Pierre Roc a écrit 426 commentaires

  • [^] # Re: Logiciels libres et enseignement de l'informatique

    Posté par  . En réponse à la dépêche Des Inspecteurs Généraux de l'Éducation Nationale en table ronde chez Microsoft. Évalué à 2.

    Pas convaincu. Pour moi, il s’agit, dans ce que vous dites, plutôt de distinguer l’enseignement pratique, c’est-à-dire un ou des langages ainsi que leur paradigme, de la théorie, plus abstraite.

    J’ai appris la théorie sur support papier et stylo et il n’y a pas besoin de programmation à ce stade là. C’est la méthode prépa. et je reconnais que c’est assez particulier. À la limite, pour des TPs, n’importe quel langage aurait pu convenir, vu que la difficulté ici n’est pas dans l’implémentation.

    Et pour la pratique, sans aller jusqu’à apprendre l’assembleur, le passage obligé est bien de savoir comment on représente les données : par exemple savoir ce qu’est la représentation binaire des nombres, entiers et flottants. Même là, ça se fait surtout sur papier (parce qu’en fait c’est du domaine théorique).

    Ensuite seulement j’ai attaqué la programmation et l’apprentissage d’un langage dans ma formation. Et à ce titre là, un langage bas-niveau me parait plus simple à apprendre. Là où chez Python, ces histoires de variables qui sont modifiées ou pas en fonction de leur type implicite, j’ai bien peur que cela sonne comme du voudou à l’oreille de la plupart des débutants. Les pointeurs, tout ça, c’est complexe, mais au moins ça a une certaine logique et le professeur peut l’expliquer. Si vous ne passez pas par cette explication, cela sera une leçon totalement arbitraire : les élèves devront apprendre par cœur les types qui sont passés par valeur, et ceux qui le sont par référence (et j’avoue m’embrouiller moi-même).

    Oh et puis zut ! De tout façon, j’ai trouvé l’argument imparable contre l’enseignement de Python (3) aujourd’hui en codant. La division des entiers qui n’est pas la division euclidienne, contrairement à tous les usages en informatique. Na ! :p

  • [^] # Re: Conférence de François ELIE

    Posté par  . En réponse à la dépêche Des Inspecteurs Généraux de l'Éducation Nationale en table ronde chez Microsoft. Évalué à 2. Dernière modification le 12 novembre 2013 à 18:27.

    Le problème qu’il soulève est bien plus général que celui du logiciel libre. C’est à peine abordé à la fin. Ce qui m’inquiète dans les techo. numériques à l’école c’est la dépossession des enseignants de leur propre métier : il y aurait des producteurs de contenus pédagogiques d’un côté, et les enseignants de l’autre, chargés seulement de l’exécution d’un outil qui restituera le contenu et qu’ils maîtriseront peu et mal. À l’heure actuelle les enseignants ont une grande liberté dans l’enseignement (je suis pas prof., mais je pense que les enseignants qui se sont déclarés pourront, s’il y a besoin, spécifier leur liberté d’action et leurs contraintes), et cela est possible parce qu’ils maîtrisent leurs outils (tableau, manuel, etc.) et sont capables de produire des contenus (exercices ad-hoc, cours magistraux sans support, etc.) lorsque ceux qu’ils ont à disposition ne leur conviennent pas.

    Ce risque là existe aussi avec le logiciel libre.

    Quant aux sciences de l’informatique, je n’en ai reçu qu’un enseignement mathématique (algo.&analyse numérique). Du coup je me demande bien en quoi ce serait une branche scientifique distincte…

  • [^] # Re: Logiciels libres et enseignement de l'informatique

    Posté par  . En réponse à la dépêche Des Inspecteurs Généraux de l'Éducation Nationale en table ronde chez Microsoft. Évalué à 1.

    J’ai du mal à comprendre cet engouement pour Python dans l’apprentissage d’un langage informatique. C’est un langage qui donne l’illusion d’être simple, mais qui est en réalité assez complexe.

    Ne serait-ce qu’avec le passage par valeur ou par référence. Les pointeurs c’est déjà l’horreur à enseigner en C, avec Python c’est même pas la peine parce que tout se fait sous le capot. On peut ajouter : le typage dynamique (les math sup/spé vont bien rigoler et j’imagine d’ici la tête des profs quand ils vont devoir justifier ça), sans compilation les erreurs de débutants ou fautes de frappe sont plus chiantes à corriger, etc.

  • # Et MPI ?

    Posté par  . En réponse au journal Petit tour d’horizon de la haute performance et du parallélisme. Évalué à 4. Dernière modification le 08 novembre 2013 à 13:25.

    Quelques remarques très générales.

    J’ai seulement appris MPI et OpenMP, dans la foulée ; je ne connais pas les autres technologies (seulement de nom pour les GPUs), mais de ce que j’en ai compris, c’est que du HPC il s’agit surtout d’exploiter une seule et même machine pour faire un calcul. Perso. quand j’entends HPC, je pense tout de suite à quelques milliers de noeuds tournant en parallèle…

    C’est l’immense avantage de MPI par rapport à OpenMP par exemple : on peut faire travailler un ensemble d’ordinateur, au prix d’une écriture assez complexe là ou OpenMP est un jeu d’enfant pour les codes qui s’y prêtent bien.

    On pourrait citer aussi, étant fan de Python, que le langage propose une bibliothèque qui permet le multiprocessing de manière très facile (et oui, Python permet d’excellentes performances à condition de le prendre par le bon bout).

    Enfin, dernière petite remarque : je trouve que nous avons tendance à trop nous concentrer sur le matériel (j’ai aussi ce travers, bien que j’essaie de corriger), alors que bien souvent chercher un algorithme plus performant amène d’excellents résultats. D’ailleurs, dans ce cas là, il faut veiller à ce que l’algo. soit parallélisable : ce n’est malheureusement pas toujours le cas, ou l’on peut perdre en performances, j’en ai fait l’amère expérience.

    Petite anecdote aussi, en HPC il existe ce genre de matos : le système grape :
    http://nbodylab.interconnect.com/nbl_grape_history.html.

  • [^] # Re: Province ?

    Posté par  . En réponse au journal Les JT c'était déjà pas glorieux, mais là on atteint des sommets.... Évalué à 1.

    Disons que je n’aime pas les petits cons qui croient tout savoir mieux que tout le monde mais se gardent bien d’avancer le moindre argument hormis de vagues anathèmes.

    Et oui. L’argument d’autorité est parfaitement valable. Travailler des années voir des décennies sur un sujet, ça a de la valeur.

    Les informaticiens sur ce site se plaignent suffisamment que les gens ne connaissent pas, ou très mal l’informatique… Se bouffer du code à longueur de journée permet d’acquérir de l’expérience, tout autant que de passer des entretiens ou s’intégrer à un milieu social donné.

  • [^] # Re: Province ?

    Posté par  . En réponse au journal Les JT c'était déjà pas glorieux, mais là on atteint des sommets.... Évalué à 0. Dernière modification le 07 novembre 2013 à 21:52.

    Quand on n’est pas sociologue, on évite de se la ramener pour juger un sociologue. Un peu marre des imposteurs… Tant que j’y suis : je ne me fie pas trop à votre jugement de la pensée de quelqu’un, quand dans le même temps vous faites un faux-sens sur mon texte (en faisant ce que vous reprochez à un autre, c’est-à-dire citer partiellement).

  • [^] # Re: Province ?

    Posté par  . En réponse au journal Les JT c'était déjà pas glorieux, mais là on atteint des sommets.... Évalué à 0.

    Seulement Philippot ?

    Pour le reste, vous êtes sociologue ?

  • [^] # Re: Province ?

    Posté par  . En réponse au journal Les JT c'était déjà pas glorieux, mais là on atteint des sommets.... Évalué à 1. Dernière modification le 07 novembre 2013 à 13:27.

    Oh ! avec vous je me rappelle évidemment pourquoi je suis à gauche. Tous les poncifs d’extrême-droite y passe… depuis le temps que vous traînez sur LinuxFR, je dois dire qu’on a le droit à un sacré feu d’artifice (pas que vous, vu qu’on a un sacré éventail).

    L’anti-intellectualisme entre autres (qu’on peut rapprocher de la haine des Lumières)… Les États-Unis sont loin d’être une référence (et sont très nationalistes, ça il suffit de regarder n’importe quel film d’Hollywood). Un bon moyen de garder la population dans l’ignorance.

    Allez, en plus du film sur Bourdieu que j’ai cité, on peut aussi trouver ça.

    c'est ce flottement déprimant, on s'est fait avoir et on va où le marché nous porte.

    Mais oui, vous connaissez la gauche (ou pas…). Quant à moi je me contente de lire ce que disent les gens… de droite… au hasard dans les commentaires de Mediapart, et ce qui est fait ou prôné par les responsables politiques. C’est pas moi qui veut revenir sur la définition de la nationalité systématiquement (Sarkozy en son temps, l’UMP maintenant, la Le Pen qui a toujours pas percuté que maintenant il y a des musulmans français.)

