kantien a écrit 1203 commentaires

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 3 (+1/-0).

    Oui, où plutôt je dirais que le COD de faire dans ce cas c'est l'action décrite par l'expression verbale tomber la chaise dans laquelle le mot chaise est COD du verbe. À la question qu'as-tu fait ? Tu répondrais : tomber la chaise. En revanche, si on prend le verbe faire dans le sens de fabriquer, tu répondrais : la chaise. Ce qui donnerai c'est phrases possibles :

    • j'ai fait tomber la chaise
    • j'ai fait la chaise sur laquelle tu es assis
    • la chaise que j'ai fait tomber
    • la chaise sur laquelle tu es assis que j'ai faite

    Et elles répondent toutes à une seule et unique règle : lorsque le COD est placé avant le participe passé, ce dernier s'accorde en genre et en nombre avec le COD. Tous les cas que tu décris ne sont que des cas d'interaction avec d'autres règles de la grammaire.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 3 (+1/-0).

    Donc finalement on est d'accord : des fois on accorde, des fois on n'accorde pas

    Non, on accorde toujours avec le COD s'il est placé avant. Mais il ne suffit pas d'être placé avant pour être le COD. C'est ce qu'il se passe quand il y a deux verbes : chacun à son sujet et son COD, qui sont distincts. On n'accorde pas lorsque c'est le COD du verbe à l'infinif qui est placé avant. Ce qui n'est pas trivial, c'est l'analyse grammaticale de la phrase, et en conséquence de savoir s'il elle tombe sous le cas d'usage de la règle d'accord du participe passé.

    Dans la phrase suivante :

    • j'ai entendu des musiciens jouer Stairway to heaven.

    Il y a deux verbes : entendre et jouer. Le sujet du verbe entendre est je, son COD est des musiciens. Le sujet du verbe jouer est des musiciens, son COD est Stairway to heaven. Ce qu'il y a, c'est qu'en français, on peut omettre le sujet dans cette situation pour écrire :

    • j'ai entendu jouer Stairway to heaven.

    Maintenant, si l'on prend ces phrases :

    • des musiciens que j'ai entendus jouer Stairway to heaven
    • Stairway to heaven que j'ai entendu jouer

    on se retrouve dans le cas de ta règle, qui n'est qu'une forme particulière de la règle générale d'accord du participe passé. Dans la première le COD est placé avant, on accorde. Tandis que, dans la seconde, c'est le COD du verbe à l'infinif qui est placé avant, il n'y a aucune raison d'accorder : on n'est pas dans un cas d'application de la règle. Ce qui n'est pas trivial dans cette construction c'est de trouver qui est le COD de qui. On pourrait faire une variante où l'on accorde les deux participes passés :

    • la chanson que j'ai entendue jouée par des musiciens hors pair.

    Vouloir supprimer la règle discutée ici amène cette question : alors pourquoi décliner le second verbe dans cette dernière phrase ?

    Le problème de la règle que tu as évoquée, c'est de l'apprendre par cœur sans comprendre qu'elle est une conséquence de l'analyse grammaticale, non triviale, des deux premières phrases. Elle n'est pas une règle primitive de la grammaire du français, mais une règle dérivée.

    C'est plus un souci pédagogique d'enseignement de la grammaire, qu'un souci d'illogisme de la règle d'accord du participe passé.

    Prenons un exemple extérieure à la grammaire, issu des mathématiques. Demande à quelqu'un quelle est la somme des angles d'un triangle. S'il est allé à l'école, il y a de fortes chances qu'il te réponde 180°. Maintenant demande lui : pourquoi ? Là, il est plus probable qu'il ne sache justifier le résultat. Pourtant, c'est l'un des théorèmes les plus trivial à démontrer en géométrie euclidienne. Prends un triangle ABC, trace l'unique parallèle à (AB) passant par C. Par une série élémentaire d'inférences sur l'égalité des angles alternes-internes, on arrive trivialement au résultat.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: "qui sera partagé en tant que modèle ouvert"

    Posté par  . En réponse au lien Comprendre les dauphins grâce à l'IA. Évalué à 2 (+0/-0).

    Certes, mais là on parle de chercheurs qui étudient les dauphins et qui cherchent à mieux comprendre leur langage. On n'est pas dans l'abus que tu décris ensuite.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: "qui sera partagé en tant que modèle ouvert"

    Posté par  . En réponse au lien Comprendre les dauphins grâce à l'IA. Évalué à 3 (+1/-0).

    Bon, blague à part, concernant les dauphins, il y a quelques études depuis pas mal d'années

    Certes, on en a compris certains principes. A priori, rien ne dit que ce genre de techniques ne puissent pas améliorer notre compréhension, en affinant les principes déjà connus. Je ne suis pas un spécialiste de l'étude des dauphins, mais on peut accorder le bénéfice du doutes que si des chercheurs dont c'est le métier s'y intéressent, ce n'est pas pour surfer sur la vibe des IA.

    L'avenir nous dira si c'était une impasse ou une voie fructueuse : c'est un peu la base de la recherche de tenter des choses sans savoir d'avance si cela aboutira. ;-)

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 3 (+1/-0).

    Tu m'as fais douter de ma grammaire. :-P

    Après réflexions, cette règle n'est en rien une nouvelle règle ou une exception, je me suis fait avoir par un non dit.

    Lorsque l'on écrit « Les airs que j'ai entendu jouer ont duré toutes la nuit », le sujet de « jouer » est sous-entendu et non explicite dans la phrase. Les airs sont le COD de jouer et ce sujet implicite le COD d'entendre. Raison pour laquelle on n'acccorde pas.

