionne… et vous le fait payer. Évalué à 10 (+10/-0).

    Bien sûr! Parce qu'on ne va jamais te dire que ta prime d'assurance augmente.

    En théorie, le montant de la prime n'a pas grand chose à voir avec le profit de l'assurance. Je trouve que faire le lien entre les deux est fallacieux.

    La vraie cause de la discussion est le lien entre le montant de la prime et l'évaluation du risque, et cette problématique est aussi vieille que le principe de l'assurance. Quel que soit le système, il y a une aiguille à régler entre la mutualisation du risque, la "justice" des montants de la prime, la "justice" sociale, et l'encouragement des comportements vertueux. C'est indécrottable, et tout le monde va prétendre avoir raison.

    Par exemple, personnellement, je mettrais plus de poids à la justice sociale et à l'incitation aux comportements vertueux. Conduire prudemment, c'est bénéfique pour tout le monde : pour le conducteur, pour les passagers, pour les autres usagers, pour les riverains, pour la société en général, et pour l'environnement. Que ça passe par ta voiture, par la consultation de ton historique de contraventions, par des enquêtes de détectives privés, ça peut être discuté éternellement, mais le principe même ne me choque pas.

    Par contre, augmenter les primes d'assurance santé (ou d'assurance crédit) aux gens qui ont des pathologies lourdes, ça, ça me choque beaucoup plus (parce que la situation n'est pas liée au comportement). Je trouve ça socialement injuste, même si c'est "juste" au niveau financier.

    Et qu'est-ce qu'on fait pour les maladies évitables (obésité)? Qu'est-ce qu'on fait pour l'assurance chômage de ceux qui n'arrivent pas à garder un CDI plus de 6 mois? Qu'est-ce qu'on fait pour l'assurance des conducteurs âgés? Chaque cas particulier est un dilemme moral, et la plupart de ces dilemmes me semble bien plus complexe que "ma voiture a rapporté à mon assurance que je conduis comme un kéké", parce que je ne considère pas que "conduire comme un kéké" mérite d'être classé très haut dans la liste des droits de l'Homme.

    Tout ceci reste indépendant de la réglementation sur la collecte et le partage des données. La situation décrite est un vrai Far West; pas de consentement, droit de propriété bafoué, pas de documentation, accès à des données détaillées qui n'ont rien à voir avec l'objectif recherché, etc.

  • [^] # Re: le complotisme ?

    Posté par  . En réponse au journal Traduction : Aux sources du complotisme. Évalué à 2 (+6/-7).

    Tu accuses ma théorie du complot de complotisme pour la décrédibiliser, c'est classique.

  • [^] # Re: Suite

    Posté par  . En réponse au journal RGPD et parti politique. Évalué à 4 (+1/-0).

    Si je me rappelle bien, avant le téléphone portable, la seule manière de ne pas être dans l'annuaire si on avait le téléphone était de se mettre sur la "liste rouge", qui était une démarche payante. Il a existé une "liste orange" gratuite, mais c'était assez tard, quand la popularité de l'annuaire était déja déclinante.

  • [^] # Re: Suite

    Posté par  . En réponse au journal RGPD et parti politique. Évalué à 4 (+1/-0).

    Il y a encore des mairies qui envoient les extraits d'acte de naissance sans vérifier qui fait la demande. D'autres petites mairies sont beaucoup plus exigeantes. J'ai par exemple dû prouver ma filiation pour avoir l'extrait d’acte de naissance de mon père.

    Ça dépend, il y a trois types d'actes de naissance: l'extrait sans filiation, l'extrait avec filiation, et la copie intégrale.

    L'extrait sans filiation peut être obtenu par n'importe qui sans aucune condition.

    La copie intégrale ou l'extrait avec filiation est réservé pour certaines personnes (partenaire de PACS, acscendants, descendants, professionnel autorisé), ou il faut attendre 75 ans (personne vivante) ou 25 ans (personne décédée).

    Il est donc normal de prouver un lien de filiation pour un extrait avec filiation, mais pour un extrait sans filiation il n'y a besoin de rien prouver. La demande se fait d'ailleurs souvent en ligne, maintenant.

  • [^] # Re: le complotisme ?

    Posté par  . En réponse au journal Traduction : Aux sources du complotisme. Évalué à 0 (+5/-8).

    Hmm, c'est intéressant. Ça doit donc remonter aux moines Franc-Maçons du Vatican qui ont manoeuvré en coulisse pour faire de l'Anglais la langue la plus parlée aux États-Unis. Quel vilain forfait! Tout ça pour permettre de traduire "complot" par "conspiracy", et donc de faciliter la confusion "complotisme/conspirationnisme" par le monde entier!

  • [^] # Re: Suite

    Posté par  . En réponse au journal RGPD et parti politique. Évalué à 7 (+4/-0).