    Vous vous basez sur quoi pour vous construire une idée de ce qu’est l’extrême-droite ?

  • [^] # Re: Province ?

    Posté par  . En réponse au journal Les JT c'était déjà pas glorieux, mais là on atteint des sommets.... Évalué à 2.

    Pour répondre plus complètement sur la nation et le nationalisme, vu que j’ai eu pas mal de réponses je vais le faire en un seul jet.

    Comme ça a été noté par CHP, et c’est du droit international, la nation est un peuple qui “décide” de s’unir politiquement afin de se doter d’une autorité (l’État) pour exercer le pouvoir sur un territoire délimité. La nation, ce n’est rien d’autre que vous et moi qui nous associons en vu d’un projet politique commun. Ni plus ni moins.

    Ça c’est le droit et la théorie. Seulement ce modèle d’État-nation pose d’immenses problèmes pratiques. On n’en a assez peu conscience, nous autres Français, parce que nous faisons partie d’une vieille nation (sans toutefois réactiver le mythe de la France multi-millénaire). Les frontières ne sont pas totalement stabilisées ou incontestées la plupart du temps (ex. les plus connus : Israël et ses colonies, la Chine et le Tibet, l’Afrique et ses cartes tracées à la règle, les Balkans) et la définition de ce qu’est un peuple est plus que délicate.

    Déjà, je n’aime pas le terme de “peuple”, je préfère parler de population ou de société. Ainsi ce qui fait la spécificité de la nation est plus claire : c’est l’union politique, c’est-à-dire de gens qui, à priori, ont des intérêts divergents, mais qui doivent vivre en commun.

    Cependant, cette union ne tombe pas du ciel ; c’est une construction historique et sociale engageant une multitude de facteurs. Je sais : c’est très vague ; mais je veux insister sur le fait qu’il n’y a pas de construction simpliste de ce qu’est une nation. De fait : il y a autant de définitions de la nation qu’il y a de nations ; chaque peuple se vit et se définit selon des termes différents, et il en est de même pour chacune des portions d’une seule et même population. Toutefois, sans en faire une liste exhaustive, on peut dégager des tendances.

    Parmi les différents moyen de créer une communauté humaine, désigner un ennemi commun est assurément le plus efficace. D’ailleurs tous les partis, et tous les hommes politiques, se servent, au moins partiellement, de ce levier. Ça permet de faire taire les conflits internes. Et c’est ce que j’ai voulu indiquer dans mon message. Le problème, c’est que ça ne fonctionne pas à l’échelle de la nation, ou de l’Europe car il y a bien un nationalisme européen tout autant dangereux. Dans le “eux et nous”, nous existons en tant que groupe humain tant que le eux existe : c’est une théorie du conflit perpétuel.

    Je m’explique. Définissez la France, ou l’Europe, comme une nation chrétienne, voir catholique, et vous ne rassemblez pas la majorité, par contre, s’opposer aux musulmans a plus de chance de regrouper des catholiques intégristes avec des laïcards confirmés. C’est une définition en négatif : tout ceux qui sont musulmans ne sont pas Français. Ce faisant vous rassemblez plus de monde. Vous avez créé une communauté parfaitement hétérogène tout en gommant superficiellement les clivages par désignation d’un ennemi commun. Mais pour une nation cela ne fonctionne pas : vous déniez la nationalité à quelques millions de Français (pas six, n’en déplaisent aux paranoïaques de la démographie). C’est un facteur de guerre civile, donc de destruction de la nation. C’est juste de la folie furieuse ; rapport là encore au droit : nous avons des droits car nous avons une nationalité, en effet c’est l’État, c’est-à-dire une puissance, qui garantit votre sûreté et vos droits y compris les plus élémentaires, par la force si nécessaire (lorsque la droite commence à remettre en question la nationalité, ou à vouloir changer sa définition, il faut bien avoir conscience de tout ce que ça implique…). Pour l’Europe il en est de même : outre l’immigration récente, il y a des peuples, notamment dans les Balkans, qui sont majoritairement musulmans ou encore orthodoxes (les Grecs). J’ai pris l’exemple avec les religions, parce que c’est le plus récent… mais c’est aussi le plus ancien ! En effet, les guerres de religions du XVIè siècle, et le massacre de la Saint Barthélémy, sont très probablement une des causes de la naissance des États-nations modernes, du moins en France. Manifestement, certains n’ont pas retenu la leçon et sont prêt à remettre le couvert…

    Le racisme (ou le nationalisme ethnique), de la même manière, est un trait que l’on prête aux nationalistes… et de la même manière il a été une des causes du massacre de millions de Juifs (là encore une destruction d’une partie de la nation… au sens propre du terme). C’est que l’Allemagne a construit sa nation d’une mauvaise manière : sur le sang (on a reproché à J.-L. Mélenchon d’en faire la remarque…). Tout comme pour les religions, les différentes vagues d’immigration remettent définitivement en cause une telle définition de la nation.

    Il y a aussi ce que j’appelle dédaigneusement le folklore (Marseillaise, drapeau, tout ça…) et les traditions inventées bonnes à contenter les faibles d’esprits mais qui ne créent aucun espace commun solide et large (genre quand vous rencontrez un(e) inconu(e) dans la rue vous vous mettez en chantonner la Marseillaise…).

    Je distingue de la culture, dont la langue fait partie bien qu’il existe des nations ayant plusieurs langues. La culture au sens sociologique du terme créé effectivement un espace d’échanges commun. L’école et les médias nationaux en sont par exemple des vecteurs. Ceci dit, outre cet espace commun, rien n’empêche (et ça a toujours été le cas, ne serait-ce qu’entre les régions) d’avoir des cultures spécifiques au sein d’une nation, encore heureux que de multiples cultures puissent co-exister. Ce d’autant qu’aucune force peut contrôler une culture : c’est une donnée politique sur laquelle on n’agit qu’avec circonspection.

    Entre parenthèses. On mélange trop la question de la nation à celle de l’identité. Effectivement, l’appartenance à une communauté crée une identité. Mais nos identités sont multiples, et dépendent du contexte : en politique intérieure je suis Français, dans ma vie professionnelle je suis informaticien et chômeur (sic), sur le web je suis Pierre Roc, tout cela à la fois. Par exemple un responsable politique qui ferait un abus de pouvoir pour faire passer sa famille avant ses autres concitoyens, ce serait une faute et un motif de destitution (je le mentionne car un élu FN a ainsi justifié ses malversations : les proches d’abord, puis les Français, et ainsi de suite, source : un ancien article Mediapart que j’ai la flemme de chercher). Idem : l’identité est une donnée politique sur laquelle on ne peut pas influer sans utiliser la violence.

    J’en viens à la spécificité Française, à laquelle je suis très attaché en tant que de gauche. Il y a une volonté de construire la nation à travers des principes (liberté – ça vaut pour les USA, nation d’immigration par excellence –, égalité, fraternité, tout ça). L’idée est très bien exposée dans Le Contrat social de Rousseau.

    Je vais prendre l’égalité des territoires par exemple, puisque Jiel le mentionne. Je vais me contenter de citer A. de Tocqueville. Le parallèle avec les événements bretons et la construction européenne est facile à faire.

    « Vous entendrez, monsieur le Président, dans toutes nos villes, et jusqu’au fond de nos campagnes, réclamer l’exécution du même travail (NDLA : création de lignes de chemins de fer) à un autre point de vue non moins digne de votre attention ; partout on vous dira que, tandis que les départements de France qui sont nos rivaux en industrie peuvent rapidement, et à peu de frais, à l’aide de chemins de fer établis par l’État ou avec son secours, apporter leurs denrées sur le marché, les nôtres, privés du même avantage, luttent contre une concurrence ruineuse.

    « À ce spectacle, notre pays s’inquiète, il s’émeut, il se plaint ; nous espérons que sa voix sera entendue ; car l’égalité industrielle entre les départements n’est pas moins précieuse que l’égalité civile entre les citoyens. »

    Autrement dit : la mise en concurrence des territoires (et on pourrait ajouter la répartition géographique de l’économie dans le cas de la Bretagne qui se spécialise dans l’agroalimentaire) fait naître des revendications spécifiques, et donc le régionalisme. C’est la politique actuelle menée aussi bien à l’échelle du pays que du continent. Et cela donne la manifestation identitaire bretonne. Tandis que l’égalité (réalisée par un pouvoir central ayant assez d’autorité pour redistribuer les richesses) rend les revendications spécifiques superflues. Bien que tout le monde essaiera de tirer la couverture vers soi lors de la redistribution, l’égalité comme but de la redistribution est capable de faire consensus. C’est un principe d’union.