    Cela se voit mieux si l'on reformule la phrase :

    • j'ai entendu jouer des airs qui ont duré toute la nuit
    • j'ai entendu (quelqu'un) jouer des airs qui ont duré toute la nuit

    Dans la phrase

    • les musiciens que j'ai entendus jouer sont plein d'énergie

    Ici les musiciens sont bien COD de entendre mais sujet de jouer.

    Dans le cas d'entendre prendre, c'est la même analyse. Si je le dis à l'oral, cela devrait plutôt se faire via une incise à l'écrit :

    • les décisions que j'ai entendues, prises lors de la réunion, m'ont laissé perplexe.

    C'est pour cela que lorsque le sujet de « prendre » est présent, j'utilise l'infinitif :

    • les décisions que j'ai entendu prendre Nicolas m'ont laissé perplexe

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 2 (+0/-0).

    Si c'est pour décrire une grammaire que je suis le seul à utiliser, ça vaut pas le coup. :-P

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: "qui sera partagé en tant que modèle ouvert"

    Posté par  . En réponse au lien Comprendre les dauphins grâce à l'IA. Évalué à 3 (+1/-0).

    Pour une fois, je suis de votre côté. Quel est le problème que des éthologues utilisent ces techniques pour étudier le langage des dauphins ?

    On a depuis longtemps imité le son produit par des animaux. Si les chasseurs ont inventé des appeaux, c'est pour des raisons moins nobles que ceux qui étudient le comportement des dauphins.

    Moi même j'imite le chien, le chat, le pigeon et la grenouille. Mais les seules réponses que j'ai eu jusqu'à présent, ce sont des sons similaires mais aucun échange auquel je puisse donner un sens. Si ça se trouve je leur raconte n'importe quoi et ils me prennent pour une IA qui hallucine. :-P

    Ici, on peut espérer détecter des régularités dans les sons émis et comprendre le degré de sophistication de leurs échanges. Les observations des éthologues mènent à l'hypothèse qu'ils se coordonnent et communiquent ainsi, mais que se disent-ils ?

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 2 (+1/-1).

    ils ont conscience d’eux-même et une plus petite partie d’entre eux ont même une conscience de groupe.

    J'ai jamais dit qu'ils n'avaient pas conscience d'eux-même, mais que leur entendement ne se prenait pas lui même pour objet : ils sont conscients d'eux, pensent et réfléchissent le monde qui les entoure mais ne soumettent pas à des règles leur propre activité intellectuelle. C'est cela que j'appelle un entendement qui se prend pour objet ou raison. Cela devrait se manifester par un langage argumentatif, et jusqu'à présent l'ethologie ne l'a pas mis en évidence et la structure des sociétés animales pour ceux qui vivent en groupe ne plaident pas en faveur de cette hypothèse.

    Donc pourquoi attribuer de l’intelligence aux machines auraient des répercussions qui ne s’appliquent pas aux animaux ?

    Parce que si l'intelligence est réductible à un calcul, par récursivité on peut l'appliquer à lui-même, ce que j'appelle raison.

    Tu es le seul ici à dire que l’intelligence implique les même droits que les Hommes.

    Je dis que si on attribue de la raison à un être, pourquoi ne pas lui attribuer les mêmes propriétés que celle qu'à la raison qui nous apparaît intérieurement à nous même ?

    Je dis qu’elles vont au delà de ce que certains affirment pour les dévaluer et que ce n’est pas une façon pertinente de lutter contre.

    Je ne lutte pas contre ni les dévalue, elle fonctionne extraordinairement bien (malgré certains défauts encore présent), je me refuse tout simplement à accorder de l'intelligence à une machine.

    Basiquement le niveau de sophistication et d’autonomie.

    Elles n'ont aucune autonomie au sens propre. Elles font ce pour quoi elles ont été programmées, la finalité de leur fonctionnement leur est donnée par des programmeurs humains : un classificateur ne peut que reconnaître avec un faible taux d'erreurs ce qu'ont lui a appris à reconnaître, un agent conversationnel produire du texte… Ce sont des machines dont le niveau de sophistication est incomparables par rapport aux métiers Jacquard, mais elles ont le même niveau d'intelligence : aucune.

    Tu as mis sur le tapis la question sur le terrain de la philosophie et plus particulièrement de la métaphysique, en parlant du fonctionnalisme et du computationnalisme. Ces écoles de pensées sont inconciliables avec le kantisme, surtout à cause de la question de la liberté et donc du droit. Pose ces deux questions à ChatGPT :

    Penses-tu que l'on peut concilier kantisme et fonctionnalisme computationnaliste en philosophie de l'esprit ?

    Puis enchaîne avec celle-ci :

    Mais, une normativité qui serait fondé sur la nature ne contredirait-elle pas la normativité éthico-juridique transcendantale du kantisme ? Comment un naturaliste ne pourrait-il pas être contraint d'assumer la thèse de la troisième antinomie ?

    Ses réponses ne sont pas des hallucinations mais une bonne synthèse de ses données d'entraînement : ce sont des questions déjà traitées en long et en large dans la littérature.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 2 (+0/-0). Dernière modification le 17 avril 2025 à 20:33.

    Mais cette règle c'est une vraie règle hein, je l'ai pas inventé aujourd'hui.