    C'est la conséquence de la croyance qu'une information (une donnée) puisse appartenir à quelqu'un (à toi, à une entreprise, etc). Contrairement au droit d'auteur, où une oeuvre a un auteur, une donnée n'a pas de "propriétaire" naturel (la personne qui l'a récoltée? la personne qui possède le fichier? la personne sur qui les données portent?). Du coup, tu as des batailles philosophiques, juridiques, informatiques, etc., et tout le monde pense être dans son bon droit.

    J'ai l'impression que la seule chose dont on a le droit envers un tiers qui possède des données sur nous, c'est le droit d'accès (et de rectification, éventuellement). Mais la notion de contrôle des données personnelles est assez récente, et je trouve qu'il y a toujours une confusion entre les données personnelles et les données privées, en plus des problèmes de définition (est-ce qu'une adresse IP est une données personnelle, etc).

    Ça amène à des discussions absurdes, comme celle qui nous occupe, où l'on s'offusque de l'atteinte aux données personnelles d'une loi qui date d'au moins 1964.

    Le nom, l'adresse, et la date de naissance, sont des données personnelles ET publiques. Il est légal d'obtenir très facilement une copie des listes électorales, il est possible à n'importe qui de demander un extrait d'acte de naissance de n'importe qui, avec dessus des informations "personnelles" comme le nom et la profession des parents. Quand les bottins existaient, il fallait payer pour en sortir et ne pas que le nom et le numéro de téléphone soient disponible pour tous. Et il n'est donc pas possible de légalement s'opposer à ce que des tiers aient accès à ces données. Les partis politiques peuvent envoyer des mails ou des courriers postaux à tous les électeurs de la liste électorale, et ils peuvent le faire en toute légalité. Les syndicats peuvent envoyer leurs tracts à toutes les adresses email de votre employeur. Ces utilisations sont non seulement légales, mais prévues par la loi (il ne s'agit pas de détournement, c'est la justification de l'existence de ces lois qui donnent accès aux listes). Ce sont des choses qu'on accepte, non pas par la force de l'habitude, mais parce que c'est un usage normal.

    C'est peut-être plutôt la volonté de fermer ses moyens de communication à tout correspondant non-souhaité qui est moderne. Bien sûr, les pratiques publicitaires agressives sont en grande partie responsables de cette fermeture, mais je trouve assez surprenant qu'on puisse être amenés à penser qu'il est naturel de n'être joignable que par des correspondants identifiés.

  • [^] # Re: Suite

    Posté par  . En réponse au journal RGPD et parti politique. Évalué à 8 (+5/-0).

    Bah là, en l'occurrence, si.

    D'après https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F1963,

    Selon les cas, la liste électorale peut être :
    Consultée gratuitement sur place
    Envoyée par courrier. Selon le support de la liste originale, la liste peut être donnée sur papier ou sur CD-Rom. Le prix facturé à l'électeur dépend du support utilisé. Il ne peut pas dépasser 0,18 € par page A4 fournie et 2,75 € par CD-ROM fourni.
    Envoyée par mail, à la condition que le document soit disponible sous cette forme. Cet envoi n'est pas facturé à l'électeur.

    C'est l'implémentation de l'article L37 du code électoral:

    Tout électeur peut prendre communication et obtenir copie de la liste électorale de la commune à la mairie ou des listes électorales des communes du département à la préfecture, à la condition de s'engager à ne pas en faire un usage commercial.

    Tout candidat et tout parti ou groupement politique peuvent prendre communication et obtenir copie de l'ensemble des listes électorales des communes du département auprès de la préfecture, à la condition de s'engager à ne pas en faire un usage commercial.

    Donc c'est tout à fait prévu que tu puisses obtenir une copie de la liste électorale (ce que tu appelles "partir avec la base en clair sous le bras").

    Et ça n'est pas récent. Ça date du début de la constitution, la version de 1964 dit " Tout électeur peut prendre communication et copie de la liste électorale." (les histoires de CD-rom sont arrivées après, bien entendu).

  • [^] # Re: Suite

    Posté par  . En réponse au journal RGPD et parti politique. Évalué à 4 (+2/-1).

    Bah le principe des listes électorales c'est d'être publiquement consultables, non? Que ça soit par des moyens électroniques ou sous format papier, ça a toujours été possible d'avoir la liste des électeurs de chaque commune, avec leur nom, leur prénom, leur date de naissance, leur adresse, et leur numéro de carte d'électeur. Comment tu voudrais organiser des élections transparentes si les listes électorales étaient secrètes?

    Ne panique pas, mais après les élections, il est même possible de savoir qui a voté et qui n'a pas voté! Pareil pour les procurations, donc on sait très bien dans quelle ville tu étais le jour de l'élection. Par contre, je ne pense pas que les listes d'émargement soient numérisées (sauf peut-être pour l'analyse des signatures en cas de suspition de fraude?).

  • [^] # Re: To hack

    Posté par  . En réponse au journal [PHS] Les hackers de la peinture du dix-neuvième. Évalué à 2 (+0/-1).

    Si ton argument, c'est "la culture évolue", c'est difficile de s'y opposer.