    À ce titre là, je ne fais pas attention aux discours politiques tenus. Au final la politique n’est qu’un désir, une volonté si vous préférez, pas une réalité. Et c’est remarquable que les gens d’(extrême-)droite soient toujours en train d’exclure des gens de la nation, dans les faits. Tout en s’en réclamant. Si vous êtes politiquement en désaccord avec eux, alors vous serez les “bobos”, les “gauchistes”, tandis que eux sont du “vrai peuple”, ils diront qu’ils sont, eux, les “vrais Français”, etc. C’est paradoxal, mais il faut acter que ce sont ceux qui tiennent un discours nationaliste qui sont aussi ceux qui ont le moins assimilé l’idée de nation. Et ils sont dangereux à ce titre-là (entre autres), car ici on touche à des fondamentaux : les droits des personnes (qui ne sont pas de simples paroles mais garantis par une puissance nationale : l’État) mais aussi le risque de guerre civile. C’est pour cela que j’ai parlé de philosophie politique : c’était le seul moyen de prendre un peu de distance vis-à-vis des catégories politiques usuelles où l’on classifie de “nationaliste” celui qui a une conscience nationale assez faible. Pour le dire autrement ceux qui ne sont pas nationalistes ont intégré, dans leur “inconscient”, l’idée de nation et, de ce fait, ils n’en font pas une préoccupation politique.

    Sur l’Europe, même si c’était très vague, c’était bien une pique. Mon intime conviction est que les européistes :
    1/ faute justement de toute cette réflexion sur la nation et la création d’une communauté politique, sont en train de se planter lamentablement (mise en concurrence des nations, donc division), voir sont en train de prendre un tour franchement réactionnaire (union face à un ennemi commun) ;
    2/ associent le nationalisme à une échelle donnée, c’est-à-dire celle des pays, alors que tout porte à croire qu’il s’agissait bien de créer une nation continentale et qu’ici j’interroge directement la nature de la communauté politique : je ne veux pas d’une Europe qui se définirait sur la base de la religion ou de la race ou d’un ennemi commun car c’est un nationalisme européen, avec toutes les tares du nationalisme ;
    3/ passent à côté d’un truc très grave : ils refusent toute critique de Bruxelles et de l’UE, sous prétexte que c’est du nationalisme, alors que cela devrait être possible de formuler une critique comme contre tout pouvoir central (la formulation des divergences&contradictions est un principe fondateur de la démocratie, cf. ¹).

    L’Europe ne remet absolument pas en cause le modèle d’État-nation. En effet l’Union européenne est construite sur la base de traités passés entre les États, dans l’objectif explicite de déléguer une partie de leur souveraineté. Les nations existent toujours. Il ne faut pas mélanger nation et souveraineté. La perte de souveraineté est réelle. Pour partie une délégation volontaire des États, mais aussi lié à un rapport de force avec les autres pays et des acteurs privés (les marchés financiers…).

    Je suis intimement convaincu que l’Union européenne est impossible. De fait, pour moi, même si je n’ai jamais pu me le faire confirmer par un écrit d’un historien, la construction européenne, union des nations qui devient elle-même une nation, participe du même mouvement que la construction des nations, union des villes. Ceci porté par des nécessités économiques (échanges de plus en plus denses et lointains, concentration du capital, répartition géographique du travail, y compris au niveau mondial). En fait, à l’heure actuel, si on tenait compte des échanges économiques il faudrait un gouvernement mondial car la politique est le seul moyen de régler les rapport et les conflits qui apparaissent inévitablement entre des populations qui interagissent. Mais une telle concentration du pouvoir pose la question cruciale de la distance au pouvoir et de la possibilité même d’une démocratie à cette échelle (déjà qu’à celle de la nation c’est pas joyeux…), sans compter, encore une fois, celle de l’union politique.

    Les projets de fédéralisme européen, la décentralisation du pays accompagnée de la centralisation européenne et autres joyeusetés, sont pour moi juste une manière de ménager la chèvre et le chou, de se raconter des histoires, une manière démagogique de présenter les chose. Car à un moment il faut trancher : il faut définir pour chaque “compétence politique” si elle relève de la région, du pays ou du continent. Il n’y a pas d’entre-deux et certaines compétences, comme la politique monétaire, implique nécessairement la détention d’un important pouvoir.

    De même, j’estime que pour être crédible quand on refuse la construction européenne, il faut aller au bout de la logique et en refuser aussi les avantages : notamment l’économie mondiale permet, à un prix terrible il faut le dire parce que sur le dos des exploités du sud-est asiatique par exemple, un niveau de vie élevé. Ils faut revoir tout ce qui est liberté de circulation des capitaux et des marchandises. D’ailleurs, pour l’Europe, il y avait un projet politique, et non pas économique, dont il existe encore des institutions fantômes (j’ai vu ça dans l’un des suppléments du Diplo.).

    Et la construction des nations s’est faite dans la violence, tout comme les deux tentatives européennes précédentes (Napoléon et Hitler). De fait il n’existe pas de liant qui puisse donner une raison aux nations européennes de s’unir. À une époque il y avait un projet commun : vivre en paix, mais avec la situation actuelle, difficile d’y croire encore, alors même que l’Union européenne porte de graves responsabilités dans les conflits entre peuples (nord/sud, cf. mise en concurrence).

    Beaucoup de Français se figurent pas mal qu’il suffirait d’exporter leur modèle, mais c’est loin d’être gagné que les autres l’accepteront. C’est la condition sine qua non en ce qui me concerne.

    Bon après il y a les délires nationalistes qui croient voir dans l’Union européenne un instrument exclusivement au service de la domination des USA et autres balivernes. C’est qu’ils ne comprennent pas que les élites, françaises en particulier, sont internationalistes et se sont toujours servi de l’étranger comme de base arrière (ou comme “modèles”) pour maintenir leur domination en France. L’internationalisme de gauche, lorsqu’il ne s’est pas fourvoyé, est supposé combattre cela.

    Voilà. Pour ceux qui ont eu le courage de me lire jusqu’ici. Sur ce coup je crois avoir été plus que complet et ça m’a pris un temps fou. L’avantage des commentaires longs, c’est que je n’aurai pas beaucoup de contradicteurs. Si j’ai fait aussi long, c’est parce que je crois que c’est un sujet trop délicat pour souffrir d’un traitement trop expéditif.

    ¹ Enfin (!), je me crois obliger d’ajouter que si la nation existe, c’est en vue d’exercer un projet politique. Et il ne faut surtout pas arrêter sa réflexion politique là. Sinon on tombe dans un autre travers du nationalisme : la négation du conflit inhérent à une société, au lieu d’établir, in fine, la démocratie et son pluralisme, sans quoi le conflit civil peut subvenir là aussi.

  • [^] # Re: Province ?

    Posté par  . En réponse au journal Les JT c'était déjà pas glorieux, mais là on atteint des sommets.... Évalué à 1. Dernière modification le 05 novembre 2013 à 09:39.

    En fait on parle de régions. Parce que ça met tout le monde à la même échelle. Sans compter le pluriel plus représentatif de la réalité. C’est comme la France et l’étranger. D’hab’ on glisse plus facilement pour dire le monde. Il n’y a pas, chez beaucoup de Français, cette conception « eux et nous… eux différents de nous, eux contre nous ».

    Qui plus est, ici le eux, tout autant que le nous, n’a strictement aucun sens. Ça a déjà été indiqué pour la province, qui n’a d’existence, en tant que groupe homogène, que dans la tête des Parisiens. Mais, surtout, Paris est une capitale, et comme toutes les grandes villes de ce genre elle est habitée par une population diversifiée qui ne s’identifiera pas comme parisienne, ou à la limite seulement dans la mesure où elle y habite.

    Alors non c’est pas un gros mot, mais ça marque une mentalité, une conception du monde que beaucoup ne partagent pas.

    Et puisque je fais un peu de philosophie politique, je peux le dire : oui c’est idéologiquement très marqué. Il y a cette idée fondamentale à droite d’inégalité : « eux et nous », s’il y a lieu de marquer la différence, c’est que le sous-entendu pose une hiérarchie. C’est un principe de destruction de la nation, car une fois le pays coupé en deux – Paris et la province –, vous êtes bien embêté : le seul moyen de recréer du sens commun, c’est de définir la France par opposition au reste du monde. Au final vous aboutissez à une hiérarchisation de l’humanité, à tous les niveaux : la famille est plus proche, (puis vient la région,) puis les Français, puis les Européens, chacun étant défini en négatif, par opposition à l’extérieur. (Pourtant, pour des raisons historiques et sociales – par paresse intellectuelle aussi – on attribue le nationalisme à l’extrême-droite là où elle en est la négation même. D’où une grande confusion sur la question de l’Europe d’ailleurs…)

    PS : la décentralisation est une vaste fumisterie. La tendance est à la centralisation… européenne.

  • [^] # Re: Au delà de 20kHz, on entend rien

    Posté par  . En réponse au journal Rencontrez badbios le virus plus puissant que Stuxnet. Évalué à 8.

    Vous confondez. Le son se propage par ondes de pression dans l’air. Rien à voir avec les ondes électromagnétiques, support de la radio, la lumière, etc. en fonction de la longueur d’onde.