    Je me doute. Et c'est moi qui parle mal la France. :-P

    En fait, dans ce cas c'est étrange, ça dépend de la présence ou non de l'auteur de l'action.

    tu écrirais "les décisions que j'ai entendues prises" ?

    À l'oral, je peux le dire suivant le contexte.

    • les décisions que j'ai entendu prises lors de la réunion
    • les décisions que j'ai entendu prendre Nicolas lors de la réunion

    Et effectivement, je n'accorde pas "entendu" si je dois l'écrire.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 2 (+0/-0). Dernière modification le 17 avril 2025 à 14:01.

    Oh le délit de faciès !

    Avoue que le site a un design playskool kikoolol. Ça n'inspire pas confiance. :-P

    Là, la référence à l'académie nous ramène au cœur du problème : elle est bien poussiéreuse et archaïque, avec des règles difficiles à justifier !

    Ce matin, au réveil, sans trop réfléchir, je me suis laissé entraîner par tes exemples. Mais pour moi, il y a un sérieux problème : c'est l'emploi de l'infinif qui dénote la voie active, là où il n'a aucun lieu d'être dans le second exemple qui doit être à la voie passive pour le deux verbes. Ce qui donnerait :

    • la cantatrice que j'ai entendue chanter
    • les chansons que j'ai entendues chantées

    Employer l'infinitif dans la deuxième phrase signifierait que ce sont les chansons qui chantent (actives) alors qu'elles sont chantées (passives), tout comme elles sont entendues (passives) également.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 4 (+2/-0).

    Personnellement, j'accorde dans les deux cas. Quand on voit l'apparence générale du site, j'affirme sans hésitation que ta source est peu fiable. ;-)

    Dans les deux cas, l'expression entendre jouer complète le nom auquel elle se réfère, donc j'accorde.

    • les musiciens entendus jouer, par moi, sont pleins d'énergie
    • les airs entendus jouer, par moi, ont duré toute la nuit

    Le style de ces phrases est sans doute lourd mais grammaticalement correcte. Ce qui me surprendrait, et que je qualifierai de manque d'uniformité, c'est de changer les principes de l'accord entre tes formulations et les miennes.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: À écouter

    Posté par  . En réponse au lien Le DICTIONNAIRE de l'ACADÉMIE est une HONTE. Évalué à 7 (+6/-1). Dernière modification le 16 avril 2025 à 22:54.

    la stupide et illogique règle d'accord du PP avec le COD

    Sans vouloir prendre la défense d'une académie poussiéreuse et archaïque, je trouve plutôt que cette règle confère cohérence et uniformité aux principes qui président aux accords en genre et en nombre des compléments du nom. Lorsqu'une subordonnée complète un nom commun, le verbe qui la compose s'accorde en genre et en nombre avec le nom qu'il complète, comme le ferait un épithète. On la retrouve avec les autres usages du participe passé, exemple :

    • la femme rencontrée lors de notre voyage m'a contacté
    • la femme que nous avons rencontrée en voyage m'a contacté

    Les deux cas ont la même fonction grammaticale et se comporte de la même façon en ce qui concerne l'accord en genre et en nombre.

    Ce que l'on peut reprocher à la formule de la règle est, à la rigueur, un défaut pédagogique en n'explicitant pas les raisons de l'accord, pour se concentrer sur des critères morphologiques secondaires (le COD est placé avant le verbe) mais peut être plus simples à identifier.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 3 (+1/-0). Dernière modification le 11 avril 2025 à 23:48.

    Donc tu attribut de l’intelligence aux animaux, les animaux ne sont pas égaux aux humain en droit et tu ne veux pas attribuer de l’intelligence aux car ça demanderait à ce qu’ils aient le même droits que nous ?

    Non, je n'attribue pas de raison mais un entendement (intelligence) aux animaux. Néanmoins, la raison étant un entendement qui se prend lui-même pour objet (et non seulement ce qui lui est autre, comme pour les animaux qui déterminent des moyens pour arriver à leur fin, mais qui ne semble pas disposer d'un langage argumentatif), il me paraît normal d'attribuer de la raison à une machine que l'on qualifierai d'intelligente : si l'intelligence émerge d'une fonction calculable (un lambda-terme), elle peut bien se prendre elle-même comme argument. Et partant, pourquoi ne pas lui attribuer les propriétés de la raison telle qu'elle nous apparaît à nous mêmes ?

    Cela étant, ce n'est pas que je ne veux pas attribuer les mêmes droits aux machines, mais que ce sera une conséquence nécessaire si je leur reconnais de l'intelligence. Je n'ai pas proposé l'argumentaire suivant : je ne veux pas donner de droits aux machines, or si elle sont intelligentes alors elles auront les mêmes droits, donc elles ne sont pas intelligentes. Mais j'interrogeais les partisans des machines intelligentes, en leur posant cette question : puisque vous les considérer intelligentes, qu'en est-il de leurs droits ? Lorsque l'on pose dogmatiquement un principe (ce que fait le fonctionnalisme), il faut en assumer toutes les conséquences. ;-)

    Pour ma part, je ne leur attribue pas d'intelligence pour les raisons évoquées précédemment, donc la question ne me concerne pas vraiment.

    Donc oui ils manipulent de la sémantique.

    Si tu veux, tout comme un type checker manipule la sémantique du code qu'il type. Mais il ne la comprend pas, cela n'a pas de signification pour lui, c'est là toute la conclusion de Searle avec sa chambre chinoise. Ce que dénote les signes qu'il manipule syntaxiquement, bien que représentant des rapports sémantiques, se trouve en dehors des signes et il ne peut s'en faire aucune représentation.