    Ce que je voulais dire, c'est que l'idée que la démarche artistique se nourrit d'innovation est essentiellement occidentale. Les notions de "disruption", "anticonformisme", "changement de paradigme", sont positives, les notions de "conformisme", "déja vu", "traditionalisme" sont négatives. L'art occidental a pour essence même d'évoluer, d'innover, de proposer des "choses nouvelles". C'est même vrai pour les artistes, individuellement: quand un album ressemble trop au précédent, les critiques sautent sur l'absence de nouvelles idées.

    Bien sûr que l'art traditionnel évolue, que les artistes ajoutent parcimonieusement leur touche. Mais l'essence même de la culture de la plupart des populations non-européennes est justement de faire perdurer la tradition. Un chaman ne va pas incorporer des influences jazz pour innover, ça n'a aucun sens. Il va plutôt dire qu'il tient cette chanson de son grand-père, qui la tenait de son grand-père.

    Donc non, bien sûr, toutes les cultures évoluent, mais la culture occidentale tient pour paradigme que l'évolution est non seulement souhaitable, mais qu'elle doit être stimulée et recherchée sous peine de mourir, alors que la culture non-occidentale s'ancre dans la tradition, et considère que l'évolution n'est pas souhaitable (bien qu'elle soit inévitable).

  • [^] # Re: To hack

    Posté par  . En réponse au journal [PHS] Les hackers de la peinture du dix-neuvième. Évalué à 7 (+4/-0).

    Ça a en effet semble-t-il toujours été l’essence même de la démarche artistique que d’innover, je dirais : de surprendre. De montrer aux gens ce qu’ils n’ont jamais vu. De faire ce que personne n’a jamais fait.

    De toutes manières, on vit avec le dogme que ça serait une catastrophe si l'inspiration artistique s'épuisait; ça aurait des conséquences assez bizarres en effet (concerts de reprises uniquement, reproductions d'oeuvres graphiques?), mais je ne suis pas mortifié par l'idée : tant qu'on a accès aux oeuvres du passé, on a un répertoire quasiment illimité à notre disposition. En tant qu'individus, on aura toujours autant de plaisir à lire des livres, à regarder des films, à écouter de la musique.

    Je pense, j’ose croire même… que beaucoup d‘artistes produisent d’abord l’art qu’eux-mêmes ont envie de contempler.

    Il y a une vision probablement assez occidentale dans l'innovation artistique. Les musiques traditionnelles du monde par exemple ne se nourrissent pas d'innovation. On peut donc avoir une vie culturelle épanouie sans cette course aux choses nouvelles.

  • [^] # Re: To hack

    Posté par  . En réponse au journal [PHS] Les hackers de la peinture du dix-neuvième. Évalué à 9 (+6/-0). Dernière modification le 15 avril 2024 à 11:31.

    En fait, ça illustre qu'il semble impossible d'innover sans s'extraire des institutions. Bien sûr, toute institution prétend qu'elle innove; les maisons de disque prétendent qu'elles lancent de nouveaux artistes, Hollywood prétend sortir de nouveaux films, tout comme les institutions de l'époque prétendaient financer un art sans cesse renouvellé, mais qui ne faisait que de reproduire sans grande originalité des recettes existantes. Mais pour faire quelque chose de vraiment nouveau, il faut un autre cadre, les institutions sont conservatrices par essence.

    Je ne crois pas à la stagnation de la démarche artistique. L'innovation et l'orinalité ne sont pas des processus linéaires dans le temps, il y a des périodes d'explosion créatives, et des périodes où rien ne se passe. Un passionné de musique du tout début du XXe siècle aurait pu te dire qu'en effet, il y avait des trucs sympa en musique récente, mais qu'on avait probablement fait le tour.

    Par contre, il est aussi probable qu'avec l'âge qui ne recule pas, on devienne de moins en moins sensibles à l'innovation artistique, et qu'on finisse comme tous les vieux par rabacher que LedZep c'était quand même mieux que ce que se fait en 2040, et que quand on était jeunes, on pouvait écouter du rock, et pas ces daubes de rap nudiste ou du jazz-grunge vegan qui ne ressemblent à rien.

  • [^] # Re: Une explication possible…

    Posté par  . En réponse au journal Le marketing des logiciels, épisode 20240410. Évalué à 4 (+1/-0).

    Une formation littéraire te donne aussi la capacité de voir le "bullshit", en fait ça en fait même partie intégrante à travers l'analyse de texte justement. Et ça te permet de voir rapidement qu'un texte est vide de de sens.

    Je n'arrive pas à trouver rapidement une étude qui aurait regardé ça, mais j'imagine que ça existe. Par exemple, pour le complotisme, il y a une corrélation très forte avec le niveau d'études (mais je ne trouve pas de données sur le type des études).

    Il me semble quand même qu'il avait été montré pendant le Covid que les littéraires étaient bien plus perméables aux thèses "négationnistes" (ça n'est pas si grave, pas besoin de porter un masque, mangez de la chloroquine…) que les scientifiques, mais c'est peut-être aussi directement lié dans ce cas à la compétence "pure" sur le sujet (médecine et épidémiologie).