  • [^] # Re: pas la peine de dénoncer

    Posté par  . En réponse au journal Les JT c'était déjà pas glorieux, mais là on atteint des sommets.... Évalué à 10. Dernière modification le 04 novembre 2013 à 20:39.

    Un témoignage est le récit d’un vécu. Dans l’extrait proposé, bien qu’il y ait d’authentiques témoignages, il est majoritairement question d’opinions politiques qui, dans la bouche d’un enfant, n’est que du mimétisme.

    Sans compter que le montage est de la pure et simple manipulation. En effet les différents plans, mis bout à bout, présentent une cohérence logique du discours alors qu’il y a plusieurs enfants différents qui parlent, à des moments différents. Magie du montage : un enfant répond à un autre… qui n’est pas présent.

    Ce n’est pas à un témoignage d’enfants qu’on assiste ici, mais un discours construit au montage. Il y a fort à parier que l’entretien en tant que tel n’avait ni queue ni tête (déjà que même pour des adultes c’est compliqué d’avoir une pensée politique structurée).

    C’est ensuite le boulot d’un journaliste que de rapporter des faits en suivant une ligne, c’est à dire en faisant une sélection pertinente dans la réalité pour en fournir une interprétation et une analyse qui dépasse le simple fait rapporté, et pas faire du simple commentaire de l’actualité.

    J’ai déjà eu l’occasion de citer les documentaires de Pierre Carles sur le site. C’en est un bon exemple : de longues séquences peu commentées mais qui sont porteuses de sens et en disent bien plus long que ce qu’elles donnent à voir. Pierre Carles met toujours son téléspectateur sur des rails : on sait où il veut en venir, mais en même temps donne du fait brut, laissant libre le téléspectateur de sortir des chemins battus ; voir la scène finale de La sociologie est un sport de combat qui porte sur la place de l’intellectuel dans le combat politique, du rôle des sociologues vis-à-vis du personnel politique et des populations étudiées, de l’impact des travailleurs sociaux, etc. ou encore dans Attention danger travail la longue séquence sur les conditions de travail de livreurs à domicile où l’individu est tout bonnement nié en tant que tel et doit devenir une simple pièce de rechange.

    À l’inverse ce reportage laisse un arrière-goût assez désagréable.

  • [^] # Re: travail hebdomadaire

    Posté par  . En réponse au journal Travail dominical. Évalué à 0.

    Question territoire, c’est loupé. Cf. Formation territoriale de la France. L’idée même d’une France n’a à mon humble avis pas grand sens du temps de la féodalité où le territoire se partageait entre les grandes familles et leurs vassaux. La construction des nations est un phénomène extrêmement récent (nous en avons assez peu conscience en Europe occidentale car France et Angleterre sont les plus vieille nations que je sache, d’abord unifiées via la monarchie).

    De même, question culture ou religion, je n’y connais pas grand chose, mais je serai prêt à parier qu’il n’y a pas de grandes similitudes entre la pratique religieuse au début du christianisme et 2000 ans plus tard. Il suffit d’invoquer l’existence de schismes comme argument.

  • [^] # Re: Rien du tout

    Posté par  . En réponse au journal Travail dominical. Évalué à 1.

    Qu’un soralien nous parle d’un conflit de classe pur et dur comme d’un problème sociétal en dit assez long sur l’extrême droite qui a cette fonction, objective comme on dit, de servir de fusible et de détournement d’attention au capitalisme. Je vous retourne le compliment.

  • [^] # Re: 56%

    Posté par  . En réponse au journal Travail dominical. Évalué à 1.

    Sans compter l’excellente critique de Bourdieu, sur le concept même d’opinion publique, hypothèse implicite de tout sondage.

    Je profite de ce message pour signaler qu’il s’agit d’une politique plus vaste visant à terme à détruire le code du travail, donc littéralement revenir à un état pire que l’esclavage (comprendre, dans un contexte de surproduction et de chômage de masse le paiement à la journée, même pas de quoi survivre, conditions de travail dangereuses voir mortelles, travail des enfants, etc. car la plupart des gens ne se rendent vraiment pas compte de la chance qu’ils ont : lisez un peu Germinal, Zola, ou Les Misérables, Victor Hugo, ou encore intéressez-vous aux conditions de travail et de vie des pays dits sous-développés ou en voie de développement). Cette mesure d’ouverture du dimanche est sensiblement similaire à l’offensive contre les retraites, l’ANI, ou plus modestement le jour férié qu’on s’est fait chouraver sous prétexte d’aider les vieux. Cela ne m’étonnerait pas qu’après cela on voit arriver la remise en cause des 35h. Se dessine ainsi une politique cohérente d’attaque contre la règlementation du travail.

    D’ailleurs ceux qui revendiquent la liberté de choisir ne doivent rien connaître à l’économie et encore moins au marché du travail : comme cela a déjà été dit, il n’y a aucune liberté pour l’employé lorsque l’employeur peut le remplacer dans un contexte de chômage de masse. Et ne parlons pas d’une règlementation de la rémunération du travail du dimanche, qui devrait être interdite selon le même pseudo-argument de liberté de choix.

    Les gens qui donnent du crédit à ce genre de non-débat (dans le sens ou la réponse est évidente pour n’importe quel travailleur pas trop boulet), sont soit pas très malins, soit des fascistes (quand ils “s’amusent” à dire que l’intérêt du travailleur est de pouvoir choisir et fustigent les syndicats qui sont, naturellement, contre, sauf corruption). D’ailleurs faire passer cela comme un intérêt du travailleur, alors que c’est exclusivement au bénéfice du patron, c’est assez typique de la confusion politique propre au fascisme.

  • # ...

    Posté par  . En réponse au journal "Pussy Riot. Lettre du camp 14 de Mordovie". Évalué à 10.

    Il se trouve que la semaine dernière il y a eu un reportage Arte sur la Russie (les trucs du samedi soir pour ceux qui connaissent, et qui, accessoirement, n’ont pas de vie sociale :p). Un vrai reportage. Le sujet était un train dans le nord de la Russie, qui traversait des étendues enneigées pour rejoindre une zone d’extraction de gaz (pour l’Europe).

    Le topo : des conditions de travail très dures, des hommes seuls face à une nature difficile, mais bien payés, à en croire ceux qui y travaillaient. Le reportage a parlé aussi du peuple autochtone qui se fait emmerder par la ligne de chemin de fer (ça cause des problèmes vis-à-vis de leur mode de vie et tout, je n’ai plus les souvenirs suffisament précis…) et qui s’est fait envoyé balader par le gouvernement russe.

    Là les petits européens que nous sommes sont bien contents que la Russie soit autoritaire. Parce que bon… les Pussy Riot, c’est cool… parce qu’elles parlent pas du gaz…

    Voilà voilà…

    Dans le reportage, on a le droit au Russe un peu bourru qui vous sort un bon gros discours macho. Celui des vrai mecs, pas les gens de la ville (genre pas ceux qui sont traumatisé par un internat français), parce qu’avec la nature on ne (se) ment pas ; si on se raconte des histoires, on le paie cash et physiquement.

    Et puis… genre dix minutes plus tard, une bonne femme… qui vous sort un de ces discours féministes, court mais structuré : si elle part faire ce métier très difficile, c’est pour la paie. Genre celle qui permet l’indépendance financière, et donc qui lui permet d’envoyer balader les hommes, de pouvoir mener sa vie sans avoir à en répondre devant eux, etc.

    Bref. Tout ça pour dire que le féminisme en Russie est une réalité. Et que loin des agitations très médiatisée des Pussy Riot au militantisme calibré pour les médias de masse et à la provoc’ calculée, il y a un véritable féminisme russe qui n’a pas besoin des médias pour exister.

    ——

    Ceci dit. Encore et toujours les mêmes petits malins de service qui croient accéder à la politique à travers Soral, ses analyses si pertinentes et percutantes (messages aux petits malins : c’est de l’ironie).

    Mais bon… je suppose qu’Arte, c’est pas une référence de Soral, Soral lui ses références c’est Fr2, itélé. Juste Lol. On est tout de même dans une période bien obscurantiste pour qu’un pauv’ mec en mal de reconnaissance médiatique puisse faire passer ses élucubrations hallucinées pour des analyses politiques. Il fait peut-être illusion comparé à des Lenglet, Calvi et autres comparses du petit écran…

    Et ceci n’interdit pas d’être lucide concernant les conflits de basse intensité mené par les puissances, ambiance guerre froide et guerre de propagande “occidentale” contre russe, que je découvre à l’occasion (étant trop jeune pour avoir connu la véritable guerre froide… ça donne un modeste aperçu), genre Snowden qui se barre en Russie, et inversement.

    Mais voilà, si les Pussy militent de manière que je trouve extrêmement courageuse, elles sont pas mal monté en épingle et instrumentalisées, il ne faut pas se le cacher, pour alimenter l’ambiance russophobe de la période (Chypre n’est pas loin et on taira la révolution syrienne par respect pour les victimes).

    Là-dessus, y’a un Soral qui se pose comme une fleur pour instrumentaliser à son tour la nouvelle “guerre froide” comme il dit, afin de faire avancer ses idées sexistes et machistes.