    Mais là encore, c'est le langage que l'on utilise pour décrire le comportement de la machine qui prête à confusion. À strictement parler, la machine ne manipule aucun signe ni aucune sémantique, c'est nous, êtres humains, qui donnons cette interprétation aux états physiques de la machine. Mais la machine, elle même n'est consciente de rien, ni ne cherche à donner un sens à ce qu'elle fait, pas plus que la pascaline ne manipule des chiffres : ce sont des rouages mécaniques qui tournent, nous interprétons leurs positions comme dénotant un nombre et son mécanisme comme effectuant des calculs arithmétiques élémentaires. Pas plus que ton stylo ne manipule des signes et de la sémantique quand tu écris à la main.

    Je réitères donc ma question : quel phénomène as-tu observé que tu ne peux expliquer qu'en attribuant de l'intelligence aux machines ? Une discussion avec un agent conversationnel ne relève pas de ce genre de phénomène pour moi. Il ne faut pas prendre une condition suffisante pour une condition nécessaire. Lorsqu'Ysabeau tricote, je n'ai aucun doute sur le fait qu'elle fasse usage de son intelligence. Ce n'est pas pour autant que j'irais attribuer de l'intelligence aux métiers Jacquard ou leur version moderne qui tricote du textile. À ma connaissance, personne ne les a jamais ainsi qualifiés. Alors pourquoi avec un agent conversationnel ? Qu'est-ce qui le différencie d'un métier Jacquard ?

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 3 (+1/-0).

    Par exemple je vois dans des comportements d'enfants qui ne parlent pas de l'intelligence, mais j'en vois aussi dans des animaux par exemple.

    Tout comme moi. Pourquoi crois-tu que j'attribue de l'entendement (mais pas de raison) aux animaux ? Mais ma question était pourquoi veux-tu attribuer cette propriété à une machine construite par l'homme ?

    Pas dans le monde dans le quel tu vis. Tu as le droit de l'imaginer, mais venir l'utiliser comme argument c'est ridicule tant que ce n'est pas le cas (bon ça ne le sera jamais donc c'est compliqué). Note que c'était encore moins le cas à l'époque que ton maître à penser.

    Je crois que tu manques de culture philosophique et historique. A-t-on avis pourquoi le projet des Lumières a-t-il débouché sur la révolution française et sa Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ? Son premier article affirme que Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Pourquoi en-est il ainsi de tous les êtres humains ? Pourquoi seuls les humains sont des sujets de droit ? Pour être sujet de droit, il faut être soumis au principe du devoir (pas de droits sans devoirs). Mais pour concevoir la notion même de devoir être, il faut se penser comme non soumis exclusivement à la nécessité de la nature et son déterminisme, c'est-à-dire être libre. Comme tu as donné plus haut un lien vers une vidéo de Mr Phi, en voici une autre : libre ou determiné.

    Les ordinateurs, quant à eux, ont toutes leurs successions d'états soumis au principe de causalité, ce qu'exprime parfaitement la loi de composition des instructions de la logique de Hoare :

    { P } S { Q } , { Q} T { R }
    ----------------------------
         { P } S ; T { R }
    

    C'est une règle de déduction avec deux prémisses : la première stipule que l'instruction S fait passer la machine de l'état P à l'état Q, et la seconde que l'instruction T la fait passer de l'état Q à l'état R. Sous ces conditions, la règles affirme que l'on peut conclure que la série d'instruction S; T fait passer la machine de l'état P à l'état R.

    Lorsque l'on formalise la notion de calcul dans le lambda-calcul typé (programmation fonctionnelle pure, sans effet de bords et donc sans changement d'état), l'analogue de cette règle est celle de la composition de fonction qui a pour type une double application de la règle de déduction logique dite du modus ponens : si P alors Q, or P donc Q. Résultat classique de la correspondance de Curry - Howard.

    Et bien tu me croiras si tu veux, mais bien que ces deux logiques (Hoare et Curry-Howard) date de la fin des années 60, le principe qui préside à leur correspondance était déjà noir sur blanc dans la Critique de la raison pure. Comme je ne voudrais pas que tu me crois sur parole, ou que tu penses encore que je me mets à créer des concepts ex nihilo (ce qui n'a jamais était le cas), je te donne la référence tu n'auras qu'à le constater par toi même. Elle se trouve dans la correspondance entre la table logique des jugements et celle des catégories. Tu pourras alors voir que la notion de cause et effet (deuxième catégorie de la relation) de la seconde table a pour corrélat, dans la première, la forme logique des jugements hypothétiques (si A alors B), jugement dont la règle de déduction est le modus ponens susmentionné.

    Pour aller plus loin, on pourrait même reprocher à la structure syntaxique de la règle de la logique de Hoare de ne pas mentionner le sujet (logique) de ses propositions, à savoir la machine ! Je propose donc de la reformuler ainsi :

    { M : P } S { M : Q } , { M : Q} T { M : R }
    --------------------------------------------
           { M : P } S ; T { M : R }
    

    où une expression de la forme M : P doit s'interpréter comme signifiant la machine M est dans l'état P. Je choisis cette notation à dessein, car c'est celle que l'on utilise dans le lambda-calcul typé pour signifier « la valeur M est de type P », ou dit autrement M est un P. Or, en logique formelle, un jugement de la forme « S est P » est appelé un jugement catégorique ou prédicatif; jugement qui met en relation un sujet S avec un prédicat P. Maintenant, si tu reprends les deux tables susmentionnées, tu pourras constater (ébahi ?) que la première catégorie de la relation (à savoir celle de substance et accident ou état) a pour corrélat la forme logique des jugements catégoriques.

    Si Kant est mon maître à penser, comme tu aimes le qualifier, ce n'est pas sans raison. Il avait parfaitement compris ce qu'une partie de la communauté scientifique a mis près de deux cents ans à retrouver. ;-)

    Le fonctionnalisme de l'état-machine tel que développé par Hilary Putnam repose fondamentalement sur les notions de changements d'états et de causalité. Contrairement à Kant, il ne prend même pas la peine de rechercher quelle pourrait être l'origine de ces notions (empirique ou a priori) ni quelles en sont les limites. Pourtant, tout comme pour la théorie de la calculabilité, le seul moyen qu'à l'être humain de déterminer les limites de notions, c'est d'emprunter le chemin des méthodes formelles (ce que fit Kant, que cela te plaise ou non). Et, comme dans le cas de la théorie de la calculabilité, les catégories aboutissent à un problème de l'arrêt connu sous le nom d'antinomies de la raison pure. La plus célèbre étant sans doute la troisième qui se voit affronter dans un débat qui n'a jamais de fin cette thèse et cette anti-thèse :

    • Thèse : La causalité déterminée par les lois de la nature n’est pas la seule d’où puissent être dérivés tous les phénomènes du monde. Il est nécessaire d’admettre aussi, pour les expliquer, une causalité libre.
    • Anti-thèse : Il n’y a pas de liberté, mais tout dans le monde arrive suivant des lois naturelles.

    Antinomie qui fait le sujet de la vidéo donnée plus haut de Mr. Phi. Et la solution kantienne à cette antinomie apparente entre nature et liberté est justement la loi du devoir ou impératif catégorique qui prend son fondement dans la commune raison humaine. Puis sur cette notion de devoir, on peut édifier la doctrine philosophique du Droit. Conséquemment, tout être doué de raison est soumis au principe du devoir, et devient, par là-même, un sujet de droit. Si l'on considère que, des êtres connus pour l'instant de nous, seuls les êtres humains sont doués de raison, on aboutit au principe suivant : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ».

    Si l'on ajoute à ce qui précède ce paragraphe de la page Wikipédia sur le computationnalisme :

    Ainsi, la formalisation mathématique montre comment les propriétés sémantiques des symboles peuvent parfois être codés selon des règles syntaxiques, tandis que la machine de Turing montre comment la syntaxe peut être relié à un processus causal, qui permet de concevoir un mécanisme capable d'évaluer toute fonction formalisable. La formalisation relie la sémantique à la syntaxe, et la machine de Turing la syntaxe au mécanisme.

    Sachant que tu niais au début que la machine ne faisait que de la manipulation syntaxique (alors que c'est même reconnu par les partisans du computationnalisme), que j'ai expliqué clairement pourquoi il en était ainsi en passant par le lambda-calcul et sa règle de beta-reduction, que j'ai viens d'expliquer en détails pourquoi un tel processus est mécanisable (correspondance entre le principe de la logique de Hoare et la règle de déduction logique du modus ponens au fondement du typage des fonctions dans la lambda-calcul), que j'ai, au demeurant, montré comment on pouvait retrouver tous ces principes dans la Critique de la raison pure, sachant tout cela, disais-je, j'ai comme un doute sur lequel de nous deux inventent des hypothèses et concepts ex nihilo, et sur lequel sait réellement ce qu'est la calculabilité, sait ce que l'on demande à la machine de faire pour nous, comment elle fonctionne et sait de quoi il parle. ;-)

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 3 (+1/-0). Dernière modification le 07 avril 2025 à 22:28.

    Je ne vois pas vraiment comment tu écartes à partir de tout ça l'idée qu'une machine puisse … avoir des perceptions.

    Ce n'était pas la finalité du tableau de Magritte, mais d'illustrer et d'insister sur la distinction entre signifiant et signifié : le signifiant n'est pas le signifié. Que ce soit un mot, un tableau, un émoji ou que sais-je, une signifiant n'est pas un signifié.

    Les états physiques d'une machine nous servent de signifiants (comme le sont les états de bien d'autres matières inertes), par les lois causales physiques connus de nous (à l'heure actuelle c'est de l'électronique) nous mécanisons et automatisons le traitement purement syntaxique des signes, mais les seuls êtres qui conférent une signification à ces signes sont les êtres humains. L'homme dans la chambre chinoise ne leur en attribue aucune, tout comme n'importe quel ordinateur. Pour ce qui est de leur attribuer une perception, on s'approche du fantasme. Autant dire que la pierre perçoit le soleil, parce qu'il a pour effet de la réchauffer.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 2 (+0/-0).

    Comment tu détermine que je suis doué de raison ?

    Tu veux savoir comment je détermine qu'un autre être que moi est doué de raison ? Je le postule par analogie avec la manière dont je m'apparaît à moi même intérieurement. La maîtrise extérieure du langage est une condition nécessaire mais non suffisante. Si tu attends de moi un critère nécessaire et suffisant, sur le plan empirique, pour déterminer chez un être, autre qu'humain, l'existence de la raison, je crains fort de ne pouvoir en donner un. Mais je défie quiconque du pouvoir en fournir un qui fasse consensus. Pour le dénier à une machine, rien de plus simple : on sait parfaitement comment elle fonctionne (elles sont notre création) et il n'est nullement nécessaire d'invoquer l'existence de la raison pour expliquer n'importe lequel de leur résultat (rasoir d'Ockham : rien ne sert de multiplier les êtres sans nécessité). Autant vouloir conférer de la raison à la lune pour expliquer l'impact de son champ de gravitation sur les marées terrestre (le principe de causalité d'une matière inerte explique aussi bien l'action de la lune que celui d'un programme exécuté par une machine).