    Je n’insisterai pas plus loin sur ses délires et autres paranoïas, jamais documentés, jamais sourcés, par ailleurs : sur le fond comme sur le forme c’est toujours aussi grisant de voir du Soral, un pauv’ type qui se prend vraiment au sérieux tout en alignant des énormités les unes après les autres. Merci pour le lien, c’est toujours un bon moment de franche rigolade.

    Tant que je suis, l’autre jour on m’a reproché d’avoir dit que le fascisme vient de la bourgeoisie. Ben voilà. Soral c’est l’exemple typique (tellement typique qu’il en devient caricatural) de ces bourgeois déclassés. Fondamentalement lui et ses groupies en partage les codes de classe : cette croyance profondément ancrée de la “sur-rationalisation” du monde. Grosso modo cette foi quasi religieuse aussi bien partagée par les complotistes que par les anti-complotistes de bas étage que le monde est régi par un ordre dont l’homme a le contrôle à un degré très élevé (qu’il soit scientiste comme on le rencontre en économie politique, ou carrément complotiste — avec toujours cette prétention à l’appel à la Raison — chez Soral).

    Fondamentalement le complotisme est une refuge réconfortant pour le bourgeois déclassé style Soral, face à une vérité beaucoup plus incommodante : celle que le monde serait avant tout régi par la bêtise humaine, l’opportunisme, tel manipulé qui croyait être manipulateur, etc.

    Ainsi les valeurs d’une société n’ont absolument rien d’un absolu, et c’est très évocateur lorsqu’il mentionne cette soit-disant Russie éternelle, orthodoxe&co.

    J’aime beaucoup la culture russe, à travers des auteurs comme Tolstoï, Dostoïevski (j’accroche moins) ou encore Gogol, ainsi que Tchaïkovski en musique (ou plus moderne, Stravinsky), tous représentatifs (peut-être moins Gogole) du syncrétisme propre aux Russes. Cette ouverture et ce que j’appelerai un certain appétit pour l’occident, dont les artistes précédemment cités sont évocateurs, est profondément ancrée dans la culture russe et ça date de plusieurs siècles en ce qui concerne la relation des élites franco-russe (impossible de retrouver la référence mais j’ai cru comprendre que cela a été fait sous l’impulsion d’un tsar, j’ai ceci par exemple).

    Donc le pauv’ boulet qui vient parler “d’ingérence étrangère”, ou encore laisse entendre que les élites françaises sont anti-russes alors qu’il suffit d’aller faire un tour sur le ministère des affaires étrangères pour se rendre compte du contraire, merci bien : c’est un mec qui globalement raconte des cracks, ne fait pas le moindre effort de recherche et de consultations de sources sérieuses (et encore, je suis loin, mais alors très loin de connaître sérieusement la Russie, mais disons que j’ai dépassé le stade… Fr2 et itélé:) et ne connaît rien à la Russie. Bref, du Soral égal à lui-même : il traîte Duflot d’idiote, il ferait mieux de se regarder dans un miroir.

    Enfin et pour terminer, sur le fond. Parce que là je rigole, mais il y a un discours de fond chez Soral, politiquement êxtremement structuré, avec cette hantise propre à la bourgeoisie de croire que les conflits de classe vont détruire la nation.

    Dans la petite vidéo mise en ligne au-dessus, il est absolument explicite : il s’agit, pour lui, de défendre l’union nationale face à des rapports de classes de plus en plus conflictuels. Et ça, avec le reste du discours sur la pauv’ aristocratie française, et l’armée son institution de refuge, cela s’adresse explicitement à la bourgeoisie et à l’aristocratie française, au catho tradi, &co. qui sont bien, bien présent ici aussi sur ce site (mais qui ont compris qu’il fallait être plus discrets et plus fins dans leur approche que les pauv’ soraliens de base qui sont juste les couillons de service).

  • # Documentaire de Pierre Carles

    Posté par  . En réponse au journal Initiative citoyenne pour le revenu de base. Évalué à 3.

    Sujet connexe : Attention danger travail

  • [^] # Re: Du beau...

    Posté par  . En réponse au journal Benoît Hamon a encore frappé. Évalué à 2.

    Et ceux qui gueulent sans aller voter, c'est surtout des gens qui pensent tout et leur contraire

    Non. Ce sont des gens que vous ne comprenez pas. C’est différent.

    n'ayant rien à foutre des conséquences de ses actes (bref, pas façon Front de Gauche).

    Lol. Vu la mentalité qui existe au FdG, je peux vous dire que vous êtes totalement à côté de la plaque les concernant.

    ils pourraient faire un parti pour faire entendre leur voix

    Ah oui, bien sûr. Ils ont le temps pour le faire. Ils en ont les moyens, intellectuels car il faut trouver des économistes&co qui marchent à leur projet, ils en ont les financements, etc.

    Pour quelqu’un qui se plaint que les indépendants ne pourraient pas participer à une démocratie à tirage au sort, vous employez ici l’argument exactement contraire. Ça n’aide pas à vous rendre crédible.

    Et puis il y aura toujours des p’tits malins pour dire que ce parti ne fait que de la merde, qu’il raconte tout et n’importe quoi, qu’il n’est pas responsable, etc.

    PS : les partis où tout le monde est d’accord, ce sont les partis où tout le monde est d’accord avec le chef. Perso. je préfère les partis démocratiques, là où y’a un peu de boxe dans les couloirs. Ce n’est pas toujours marrant, mais c’est vital.

  • [^] # Re: Du beau...

    Posté par  . En réponse au journal Benoît Hamon a encore frappé. Évalué à 2.

    Et je trouve ça malheureux ce qui arrive au PS. Ce pour une raison simple : le raisonnement tenu fait l’impasse sur les abstentionnistes. Là j’ai le sentiment qu’il y aurait beaucoup de monde à convaincre, parce que des gens qui se disent de gauche et qui disent ne pas vouloir à voter, il y en a je pense un paquet.

  • [^] # Re: Du beau...

    Posté par  . En réponse au journal Benoît Hamon a encore frappé. Évalué à 9.

    Je réponds point par point. C’est long, mais je ne ferai qu’un commentaire long, promi. :)

    Au passage, c’est Chouard qui défend et qui a popularisé cette histoire de tirage au sort. Le problème avec Chouard, c’est que “c’est une enfant en politique” (je devrai pas dire ça vu que je suis dans le même cas) : on l’a accusé plusieurs fois de fascisme… sans qu’il percute ce qu’on lui reprochait. Dernier épisode en date : http://www.fakirpresse.info/L-air-du-soupcon.html

    En fait Chouard reprend une vision de droite de l’élection (désignation du “meilleur”, du plus compétent), pour mieux démontrer que l’élection n’est pas démocratique. Il redécouvre que la droite n’est pas démocrate. Quel scoop ! Ce qu’il n’a pas capté, c’est que les gens de gauche votent comme dans une démocratie : pour faire un choix, une choix de société, un choix de programme, un choix des idées, etc. C’est que l’élection est très ambigüe : on désigne à la fois un programme (on porte donc une décision politique), et les hommes qui seront chargé de l’exécuter (rien de tel dans la démocratie athénienne). Lui est resté fondamentalement de droite : il croit que le tirage au sort permettra d’aboutir à la “meilleure” solution.

    1/ On s’en fout. Du moins en première analyse. Il suffit d’étendre à toute la population. En seconde analyse, c’est important, car une société de classe (esclaves, propriétaires, travailleurs, etc.) crée des groupes sociaux bien distincts, et ils entrent en conflits : il faut donc une “justice” pour arbitrer entre eux. En fait c’est l’essence même de la démocratie moderne comme antique. En effet, dans l’antiquité, il y avait aussi des classes au sein de la population qui avait des droits politiques : propriétaires terriens, travailleurs à la journée, de la ville, du port, ou de la campagne. J’y reviens en seconde partie.

    2/ On s’en fout. C’est même une très bonne chose dans une démocratie saine. En effet, nous ne sommes pas tous concerné par tel ou tel projet de loi. Dans ce cas là il vaut mieux laisser aux gens plus concernés, donc qui vont prendre le temps de s’informer, le soin de la décision. À Athènes la participation à la démocratie était plutôt élevée (il faut comprendre qu’il y avait des centaines de magistratures à pourvoir, en conséquence il n’y a rien d’étonnant dans la difficulté à les remplir toutes).

    3/ Parfaitement possible. Une partition géographique avec des assemblées locales (Athènes en avait), doublée d’une partition arbitraire pour organiser un roulement (par exemple sur un mois : c’est un tiers de la population qui se réunit chaque semaine). Pour le coût : ça se fait ; les athéniens y passaient du temps avec une économie à des années-lumières de la nôtre.

    4/ Le système politique athénien était très ingénieux : il était conçu pour éviter les retournements d’opinion, tout en se permettant un mode de décision extrêmement rapide (il fallait gérer des questions diplomatiques et militaires). Grossièrement cela reposait sur une assemblée populaire qui se réunissait souvent et prenait une multitude de décisions dans la journée ou le lendemain, et une assemblée (le tribunal) qui avait le pouvoir suprême mais qui demandait plus de temps (à réunir et à délibérer).