    Un sujet de droit ? Tu parles d'un point de vue légal ?

    Bien entendu. Je parle du droit que l'on trouve dans les différents codes (pénal, civil…) et déterminé par nos représentants à l'Assemblée et au Sénat.

    D'une part c'est toi qui fait ce glissement et d'autre part si elles deviennent des entités légales elles peuvent aussi commettre des plagiats. Mais le fait d'être doué de raison ne donne pas les même droits qu'un humain.

    Je fais ce glissement parce qu'il est une conséquence nécessaire de l'attribution de l'intelligence et de la compréhension aux machines. Et si, être doué de raison confère les même droits, du moins pour un kantien : le principe du droit est fondé sur la raison. Si les autres animaux dispose d'un entendement, jusqu'à preuve du contraire, rien ne permet de conclure à l'existence de la raison chez eux : un entendement qui se prend lui même pour objet et qui se manifeste par un usage argumentatif du langage (comme nous le faisons depuis le début du débat). Raison pour laquelle je ne me considère que dans un rapport éthique et non juridique avec eux. En revanche, je n'entretiens aucun de ses rapports avec une simple machine.

    Mais à mon tour de poser une question. Qu'est-ce qui te pousse à considérer que les machines sont intelligentes et comprennent ce qu'elles font ? C'est parce que maintenant l'entrée et la sortie de l'interaction avec le programme se fait en langue naturelle ? Quand tu joues dans la REPL python, le programme ne montre pas le moindre signe d'intelligence, mais quand c'est la REPL d'un agent conversationnel, c'est intelligent ? Et une ligne automatique du métro, elle comprend ce que c'est que conduire un métro (au moins, pour la sécurité des passagers, la rigueur formelle de sa conception fait qu'elle n'hallucine pas) ?

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 3 (+1/-0). Dernière modification le 03 avril 2025 à 11:02.

    La vrai pipe n'existe pas, pour paraphraser le petit enfant bouddhiste du premier Matrix. :-P C'est la distinction kantienne entre le phénomène et la chose en soi (ta « vraie pipe »). Si, au fondement des phénomènes que nous percevons dans l'espace-temps (une pipe), on peut bien poser une chose en soi (la « vraie pipe »), il s'avére que la chose en soi est inconnaissable et non spatio-temporellement déterminée. Si l'on voit partout de l'espace et du temps dans l'expérience, c'est parce qu'on les y met nous-mêmes (ils sont les formes a priori de notre sensibilité). Parler d'objets spatio-temporellement déterminés sans référence à un observateur qui les perçoit (comme la « vraie pipe ») est une proposition vide de sens.

    C'est la non prise en compte de cette distinction (phénomène et chose en soi) qui entraîne notre raison dans des illusions dialectiques dont elle a du mal à se départir. C'est ce qui a amené Descartes à considérer un esprit sans corps ayant conscience de lui même, illusion objet du premier chapitre de la dialéctique transcendantal et qui réfute au passage le matérialisme. Même Gödel fût victime de cette illusion en tentant de ressusciter la preuve ontologique de l'existence de Dieu, preuve formellement inattaquable : elle a été certifié en Isabelle/HOL. Cette illusion est l'objet du dernier chapitre de la dialectique, celui sur L'Idéal de la Raison Pure . Elle trouve son fondement dans la catégorie de la communauté et celle de la nécessité, c'est-à-dire la forme logique du raisonnement disjonctif et la modalité apodictique (voir la correspondance entre la table des jugements et celles des Catégories, un correspondance de Curry-Howard bien avent l'heure ;-). Rien d'étonnant que Gödel ait eu recours à la logique modale, mais c'est une illusion de la raison… L'homme s'y trouve dupe de son propre langage, comme ceux qui voient de l'intelligence ou de la compréhension dans une machine exécutant un programme.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 4 (+2/-0).

    Tu préfère élargir la notion de syntaxe. C’est rigolo.

    Je n'élargi pas la notion de syntaxe, mais l'utilise dans la même acception que John Searle lorsqu'il distingue syntaxe et sémantique. La syntaxe relève de toutes les règles qui régissent l'usage des termes du langages entre eux, la sémantique consiste en un rapport entre le langage et quelque chose qui lui est extérieur : le rapport signifiant (les mots) à signifié (les choses); voir sémantique Tarskienne.

    Tu ne trouveras personnes qui ne considère pas la réduction d'un lambda-terme (c'est-à-dire l'exécution d'un programme) comme de la simple manipulation syntaxique des termes du langage.

    Exécuter un programme c'est comme calculer le polynôme 1 + x + x² pour la valeur 4. Cela consiste à remplacer toutes les occurences de x par 4 (c'est cela la beta-réduction), pour obtenir 1 + 4 + 4², puis réduire l'expression obtenue. Tout ceci n'est que de la manipulation syntaxique. Le lambda-calcul et sa règle de beta-reduction n'est qu'une extension de ce procédé, ce qui donne un formalisme de la notion de calculabilité équivalent aux machines de Turing.