    5/ Un très grande proportion des athéniens devenaient président d’Athènes (fonctions diplomatiques style recevoir les ambassadeurs)… pendant 24 h. Pas une minute de plus (mandat non renouvelable). À l’époque d’Athènes, la diplomatie était particulièrement importante et occupait une part de la vie politique : c’était une société très militarisé qui devait gérer finement ses alliances avec les autres cités. À l’heure actuelle on peut dire que la politique étrangère est un domaine totalement confisqué des mains du peuple. À Athènes c’était tout le contraire (je suppose qu’envoyer leurs fils au casse-pipe était une excellente incitation pour les athéniens de garder le contrôle dans ce domaine).

    6/ (ce n’est pas à vous que je réponds, mais à un autre commentaire) Il y avait effectivement des postes réservés aux plus riches… essentiellement des fonctions honorifiques… où le magistrat devait y allait de sa cagnotte personnelle (des trucs à la con pour nous mais auxquels les athéniens tenaient genre organisation de fêtes religieuses). De même l’impôt, pour des raisons pratique, n’était payé que par les plus riches (mais Athènes, en tant que cité, se finançait essentiellement grâce à des mines d’argent qui appartenaient à la cité). Sauf la question des métèques et des esclaves, les pauvres avaient des droits politiques étendus et un véritable pouvoir sur la gestion de la vie collective.

    ——

    La démocratie athénienne était vraiment bien foutue. Il y a bien des choses à en tirer. J’exposerai dans la suite du commentaire des trucs qui me semblent dignes d’intérêt. Mais je tiens aussi à expliquer en quoi le tirage au sort est, selon mon opinion, une ânerie (de ma lecture de La démocratie athénienne à l’époque de Démosthène conseillé par Chouard – sic), et que se revendiquer du système grec pour défendre le tirage au sort est une double ânerie.

    Contrairement à ce que la propagande des militants du tirage au sort voudrait faire croire, le système politique athénien ne reposait pas sur le tirage au sort. En effet les postes les plus importants, stratèges et pour les finances, étaient élus (au IVè av JC). Le tirage au sort était essentiellement un moyen pragmatique d’éviter la corruption et de désigner très rapidement des centaines d’individus, voir des milliers (le matin pour la journée !).

    En fait le système représentatif est une assez bonne approximation du système grec : des orateurs (les partis politiques) font valoir leur argumentation auprès de l’assemblée populaire (les médias, au sens large, c.-à-d. tout médium de transmission de l’information, du militant sur le marché au DPDA) et ce peuple décide en dernier ressort, par suffrage. C’est ainsi que fonctionnaient les assemblées grecques : tout le monde avait le droit de prendre la parole théoriquement, mais dans les faits il y avait des orateurs, entraînés et reconnus, qui défendaient un camp et un point de vue précis… exactement comme un parti moderne le ferait. Au passage la démocratie athénienne permettait aux orateurs de prononcer des discours (plutôt très formels), mais n’aimait pas trop le débat à baton rompu : exactement tout le contraire de ce qui se pratique à l’heure actuelle dans les médias de masse.

    Alors n’en déplaise aux fascistes (sisi l’anti-partisme est propre au fascisme), les partis sont un vecteur essentiel de la démocratie. Il y a juste une totale ignorance sur le fonctionnement politique moderne, et en particulier sur le rôle de la démocratie : le(s) commentaire(s) qui s’attaque(nt) aux partis attribuent le présidentialisme de la Vè à la faute des partis.

    Pour dissiper tout malentendu : le parti est le collectif de citoyens qui décident de se réunir pour pouvoir s’impliquer en politique. Il faut bien le distinguer de la direction ou des paroles portées dans les médias de masse.

    Il n’y a pas de “chef” au PS, c’est de la direction collégiale et de la proportionnelle ! Le fait que les députés répondent au garde à vous, déjà ce n’est pas vrai, sauf que tout ceci se fait de manière assez discrète (parce qu’à chaque fois que des dissensions apparaissent au sein d’un parti, les médias, attirés par l’odeur du sang, se font une joie de remettre le couteau dans la plaie), ensuite les députés sont soumis au très fort pouvoir du président (d’où ils tirent leur mandat, du fait que les législatives sont totalement attachées à la présidentielle, et parce que l’exécutif possède de très forte prérogatives, budget et propositions de loi par exemple). En réalité les partis sont totalement anesthésiés et ne peuvent rien faire, les députés bien souvent n’en font qu’à leur tête malgré ce que les militants peuvent dire.

    Des exemples concrets : au PS ça gueule face à la politique du gouvernement, mais ils n’ont absolument aucune possibilité d’imposer leur vue. Voir le cas de Valls. Les propositions de campagne de Hollande ne sont pas celles de son parti (vive la primaire !). Au FdG c’est idem : les députés sont indépendants de la direction du FdG et je pense de leur partis respectifs (au moins pour les communistes), du coup il y a eu des couacs (ça a l’air d’être réglé maintenant -_-).

    Enfin un point important, que je répète inlassablement sur ce site : la démocratie (et d’une manière générale toute politique, même celle d’un dictateur) a pour fonction, entre autres, de construire une gouvernance face à des revendications diverses et variées de la population. Souvent ces revendications sont contradictoires ; il faut donc arbitrer. Forcément le politique ne peut pas satisfaire tout le monde, et il y aura un gagnant et un perdant.

    Au passage les Athéniens avaient parfaitement conscience de cette fonction de justice, c’était le tribunal populaire qui décidait en dernière instance, y compris des lois, dont le processus de décision était organisé comme un procès (un “orateur-accusateur” présente sa nouvelle loi, des “orateurs-défenseurs” argumentent pour rester sur l’existant, un jury tirés au sort tranche) ; il y avait cependant bien séparation des pouvoirs par contre-pouvoirs interposés. Et idéologiquement la justice semble importante (si on en croit Le Banquet de Platon, les Athéniens considéraient la démocratie comme synonyme de justice).

    Revenons au monde moderne. Je disais donc, forcément, dans les arbitrages, il y a un perdant. Dans les milliers de décisions rendues, il y a forcément des millions de perdants. Les gens ne retiennent que les décisions qui leur sont défavorables. Comme c’est le politique qui tranche, qui fait le choix définitif, et comme les hommes politiques sont la partie visible de l’iceberg (ainsi que les partis, le parlement, l’État, les fonctionnaires, etc.), on finit par les détester.

    Or ici les hommes politiques ne jouent que les intermédiaires et les juges entre deux groupes sociaux en conflit. Toute la haine, l’intolérance née de l’incompréhension de leur rôle dans la société, se reporte sur eux (c’est facile et ça ne mange pas de pain).

    Il y a bien évidemment des conflits propres aux antagonismes citoyen-classe politique, mais ils sont rarement à l’origine de la méfiance des individus envers le politique, de ce que j’ai constaté.

    Les institutions politiques (et les hommes qui les font vivre) servent de fusible et, étonnamment, permettent à une société foncièrement intolérante et incapable de faire elle-même ses propres arbitrages, de ne pas tomber dans la guerre civile. Et fondamentalement, c’est une des fonctions de la démocratie : se doter de moyens de prendre des décisions pour résoudre des conflits (inhérents aux communautés humaines), ceci afin d’éviter d’en venir aux mains.

    Malheureusement ce fusible là n’est pas remplaçable, car lorsqu’il saute, c’est la démocratie qui tombe.

    L’idée des tirés au sort, portée par Chouard&Co, repose sur une vision naïve de la démocratie, mais encore plus de l’exercice du pouvoir (croire qu’un mec lambda saura faire la part des choses entre multiples pressions et influences inhérentes à toute position importante, ce sur des dossiers extrêmement techniques qui réclament une expertise assez approfondie).

    Perso. y’a un endroit où je vois assez bien le tirage au sort : c’est à la tête de la télévision et de la radio publique (et un titre de presse tant qu’à faire), après avoir formellement institutionnalisé les médias comme 4ème pouvoir (ie. mis dans la constitution une structure juridique complète et un statut des journalistes en béton, voir la possibilité pour le simple citoyen de prendre la parole, filtrée par des instances tirées au sort). J’ai le sentiment que pour décider d’une grille de programme, ou des reportages diffusés en JT, y’a pas besoin de compétences particulières.

    Un autre exemple tiré d’Athènes, c’est la liberté politique, qu’on ne connaît que très peu dans le monde moderne, qui seulement énonce des libertés individuelles, et les applique au bonheur la chance. Par exemple tout citoyen pouvait soumettre une proposition de loi, accuser un magistrat (équivalent de l’homme politique moderne) de mal faire son boulot, etc. et avait de multiples moyens de le faire. Face à cette liberté, pour éviter les demandes saugrenues, le citoyen était responsable de ses actes politiques et pouvait, à son tour, en être accusé. Certes une bonne proportion des lois venait d’une minorité, mais globalement, outre cette minorité, le restant de la société avait recours dans les faits à ce droit politique. Il n’existe rien de tel aujourd’hui (ou alors de manière très informelle, via les partis).