    La thèse de Church affirme que tout ce qu'un être humain peut calculer est exprimable dans chacun de ces formalismes (je la partage, et à dire vrai elle fait peu débat). Le computationalisme est la thèse converse : tout ce qu'une homme pense est réductible au calcul et donc exprimable dans l'un de ces formalismes. Cette thèse je la récuse.

    Mais du coup le te répète sous une forme un peu différente une question que j’ai posé plus haut : qu’est ce qui me distingue d’un zombie qui ne fait que du traitement syntaxique ? ou puisque nous communiquons par écrit uniquement qu’est ce qui te permet de dire que je suis un humain ou une IA ?

    Rien. Mais, mes interactions avec les êtres humains ne se limitent pas à des échanges écrits. Le but de la chambre chinoise n'est pas de dire qu'une machine ne peut pas passer le test de Turing (ce que ne font pas encore les chat bots les plus actuels), mais de dire que ce test est insuffisant pour conclure que la machine comprend ce qu'elle fait. Il n'est nullement nécessaire d'invoquer la notion de compréhension pour expliquer l'expérience de pensée.

    S’il n’est pas possible de le déterminer à quoi sert cette distinction ? Uniquement pour créer artificiellement si nécessaire des différences (un peu comme quand on disait que les animaux ne ressentaient pas la douleur) ou il y a une démarche autre dans la quelle c’est utile ?

    Savoir si l'être avec lequel j'intéragis est doué de raison et donc s'il est un sujet de droit. La distinction n'a pas d'intérêt en philosophie théorique (connaissance de ce qui est) mais un intérêt en philosophie pratique (connaissance de ce qui doit être : éthique et droit). J'ai des devoirs de vertus (éthique) envers tout être vivant (les animaux dans leur ensemble), mais ceux doués de raison sont aussi, tout comme moi, soumis au principe du devoir et dans nos devoirs réciproques nous sommes soumis au principe du droit.

    Remarques, considérer que la machine peut être douée de raison cela ôterait une épine du pied des entreprises d'IA. Dans les débats actuels sur le droit d'auteur et les IA, les auteurs qui s'estiment léser ne devraient pas ester les entreprises mais la machine elle-même. :-D

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 5 (+3/-0).

    D’une par d’un point de vu technique ces IA peuvent te dessiner cette reine, ils peuvent la repérer dans une image.

    Ceci n'est pas une pipe !

    Il faut vraiment arrêter de croire que ces IA raisonnent au niveau syntaxique car c’est faux.

    À moins que ces IA ne soient pas un programme informatique, c'est la seule chose qu'elles peuvent faire. En tant que programme, je peux choisir n'importe quelle représentation équivalente : choisissons le lambda-calcul. Toute exécution d'un programme, vu sous sa représentation comme lambda-terme, n'est rien d'autre qu'un processus syntaxique de réécriture connu sous le nom de béta-réduction.

    Même dans un logiciel comme Coq, la machine ne raisonne pas. C'est nous, être humains, qui interprétons ce jeu de réécriture, ou les états successifs de la machine, comme le déroulement d'un raisonnement. Mais, au sens propre du terme, la machine ne raisonne pas. Pas plus qu'un distributeur automatique de boissons comprend et raisonne sur ce qu'il fait.

    Il en est de même dans la chambre chinoise, seule la personne à l'extérieur de la chambre donne une signification au texte en chinois et comprend ce qu'il s'y dit. Pour la personne à l'intérieur (ou même les système opérateur + chambre + tables), tout cela est vide de sens : ce n'est que de la manipulation syntaxique, de la réécriture de signe. Seuls les rapports de signe à signe sont considérés, et non les rapport de signifiant à signifié (ce en quoi consiste la sémantique nécessaire à la compréhension).

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: ia = intelligence

    Posté par  . En réponse au journal IA : Imitation Artificielle. Évalué à 3 (+2/-1).

    Si ce n’est pas le cas est-ce que c’est que pour toi par construction les machines ne peuvent pas comprendre ?

    Pour moi c'est bien cela, une machine pensante est inconcevable. Je ne suis pas fonctionnaliste et encore moins computationaliste. J'ai du mal à concevoir ces doctrines comme non assises sur le matérialisme (la pensée étant conçue comme une propriété émergente du cerveau), même si Hilary Putnam pensait que le fonctionnalisme était conciliable avec le dualisme corps-esprit, et je considère le matérialisme comme réfuté par la dialectique transcendantale de la Critique de la Raison Pure.

    Sans être un grand partisan de l'argumentaire de la chambre chinoise, je souscris à sa conclusion car reconnaît le principe selon lequel « la syntaxe n'est ni constitutive, ni suffisante à la sémantique ». Pour reprendre un aphorisme de Wittgenstein : ce que le langage signifie, cela se montre, cela ne se dit pas (je le formule de mémoire, mais l'idée est là). Manipuler les signifiants ne donnera jamais accès au signifié. Ton exemple du roi, de la femme et de la reine, n'est que de la manipulation syntaxique; il n'y a aucun rapport à quelque chose qui est au-delà du langage : un signifié. En logique mathématique, on retombe sur la même problématique en combinant deux résultats de Gödel : le théorème de complétude et le théorème d'incomplétude.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: Reproductibilité, vérifiabilité et musiciens de Brême

    Posté par  . En réponse à la dépêche Programmer des démonstrations : une modeste invitation aux assistants de preuve. Évalué à 2 (+0/-0).