  • [^] # Re: Zswap vs Zram

    Posté par  . En réponse à la dépêche Linux pour Workgroups 3.11, le noyau prêt pour le bureau. Évalué à 1. Dernière modification le 05 septembre 2013 à 13:23.

    Mais à l'usage j'ai quand même eu pas mal de problèmes de fuite mémoire avec "zram", si bien que je ne l'utilise plus du tout. Peut-être que zswap sera mieux suivi.

    Ah c’est donc ça… J’ai des fuites mémoires dont je n’ai jamais su trouver l’origine.

    Toutefois, il me semble qu’il y a une nette différence d’usage entre les deux. Zram me permet de créer une zone de RAM compressée en plus du swap “dur” via :

    #!/bin/sh
    echo $((2*1024*1024)) > /sys/block/zram0/disksize
    mkswap /dev/zram0 > /dev/null
    swapon -p 32767 /dev/zram0

    (Au passage, on peut ensuite créer des tmpfs qui, je suppose, seront compressés au besoin…)

    Tandis que zswap permettra de compresser uniquement la partie de la mémoire qui se trouve sur le disque dur.

  • [^] # Re: FOUTAISES !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Décolonisons nos imaginaires. Évalué à 5.

    Franchement ni le temps ni l’envie de répondre dans le détail à ce tas d’inepties (et je me retiens en disant cela) car ça va partir dans tous les sens, ceux qui le veulent pourront creuser s’ils s’en sentent le courage… J’ai pour ma part assez soupé la semaine dernière. C’est sans fin cette histoire : il faut 5 minutes pour écrire une ineptie, moi il me faut 1 h pour écrire un commentaire en vérifiant quelques trucs, histoire que ma mémoire ne me joue pas des tours, faire des recherches sur tel ou tel sujet que je connais mal. Au final on va me reprocher soit d’être trop long, soit trop simpliste, au final jamais content.

    Seul le point 0/ (avec sa note ¹) est important (initialement placé à la fin). Le reste c’est que du bonus.

    0/ “La liberté qui consiste à avoir le droit de zapper entre TF1 et M6 n'est pas une liberté.” Ça tombe bien. La liberté à ce sujet existe déjà : l’accès aux bibliothèques est en général gratuit, le prix du prêt modéré. Voilà une bonne alternative à TF1/M6. Je prends cette exemple, parce que ça va démonter tout votre bullshit de manière extrêmement efficace, et ce sur plusieurs points : déterminisme, taxation foncière, rôle de l’école et de l’État, démocratie.

    Je vais profiter pour donner un exemple de déterminisme : nous ne sommes pas tous égaux devant le savoir, il ne suffit pas de faire lire à un gosse du Victor Hugo pour qu’il soit capable d’y prendre du plaisir, de le comprendre de manière plus ou moins pertinente, de le restituer, etc. Si dans sa famille on discute peu littérature, si pour “calmer les enfants” ou le soir à table on les fout devant la télé, etc., alors l’enfant aura un rapport difficile à la lecture. C’est ce qu’on appelle un déterminisme. Tout ça pour dire un truc tout bête : “personne n’a la sciences infuse” : la démocratie, la liberté, acquérir du nouveau savoir, tout cela s’apprend. Et pour cela, oui il faut une aide de l’extérieur : vous vous contentez de postuler que le mec va se créer ex nihilo du savoir, ses clefs d’accès au savoir, etc. Le jour où ça arrive vous pourrez l’inscrire comme miracle. Mais il me faudra plus qu’un vague postulat. Et l’enfant n’a absolument pas choisi cet état de fait (on ne choisit pas sa famille, son milieu social, etc.), et une fois devenu adulte, il y a de grandes chances de le reproduire de fait avec ses enfants. L’école intervient, idéalement, pour donner des clefs d’accès au savoir. Elle n’y arrive que très imparfaitement, mais c’est très largement mieux que rien. Voilà pourquoi l’école est indispensable à l’élaboration d’une véritable liberté, une liberté effective, dans l’accès au savoir. Sinon effectivement : celui qui est né dans un milieu social peu littéraire sera condamné à avoir pour toute liberté celle de choisir entre TF1 et M6, à la limite celle d’ouvrir 20 minutes ou le Monde, mais ça n’aide pas à acquérir un savoir de fond.

    Enfin passons aux bibliothèques en admettant qu’il n’y ait plus aucun déterminisme dans la société. Il faut les financer. Là je crois que vous me voyez venir… Les bibliothèques en France sont essentiellement municipales… et le financement des municipalités ? Je ne connais pas le budget type d’une commune mais il me semble que la taxe foncière¹ en fait partie, voilà un exemple concret de l’utilisation de nos impôts pour financer : école et bibliothèque. Les deux sont généralement gratuites. Idéalement elles le sont totalement. Idéalement, cela résulte en la liberté effective et totale de connaitre autre chose que TF1 et M6. Pas une liberté-mantra, une liberté qu’on invoque à tout bout de champs mais qui ne correspond à aucune réalité, mais une liberté pour laquelle on s’est donné les moyens.

    On bosse à appliquer tout cela en pratique : malheureusement il y a des gens de votre trempe, qui aiment bien parler de démocratie et de liberté, qui se font passer pour ce qu’ils ne sont pas, mais qui n’y connaissent pas grand chose et s’attaquent à tout ce qui, de près ou de loin, peut permettre l’émergence d’une réelle démocratie.

    Enfin, pour finir, pour quelqu’un qui se revendique de vouloir rétablir la démocratie, il serait temps d’en comprendre tout de même un principe essentiel : l’impôt est levé au nom de la collectivité et il est en conséquence géré par la collectivité. C’est cadeau, c’est le tout dernier billet de F. Lordon (la section intitulée Faucher la nation au FN) : il y a un principe fondamental de la démocratie, c’est adhésion au fait que nous formons une collectivité, collectivité qu’il faut financer pour en gérer les biens communs. Bien évidemment, la démocratie est un bien commun, et elle prend pour hypothèse de base, entre autres, une égale connaissance des affaires publiques par les citoyens, donc un accès libre et sans condition au savoir, donc des écoles et des bibliothèques gratuites, donc un financement. En bref : une démocratie ça se finance et faut casquer — et pas qu’un peu concernant le savoir… –, la démocratie et la liberté ne sont pas de simples mots qu’on peut balancer en l’air : ils sont une réalité concrète possible si et seulement si les individus sont prêts à y mettre du leur.

    À ce sujet et en apparté je recommande, à ceux qui prônent le tirage au sort de lire La démocratie athénienne à l’époque de Démosthène, ça mangera pas de pain (pas sûr qu’on le trouve en bibliothèque celui-là…).

    1/ Personne de sérieux nie la Terreur. Utiliser ce terme de négationnisme à tout va revient à le banaliser… mais c’est vous qui voyez… Par contre, tout laisse à penser que Peillon est franc-maçon. Il a bien le droit de vouer un culte à la Révolution et la République : la bigotterie, je trouve ça mignon. Manifestement ça ne vous plait pas. Ma foi, les bigots catho. n’ont jamais aimé les franc-maçons et ils le leur rendent bien, ce n’est pas une nouveauté. Mais si vous pouviez éviter l’excès, “on se croirait revenir à l’époque de [mettez le massacre de votre choix ici]” : mais où avez-vous vu un massacre de catholiques en France ? Je ne sais même pas quoi répondre. J’ose espérer qu’ici la vocation polémique de votre texte était pleinement consciente… Après tout, vous vouez un culte à un dieu génocidaire, j’en fais pas un drame…

    Au sujet de la Terreur, j’ai adoré Quatrevingt-treize de Victor Hugo. C’est certes un roman, mais c’était un féru d’Histoire, et ce n’est pas un pavé.

    2/ La moindre des choses ce serait de se renseigner sur ce qu’est un déterminisme. Quand on ne comprend pas un texte, on évite de le commenter.

    3/ Sur la liberté, à vous de nous renseigner, mais il me semble que le pape est infaillible, et j’en passe et des meilleures.

    4/ Ça dépend des auteurs, mais si, les Lumières ont (ré-)inventé la démocratie : après ça navigue sévère entre eux mais globalement chacun a apporté sa pierre à la construction théorique des démocraties modernes. Mais ils n’ont plus grand chose à voir avec nos régimes actuels. Il suffit d’écouter les élus en parler pour se rendre compte de la supercherie : pour eux cela se résume à un ensemble formel d’institutions dans lesquelles ils ont su se faire un nid douillet. Par contre du point de vue de la philosophie/sciences politiques ça a bossé dur du temps des Lumières et ça a continué, en particulier sur la question du totalitarisme.

    5/ C’est là le plus rigolo dans l’histoire : vous avez aimé la Terreur, vous aimez certainement Robespierre ? qui se réclamait de Rousseau… le plus démocrate des Lumières (et au passage il avait saisi l’importance de l’apprentissage de la démocratie). Au final la République fut un compromis entre les forces réactionnaires et les forces progressistes (un siècle pour cela). Le régime de De Gaulle est un véritable retour en arrière de ce point de vue. Régime détesté par ceux qui se réclament des Lumières, tout particulièrement de ceux que je cite (je vous laisse chercher dans le paysage politique contemporain…).

    6/ La FNAC n’est pas l’auteure des livres qu’elle vend. Sauf quelques têtes d’affiches, les rentrées littéraires se sont des milliers et des milliers de livres, la plupart ne permettent pas à leurs auteurs d’en vivre : encore heureux qu’ils aient le droit d’auteur, sans cela la FNAC pourrait vendre sans rien leur donner, et les auteurs ne pourraient pas utiliser de licences CC-NC pour les en empêcher.

    ——

    ¹ Il y a en France, un marché privé du logement locatif. Cela grève sacrément les budget. Vous êtes bien mignon de me parler du logement social ou des alloc’, mais vous oubliez de dire que ceux qui en font la demande le font parce qu’ils n’ont pas les moyens de se payer une location privée ou une propriété. Le fait est que vous considérez que « faut pas les aider » (je vous cite), et que pour ne pas passer pour un gros conard (c’est important les apparences hein…), il faut trouver une explication, fusse-t-elle totalement alambiquée, sur le servage et j’en passe… Enfin, la taxe foncière, c’est franchement minime face à un loyer (au pif-o-métrique ça doit être moins de 10 %, et encore j’ai bien casqué l’année dernière), et ce ne sera pas demain la veille que je pourrai jeter un œil au budget de mon propriétaire ou encore qu’il me mette à disposition des infrastructures (que ce soit en “béton” – c.-à-d. des bâtiments/réseaux – ou “sociales” – c-à-d. des services). Le privé, c’est une ponction pure et simple. Le logement social c’est financé par le livret A (c’est même pas chié comme solution, ça ne tiendrait qu’à moi, ce serait l’impôt progressif, et quand je dis progressif, c’est progressif “à-la-Mélenchon”;). Puisque vous tenez tant à l’analogie avec le Moyen-Âge, je vous invite à repositionner le débat conformément à la réalité socio-économique du pays et à s’attaquer aux propriétaires privés… toujours là ?

    Au passage, l’insee c’est une vraie mine d’or. 10 s pour trouver le lien, premier résultat google : site de l’insee. Banco ! Pas pour rien que Sarkozy ne l’aime pas.

  • [^] # Re: FOUTAISES !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Décolonisons nos imaginaires. Évalué à 10.

    Les Lumières n’ont rien préparé, elles ont accompagné le mouvement général de la bourgeoisie, dont le pouvoir a commencé à s’installer bien avant la Révolution. Elles ont aussi mis en place des valeurs destinées à combattre les fléaux de leur temps : fanatisme, obscurantisme, absolutisme (quand le religere — étymologie plus que contestable — conduit au massacre de la saint Barthelemy et aux guerres de religions qui ont ébranlé les sociétés d’alors). La philosophie a dépassé très largement ce que la bourgeoisie aurait souhaité, et la Révolution, outre qu’elle n’était pas uniforme et que seule une interprétation superficielle conduit a penser qu’il s’agissait d’une simple passation de pouvoir, a contraint les successeurs à défendre des idées en lesquelles ils ne croyaient pas réellement : la bourgeoisie se serait bien contenté d’une société de privilèges dans laquelle elle aurait eu sa place, au lieu de quoi le peuple tout entier a accéder à des droits (en fait les groupes n’étaient pas parfaitement homogènes, outre les grandes tendances correspondant à l’organisation en trois corps, le petit clergé vivant dans des conditions proches du peuple pouvait se montrer favorable au tiers-État et donc à la Révolution, et la noblesse issue de l’ordre féodal et bourgeoisie se côtoyaient, par exemple noblesse de robe).

    En aparté : l’idée selon laquelle les “idées” seraient le moteur de l’Histoire, est très largement rebattue en brèche. Les philosophes, ou ce qu’on appellerait aujourd’hui les intellectuels, n’ont qu’un pouvoir très limité sur le cours des événements. Là c’est très rigolo : cette mentalité de puissance des idées, que vous développez ici, est précisément du fait des Lumières (la victoire de la Raison apportée par des hommes éclairés…). Les Lumières ne sont qu’un témoignage de la société de l’époque : comme c’est le plus visible, on en fait à tort la cause de la Révolution, sans prendre en compte les changements économique, intellectuels (re-découverte de l’antiquité par exemple…), scientifiques, technologiques, démographiques, etc.

    Par contre l’Histoire des idées est parfaitement passionnante en tant que telle. D’ailleurs c’est très rigolo de lire votre discours — j’ai fait un tour sur votre site —, qui s’inscrit dans un héritage hostile aux Lumières et à la Révolution et qui en même temps défend la démocratie (le ralliement à la démocratie se fera durant le début de la IIIè avec le déclin des monarchistes, de souvenir).

    Il est curieux par ailleurs de se revendiquer de la démocratie dont l’élaboration théorique fut le fait d’une partie des Lumières, puisant dans l’antiquité.

    Quant à la soit-disant implication des Lumières dans la propriété intellectuelle, ce fut parfaitement marginal dans le cours général de l’Histoire. Votre argumentation est à ce sujet assez bancale : les moines-copistes n’eurent pas besoin de droit d’auteur car ils étaient de fait dépositaire du savoir. Ici l’imprimerie et l’alphabétisation vont participer à la diffusion du savoir, rendant impossible son appropriation matérielle ; elles vont être une des causes de l’émergence concomitante des Lumières et du droit d’auteur (qui ne sera qu’appropriation partielle à l’époque car la diffusion des idées explose tout de même).

    Quant à l’affirmation selon laquelle le droit d’auteur serait un privilège de la noblesse nouvelle. Je ne sais d’où vous pouvez sortir cela. Les écrivains n’ont absolument pas le pouvoir, et le droit n’est pas un privilège : c’est précisément tout le contraire puisqu’il est indistinctement accessible à tous ; enfin, si les multinationales se servent de la propriété intellectuelle, ce n’est qu’une partie de leur capacité à exercer le pouvoir sur la société, seulement possible dans les secteurs économiques compatibles.

    Pour terminer, “l’économie de la connaissance”, liée à une économie portée par le “progrès” technologique permanent, est extrêmement récente dans l’Histoire, et c’est anachronique de la rattacher aux Lumières qui n’avaient même pas encore vu passer la société industrielle (encore au stade de la manufacture, petites industries à la limite) qui interdira définitivement la possibilité matérielle d’une organisation corporatiste de la production économique.

    Pour le servage je ne vois pas du tout où vous voulez en venir. Cela renvoie à une réalité très précise d’un statut de quasi-esclavage (avec quelques droits tout de même) totalement décalé avec la réalité présente.

  • [^] # Re: FOUTAISES !

    Posté par  . En réponse à la dépêche Décolonisons nos imaginaires. Évalué à 10.

    Et encore “culture occidentale” il faut le dire vite. Il ne s’agit pas d’une production culturelle, mais industrielle.

    Accordons-nous sur la définition des termes :

    La culture, c’est l’ensemble des représentations communes, des idées et coutumes produites, échangées et pratiquées au sein d’une société.

    Ce qu’on appelle à tort culture dorénavant, c’est la production artistique par une minorité (les aaaartiiiiste), déversée sur tout la société qui n’en est que consommatrice. Et effectivement, ici on peut parler, à terme, de destruction de la démocratie voir de totalitarisme. À la limite, je dirais que la marchandisation n’est qu’un problème marginal.

    En fait, je pense même que les pays “colonisés” sont bien plus cultivés que les pays “colonisateurs”.

    L’accès au savoir formel (et à son exploitation), c’est une autre histoire, là il ne s’agit pas de culture, mais bien d’une domination dans le sens classique du terme, c’est-à-dire par la force. J’ai toujours en tête celui des médicaments génériques produits par l’Inde pour l’Afrique, ou un truc du genre, qui se sont fait attaqués en justice par les grands laboratoires pharmaceutique pour non-respect de la propriété intellectuelle.

    Pour terminer, reconstruire sa propre Histoire et sa propre culture, ce n’est pas une idée nouvelle en Afrique, c’est Sankara je crois qui développait la même idée.

  • [^] # Re: Tu peux développer?

    Posté par  . En réponse au journal Quitter la sécurité sociale. Évalué à 0. Dernière modification le 29 août 2013 à 21:56.

    Ce n’est pas une attaque ad-hominem, je ne le connais pas le bonhomme. Par contre les prises de positions politiques se classifient.

    Pour la synthèse : GS, Monti, toutes les gouvernances mises en place après la crise en Europe du Sud ont lamentablement planté. Elles ne pouvaient que se planter car la gouvernance technocratique est intrinsèquement un truc qui va dans le mur.