    J'aime bien le grand écart entre ces tendances plus ou moins antagonistes

    Ces tendances ne sont pas antagonistes et peuvent parfaitement coopérer. Ce qui m'a gêné dernièrement, c'est plus ceux qui s'emballent sur les succès récents de la technologie des LLM. Mais combiner des LLM avec des méthodes formelles comme la vérification ou la recherche automatique de preuves, cela se fait : Imandra, par exemple.

    Sur l'emballement au sujet des LLM et des machines soit disant intelligentes, cela me rappelle une anecdote. Il y a 20 ans, ma compagne de l'époque était journaliste et utilisait du speech-to-text (algorithmique que l'on retrouve dans l'apprentissage automatique) pour l'aider à retranscrire ses interviews enregistrés sur dictaphone.. Un jour j'essaye de lui expliquer que l'on peut programmer un ordinateur pour qu'il est 20 au bac S en maths (on sait faire ça depuis longtemps via les approches formelles) : elle n'a jamais voulu me croire ! Une machine ne pouvait pas être aussi « intelligente » pour elle (le fait qu'elle utilise du speech-to-text me faisait rire intérieurement ;-). Je me demande bien ce qu'elle pense aujourd'hui d'un logiciel comme ChatGPT.

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: Pour la complétude, j'ajoute le couple SPARK/Ada

    Posté par  . En réponse à la dépêche Programmer des démonstrations : une modeste invitation aux assistants de preuve. Évalué à 3 (+1/-0).

    Le langage fonctionnant par effet de bords, il faut effectivement utiliser la logique de Hoare pour vérifier la correction des programmes écrits avec.

    Cela étant, il me semble que Thomas voulait dire que l'exemple était monomorphe (les deux variables d'entrées sont de types Int) et non polymorphes (il n'y a pas de variable de types); d'où sa remarque sur le manque de généralité.

    Quoi qu'il en soit, la logique de Hoare est une proche parente de la théorie des types en partageant le même fondement : la structure logico-déductive de l'ésprit humain. Par exemple, la règle de composition :

    {P} S {Q} , {Q} T {R}
    ---------------------
        {P} S; T {R}
    

    est la version impérative du typage de la composition de fonction dans les langages fonctionnels (('p -> 'q) -> ('q -> 'r) -> 'p -> 'r dans le langage des types de OCaml), règle qui a pour fondement une double application du modus ponens (si A alors B, or A, donc B).

    Les programmeurs impératifs composent les instructions, comme les programmeurs fonctionnels composent les fonctions.

    P.S : Joli dépêche qui résume bien le domaine et l'état des lieux. J'étais passé à côté et je compte bien t'écrire un commentaire plus long et détaillé (qui me demandera plus de temps que cette simple remarque sur la logique de Haore). En plus, ça me permettra de parler de mes marottes (la logique formelle, la théorie de la démonstration, la correspondance de Curry-Howard et la philosophie des mathématiques) sans que thoasm m'en fasse le reproche. ;-)

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: Pourquoi dire IA si on ne parle que des réseaux de neurones ?

    Posté par  . En réponse à la dépêche Une intelligence artificielle libre est-elle possible ?. Évalué à 2 (+0/-0).

    Qu'il me soit permis d'ajouter une remarque sur la démarche qui consiste à comparer le jeu mathématique et celui des échecs, des dames, du Go ou de Othello.

    Leibniz vantait fort une caractéristique dont il était l’inventeur ; tous les savants ont regretté qu’elle fût ensevelie avec ce grand homme. Ce regret m’est une occasion de dire mon sentiment sur l’art combinatoire. J’avoue que dans ces paroles du grand philosophe, je crois apercevoir le testament du père de famille dont parle Esope : étant sur le point d’expirer, il déclara en secret à ses enfants qu’il avait un trésor caché quelque part dans son champ, mais, surpris par la mort, il ne put leur indiquer l’endroit où il l’avait enfoui ; ce fut pour les enfants l’occasion de fouiller leur champ avec la plus grande ardeur, de le creuser et de le retourner en tous sens ; tant et si bien que, quoique trompés dans leurs espérances, ils finirent par se trouver plus riches de la plus grande fécondité de leur champ. Nul doute que ce ne soit là le seul fruit à retirer de la recherche de ce mécanisme inventé par Leibniz, si l’on doit s’en occuper encore.

    Kant, Explication nouvelle des premiers principes de la connaissance métaphysique

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: Pourquoi dire IA si on ne parle que des réseaux de neurones ?

    Posté par  . En réponse à la dépêche Une intelligence artificielle libre est-elle possible ?. Évalué à 2 (+0/-0).

    Ça veut dire quoi "partir en sucette" ?

    C'est la machine qui part en sucette (elle boucle sans fin, le programme ne s'arrête jamais), pas les êtres humains. Si je cherche un exemple d'énoncé indécidable, le postulat d'Euclide est le premier qui me vient à l'ésprit. Et pourtant il a alimenté une grosse partie de la géométrie du XIXème siècle, et quand un physicien s'y intéresse il donne une réponse plus que satisfaisante au périhélie de Mercure. ;-)

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.

  • [^] # Re: Pourquoi dire IA si on ne parle que des réseaux de neurones ?

    Posté par  . En réponse à la dépêche Une intelligence artificielle libre est-elle possible ?. Évalué à 2 (+0/-0).

    Non, le jeu est infini évidemment

    Que le jeu soit infini je m'en fous, c'est pas là le problème. Ce que je veux savoir c'est si la méta-machine part en sucette. Et donc est-ce que jouer aux maths c'est la même chose que jouer aux échecs, au Go ou Othello ?

    Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières.